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09/04/2015 | FRANCE | N°14/09015

France | France, Cour d'appel de Versailles, 2e chambre 1re section, 09 avril 2015, 14/09015


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





2ème chambre 1ère section







ARRÊT N°







CONTRADICTOIRE

Code nac : 27J





DU 9 AVRIL 2015





R.G. N° 14/09015





AFFAIRE :

[D] [C]

C/

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

[R] [Q] épouse [C]





Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 13 Novembre 2014 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 02

N° Section : 01

RG : 14/11323



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies délivrées le :



à :



-Me Franck LAFON,



-la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT,



-Le Procureur Général

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE NEUF AVRIL DEUX MILLE QUINZE,

La ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

2ème chambre 1ère section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 27J

DU 9 AVRIL 2015

R.G. N° 14/09015

AFFAIRE :

[D] [C]

C/

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

[R] [Q] épouse [C]

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 13 Novembre 2014 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 02

N° Section : 01

N° RG : 14/11323

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies délivrées le :

à :

-Me Franck LAFON,

-la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT,

-Le Procureur Général

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF AVRIL DEUX MILLE QUINZE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [D] [C]

né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 4]

Chez Mme [J] [C]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté par Me Franck LAFON, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20140535

assisté de Me Alain CORNEC de l'AARPI VILLARD CORNEC & ASSOCIES, avocat plaidant - barreau de PARIS, vestiaire : P0150

APPELANT

****************

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

COUR D'APPEL DE VERSAILLES

[Adresse 3]

[Localité 5]

en la personne de Mme [X], substitut du Procureur

INTIMÉ

****************

Madame [R] [Q] épouse [C]

née le [Date naissance 2] 1977 à[Localité 2]Y (RUSSIE)

[Adresse 1]

Appt 3

H3J 1 E7 [Localité 3], QUÉBEC - CANADA

représentée par Me Pascal KOERFER de la SCP BOULAN KOERFER PERRAULT, avocat postulant - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 31

assistée de Me Véronique CHAUVEAU, avocat plaidant - barreau de PARIS, vestiaire : B0759

INTERVENANTE VOLONTAIRE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 Mars 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Xavier RAGUIN, Président et Mme Florence VIGIER, conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Xavier RAGUIN, Président,

Mme Florence LAGEMI, Conseiller,

Mme Florence VIGIER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

FAITS ET PROCÉDURE

Du mariage de [R] [Q] et de [D] [C] sont issus deux enfants :

- [N], né le [Date naissance 4] 2003, actuellement âgé de 11 ans,

- [B], né le [Date naissance 3] 2008, actuellement âgé de 6 ans.

Par décision du 14 juillet 2010, la cour supérieure du Québec a, dans le cadre de la procédure en séparation des époux, ordonné une résidence alternée des enfants.

En 2009 et 2010, plusieurs signalement ont été effectués auprès de la protection de la jeunesse conduisant à l'intervention judiciaire.

Par décision du 09 févier 2011, la chambre de la jeunesse de la cour du Québec a maintenu la garde des enfants auprès de la mère et ordonné que les visites du père soient supervisés par la directrice de la protection de la jeunesse.

Suite à une nouvelle décision, le père a reçu les enfants une fin de semaine sur deux.

[D] [C] a déposé une requête en divorce signifiée le 1er mars 2013 à [R] [Q].

Par décision du 24 mai 2012, la cour du Québec a, pour une période d' un an, confié [B] à sa mère, autorisé les contacts entre le père et l'enfant toutes les fins de semaine du samedi 10 heures au dimanche 18 heures, autorisé un séjour de trois semaines de l'enfant auprès de son père pendant l'été 2012 et un séjour de cinq jours pendant les vacances de Noël 2012/2013.

Par décision du 17 avril 2014, dans le cadre de la procédure de divorce, la chambre de la famille de la cour supérieur du Québec a, tout en rappelant que les deux parents exercent conjointement l'autorité parentale, confié la garde des enfants à la mère, déterminé les droits d'accès du père et renvoyé l'affaire aux 28 et 29 octobre 2014.

Par décision du 03 juin 2014, [D] [C] a été autorisé à quitter le territoire canadien pour se rendre en France du 07 au 27 juillet 2014.

Par décision du 03 juillet 2014, les juridictions québécoises ont ordonné que [N] soit inscrit dans un établissement répondant à ses besoins d'apprentissage pour la rentrée 2014/2015, le père ayant ensuite autorisé la mère à procéder à l'inscription des enfants.

Par mail du 27 juillet 2014, [D] [C] a indiqué à [R] [Q] qu'il n'entendait pas revenir au Canada.

Le 29 juillet 2014, [R] [Q] a saisi l'autorité centrale du Canada afin de solliciter le retour des enfants.

Par courrier du 13 août 2014, [D] [C] a indiqué à l'autorité centrale française saisie qu'il n'entendait pas rentrer avec les enfants au Québec au regard de l'article 13b de la Convention de LA HAYE.

Par décision du 28 octobre 2014, la cour supérieur du Québec a constaté, d'une part, l'absence du père à l'audience et, d'autre part, que les dispositions des ordonnances du 17 avril 2014 et du 03 juin 2014 étaient toujours maintenues.

Par acte du 02 octobre 2014, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nanterre a fait assigner [D] [C] en la forme des référés devant le juge aux affaires familiales de cette même juridiction sur le fondement des dispositions de la Convention de LA HAYE du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants.

Par ordonnance en la forme des référés du 13 novembre 2014, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nanterre ,a notamment :

-constaté que le non retour des enfants est illicite ;

-ordonné le retour de [N] et de [B] au Canada ;

-mis les dépens à la charge du Trésor public ;

-condamné [D] [C] à payer à [R] [Q] les frais de retour des enfants au Canada au titre des frais visés à l'article 26 de la convention de LA HAYE du 25 octobre 1980.

Par déclaration du 17 décembre 2014, [D] [C] a interjeté un appel de portée générale contre cette décision.

Par conclusions du 23 février 2015, le ministère public demande à la cour de confirmer purement et simplement en toutes ses dispositions la décision de première instance entreprise.

Dans ses dernières conclusions du 18 mars 2015, [D] [C] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de :

-déclarer irrecevables l'intervention volontaire et les conclusions de [R] [Q],

-dire la demande de retour mal fondée ;

-dire que l'Etat supportera les dépens ;

-dire n'y avoir lieu à l'application de l'article 26 de la Convention de la Haye.

Dans ses dernières conclusions du 18 mars 2015, [R] [Q], intervenante volontaire, demande à la cour de :

-confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

-écarter l'exception de l'article 13 b au visa de la législation protectrice des mineurs du Canada,

-confirmer qu'en conséquence doit être ordonné le retour immédiat vers le Canada des enfants par application de l'article 12 de la Convention ;

En conséquence confirmer :

-dire que les enfants doivent être ramenés au Canada dans les 72 heures de la signification de la décision à intervenir ;

-dire qu'à défaut pour [D] [C] d'avoir ramené les enfants au Canada dans ledit délai, qu'ils lui soient remis ou à un tiers de bonne foi à charge pour elle de ramener les enfants au Canada, il sera mis à la charge de [D] [C] une astreinte de 500 euros par jour de retard, à compter de l'expiration du délai de 72 heures suivant la signification de l'arrêt à intervenir ;

y ajoutant,

-condamner [D] [C] à lui payer la somme de 15.000 euros au titre de l'article 26 de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 ;

-condamner [D] [C] en tous les dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 19 mars 2015.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux écritures déposées et développées à l'audience.

SUR CE, LA COUR

Considérant que selon les dispositions de l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile applicables à la présente procédure, les prétentions des parties sont récapitulées sous forme de dispositif ; que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ;

Sur l'intervention volontaire de [R] [Q]

Considérant qu'il résulte des articles 325 et 554 du code de procédure civile que peuvent intervenir en cause d'appel les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité, dès lors qu'elles y ont intérêt et que l'intervention se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant ;

Qu'en l'espèce, l'objet de l'instance est le retour au Canada de deux enfants dont [R] [Q] est la mère, suite à sa saisine des autorités canadiennes et à l'action engagée à la demande de celles-ci par le procureur de la République sur le fondement de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants ;

Considérant que, contrairement aux affirmations de [D] [C], le Parquet, qui exerce une mission d'intérêt général, ne représente pas [R] [Q] dans cette procédure dans laquelle il exécute les obligations d'ordre public international qui lui sont imposées par les engagements internationaux de la France et découlant précisément de l'article 11 de la Convention de La Haye ;

Que l'action du Parquet tendant à lui restituer l'exercice de droits fondamentaux dont elle a été privée , l'intervention de [R] [Q], dont l'intérêt à rétablir un lien avec ses deux enfants est indiscutable, se rattache aux prétentions du Parquet par un lien suffisant ;

Qu'elle est recevable ;

Considérant que [D] [C] conteste la réalité de sa résidence effective à l'adresse mentionnée par [R] [Q] sur ses conclusions , selon lui 'contredite par la pièce 3' sans autre précision sur les éléments qui déterminent son affirmation ; que [R] [Q], dont il doit être rappelé qu'elle n'a disposé que de quelques heures avant l'ordonnance de clôture pour répondre au moyen d'irrecevabilité qui lui a été opposé (conclusions [D] [C] à 10 heures 08 /réplique de [R] [Q] à 17 heures 15), justifie de son adresse par la production d'une facture d'un fournisseur du 10 février 2015 ;

Que l'exception d'irrecevabilité de ses conclusions est donc mal fondée ;

Sur le caractère illicite du déplacement des enfants

Considérant que les époux et leurs enfants se sont installés au Canada à l'automne 2009, alors que [D] [C] s'était mis en position de disponibilité de son administration française pour poursuivre dans ce pays des études de biochimie ; qu'il conteste le fait que les enfants aient eu au Canada une résidence permanente puisque selon lui, l'intention de la famille était de revenir en France à l'issue de ses études, moment où il reprendrait un poste dans son administration habituelle ; qu'il soutient que l'installation au Canada n'a donc eu qu'un caractère temporaire pour une période déterminée et limitée par la durée de ses études et que depuis la fin de celles-ci, la résidence habituelle de la famille et des enfants se trouve en France ;

Considérant que selon l'article 3 de la Convention, le déplacement de l'enfant ou son non retour est considéré comme illicite :

a) lorsqu'il y a eu violation d'un droit de garde attribué par le droit de l'Etat dans lequel l'enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non-retour,

b ) que ce droit était exercé de façon effective seul ou conjointement au moment du déplacement ou du non-retour, ou l'eut été si de tels événements n'étaient survenus.

Le droit de garde visé en a) peut notamment résulter d'une attribution de plein droit, d'une décision judiciaire ou administrative, ou d'un accord en vigueur selon le droit de cet Etat.

Considérant que la résidence habituelle doit être établie en considération de facteurs susceptibles de faire apparaître que la présence physique de l'enfant dans un Etat membre n'a nullement un caractère temporaire ou occasionnel et que la résidence de l'enfant correspond au lieu qui traduit une certaine intégration dans un environnement social et familial ; que doivent notamment être pris en considération la durée, la régularité, les conditions et les raisons du séjour sur le territoire de l' État membre et du déménagement de la famille dans cet Etat, la nationalité de l'enfant, le lieu et les conditions de scolarisation, les connaissances linguistiques ainsi que les rapports familiaux et sociaux entretenus par l'enfant dans ledit Etat ;

Qu'en l'espèce, près de cinq années s'étaient écoulées depuis leur arrivée au Canada lorsque les enfants en ont été retirés par leur père ; qu'ils y étaient régulièrement scolarisés et étaient inscrits pour l'année scolaire 2014/2015 dans une école de [Localité 3] ce qui implique la constitution d'un environnement amical dans lequel ils s'étaient intégrés et dont témoignent les attestations de Mmes [O] et [U], mères de camarades de classes des enfants ; que lors de la séparation du couple, [D] [C] a saisi en juillet 2010 la justice canadienne et non la justice française, qui aurait pu être compétente en raison de la nationalité française commune des époux, de son action en divorce, démontrant ainsi que lui-même considérait qu'il existait davantage de critères de rattachement de la situation familiale au Canada plutôt qu'avec la France ; qu'il n'avait d'ailleurs conservé aucun logement en France puisqu'il s'est logé à son retour avec ses enfants chez sa mère ;

Que la résidence habituelle des enfants se situait donc au Canada immédiatement avant leur déplacement en juillet 2014 ;

Considérant qu'il résulte de la décision du 17 avril 2014 de la cour supérieure du Québec que l'autorité parentale était exercée conjointement par les deux parents mais que [R] [Q] était investie du droit de garde, [D] [C] bénéficiant sur les enfants d'un droit d'accès selon un cycle de trois fins de semaine de quatre jours ; que la décision de la même juridiction du 03 juin 2014 n'a autorisé [D] [C] à déplacer les enfants que pour une période limitée du 07 au 27 juillet 2014, les enfants devant être restitués à leur mère le 28 juillet ;

Que leur maintien en France postérieurement à cette date à l'initiative de leur père sans l'accord de leur mère qui n'y a pas acquiescé constitue un non retour illicite au sens de la Convention ;

Que les juridiction canadiennes ont par ailleurs, le 1er août 2014, attesté du caractère illicite du déplacement ou du non retour des enfants, cette décision s'imposant en application de l'article 14 de la Convention, même en dehors de toute procédure pour la reconnaissance des décisions étrangères ;

Sur l'exception au retour

Considérant selon l'article 13 de la Convention que l'Etat requis n'est pas tenu d'ordonner le retour de l'enfant lorsque la personne qui s'y oppose établit qu'il existe un risque grave que le retour de l'enfant ne l'expose à un danger physique ou psychique, ou de toute autre manière le place dans une situation intolérable ; qu'il en est de même s'il est constaté que l'enfant s'oppose au retour et qu'il a atteint un âge ou une maturité où il se révèle approprié de tenir compte de cette opinion ;

Considérant que [D] [C] soutient que le retour des enfants au Canada les exposerait à une situation intolérable puisqu'ils ont été victimes de viols perpétrés par leur mère, que la direction de la protection de la jeunesse canadienne, auquel il reproche sa partialité au profit de [R] [Q], n'a rien fait pour les protéger et n'a pour objectif que de les donner à l'adoption, qu'enfin, les conditions de vie offertes par leur mère sont inconnues ;

Considérant que [D] [C] a déposé entre les mains du procureur de la République de [Localité 5] une plainte pour viols à l'encontre de [R] [Q] le 25 juillet 2014 ; qu'il estime l'infraction constituée au regard des éléments dont il fait état et se plaint du fait que , bien que l'enquête préliminaire soit achevée et retournée depuis le mois de janvier au parquet des mineurs, il n'a pu avoir connaissance du dossier ;

Considérant que les deux époux s'opposent dans un conflit massif depuis plusieurs années dont les enfants sont devenus l'enjeu et où ils se trouvent plongés dans un conflit de loyauté majeur ;

Que selon [D] [C], les faits de viols commis par [R] [Q] sur les enfants n'auraient pour objectif que de pouvoir les lui imputer afin de l'évincer totalement de la vie des enfants ;

Considérant que les résultats des investigations menées en France ne sont pas communiqués à la cour ; que cependant, l'enquête n'est pas achevée puisque, comme en convenait [D] [C] par l'intermédiaire de son conseil le 12 janvier 2015, ce dossier doit connaître des suites au Canada puisqu'il semble que [R] [Q] n'ait pas été entendue sur les faits reprochés ;

Que les déclarations de [N] selon lesquelles sa mère 'lui a mis deux doigts dans les fesses pour accuser mon père et dire qu'il met ses parties dans mes fesses', relatées dans un compte-rendu de consultation daté du 21 juillet 2014 remis à son père par le docteur [G], chef de service à l'[1] de [Localité 1], ont amené ce praticien à conclure prudemment que l'enfant 'd'après ses dires, semble avoir été instrumentalisé par sa mère dans le conflit qui l'oppose à son père' ;

Que les déclarations de l'enfant doivent être prises avec la plus grande prudence puisqu'il se trouve au centre d'un conflit parental aigu et est exposé à des pressions directes ou indirectes, l'enfant se trouvant en outre confronté à une phase de recomposition par son père d'une cellule familiale, [N] ayant indiqué qu'il vivait 'chez sa grand-mère paternelle qui vit seule, avec son père et la compagne de son père, [R] qui est une femme sénégalaise' ;

Que si la présence d'un hématome anal constaté sur [B] le 31 mars 2014 permet à [D] [C] d'affirmer qu'il ne peut recevoir 'aucune autre explication en l'état' que des faits de viols imputables à [R] [Q], la cour constate qu'aucun élément médical n'est versé aux débats sur ce point, excluant toute autre cause possible ;

Considérant sur les critiques portées contre la direction de la protection de la jeunesse canadienne que la cour s'approprie les motifs retenus par le premier juge pour les écarter ; qu'il convient d'ajouter qu'il apparaît excessif de la part de [D] [C] de reprocher à cette institution de vouloir favoriser précisément l'adoption de [N] et [B] alors qu'il ne ressort d'aucun élément que [R] [Q] pourrait être favorable à un tel abandon ;

Considérant que l'opposition exprimée par [N] à son retour dans un écrit du 08 octobre 2014 doit être prise avec circonspection puisque l'enfant occupe une place très exposée dans le conflit parental et est soumis depuis le mois de juillet dernier à l'affection exclusive de son père, celui-ci ayant coupé toute relation des enfants avec leur mère ; qu'il ne peut à lui seul justifier le non retour des enfants ;

Considérant enfin qu'il incombe à [D] [C] de rapporter la preuve que, comme il le prétend, les conditions de vie matérielles de [R] [Q] au Québec sont de nature à exposer les enfants à une situation intolérable ; que celle-ci justifie d'une adresse, produit des photographies de chambres d'enfant équipées convenablement et plusieurs attestations dont il résulte qu'elle est une mère attentionnée, responsable et bien organisée ; que la photographie présentée en pièce 30, qui bien que non datée précisément montre des enfants d'un âge approchant celui qu'ils ont actuellement, démontre la complicité existant entre la mère et ses deux fils ;

Qu'ainsi, les exceptions opposées par [D] [C] au retour des enfants au Canada, apparaissent infondées ;

Sur la demande de remise des enfants à [R] [Q] sous astreinte

Considérant que le juge saisi dans la cadre de la Convention de la Haye ne peut qu'ordonner le retour de l'enfant et non la remise de celui-ci au parent ;

Que la demande de [R] [Q] est donc infondée ;

Sur la demande formée au titre de l'article 26 de la Convention

Considérant que le premier juge a condamné [D] [C] à supporter les frais de retour des enfants au Canada ; qu'il convient de confirmer cette décision ;

Que [R] [Q] sollicite sa condamnation à lui verser une somme de 15.000 euros correspondant aux frais de représentation en justice qu'elle a été contrainte d'exposer, ses frais de déplacement du Québec vers la France, ses frais de séjour ;

Qu'il convient de faire droit à sa demande ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE, en dernier ressort et après débats en chambre du conseil,

DÉCLARE l'intervention volontaire et les conclusions de [R] [Q] recevables,

CONFIRME l'ordonnance du 13 novembre 2014,

CONDAMNE [D] [C] à verser à [R] [Q] la somme de 15.000 euros au titre de l'article 26 de la Convention de la Haye ,

DIT que les dépens sont à la charge du Trésor public,

REJETTE toute autre demande des parties,

arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Xavier RAGUIN, président, et par Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 2e chambre 1re section
Numéro d'arrêt : 14/09015
Date de la décision : 09/04/2015

Références :

Cour d'appel de Versailles 02, arrêt n°14/09015 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-04-09;14.09015 ?
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