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18/01/2001 | FRANCE | N°2000-6290

France | France, Cour d'appel de Versailles, 18 janvier 2001, 2000-6290


FAITS. PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES La société BM BROKERS était, aux termes d'un contrat en date du 17 juin 1995, l'agent commercial de la société SPADO LASSAILLY qui a été déclarée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Chartres du 09 mars 1999. Invoquant le fait que, malgré la décision de maître Z..., ès qualités d'administrateur judiciaire, de poursuivre le contrat, la société SPADO LASSAILLY n'avait pas respecté ses obligations, la société BM BROKERS a saisi le tribunal de commerce de Chartres afin d'obtenir le paiement de commissions arriÃ

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FAITS. PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES La société BM BROKERS était, aux termes d'un contrat en date du 17 juin 1995, l'agent commercial de la société SPADO LASSAILLY qui a été déclarée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Chartres du 09 mars 1999. Invoquant le fait que, malgré la décision de maître Z..., ès qualités d'administrateur judiciaire, de poursuivre le contrat, la société SPADO LASSAILLY n'avait pas respecté ses obligations, la société BM BROKERS a saisi le tribunal de commerce de Chartres afin d'obtenir le paiement de commissions arriérées et une indemnité d'inexécution de préavis de rupture. Par jugement en date du 26 juillet 2000, cette juridiction estimant que la procédure de redressement judiciaire était sans influence juridique sur le litige, a fait droit à l'exception d'incompétence soulevée parla société SPADO LASSAILLY sur le fondement d'une clause contractuelle attributive de juridiction et a renvoyé la procédure devant le tribunal de commerce de Paris. Le 14 août 2000, la société BM BROKERS a formé contredit à l'encontre de cette décision. Elle soutient qu'en vertu de l'article 174 du décret du 27 décembre 1985 le tribunal de commerce de Chartres, saisi de la procédure collective de la société SPADO LASSAILLY, est seul compétent pour connaître de cette action dès lors que l'état de redressement judiciaire exerce une influence sur le litige et qu'il s'agit d'une demande de condamnation exprimée sur le fondement de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985. Elle demande à la cour de réformer le jugement entrepris, de dire que le tribunal de commerce de Chartres était seul compétent et d'évoquer le fond du litige en invitant les parties à constituer avoué pour voir prononcer la résiliation du contrat d'agent commercial aux torts de la société SPADO LASSAILLY et condamner cette dernière au paiement de la somme de 169.712,47 francs au titre des commissions impayées, celle de 1.216.471,96 francs pour inexécution du préavis avec

intérêts de droit, et celle de 30.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Par conclusions visées par le greffe le 02 novembre 2000, la société SPADO LASSAILLY et maître Z... ès qualités, répondent ensemble que la société BM BROKERS a mis fin au contrat d'agent commercial par courrier du 15 septembre 1999 au motif que l'essentiel de l'objet de son mandat aurait été supprimé et que la société SPADO LASSAILLY aurait été défaillante dans l'envoi des dossiers. Ils en déduisent que la résiliation n'a aucun lien avec le redressement judiciaire et que la clause contractuelle attributive de compétence doit porter ses effets. Ils demandent en conséquence à la cour de confirmer le jugement entrepris. Subsidiairement sur le fond, ils critiquent les arguments invoqués par la société BM BROKERS qui justifieraient la rupture du contrat et contestent les montants réclamés. Ils demandent à la cour de dire que la rupture est imputable à la société BM BROKERS, de la condamner à leur payer la somme de 250.000 francs pour non respect du préavis et, subsidiairement, de voir ramener le montant de l'indemnité à 156.700 francs en constatant la créance éteinte puisque non inscrite au passif, de voir ramener le montant des commissions à 111.674,93 francs et condamner la société BM BROKERS au paiement de la somme de 20.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. -4- SUR CE. LA COUR Considérant que l'article IXdu contrat d'agent commercial conclu le 12juin 1985 entre les sociétés BM BROKERS et SPADO LASSAILLY stipule: "en cas de litige survenant soit pendant la durée soit à propos de l'exécution du présent contrat, soit lors de sa résiliation ou à propos des conditions de celle-ci, les parties contractantes soumettront leur différend au tribunal de commerce de Paris devant qui attribution de juridiction est expressément faite" ; Considérant que cette clause attributive de juridiction, librement convenue entre

deux commerçants et clairement exprimée dans le contrat, est licite et fait, par application des dispositions de l'article 1134 du code civil, la loi des parties ; Considérant toutefois qu'il résulte des dispositions de l'article 174 du décret du 27 décembre 1985, pris en application de la loi d'ordre public du 25 janvier 1985, que le tribunal saisi d'une procédure de redressement judiciaire connaît de tout ce qui concerne le redressement et la liquidation judiciaires ; Considérant que, même en présence d'une clause attributive, le tribunal de la procédure collective est compétent dès lors que l'état de redressement judiciaire exerce une influence sur le litige né de l'exécution d'un contrat antérieur à l'ouverture de la procédure collective mais fondé sur des griefs nés postérieurement ; Qu'en l'espèce la société BM BROKERS a interrogé maître A..., ès- qualités, sur la poursuite du contrat d'agent commercial par une lettre du 28 mai 1999 à laquelle l'administrateur a répondu affirmativement le 24 juin ; que la société SPADO LASSAIL LY, par une lettre du 28 juillet 1999 adressée sous la double signature de son dirigeant et de maître Z..., ès qualités, a fait connaître à la société BM BROKERS sa décision de cesser de commercialiser certains produits à faible marge en invoquant le fait que la situation de l'entreprise "ne permet plus de maintenir une activité à rentabilité aussi faible" ; que la société BM BROKERS a considéré cette décision comme vidant le contrat de son objet et constituant la manifestation de l'intention de la société SPADO LASSAILLY de mettre un terme au contrat ; Qu'il s'ensuit que l'état de redressement judiciaire qui peut justifier certaines décisions de restructuration de l'entreprise n'est pas étranger à la résiliation invoquée et exerce une influence sur le litige ; Qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de dire que le tribunal de commerce de Chartres est territorialement compétent pour connaître de

la demande de la société BM BROKERS; Considérant qu'il n'apparaît pas de l'intérêt d'une bonne administration de la justice d'évoquer le fond du litige par application de l'article 89 du nouveau code de procédure civile ce qui priverait les parties du premier degré de juridiction et du débat devant le tribunal saisi de la procédure collective ; Considérant que l'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Considérant que l'intimée qui succombe doit être condamnée aux dépens de première instance et de contredit ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, INFIRME le jugement entrepris, et statuant de nouveau, DÉCLARE la SA SPADO LASSAILLY et maître X... PIERRAT, ès-qualités, mal fondés en leur exception d'incompétence, les en déboute, DIT le tribunal de commerce de Chartres compétent pour connaître du litige, DIT n'y avoir lieu d'évoquer le fond du litige en application de l'article 89 du nouveau code de procédure civile, DÉCLARE tant la SA BM BROKERS que la SA SPADO LASSAILLY et maître X... PIERRAT, ès-qualités, mal fondés en leur demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, les en déboute, CONDAMNE la SA SPADO LASSAILLY aux dépens de première instance et de contredit. ARRÊT RÉDIGE PAR MONSIEUR COUPIN, CONSEILLER PRONONCÉ PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRÉSIDENT ET ONT SIGNÉ LE PRÉSENT ARRÊT LE GREFFIER

LE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE

I

PRÉSIDENT M.THÉRÈSE GÉNISSEL

F. Y...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2000-6290
Date de la décision : 18/01/2001

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Organes - Tribunal - Compétence matérielle - Action concernant la procédure collective

Il résulte de l'article 174 du décret du 27 décembre 1985, pris en application de la loi d'ordre public du 25 janvier 1985, que le tribunal saisi d'une procédure de redressement judiciaire connaît de tout ce qui concerne le redressement et la liquidation judiciaire. Si une clause attributive de compétence librement convenue entre deux commerçants et clairement exprimée dans un contrat fait la loi des parties en application de l'article 1134 du code civil, dès lors que l'état de redressement judiciaire d'une des parties au contrat antérieurement conclu exerce une influence sur le litige né de son exécution et fondé sur des griefs nés postérieurement au jugement d'ouverture, le tribunal de la procédure collective est compétent


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2001-01-18;2000.6290 ?
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