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23/05/2023 | FRANCE | N°21/02231

France | France, Cour d'appel de Riom, Chambre sociale, 23 mai 2023, 21/02231


23 MAI 2023



Arrêt n°

KV/NB/NS



Dossier N° RG 21/02231 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FWH5



[A] [D]

/

C.A.F DE L'ALLIER





jugement au fond, origine pole social du tj de moulins, décision attaquée en date du 20 août 2021, enregistrée sous le n° 20/00460

Arrêt rendu ce VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT TROIS par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :



M. Christophe RUIN, Président



Mme Karine VALLEE, Conseiller<

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Mme Sophie NOIR, Conseiller



En présence de Mme Nadia BELAROUI, Greffier lors des débats et du prononcé



ENTRE :



Mme [A] [D]

[Adresse 4]

[Localité 2]

R...

23 MAI 2023

Arrêt n°

KV/NB/NS

Dossier N° RG 21/02231 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FWH5

[A] [D]

/

C.A.F DE L'ALLIER

jugement au fond, origine pole social du tj de moulins, décision attaquée en date du 20 août 2021, enregistrée sous le n° 20/00460

Arrêt rendu ce VINGT TROIS MAI DEUX MILLE VINGT TROIS par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Karine VALLEE, Conseiller

Mme Sophie NOIR, Conseiller

En présence de Mme Nadia BELAROUI, Greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

Mme [A] [D]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Sylvain GAUCHE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/009280 du 01/10/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CLERMONT-FERRAND)

APPELANTE

ET :

C.A.F DE L'ALLIER

[Adresse 3] et [Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Mme [P], muni d'un pouvoir de représentation

INTIMEE

Mme VALLEE, Conseiller en son rapport, après avoir entendu, à l'audience publique du 24 Avril 2023, tenue en application de l'article 945-1 du code de procédure civile, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré après avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

De l'union de Mme [A] [D] et M. [O] [D], sont nés sept enfants dont les cinq aînés en Serbie et les deux plus jeunes en France, à savoir :

- [G] [D] né le 2 octobre 1999 ;

- [X] [D] né le 8 mars 2001 ;

- [L] [D] née le 11 décembre 2003 ;

- [Z] [D] née le 4 février 2006 ;

- [R] [D] née le 25 octobre 2008 ;

- [W], née le 22 juillet 2010 ;

- [F] né le 30 octobre 2012.

Par décision en date du 6 septembre 2019 la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES (CAF) de l'ALLIER a refusé le bénéfice des allocations familiales pour les cinq enfants nés en SERBIE.

Par décision en date du 19 juin 2020, notifiée le 17 juillet 2020 à Mme [D], la commission de recours de la CAF de l'ALLIER a rejeté le recours qu'elle avait introduit à l'encontre de cette position de refus.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 17 décembre 2020, Mme [D] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de MOULINS d'un recours contre la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable.

Par jugement prononcé contradictoirement le 20 août 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de MOULINS a débouté Mme [D] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée aux dépens de l'instance.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 26 octobre 2021, Mme [D] a interjeté appel de ce jugement notifié à sa personne le 28 août 2021.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par ses dernières écritures visées le 24 avril 2023, oralement soutenues à l'audience, Mme [D] conclut à l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande à la cour, statuant à nouveau, de:

A titre principal :

- annuler la décision du 17 juillet 2020 par lequel le bénéfice des prestations familiales lui a été refusé ;

- dire qu'elle peut prétendre à des prestations familiales et à un complément familial pour leurs cinq enfants à hauteur de 1.094,66 euros par mois ;

- condamner la CAF de l'ALLIER au versement de l'allocation mensuelle au titre des allocations familiales et du complément familial à hauteur de 19.703 euros depuis le 1er juin 2019, assortie des intérêts légaux à compter de chaque mois pour lequel elle aurait dû être versée dans les 30 jours suivant la notification de l'arrêt sous astreinte de 90 euros par jour de retard;

- condamner la CAF de l'ALLIER à lui verser la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts dans les 30 jours suivant la notification du jugement et sous astreinte de 90 euros par jour de retard.

A titre subsidiaire :

- annuler la décision du 17 juillet 2020 par laquelle le bénéfice des prestations familiales lui a été refusé s'agissant d'[R] [D] ;

- dire qu'elle peut prétendre à des prestations familiales et à complément familial pour [R] [D] ;

- condamner la CAF de l'ALLIER à lui verser l'allocation mensuelle au titre des allocations familiales et du complément familial à hauteur de 5.911 euros depuis le 1er juin 2019, assortie des intérêts légaux à compter du premier jour de chaque mois pour lequel elle aurait dû être versée dans les 30 jours suivant la notification de l'arrêt sous astreinte de 90 euros par jour de retard ;

- condamner la CAF de l'ALLIER à lui verser la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts dans les 30 jours suivant la notification du jugement sous astreinte de 90 euros par jour de retard.

Dans tous les cas :

- condamner la CAF de l'ALLIER à payer à son conseil la somme de 1.200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.

Mme [D] revendique à titre principal le versement des allocations familiales et du complément familial pour ses cinq enfants nés en Serbie en dépit de leur arrivée en FRANCE hors procédure de regroupement familial.

Elle conclut à l'illégalité de la décision rendue le 17 juillet 2020 par la commission de recours amiable de la CAF de l'ALLIER au motif qu'elle contrevint aux articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, à l'article 1er du protocole n°1 à la convention et à l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

A titre subsidiaire, elle fait valoir qu' [R] [D] est née en France le 25 octobre 2008, de sorte qu'elle ouvre droit au versement des allocations familiales et du complément familial.

Par ses dernières écritures visées le 24 avril 2023 , oralement soutenues à l'audience, la CAF de l'ALLIER demande à la cour de :

A titre principal :

- confirmer la position de la commission de recours amiable en ce qui concerne le refus aux prestations familiales pour cinq des sept enfants ;

- confirmer en conséquence le jugement entrepris ;

- débouter Mme [D] de l'ensemble de ses demandes.

A titre subsidiaire :

- Confirmer le non versement des prestations familiales et complément familial s'agissant d'[R] [D] ;

- débouter Mme [D] de l'ensemble de ses demandes.

La caisse de sécurité sociale fait valoir, au visa des dispositions des articles L. 512-2 et D. 512-2 du code de la sécurité sociale, qu'elle n'a pu obtenir communication de la part de Mme [D] du certificat de contrôle médical délivré par l'office français de l'immagration au titre du regroupement familial, pourtant strictement nécessaire à l'ouverture des droits à prestations familiales s'agissant d'enfant d'origine étrangère. Elle précise que Mme [D] et ses enfants sont entrés irrégulièrement en France.

Elle indique qu'à défaut d'un tel certificat, il reste possible de faire droit à la demande de prestations familiales d'un parent si celui-ci justifie être titulaire d'une carte de séjour temporaire 'vie privée et familiale' délivrée dans le cadre du respect des droits de famille (article L.313-11-7° du CESEDA) et dans l'hypothèse d'une arrivée des enfants sur le territoire français effectuée en même temps que celle des parents.

Or elle relève que les consorts [D] ont certes reçu une carte de séjour temporaire vie privée et familiale, mais que celle-ci leur a été délivrée sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de la sécurité sociale au titre d'une admission exceptionnelle au séjour, et non dans le cadre des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du CESEDA précité.

Elle en déduit que la carte de séjour dont se prévaut Mme [D] n'est pas de nature à ouvrir droit aux prestations familiales.

A titre subsidiaire, elle fait observer que la demande au titre des allocations familiales et du complément familial concernant Mme [R] [D] est présentée pour la première fois en cause d'appel. Elle la considère en conséquence irrecevable.

Sur le fond, elle conteste que Mme [R] [D] soit née sur le territoire français, dès lors qu'elle a toujours été connue de ses services comme étant de nationalité serbe au vu des justificatifs communiqués par les consorts [D], . Elle souligne qu'en tout état de cause, la date de naissance de cet enfant est antérieure à celle de l'arrivée des consorts [D] sur le territoire français.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées des parties, oralement soutenues à l'audience, pour un plus ample exposé de leurs moyens.

MOTIFS

Selon les pièces produites, Mme [D] et son époux sont entrés irrégulièrement sur le territoire français le 10 novembre 2008 accompagnés de leurs premiers enfants et ont obtenu le bénéfice d'une carte vie privée et familiale pour la période du 9 mai 2019 au 8 mai 2021 en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESADA) alors applicable.

Les époux [D] n'ont pu produire l'attestation préfectorale prévue à l'article D. 512-2 du code de la sécurité sociale destinée à établir que leurs enfants sont entrés au plus tard en même temps que l'un d'entre eux en FRANCE

Les parties assoient leurs argumentations respectives soit sur les dispositions du code de la sécurité sociale régissant les conditions d'octroi des prestations familiales aux personnes de nationalité étrangère séjournant en FRANCE soit, s'agissant des époux [D], sur divers textes supra-nationaux.

Aucune d'entre elles ne fait état des dispositions de la convention générale entre la FRANCE et la YOUGOSLAVIE sur la sécurité sociale signée le 5 janvier 1950, publiée par le décret n° 51-457 du 19 avril 1951, rendue applicable dans les relations entre la FRANCE et la SERBIE par l'accord de gouvernement conclu entre la République française et le conseil des ministres de Serbie-Monténégro, relatif à la succession en matière de traités bilatéraux conclus entre la FRANCE et la République fédérative de YOUGOSLAVIE, signé le 26 mars 2003 et publié par le décret n° 2003-457 du 16 mai 2003.

Cette convention générale prévoit:

'§ 1er - Les travailleurs français ou yougoslaves, salariés ou assimilés aux salariés par les législations de sécurité sociale énumérées à l'article 2 de la présente convention, sont soumis respectivement auxdites législations applicables en Yougoslavie ou en France et en bénéficient ainsi que leurs ayants droit, dans les mêmes conditions que les ressortissants de chacun de ces pays.

Les travailleurs salariés ou assimilés aux salariés, visés à la présente convention, comprennent au sens de la législation yougoslave, les personnes bénéficiaires d'un contrat de travail et les personnes qui leur sont assimilées en ce qui concerne le régime d'assurances sociales.

§ 2 - Les ressortissants français ou yougoslaves autres que ceux visés au premier paragraphe du présent article sont soumis respectivement aux législations concernant les prestations familiales énumérées à l'article 2, applicables en Yougoslavie ou en France, et en bénéficient dans les mêmes conditions que les ressortissants de chacun de ces pays.

§ 3- Les ressortissants français ou yougoslaves résidant en Yougoslavie ou en France peuvent être admis à l'assurance volontaire ou facultative continuée des législations énumérées à l'article 2, dans les mêmes conditions que les ressortissants du pays où ils résident, compte tenu, le cas échéant, des périodes d'assurance en France et en Yougoslavie'.

L'article 2 auquel il est renvoyé, modifié par l'avenant du 8 février 1966, rendu applicable par le décret n° 67-125 du 1er février 1967, dispose quant à lui notamment que : '§ 1er - Les législations de sécurité sociale auxquelles s'applique la présente convention sont :

1° En France :

a) La législation générale fixant l'organisation de la sécurité sociale.

b) La législation générale fixant le régime des assurances sociales applicables aux assurés des professions non agricoles et concernant l'assurance des risques maladie, invalidité, vieillesse, décès et la couverture des charges de la maternité, à l'exception des dispositions concernant l'assurance volontaire du risque vieillesse pour les nationaux français exerçant ou ayant exercé à l'étranger une activité professionnelle salariée ou non salariée.

c) La législation des assurances sociales applicables aux salariés et assimilés des professions agricoles et concernant la couverture des risques et charges ;

d) la législation des prestations familiales ;

e) les législations sur la prévention et la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles ;

f) les régimes spéciaux de sécurité sociale, en tant qu'ils concernent les risques ou prestations couverts par les législations énumérées aux alinéas précédents et notamment le régime relatif à la sécurité sociale - dans les mines [...]'.

Si en principe il n'appartient pas au juge de relever d'office d'autres moyens de pur droit que ceux soulevés par les parties, et ce quand bien même un raisonnement juridique différent devait s'avérer plus pertinent au regard de l'objet du litige, il a en revanche l'obligation d'examiner d'office les conditions d'application d'une convention bilatérale liant la FRANCE.

Il y a donc lieu de soumettre à la discussion contradictoire des parties l'existence de la convention bilatérale précitée, qui est susceptible d'avoir une incidence sur la solution du litige.

La réouverture des débats sera à cette fin ordonnée et l'affaire renvoyée à l'audience du 11 septembre 2023 à 13H30.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Ordonne la réouverture des débats afin de soumettre à la discussion contradictoire des parties l'existence de la convention bilatérale, évoquée aux motifs de l'arrêt, liant la FRANCE à la SERBIE en matière de législation de prestations familiales ;

- Dit que la notification du présent arrêt vaut convocation des parties à l'audience de la chambre sociale du 11 septembre 2023 à 13H30;

- Invite les parties à conclure avant cette audience si elles l'estiment nécessaire à la défense de leurs intérêts ;

- Réserve les demandes des parties.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/02231
Date de la décision : 23/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-23;21.02231 ?
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