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06/03/2014 | FRANCE | N°11/06331

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 1ère section, 06 mars 2014, 11/06331


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 54F



1ère chambre 1ère section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 06 MARS 2014



R.G. N° 11/06331



AFFAIRE :



[F] [R]

...



C/





SELARL [M]















Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Juillet 2011 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 2

N° Section :

N° RG : 10

/2329



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :





SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES,



Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, avocat au barreau de VERSAILLES -



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU P...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 54F

1ère chambre 1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 06 MARS 2014

R.G. N° 11/06331

AFFAIRE :

[F] [R]

...

C/

SELARL [M]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Juillet 2011 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre : 2

N° Section :

N° RG : 10/2329

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES,

Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, avocat au barreau de VERSAILLES -

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX MARS DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [F] [R]

né le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant :SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD, LEXAVOUE PARIS VERSAILLES postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625

Plaidant par la SCPA BEUCHER, (Société d'avocats LEXCAP au barreau d'ANGERS)

Madame [I] [R]

née le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentant : SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD, LEXAVOUE PARIS VERSAILLES postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625

Plaidant par la SCPA BEUCHER, (Société d'avocats LEXCAP au barreau d'ANGERS)

APPELANTS

****************

SELARL [M]

inscrite au RCS de PARIS, sous le numéro 451 425 656

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 - N° du dossier 00040236 -

Représentant : Me J.P. CORDELIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0399

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 23 Janvier 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Dominique LONNE, conseiller chargé du rapport, Monsieur Dominique PONSOT, conseiller,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président

Madame Dominique LONNE, Conseiller,

Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT,

Courant 1993, la société Umark (société industrielle de charcuterie) a fait construire une unité de production de 2.300 m2.

La maîtrise d'oeuvre a été confiée à M.[L], le contrôle technique à la société CEP et l'exécution des travaux de gros oeuvre à la société Luxabat.

Pour financer la construction, la société Umark a conclu un contrat de crédit-bail immobilier avec la société Auxicomi pour un montant de 8.000.000 francs.

Pour la réalisation de ce chantier, la société Auxicomi, en tant que maître d'ouvrage, a souscrit une police dommages ouvrage et constructeur non réalisateur auprès de la société Allianz aux droits et obligations de laquelle se trouve la société AGF.

La réception des travaux a été prononcée, sans réserve, le 1er septembre 1993.

Se plaignant de vices de construction pouvant compromettre à tout moment l'exploitation notamment pour des raisons sanitaires, la société Umark a fait une déclaration de sinistre à l'assureur dommages ouvrage le 12 avril 2000.

L'expert missionné par l'assureur a remis un rapport préliminaire le 30 mai 2000.

Par le même courrier du 08 juin 2000, les AGF ont notifié à la société Umark le rapport d'expertise et ont indiqué refuser leur garantie pour une partie des désordres (flaques d'eau, défauts de pente, humidité au niveau des murs), ne garantissant que les infiltrations en toiture et la détérioration des revêtements de sol.

La société Umark a refusé cette proposition partielle d'indemnisation et a consulté la SELARL [M] en vue d'engager une procédure.

Les sociétés Umark et Auxicomi, crédit- bailleur et crédit- preneur, représentées par la société d'avocats [M], ont engagé le 29 juin 2001 une procédure en référé- expertise à l'encontre de la société AGF, de M.[L], du Bureau Veritas (CEP), de la société Luxabat et de son assureur la SMABTP, de la société Sodemef ( travaux de bardage, couverture, cloisonnement intérieur, portes isolantes et serrures) et de son assureur la MAAF.

Par ordonnance de référé du 3 juillet 2001, M. [U] a été désigné en qualité d'expert.

Cet expert a déposé un rapport le 12 septembre 2004.

Préalablement au dépôt du rapport de l'expert judiciaire, par une assignation du 23 juillet 2003, la Société UMARK, 'représentée par Me [D] [P]', a assigné au fond devant le tribunal de grande instance de Paris :

- la société AGF Iart (venant aux droits de Allianz Via) prise en sa qualité d'assureur dommages ouvrage et constructeur non réalisateur,

-M.[L],

- le Bureau Veritas (venant aux droits de la société CEP),

-Me [J] liquidateur judiciaire de la société Luxabat,

-la SMABTP, assureur de M.[L], du bureau Veritas et de la société Luxabat, -les sociétés Sodemef et de Meyer et leur assureur la MAAF.

Un jugement du 22 janvier 2004 a sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise judiciaire.

A la suite du dépôt du rapport de l'expert judiciaire, la société Umark et la société Auxicomi, représentées par Me [K] [M], ont assigné en novembre 2004 en référé provision les AGF, M.[L], Me [J] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Luxabat (gros oeuvre) , la SMABTP, assureur de cette dernière, la société Sodemef (lot couverture et cloisonnement intérieur) et son assureur la MAAF.

Par ordonnance du 8 avril 2005, le juge des référés a :

- débouté les société Umark et Auxicomi de leurs demandes de provision contre les AGF,

- condamné in solidum M.[L] et la SMABTP à payer aux sociétés Umark et Auxicomi une provision de 264.648,64 euros en réparation de l'absence de pente et a condamné in solidum M.[L], la SMABTP, la société Sodemef et la MAAF à régler une provision de 250.658 euros en réparation des cloisons.

Sur appel de la MAAF, par arrêt du 11 janvier 2006, cette ordonnance a été infirmée par la cour d'appel de Paris qui a débouté la Société Umark de ses demandes provisionnelles.

Sur l'assignation au fond sus-visée du 23 juillet 2003, après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire le 12 septembre 2004, la société Umark a fait rétablir l'affaire au rôle et par jugement du 15 février 2007, le tribunal de grande instance de Paris a rejeté les demandes de la Société Umark, en considérant que les vices allégués étaient apparus en cours de chantier et étaient apparents au moment de la réception, en sorte que la réception sans réserves exonérait les constructeurs et les assureurs.

Ce jugement est ainsi motivé :

« Les opérations d'expertise ont démontré que les désordres objet de la présente instance sont la conséquence directe et indirecte des stagnations d'eau sur le sol des salles de l'établissement, ayant pour cause une faute dans l'exécution des dallages.

Il est constant que le défaut de pente des dallages a été porté à la connaissance d'UMARK en cours de chantier, environ deux mois avant la réception.

L'expert a relevé expressément que cet état de fait a été connu des intervenants à l'acte de construire, que le maître d'oeuvre avait prévu de procéder à la reprise des flaches et à la création de caniveaux et de siphons complémentaires, que ces rectifications de l'ouvrage n'ont pas été réalisées « le maître de l'ouvrage étant au courant et se satisfaisant de la situation », et que la réception aurait dû être refusée, ou prononcée avec réserves formelles.

Il résulte donc de ces éléments que le vice de l'ouvrage était visible et connu lors de la réception prononcée sans réserve le 1er septembre 1993 par UMARK.

....De surcroît, UMARK, en sa qualité de professionnel de l'industrie alimentaire, ne pouvait ignorer les conséquences de stagnations d'eau dans les salles de fabrication, ni leur prohibition ; elle s'en est toutefois accommodée en toute connaissance de cause....

...Il convient de retenir, avec les défendeurs, que la réception sans réserve a couvert le vice de l'ouvrage, et exonère les constructeurs de toute responsabilité de ce chef.

Il en découle que l'action en responsabilité décennale engagée à l'encontre des constructeurs et de leurs assureurs est dépourvue de fondement et doit être rejetée. Par voie de conséquence, le vice n'entrant pas dans les prévisions de l'article 1792 du code civil, UMARK n'a pas d'action à l'encontre de l'assureur de dommages à l'ouvrage... ».

Sur appel de ce jugement, interjeté par la Société UMARK, ' assistée de Maître [D] [P]', par un arrêt du 06 février 2009, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement du 15 février 2007 et, y ajoutant, a dit que l'action de la société UMARK à l'encontre de la société AGF en sa qualité d'assureur dommages ouvrage est irrecevable comme prescrite en application des dispositions de l'article L 114-1 du code des assurances.

A ce stade, il convient de préciser :

' que sur la demande de la société UMARK dirigée à l'encontre la compagnie AGF, en sa qualité d'assureur dommages ouvrage, la cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 06 février 2009, a déclaré la demande de la société Umark irrecevable comme prescrite pour les motifs suivants :

-' la compagnie AGF, en sa qualité d'assureur dommages ouvrage, ne conteste, devant la Cour, ni le fait qu'elle ait notifié à l'assuré, dans le délai qui lui était imparti, sa décision sur le principe de la garantie sans lui avoir, préalablement à cette notification, donné communication du rapport préliminaire d'expertise, ni que sa prise de position, frappée de nullité du fait de l'envoi concomitant du rapport préliminaire et de la notification de garantie, est assimilable à une absence de réponse dans le délai de soixante jours, ce qui entraîne les sanctions prévues à l'article L 242-1 du Code des assurances ;

-elle oppose, toutefois, l'effet extinctif de la prescription biennale de l'article L 114-1 du même code ;

-c'est à juste titre que la société Umark soutient que l'assureur dommages ouvrage ne peut plus, passé le délai de soixante jours suivant la réception de la déclaration de sinistre, opposer à l'assuré la prescription biennale déjà acquise au moment de la réception de la déclaration de sinistre ;

-toutefois, la déchéance, pour cet assureur, du droit de contester sa garantie n'empêche pas la prescription de courir à compter de l'expiration du délai de soixante jours suivant la réception de la déclaration de sinistre, moment où le droit à garantie est acquis à l'assuré par l'effet de cette déchéance,

-il est admis que le courrier par lequel la Société UMARK a formé la déclaration de sinistre a été reçu par la compagnie AGF le 17 avril 2000 ; que le délai de prescription a donc commencé à courir le 17 juin suivant ;

-le délai a été interrompu par la Société UMARK par l'assignation en désignation d'expert qui a été délivrée le 29 juin 2001 à la compagnie AGF ; qu'à compter de l'ordonnance de référé, rendue le 3 juillet suivant, un nouveau délai de deux ans à recommencer à courir pour expirer le 3 juillet 2003 ;

- l'assignation au fond par la Société UMARK n'a été délivrée à la compagnie AGF que le 23 juillet 2003, soit postérieurement à l'expiration du délai de prescription biennal autorisant l'assuré à revendiquer la nullité de prise de position de l'assureur et les sanctions en découlant, alors qu'aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu entre le 3 juillet 2001 et le 3 juillet 2003;

-en effet, ce délai n'a pas été interrompu par l'assignation par la MAAF ayant donné lieu à l'ordonnance du 13 juin 2002 qui a étendu à la Société INOVETANCHE et à son assureur la compagnie AXA France les opérations d'expertise, alors que la citation en justice, pour être interruptive de prescription, aurait dû être signifiée par la Société UMARK elle même à la compagnie AGF qui se prévaut de la prescription ;

-ce délai n'a pas plus été interrompu par le recours, par l'expert désigné par la compagnie AGF, à un métreur vérificateur en tant que sapiteur, étant, en outre, observé que la Société UMARK n'établit pas que cette désignation d'un sapiteur serait intervenue avant le 3 juillet 2003 ;

-enfin, la renonciation au bénéfice de la prescription de la part de la compagnie AGF n'est démontrée par aucun élément probant alors que cette renonciation doit être non équivoque et ne peut résulter, notamment, du simple suivi des opérations d'expertise ordonnée par la juridiction, pas plus que du maintien de la désignation de son expert pour suivre l'expertise judiciaire ;

-il s'ensuit que l'action de la Société UMARK à l'encontre de la compagnie AGF, en sa qualité d'assureur selon police dommages ouvrage est irrecevable comme prescrite en application des dispositions de l'article L 114-1 du Code des assurances ».

'Sur la demande de la société Umark dirigée contre les constructeurs, leurs assureurs et le maître d'oeuvre , la société Umark ayant fait valoir que depuis 1998 elle a été confrontée à des vices de construction de nature à compromettre l'exploitation industrielle, l'hygiène, la qualité de la production comme la sécurité des employés étant affectées, l'arrêt du 06 février 2009 rejette les demandes de la société Umark du chef de l'absence de pente des sols et confirme le jugement de ce chef . La cour retient que 'la Société UMARK, entreprise industrielle alimentaire spécialisée dans la fabrication de produits de charcuterie, qui a signé le procès verbal de réception en sa qualité de maître d'ouvrage, ne pouvait ignorer, en tant que professionnel de la charcuterie tenu comme tel à l'observation de règles rigoureuses d'hygiène et au respect de cahiers des charges stricts concernant le lavage des sols, les conséquences de cet état de fait quant à l'exercice de sa profession' et que ' le vice affectant les sols de l'unité industrielle était, lors de la réception, apparent dans ses causes, manifestations et ses conséquences pour la Société UMARK qui a prononcé cette réception sans réserve ; que la réception sans réserve exonère l'entrepreneur qui a réalisé les travaux de toute responsabilité ; que si le maître d'oeuvre est tenu d'une obligation de conseil envers le maître d'ouvrage lors de la réception, il est avéré, en l'espèce, que ce dernier a été informé du vice affectant les sols par le maître d'oeuvre avant la réception ; que ce maître d'oeuvre est, de ce fait, déchargé de toute responsabilité ».

Sur la demande de la société Umark concernant les cloisonnements intérieurs, la cour d'appel de Paris rejette également les demandes de la société Umark de ce chef au motif qu'il n'est pas démontré que les désordres affectant les cloisons compromettent la solidité de l'ouvrage en son entier ou le rendent impropre à sa destination.

Sur la garantie de la société AGF, poursuivie par la société Umark en qualité d'assureur constructeur non réalisateur, la cour retient que cette garantie ne peut être recherchée, la police CNR ne couvrant la responsabilité de l'assuré que pour des dommages de nature décennale apparus après la réception, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

Par exploit d'huissier du 15 février 2010, M. [F] [R] et Mme [I] [R], se disant subrogés dans les droits de la société Umark en vertu d'une convention de cession des droits en date du 07 décembre 2009, ont assigné devant le tribunal de grande instance de Versailles, sur le fondement de l'article 1147 du code civil, la SELARL [M] , avocat de la société Umark, afin de la voir juger responsable du dommage subi du fait de la prescription biennale acquise à l'égard de la société AGF, assureur dommages-ouvrage dont les garanties étaient définitivement acquises, et en conséquence de la voir condamner à leur payer la somme de 950.384 euros, chiffrée par l'expert judiciaire [U], avec actualisation par application de l'indice BT 01 entre le 12 septembre 1994 et le complet paiement, et ce au titre des indemnités que la société était en droit de recevoir de l'assureur dommages ouvrage.

Par jugement dont appel du 26 juillet 2011, le tribunal de grande instance de Versailles a :

-déclaré recevable l'action introduite par M. [F] [R] et Mme [I] [R] ;

-débouté M [F] [R] et Mme [I] [R] de l'intégralité de leurs demandes ;

-débouté la SELARL [M] de ses demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision ;

-condamné M. [F] [R] et Mme [I] [R] aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions signifiées le 21 février 2012 par M.[F] [R] et Mme [I] [R], auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de leurs demandes et par lesquelles ils demandent à la cour de :

-les dire recevables et fondés en leur appel,

-réformant le jugement dont appel, juger que la SELARL [M] a manqué à son devoir de conseil et qu'elle est seule responsable du dommage subi du fait de la prescription du délai de 'garantie' biennale à l'égard des AGF dont les garanties étaient définitivement acquises, en application de l'article 1147 du code civil,

-en conséquence, condamner la SELARL [M] à leur payer la somme de 950.384 euros avec intérêts de droit entre le 12 septembre 2004 et la date du complet paiement,

-les condamner à leur payer la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 11 avril 2012 par la SELARL [M] auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses demandes et par lesquelles elle demande à la cour de :

-dire irrecevable et mal fondé l'appel des époux [R],

Statuant sur son appel incident,

-infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la demande des époux [R] recevable,

-constater :

*que le bénéficiaire de la police souscrite auprès des AGF est la Société UMARK, en tant que propriétaire de l'immeuble assuré par cette compagnie en dommages ouvrage ;

*que les époux [R], ayant cédé toutes leurs actions, sont dépourvus de droits ;

* que la Société UMARK a renoncé à toutes actions judiciaires ;

*que dans les conventions conclues par les époux [R] avec leur cessionnaire, est pris en compte le litige avec la MAAF et la SMABTP, à l'exclusion du litige avec les AGF ;

-Dire les époux [R] irrecevables en toutes leurs prétentions.

Subsidiairement,

Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 15/12/2011,

Constater qu'à la date des faits, il était reconnu par la jurisprudence qu'une ordonnance étendant les opérations d'expertise à une autre partie avait un effet interruptif à l'égard de toutes les parties.

Dire qu'en l'état de cette jurisprudence, l'avocat n'a pas commis de faute.

Constater qu'il n'a pas été formé de pourvoi contre l'arrêt du 6 février 2009, ainsi que voulu par la cliente et M. [R] qui a refusé de prendre l'avis d'un avocat à la Cour de cassation comme il lui était conseillé par la société d'avocats et Me [P].

Dire que la société d'avocats [M] n'a commis aucune faute.

Constater, en tout cas, qu'il n'est pas justifié d'un préjudice né, actuel, certain et direct indemnisable.

Débouter les époux [R] de toutes leurs prétentions.

Les condamner in solidum à payer à la société [M] la somme de 10.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile , ainsi qu' aux dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 09 janvier 2014.

MOTIFS DE LA DECISION

La cour constate que devant le tribunal de grande instance de Paris dans l'instance ayant abouti au jugement du 15 février 2007 comme dans l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 06 février 2009, la société Umark est assistée de Me [D] [P], avocat au barreau de Paris.

M et Mme [R] concluent que la société Umark n'a jamais eu de lien contractuel qu'avec la SELARL [M], ce qui est confirmé par les factures de cette dernière pour l'ensemble de la procédure y compris devant la cour d'appel de Paris.

Sur ce point, la SELARL [M] indique dans ses conclusions que Maître [P] a bien été constitué devant le tribunal de grande instance Paris et a plaidé devant la cour et ce avec l'accord de M.[R] mais en tout état de cause, elle conclut expressément qu'elle a reçu les honoraires versés par la société Umark et et 'qu'elle ne conteste nullement assumer la responsabilité qu'aurait encourue Maître [P] , mais qu'elle conteste'.

M. et Mme [R] reprochent à la SELARL [M] :

-d'une part l'échec de l'action contre les AGF en qualité d'assureur dommages ouvrage, la cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 06 février 2009, ayant considéré que l'assignation au fond délivrée par la société Umark à la société AGF le 23 juillet 2003 l'a été postérieurement à l'expiration du délai de prescription biennale autorisant l'assuré à revendiquer la nullité de prise de position de l'assureur et les sanctions en découlant, alors qu'aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu entre le 03 juillet 2001 (date de l'ordonnance de référé ordonnant l'expertise faisant courir un nouveau délai de deux ans) et le 03 juillet 2003 ;

- d'autre part d'avoir manqué à son devoir de conseil sur l'opportunité de former un pourvoi à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Paris rendu le 06 février 2009, ce recours permettant selon eux de corriger la faute commise par la SCP d'avocats qui n'avait pas interrompu le délai de prescription.

La SELARL [M] soutient que la demande de M. et Mme [R] n'est pas recevable et qu'ils ne sont pas fondés à se dire subrogés, suivant une convention de cession de droits du 07 décembre 2009 dans tous les droits de la société Umark, qui aurait dû recevoir des AGF la somme de 950.384,00 €.

Il résulte du dossier :

'qu'aux termes d'un acte du 08 juin 2007 intitulé 'protocole d'acquisition de la société Finalfa sous conditions suspensives', les consorts [R], dont [F] et [I] [R], et la société BNP Paribas de Développement ont cédé à la SAS Les Braserades la totalité des actions de la Société Finalpa, laquelle détenait une participation majoritaire dans la société Umark (à savoir 24.980 actions sur 25.000) ainsi que la totalité du capital de la SAS BREDA.

'ce protocole prévoit que le prix de cession sera ajusté à la hausse comme à la baisse ; que pour le calcul de l'ajustement, en complément ou en diminution du prix, les parties ont convenu de prendre en compte notamment (article 3.2.1 b):

*'les conséquences de la procédure diligentée auprès de la SMABTP et de la MAAF qui aujourd'hui déboute la Société UMARK de sa demande et la condamne à rembourser les sommes qu'elle avait initialement perçues (515.396 €) de ces dernières seront comprises parmi les charges de la situation',

*'une provision de 25.000 € sera dotée afin de couvrir le montant des frais et honoraires liés à la procédure d'appel diligentée par la société UMARK dans le cadre du litige SMABTP et MAAF, tel que ce terme est défini à l'article 3.4 ci-après'.

L'article 3.4 de ce protocole, intitulé 'complément ou diminution du prix' définit ainsi le « litige SMABTP et MAAF » :

' Les parties rappellent que les sociétés SMABTP et la MAAF avaient été condamnées le 8 avril 2005 par le tribunal de grande instance de Paris, statuant en la forme des référés, à verser à UMARK la somme de 515.396 €. Par décision en date du 15 février 2007, le tribunal de grande instance de Paris, statuant au fond, a débouté UMARK de sa demande et l'a condamné à rembourser les sociétés SMABTP et MAAF des sommes que ces dernières avaient initialement été condamnées à lui payer (515.396 €) (ci-après le « Litige SMABTP et MAAF »). »

L'article 3.4 détaille le calcul du prix au regard de la somme de 515.396 euros.

Ainsi que le relève l'intimée, c'est en réalité en exécution de l'arrêt du 11 janvier 2006, infirmant l'ordonnance du 8 avril 2005, que la restitution des fonds devait intervenir, le jugement du 15 février 2007 ayant débouté sur le fond du litige la société Umark de ses demandes notamment à l'encontre de la SMABTP et de la MAAF sans ordonner de restitution des fonds.

Il résulte du protocole d'acquisition du 08 juin 2007 que celui-ci ne fait que prendre en compte les conséquences de l'arrêt rendu le 11 janvier 2006 par la cour d'appel de Paris, au regard du complément du prix de cession à parfaire, cet arrêt infirmant l'ordonnance du 8 avril 2005 ayant condamné in solidum M.[L] et la société Sodemef, ainsi que leurs assureurs, la SMABTP et la MAAF au paiement des provisions 264.648,64 euros et de 250.658 euros.

Pour soutenir qu'ils ont qualité à agir, M et Mme [R] se prévalent d'une 'convention de cession de droits' en date du 07 décembre 2009 et soutiennent qu'elle ne limite pas leurs droits aux seules actions contre les deux assureurs condamnés en référé et au montant des sommes allouées en référé, qu'ils sont donc recevables à être indemnisés des préjudices subis par les fautes de leur avocat.

La SELARL [M] réplique qu'ils n'ont de droits que ceux de la société Umark, qu'ils ne sont pas recevables à agir à l'encontre de l'ancien conseil de la société Umark pour ce qui concerne les conséquences de la mise hors de cause de la société AGF, assureur dommages ouvrage, alors que la convention du 07 décembre 2009 ne réglait que les conséquences de l'échec du procès mené contre les constructeurs et leurs assureurs, à savoir la SMABTP et la MAAF ; qu'en outre au 07 décembre 2009 et depuis plusieurs années, M. et Mme [R] ne détenaient plus d'actions de la société Umark ni de la société Finalpa; qu'ils ne peuvent pas prétendre agir en substitution de la société Umark, propriétaire du bâtiment et à ce titre seule bénéficiaire des garanties prévues par l'assurance dommages ouvrage ; qu'au regard d'un ouvrage affecté d'un vice apparent, le refus de garantie opposé par les AGF en sa qualité d'assureur dommages ouvrage a été accepté par la société Umark qui, dans l'acte du 07 décembre 2009, a renoncé à engager de nouvelles actions judiciaires après l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 06 février 2009.

Il résulte des termes de la 'convention de cession de droits' , datée du 07 décembre 2009, qu'elle a été conclue entre la société Umark et la SAS GD Participation d'une part et M. et Mme [R] d'autre part, le préambule de cette convention précisant que le 19 octobre 2007 la société GD Participations a acquis la totalité des actions de la société Umark détenues par [F] [G], [I] [G], [A] et [Y] [G], [N] [G] et la BNP Paribas Développement.

L'objet de cette convention est ainsi défini :

' La Société UMARK cède à Monsieur [F] [R] et Madame [I] [R] l'ensemble des droits et actions qu'elle détient à l'encontre des constructeurs et assureurs visés expressément dans l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris en date du 6 février 2009 et toutes actions en responsabilité qu'elle posséderait à l'encontre des différents conseils intervenus dans le cadre de ce contentieux.

En contrepartie Monsieur [F] [R] et Madame [I] [R] renoncent expressément à réclamer à la Société GD PARTICIPATIONS et à la Société UMARK le paiement du solde de la provision de 25.000 € qui avait été dotée lors de la détermination du prix de vente dans l'acte du 8 juin 2007 et dont l'objet était de couvrir le montant des frais et honoraires liés à la procédure d'appel diligentée par la Société UMARK dans le cadre du litige SMABTP et MAAF. '

Le préambule de la convention de cession de droits reproduit in extenso l'article 3.4 du protocole d'acquisition sus-visé du 08 juin 2007, portant sur le litige avec les assureurs SMABTP et MAAF relatif à la somme de 515.396,00 €. Par ailleurs, elle vise l'abandon par M. et Mme [R] de la somme de 8.981 euros, solde de la provision de 25.000 euros affectée au paiement des frais et honoraires liés à la procédure d'appel diligentée par la société Umark 'dans le cadre du litige SMABTP et MAAF'.

Il est également précisé dans le préambule :

'La Cour d'appel de Paris par arrêt du 6 février 2009 a confirmé le jugement de février 2007 et a donc débouté la Société UMARK de toutes ses demandes contre la SMABTP et la MAAF.

A la demande des cédants et conformément à la procédure prévue à l'article 3.4 ci-dessus du protocole, la Société UMARK ne s'est pas pourvue en cassation à l'encontre de cet arrêt.

Toutefois Mr et Mme [R] n'acceptent pas d'en rester là et envisagent d'engager des actions et en tout cas une action judiciaire à l'encontre de l'avocat de la Société UMARK en considérant qu'il a commis des fautes dans la gestion de ce dossier dont UMARK et lui-même sont fondés à demander réparation.

La Société UMARK n'entend pas quant à elle engager de nouvelles actions judiciaires avec les frais et risques que cela comporte.

Mr [F] [R] et Mme [I] [R] sont prêts et offrants d'assumer seuls toute procédure et d'en supporter toutes conséquences et les frais'.

Il résulte de l'ensemble de cette convention de cession du 07 décembre 2009 que seule est concernée l'issue du litige opposant la société Umark aux assureurs SMABTP et MAAF et non celle du litige opposant la société Umark à la société AGF en qualité d'assureur dommages ouvrage quant à la question de la garantie de cet assureur, ainsi que le fait valoir la SELARL intimée.

M et Mme [R] soutenant pouvoir agir aux lieu et place de la société UMARK, dont ils n'étaient plus actionnaires à la date de la cession de droits dont ils se prévalent, il n'est pas contesté que la société Umark , qui au début des procédures engagées en réparation des désordres invoqués agissait aux côtés de la société Auxicomi, crédit-bailleur, alors propriétaire du bâtiment et maître d'ouvrage ayant seule qualité à agir à l'encontre des AGF en tant qu'assureur dommages-ouvrage, a ultérieurement poursuivi seule les procédures, étant devenue propriétaire du bâtiment concerné par les litiges au vu d'un acte de vente du 23 juin 2007.

En sa qualité de propriétaire du bâtiment la société Umark est seule bénéficiaire des garanties prévues par l'assurance dommages-ouvrage.

En effet, l'assurance dommages ouvrage est une assurance de chose, attachée à l'ouvrage. Elle ne peut être mise en oeuvre que par le propriétaire du bien assuré au jour de la survenance du dommage et elle se transmet aux propriétaires successifs de l'immeuble.

Il ne résulte pas de l'acte de cession du 07 décembre 2009 que la société Umark ait cédé à M. et Mme [R] ses droits dans les actions ayant trait à l'assurance dommages ouvrage et en particulier la revendication de l'indemnisation due par l'assureur dommages ouvrage.

A cet égard, l'intimée fait valoir à juste titre que la somme provisionnelle de 515.306 € ne pouvait résulter que de la mise en oeuvre de la police responsabilité civile professionnelle des constructeurs souscrit auprès de la SMABTP ou de la MAAF, étant rappelé que l'ordonnance de référé du 08 avril 2005, qui a été confirmée sur ce point, avait considéré que seule la société Auxicomi en qualité de maître d'ouvrage avait vocation à demander le bénéfice des dispositions de l'article 1792 du code civil et était recevable à agir contre les AGF mais que la demande provisionnelle de la société Auxicomi devait être rejetée car sa créance contre son assureur n'était pas certaine.

En conséquence, il y a lieu de considérer que M. et Mme [R] ne sont pas recevables à exercer sur le fondement de l'article 1147 du code civil une action en responsabilité contractuelle à l'encontre de la SCP [M], avocat de la société Umark, aux lieu et place de cette dernière, pour avoir laissé prescrire l'action contre les AGF, et à réclamer ainsi à leur profit l' indemnisation à laquelle la société Umark aurait pu prétendre au titre de la garantie de l'assurance dommages ouvrage mais qu'elle n'a pas entendu poursuivre en justice à la suite de l'arrêt du 06 février 2009 et à laquelle eux-mêmes ne peuvent pas prétendre en l'absence de toute subrogation à ce titre dans les droits de la société Umark.

Il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'action introduite par M. et Mme [R],

Statuant à nouveau,

Dit M. [F] [R] et Mme [I] [R] irrecevables en leurs demandes à l'encontre de la SELARL [M],

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. et Mme [R] aux dépens de première instance et d'appel , lesquels seront recouvrés directement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

-prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Gabrielle MAGUEUR, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 11/06331
Date de la décision : 06/03/2014

Références :

Cour d'appel de Versailles 1A, arrêt n°11/06331 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-06;11.06331 ?
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