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17/01/2013 | FRANCE | N°11/01920

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 1ère section, 17 janvier 2013, 11/01920


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 79A



1ère chambre 1ère section



ARRET N°









CONTRADICTOIRE



DU 17 JANVIER 2013



R.G. N° 11/01920



AFFAIRE :



[N] [D]





C/

[B] [D]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Février 2011 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° chambre : 1

N° Section :

N° RG : 08/7462


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Expéditions

Copies

délivrées le :

à :





Me Emmanuel JULLIEN,





Me Anne Laure DUMEAU











REPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LE DIX SEPT JANVIER DEUX MILLE TREIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt sui...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 79A

1ère chambre 1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 17 JANVIER 2013

R.G. N° 11/01920

AFFAIRE :

[N] [D]

C/

[B] [D]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Février 2011 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° chambre : 1

N° Section :

N° RG : 08/7462

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Emmanuel JULLIEN,

Me Anne Laure DUMEAU

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DIX SEPT JANVIER DEUX MILLE TREIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [N] [D]

né le [Date naissance 8] 1938 à [Localité 31]

[Adresse 17]

[Localité 29]

Représentant : Me Emmanuel JULLIEN de la AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, (avocat postulant au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 20110299)

- PLAIDANT par Me Christophe CARON avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0500

APPELANT

****************

Monsieur [B] [D]

né le [Date naissance 14] 1943 à [Localité 24] (36)

[Adresse 4]

[Localité 29]

Représentant : Me Anne Laure DUMEAU, (avocat postulant au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 0027246 )

Madame [V] [D] veuve [Z]

née le [Date naissance 1] 1937 à [Localité 29] (92)

[Adresse 20]

[Localité 30]

- Représentant : Me Anne laure DUMEAU, (avocat postulant au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 0027246 )

Monsieur [T] [L]

né le [Date naissance 10] 1962 à [Localité 26] (92)

[Adresse 5]

[Localité 15]

Représentant : Me Anne laure DUMEAU,(avocat postulant au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 0027246 )

Monsieur [Y] [L]

néle [Date naissance 9] 1963 à [Localité 30] (75)

[Adresse 13]

[Localité 18]

Représentant : Me Anne Laure DUMEAU, (avocat postulant au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 0027246 )

Madame [A] [L] épouse [G]

née le [Date naissance 2] 1965 à [Localité 30] (75)

[Adresse 3]

[Localité 19]

Représentant : Me Anne laure DUMEAU, (avocat postulant au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 0027246 )

Monsieur [R] [L]

né le [Date naissance 6] 1969 à [Localité 30] (75)

demeurant [Adresse 16])

Représentant : Me Anne laure DUMEAU, avocat postulant au barreau de VERSAILLES - N° du dossier 0027246 )

PLAIDANT par Maitre Jean Louis LAGARDE, avocat au barreau de PARIS D.0127.

INTIMES

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 Novembre 2012, Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président,

Madame Dominique LONNE, Conseiller,

Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT

Vu l'appel interjeté le 10 mars 2011 par Monsieur [N] [D] du jugement contradictoire rendu le 10 février 2011 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE qui a :

- ordonné le séquestre des films dépendant de la succession de [F] [D] et de son épouse [I] [S], déposés au Centre National de Cinématographie, le 12 juin 1986 sous bulletins d'entrée numéros 23161 et 23162, entre les mains de la société par actions simplifiées AUGY STOCK, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d'Auxerre sous le n° B 423 938 540,

- dit que ce séquestre sera régi conformément au projet de contrat joint à l'assignation et annexé au jugement, - condamné [N] [D] à payer à Monsieur [B] [D], Madame [V] [D], épouse de [J] [Z], décédé, Monsieur [T] [L], Monsieur [Y] [L], Madame [A] [L], épouse [G] et Monsieur [R] [L], ensemble, la somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées 30 octobre 2012 par lesquelles Monsieur [N] [D], appelant, poursuivant l'infirmation du jugement entrepris, prie la cour, statuant à nouveau de :

I/ LES DECISIONS DE JUSTICE EXCLUENT EXPRESSEMENT DU CHAMP DE COMPETENCE DU SEQUESTRE LES FILMS AUDIOVISUELS DEPOSES AU CNC

- dire que la présente procédure judiciaire, engagée par les intimées, démontre que les films audiovisuels litigieux ne sont pas concernés par les décisions de justice antérieures car, si ils l'étaient, les intimés auraient demandé l'exécution pure et simple desdites décisions.

- dire que toutes les décisions de justice opposant les parties à l'instance (et notamment l'ordonnance de référé du Tribunal de Grande Instance de NANTERRE en date du 14 septembre 1995 et son arrêt de la Cour d'appel de VERSAILLES en date du 7 mai 1997, le jugement de la 5ème chambre, section A, en date du 7 décembre 2000 du Tribunal de grande Instance de NANTERRE, confirmé par l'arrêt de la 1ère chambre section 1 de la Cour d'appel de Versailles en date du 28 novembre 2002 et l'arrêt de la 1ère chambre civile de la cour de cassation en date du 3 novembre 2004) excluent du séquestre judiciaire les treize films audiovisuels litigieux.

- dire que la divulgation post-mortem, au sens de l'article L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle, s'épuise lors de la première communication de l'oeuvre auprès du public et ne vise que les oeuvres qui n'ont pas été divulguées de vivant de l'auteur.

- dire que chacun des films audiovisuels litigieux, qui sont des oeuvres de l'esprit, a été d'ores et déjà divulgué du vivant de [F] [D] de sorte qu'une communication des oeuvres, après sa mort, ne s'analyse pas en une divulgation post-mortem, conformément à l'article L.121-2 du Code de la propriété intellectuelle.

- dire que toutes les décisions de justice opposant les parties à l'instance (et notamment le jugement de la 5éme chambre, section A, en date du 7 décembre 2000 du Tribunal de Grande Instance de Nanterre, confirmé par l'arrêt de la 1ère chambre section 1 de la Cour d'appel de Versailles en date du 28 novembre 2002 et l'arrêt de la 1ére chambre civile de la Cour de cassation en date du 3 novembre 2004), n'interdisent que la divulgation des 'uvres inédites de [F] [D] qui n'ont pas été divulguées de son vivant et ne concernent pas les 'uvres, telles que les films audiovisuels, d'ores et déjà divulgués du vivant de l'auteur et qui ne sont plus des 'uvres inédites.

- dire que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet de décisions antérieures et que la chose demandée, en l'espèce, est différente puisqu'elle ne concerne plus les 'uvres non divulguées par l'explorateur de son vivant ('uvres inédites), c'est-à-dire les 'uvres posthumes, mais les 'uvres qui l'ont été de son vivant et elle ne porte exclusivement que sur les films audiovisuels.

En conséquence,

- dire que les intimés ne peuvent pas se retrancher derrière l'autorité de la chose jugée afin de solliciter le séquestre des films audiovisuels litigieux auprès de la société AUGY STOCK, dès lors que lesdites décisions judiciaires excluent les films audiovisuels litigieux du séquestre et n'interdisent que la divulgation post-mortem des 'uvres non divulguées de l'auteur de son vivant et dire que chacun desdits films litigieux a d'ores et déjà été divulgué.

- le déclarer recevable et bien fondé en son appel et débouter les intimés de l'intégralité de leurs demandes.

II / UN REGLEMENT D'INDIVISION HOMOLOGUE PAR LES JUGES LE 7 DECEMBRE 2000 QUI NE FAIT PAS OBSTACLE AU RESPECT DES STATUTS DU CNC

- dire que le règlement d'indivision, homologué par le Tribunal de Grande Instance de Nanterre, le 7 décembre 2000, préconise une conservation des films litigieux auprès du Centre National de la Cinématographie de [Localité 23], comme ils le sont d'ores et déjà depuis 1986.

- dire que le règlement d'indivision régissant le sort des 'uvres de [F] [D], interdit, conformément à son article 6, la divulgation des 'uvres posthumes de l'auteur et n'interdit pas la communication auprès du public des 'uvres qui ont été divulguées par l'auteur de son vivant.

- dire que chaque film audiovisuel litigieux a été d'ores et déjà divulgué du vivant de [F] [D] de sorte qu'une nouvelle communication des 'uvres ne s'analyse pas en une divulgation post-mortem et dire que ledit règlement d'indivision n'interdit pas que la divulgation des 'uvres inédites de l'auteur qui ne l'a pas été de son vivant, ce qui ne concerne pas les films audiovisuels litigieux.

En conséquence,

- dire que les intimés ne peuvent pas se retrancher derrière ledit règlement d'indivision afin de solliciter le séquestre des films auprès de la société AUGY STOCK, dès lors que ce règlement impose une conservation des films auprès du Centre National de la Cinématographie de [Localité 23] et n'interdit pas la communication au public d''uvres divulguées par l'auteur de son vivant.

- débouter les intimés de l'intégralité de leurs demandes.

III / A TITRE RECONVENTIONNEL: MONSIEUR [N] [D] SERA AUTORISE A SIGNER. SEUL. AU NOM DE L'INDIVISION. LES STATUTS DU CNC

A - SEULE LA SAUVEGARDE DE L'INTERET DES BIENS INDIVIS. DANS LE RESPECT DE LA VOLONTE DE L'AUTEUR. DOIT MOTIVER LA DECISION DE LA COUR POUR TRANCHER LE LITIGE

- dire qu'une bonne gestion des biens indivis impose que les films audiovisuels litigieux soient conservés et restaurés par le Centre National de la Cinématographie de [Localité 23], comme ils le sont depuis 1986, car cela est conforme à la volonté de l'auteur défunt, et cela garantit une conservation et des conditions de restauration optimales, à un coût inexistant pour l'indivision.

- dire que le dépôt auprès du CNC coïncide avec le droit à l'information du public, la liberté scientifique et l'intérêt culturel et éducatif de la collectivité.

- dire que les intimés, en sollicitant le séquestre des 'uvres audiovisuelles litigieuses auprès de la société AUGY STOCK, portent atteinte à l'intérêt de l'indivision et mettent en péril la sauvegarde des biens indivis.

En conséquence,

- débouter les intimés de l'intégralité de leurs demandes qui mettent en péril la sauvegarde des biens indivis.

- dire que les treize films audiovisuels litigieux seront conservés et restaurés au Centre National de la Cinématographie, conformément à la Convention générale relative au dépôt, à la conservation, sauvegarde et restauration et la Convention particulière de restauration du Centre National de la Cinématographie de [Localité 23], jointes à la procédure en pièces n° 37 et 38.

- l'autoriser à signer, seul, pour le compte de l'indivision, la Convention générale relative au dépôt, à la conservation, sauvegarde et restauration et la Convention particulière de restauration du Centre National de la Cinématographie de [Localité 23], en toutes leurs dispositions et cela, sans réserve.

B - LE NON-USAGE DES DROITS D'EXPLOITATION DES HERITIERS CONSTITUE UN ABUS NOTOIRE : LE JUGE DEVRA Y METTRE UN TERME

-dire que le non-usage des droits patrimoniaux, sans juste motif, constitue un abus notoire de non-exploitation.

- dire que le fait que ce non-usage soit limité dans le temps, sans juste motif, ajoute à la caractérisation de l'abus.

- dire que les droits patrimoniaux dévolus aux héritiers doivent s'exercer conformément à la volonté de l'auteur défunt.

- dire que Monsieur [F] [D] a divulgué les films audiovisuels litigieux de son vivant et a donc exprimé sa volonté que lesdits films soient communiqués au public.

- dire que les héritiers ne peuvent pas s'abstenir d'exploiter les droits patrimoniaux qui leur sont dévolus sans juste motif et contre la volonté de l'auteur décédé.

- dire que la fonction sociale du droit d'auteur doit prévaloir sur l'intérêt individuel et non justifié des intimés.

En conséquence,

- dire que le non-usage des droits d'exploitation constitue un abus notoire.

- débouter les intimés de l'intégralité de leurs demandes.

- dire que les treize films audiovisuels litigieux seront conservés et restaurés au Centre National de la Cinématographie, conformément à la Convention générale relative au dépôt, à la conservation, sauvegarde et restauration et la Convention particulière de restauration du Centre National de la Cinématographie de [Localité 23], jointes à la procédure en pièces n° 37 et 38.

- l'autoriser à signer, seul, pour le compte de l'indivision, la Convention générale relative au dépôt, à la conservation, sauvegarde et restauration et la Convention particulière de restauration du Centre National de la Cinématographie de [Localité 23], en toutes leurs dispositions et cela, sans réserve.

IV/ SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE ET LES ENTIERS DEPENS

- condamner in solidum les intimés au paiement d'une somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner in solidum les intimés au paiement des entiers dépens de la présente procédure et de la procédure de première instance ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 23 octobre 2012 par lesquelles Monsieur [B] [D], Madame [V] [D], veuve [Z], Monsieur [T] [L], Monsieur [R] [L] , Monsieur [Y] [L], Madame [A] [L], épouse [G], intimés, concluent à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, et demandent à la cour d'ordonner le séquestre des films dépendants de la succession de [F] [D] et de son épouse [I] [S] entre les mains de la société AUGY STOCK, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d'Auxerre sous le n°B 423 938 540, conformément au projet de contrat accepté par la société AUGY STOCK, dire que le séquestre des films sera régi par la convention proposée par AUGY STOCK, de débouter [N] [D] de l'ensemble de ses demandes, de le condamner au paiement d'une somme de 20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture du 8 novembre 2012 ;

SUR QUOI, LA COUR

Considérant que [F] [D], explorateur, a réalisé plusieurs films à l'occasion de ses voyages et explorations, projetés lors de conférences, comme celles de 'Connaissance du monde" au cours desquelles il était amené à les commenter ;

Qu'il est décédé le [Date décès 11] 1972, laissant à sa veuve, [I] [S], elle-même décédée le [Date décès 12] 1994, et à ses héritiers, outre ces films, des récits, romans, notes, dessins et commentaires, constituant un fonds d'archives, qui a été classé, selon un inventaire réalisé par sa veuve et l'un de ses petits-fils, [T] [L] ;

Que le 12 juin 1986, un dépôt volontaire des 13 films réalisés par [F] [D] a été effectué au Centre National de la Cinématographie (CNC) de [Localité 23] ;

Qu'un litige étant survenu entre les héritiers de [F] [D] postérieurement au décès de sa veuve, sur la divulgation des archives, le président du tribunal de grande instance de Nanterre, saisi en référé, a, par décision du 14 septembre 1995, ordonné "la mise sous séquestre des archives de [F] [D] à l'exception des films qui sont stockés au Centre de Conservation de '[Localité 23]" et désigné "en qualité de séquestre la Bibliothèque-photothèque du Musée de l'Homme, Palais de Chaillot, [Adresse 7], ordonnance confirmée sur ce point par arrêt de la cour d'appel de Versailles le 7 mai 1997 ;

Que le litige relatif à la conservation et la divulgation du fonds d'archives de [F] [D] persistant, le Tribunal de Grande Instance de Nanterre a, par jugement du 7 décembre 2000, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 28 novembre 2002, approuvé un règlement d'indivision régissant ce fonds ; que par arrêt du 3 novembre 2004, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par [N] [D] à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles ;

Que par lettre du 26 mars 2002, le CNC a informé le conseil des intimés que le séquestre confirmé par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 26 mars 2002 ne vise pas le dépôt volontaire effectué au CNC et leur a proposé la signature d'une convention de dépôt prévoyant la cession à titre gratuit et non exclusif à son profit des droits de reproduction et de représentation des films ; que dans une lettre datée du 10 juillet 2006 adressée à [B] [D] et [N] [D], le CNC a confirmé qu'il ne souhaite plus être dépositaire des films réalisés par [F] [D] et a proposé aux parties de retirer définitivement les documents déposés en 1986, dans un délai de 6 mois leur rappelant qu'il n'a pas la qualité de séquestre, que les conditions dans lesquelles le dépôt volontaire a été accepté ont changé et que suivant les articles 1932 à 1946 du code civil, les dépôts à durée déterminée peuvent être rompus unilatéralement par le dépositaire, sous réservé d'avoir un motif légitime ;

Que les héritiers de [F] [D] n'ont pu s'entendre sur un nouveau séquestre assurant la conservation et la restauration des films, [N] [D] désirant signer la convention proposée par le CNC qui prévoit la divulgation des films et une cession de droits de reproduction et de représentation à son profit et les consorts [D]/ [L], offrant de confier le séquestre des films à la société AUGY STOCK ;

Que les consorts [D] & [L] ont, dans ces circonstances, saisi le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE aux fins de voir désigner un séquestre pour ces films, en la personne de la société AUGY STOCK ; que [N] [D] s'y est opposé et a demandé à être autorisé, au nom de l'indivision, à signer la convention permettant au CNC de conserver le dépôt des films litigieux ;

Que le tribunal de grande instance de Nanterre a fait droit à la demande formée par les consorts [D]/ [L] ;

Considérant que pour voir dire que les 13 films audiovisuels seront conservés et restaurés au CNC conformément à la convention générale relative au dépôt, à la conservation, sauvegarde et restauration et la convention particulière de restauration du CNC de [Localité 23], et se voir autoriser à signer au nom de l'indivision les statuts du CNC, [N] [D] soutient que le sort des 13 films audiovisuels déposés au CNC de [Localité 23] n'a pas été tranché par les décisions de justice antérieures et sont donc exclues du séquestre ordonné auprès de la bibliothèque photothèque du Musée de l'Homme et de celui ordonné auprès du CNC, s'agissant d'un dépôt volontaire ; qu'aucune interdiction de communication au public n'a été ordonnée ; que le droit de divulgation post mortem des oeuvres est épuisé dès lors que chacun des films litigieux a déjà été divulgué du vivant de l'auteur ; que les décisions de justice antérieures et le règlement d'indivision n'interdisent que la divulgation des oeuvres posthumes inédites de [F] [D] ;

Que les intimés invoquent essentiellement, d'une part, l'autorité de chose jugée qui s'attache à l'arrêt de la cour de cassation du 4 novembre 2004, à l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 28 novembre 2002 et au jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 7 décembre 2000, d'autre part, la volonté exprimée par la majorité des héritiers de [F] [D] de différer toute divulgation jusqu'au décès du dernier de ses héritiers directs ;

- Sur la portée du règlement d'indivision régissant le fonds documentaire

Considérant que [N] [D] soutient en vain que les décisions judiciaires antérieures excluent du séquestre les 13 films litigieux déposés au CNC ; qu'en effet, le règlement d'indivision annexé au jugement devenu définitif du tribunal de grande instance de Nanterre du 7 décembre 2000 a pour objet d'organiser la conservation et la possibilité d'avoir accès pour les membres de l'indivision au fonds d'archives de [F] [D], sans distinguer entre documents, photographies et films le composant ; qu'il prévoit en son article 2 intitulé «SEQUESTRE» que le séquestre confié au Centre de la cinématographie de [Localité 23] est confirmé ; que les premiers juges ont relevé pertinemment qu'aux termes de l'article 3 du règlement, le libre accès de chacun des co-indivisaires au fonds d'archives déposé au CNC prévoit expressément le visionnage des films ; que s'agissant de la conservation du fonds, l'article 5 mentionne les films ;

Que l'arrêt rendu le 28 novembre 2002 par la cour d'appel de Versailles, qui a confirmé en toutes ses dispositions le jugement du 7 décembre 2000, est définitif ;

Que l'usage impropre du mot «séquestre» pour désigner le dépôt volontaire des films au CNC n'affecte pas le sens et la portée du règlement d'indivision qui est dépourvu de toute équivoque sur le contenu du fonds d'archives dont il organise la conservation et l'accès aux membres de l'indivision ;

Considérant que le règlement d'indivision prévoit en son article 6 que le fonds d'archives de [F] [D] ne fera l'objet d'aucune divulgation à l'extérieur de la famille des cohéritiers et interdit toute communication à des tiers même pour leur usage privé, toutes publications, exposition, représentations, consultation ; que l'article 7 mentionne que le séquestre aménagé par le règlement restera en vigueur jusqu'au décès du dernier des héritiers au premier degré de [F] [D], à savoir [N] [D], [V] [D] épouse [Z] et [B] [D] et/ou jusqu'au décès du dernier de leurs conjoints respectifs ;

Considérant qu'[N] [D] soutient que seule la divulgation des oeuvres posthumes et inédites est prohibée par le règlement d'indivision et que les 13 films litigieux confiés au CNC ont été divulgués du vivant de l'auteur ; qu'il avance que le dépôt au CNC fait par la veuve de l'auteur autorisait l'exploitation des films et leur consultation ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.121-2 alinéa 1er du CPI, l'auteur a seul le droit de divulguer son oeuvre . Sous réserve des dispositions de l'article L.132-24, il détermine le procédé de divulgation et fixe les conditions de celle-ci ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que les 13 documents déposés, non sonorisés, ont été présentés au public par [F] [D] qui les commentait oralement et modifiait tant le montage que le commentaire au gré des conférences ; qu'il n'a laissé aucun commentaire écrit ; que si, selon l'article L.112-2-6° du CPI sont considérées comme oeuvres audiovisuelles, les oeuvres cinématographiques consistant dans des séquences d'images, sonorisées ou non, les 13 films en litige n'ont pas davantage fait l'objet d'un montage définitif par leur auteur ; que les intimés rappellent, sans être contredits, que le travail de classement des dossiers et lots photographiques, films, diapositives, cartes et fichiers, correspondants à chacune des 17 expéditions qu'il a menées a été réalisé par sa veuve aidée par une documentaliste, ce qu'elle confirme dans une lettre adressée à ses enfants, le 12 mars 1987 ;

Que [F] [D] a fait le choix de divulguer les images qu'il rapportait de ses expéditions sous la forme de support à des conférences sans effectuer ni montage, ni sonorisation définitifs ;

Qu'en l'absence de version définitive scellée par l'auteur, ces oeuvres ne peuvent être considérées comme achevées ;

Considérant que le bordereau de remise de films au CNC daté du 8 juin 1986, établi au nom de [F] [D], [B] [D] et [T] de CONTENSON, comporte une liste de 13 titres suivie d'une demande d'admission aux termes de laquelle le souscripteur autorise l'inscription au catalogue du service et la consultation des documents faisant l'objet du bordereau ; que ce dépôt, qui ne prévoit qu'une consultation des oeuvres, ne saurait valoir autorisation d'exploitation, étant relevé au surplus que les conditions d'exploitation ne sont pas déterminées ;

Que dans son arrêt du 3 novembre 2004, la cour de cassation, rejetant le pourvoi formé par [N] [D] a approuvé les juges du fond en ce qu'ils ont pu considérer qu'en raison du conflit opposant les héritiers sur le sort à réserver à ces archives, leur réunion en un fonds unique qui en évitait la dispersion et permettait d'en assurer la conservation tout en en réservant la divulgation, n'était pas contraire à la volonté de l'auteur et constituait une mesure appropriée à la situation qu'elle a consacrée en homologuant le projet de règlement d'indivision excluant la divulgation jusqu'au décès du dernier descendant direct ;

Que la divulgation des 13 films litigieux est donc soumise à l'article 6 du règlement d'indivision ;

- Sur la demande d'[N] [D] sur le fondement de l'article 815-5 alinéa 1 et 3 du code civil

Considérant qu'[N] [D] soutient que la mise en péril des biens indivis l'autorise à signer seul l'acte de dépôt avec le CNC ; qu'il fait valoir que le séquestre auprès de la société AUGY STOCK est en contradiction avec le règlement d'indivision dont les intimés demandent l'application et que la bonne gestion des biens indivis, à un coût moindre pour l'indivision, dans le respect de l'intérêt scientifique, culturel, pédagogique impose une conservation des films auprès du CNC, que l'intérêt du public doit primer sur celui des héritiers d'autant plus qu'il coïncide avec la volonté de l'auteur exprimée de son vivant ; qu'il ajoute que la signature de la convention générale de dépôt proposée par le CNC n'est que le renouvellement du dépôt effectué en 1986 par la veuve de [F] [D] ;

Mais considérant qu'il n'établit pas en quoi la restauration et la conservation des films ne sera pas assurée dans de bonnes conditions par la société AUGY STOCK, étant relevé que dans une lettre datée du 13 février 2007 adressée à [B] [D] il avait lui-même proposé le transfert des films à cette société ; que le fait que le séquestre auprès de la société AUGY STOCK interdit toute communication des films ne saurait caractériser la mise en péril de l'intérêt commun des indivisaires, alors que la non divulgation des films est conforme au règlement d'indivision ;

Que sa demande sera donc rejetée ;

- Sur l'abus notoire résultant du non usage des droits d'exploitat ion

Considérant que [N] [D] fait valoir que [F] [D] qui a divulgué les films de son vivant souhaitait qu'ils soient communiqués au public et que le refus sans motif légitime des héritiers de respecter la volonté de l'auteur défunt constitue un abus notoire ;

Mais considérant qu'[N] [D] ne rapporte pas la preuve que la volonté de [F] [D] qui n'avait ni sonorisé, ni monté les images prises lors de ses voyages était de les voir diffuser telles quelles ou accompagnées d'un commentaire qu'il n'a pas approuvé ; que si, en répertoriant et classant les documents, photographies et films issus des expéditions menées par son époux, sa veuve a exprimé le souhait de les voir rassembler sous une même responsabilité afin de permettre à ses enfants d'en prendre connaissance, elle n'a pas davantage émis le désir que les films soient communiqués au public et commentés par un tiers ;

Qu'en tout état de cause, la restriction apportée par le règlement d'indivision à la divulgation des oeuvres est limitée dans le temps ;

Qu'il s'ensuit que le refus des consorts [D] -[L] de voir exploiter les films après le décès de l'auteur ne peut être qualifié d'abus notoire dans le non usage du droit de divulgation, tel que prévu par l'article L.121-3 du CPI ;

Que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il a ordonné le séquestre des films dépendant de la succession de [F] [D] et de son épouse [I] [S], déposés au Centre National de Cinématographie, le 12 juin 1986 sous bulletins d'entrée numéros 23161 et 23162, entre les mains de la société AUGY STOCK ;

Considérant que les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile doivent bénéficier aux consorts [D]- [L] ; qu'il leur sera alloué à ce titre la somme complémentaire de 10.000 € ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Y ajoutant,

Déboute [N] [D] de toutes ses demandes,

Condamne [N] [D] à payer aux consorts [D] - [L] la somme complémentaire de 10.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne [N] [D] aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile .

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 11/01920
Date de la décision : 17/01/2013

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°11/01920 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-01-17;11.01920 ?
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