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07/11/2019 | FRANCE | N°18/03449

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 07 novembre 2019, 18/03449


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89A



5e Chambre











ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 07 NOVEMBRE 2019



N° RG 18/03449



N° Portalis DBV3-V-B7C-SSFC



AFFAIRE :



CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DES YVELINES



C/



[G] [H]







Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 25 Juin 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VERSAILLES

N° RG : 16

-00257/V





Copies exécutoires délivrées à :



Me Franck LAFON



CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DES YVELINES



Copies certifiées conformes délivrées à :



[G] [H]







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEPT NOVE...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89A

5e Chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 NOVEMBRE 2019

N° RG 18/03449

N° Portalis DBV3-V-B7C-SSFC

AFFAIRE :

CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

C/

[G] [H]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 25 Juin 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VERSAILLES

N° RG : 16-00257/V

Copies exécutoires délivrées à :

Me Franck LAFON

CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

Copies certifiées conformes délivrées à :

[G] [H]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

CAISSE PRIMAIRE ASSURANCE MALADIE DES YVELINES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Mme [V] (Représentant légal) en vertu d'un pouvoir général

APPELANTE

****************

Monsieur [G] [H]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618, substitué par Me HAUVILLE Marie-Pierre, barreau de VERSAILLES

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Septembre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Caroline BON, Vice présidente placée chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Carine TASMADJIAN, Conseiller,

Madame Caroline BON, Vice présidente placée,

Greffier, lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU,

M. [G] [H] exerçait la profession de conducteur de bus au sein de la société Transdev (ci-après, la Société).

Le 15 juillet 2015, il a souscrit une déclaration de maladie professionnelle au titre du tableau n°57 pour l'affection suivante : 'arthropathie acromio claviculaire dégénérative'.

Le certificat médical initial daté du 5 juin 2016 et établi par le docteur [M] [U] constatait: 'Arthropathie acromio claviculaire évolutive avec épanchement articulaire associé. Périarthrite évolutive. Chauffeur de car'.

La caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines (ci-après, la CPAM ou la Caisse) a procédé à une enquête administrative. Il en résulte que de février 1992 au 8 juin 2015, dans le cadre de son emploi de chauffeur, il était exposé à : 'conduite bus urbain tourner braquer boîte automatique principalement les boites de vitesse manuelle c'est occasionnel passage de visites médicales sans restriction. Pas de mouvements de l'épaule à 60 degrés sans soutien'. Il était conclu le 14 septembre 2015 que l'exposition au risque était reconnue mais que la condition tenant à la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer la maladie n'était pas remplie.

Le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles d'Ile-de-France (ci-après, le CRRMP) était saisi.

Le 11 janvier 2016 et en l'absence de réception de l'avis du CRRMP, la Caisse a refusé de prendre en charge l'affection déclarée au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le 14 avril 2016, le CRRMP émettait un avis défavorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par M. [H] aux motifs que 'l'analyse du poste de travail, des tâches et des mouvements effectués de façon habituelle au cours de celui-ci tels que décrits par l'enquête administrative ne permet pas de retenir un lien direct entre le travail habituel et la maladie déclarée par certificat médical du 05/06/2015'.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 mai 2016, la Caisse a confirmé sa décision de refus de prise en charge.

M. [H] a saisi la commission de recours amiable le 29 juillet 2016 d'une contestation de cette décision.

Dans le silence de la commission de recours amiable, M. [H] a saisi le 5 février 2017 le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines (ci-après, le TASS).

Depuis le 1er décembre 2017, il perçoit une pension d'invalidité de catégorie 2, le médecin conseil ayant estimé que son état d'invalidité réduisait des 2/3 au moins sa capacité de travail ou de gain.

Suite à la visite de reprise, le docteur [T], médecin du travail, émettait un avis d'inaptitude au motif que 'l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi'.

Le 30 janvier 2018, M. [H] a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par jugement en date du 25 juin 2018, le TASS a :

- ordonné un complément d'enquête,

- enjoint à la Caisse de saisir un autre enquêteur ayant pour mission de :

- convoquer et entendre M. [H], son ex-employeur et la Caisse et recueillir leurs observations,

- se faire remettre tous documents et pièces utiles à l'accomplissement de sa mission et, le cas échéant, entendre tous sachant,

- se rendre sur les lieux et, en présence de M. [H], de son ex-employeur et de la Caisse, de procéder à un examen du poste de travail de M. [H], ce dernier tant au volant d'un bus de même type que celui qu'il avait l'habitude de conduire (passage manuel des vitesses) afin de constater in situ si le maniement du levier de vitesse et le maniement du volant entraînait des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction avec un angle supérieur ou égal à 60° durant au moins deux heures par jour en cumulé ou avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé, en fournissant tous éléments descriptifs permettant à la juridiction de le vérifier, l'angle devant être calculé précisément,

- rapporter toutes autres constatations utiles à l'examen des prétentions des parties ;

- dit que la Caisse devra saisir l'enquêteur de sa mission dans le mois de la notification de la présente décision, à peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard ;

- se réserve le pouvoir de liquider l'astreinte ;

- dit que M. [H] pourra à tout moment faire rétablir cette affaire en vue de la liquidation d'astreinte ;

- sursis à statuer sur les demandes des parties ;

- renvoyé la cause et les parties à l'audience du vendredi 12 octobre 2018 à 9 heures 30 ;

- ordonné l'exécution provisoire.

Le 20 juillet 2018, la CPAM a interjeté appel de cette décision et les parties ont été convoquées à l'audience de la cour du 9 septembre 2019.

La Caisse, reprenant oralement ses écritures, demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré ;

- confirmer le bien-fondé de la décision de refus de prise en charge de l'affection déclarée le 5 juin 2015 au titre de la législation sur les maladies professionnelles ;

- ordonner, si elle l'estime nécessaire, la saisine d'un CRRMP autre que celui d'Ile-de-France;

- débouter M. [H] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

A l'audience, M. [H] réitère à l'oral ses conclusions aux termes desquelles il sollicite de la cour qu'elle :

- confirme le jugement entrepris ;

- dise et juge que le refus du 20 mai 2016 de la Caisse de reconnaissance de sa maladie en maladie professionnelle n'est pas fondé ;

- dise et juge que sa pathologie prise en charge est bien celle figurant au tableau 57 : une 'tendinopathie chronique non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM' ;

- dise et juge que les travaux qu'il effectuait sont bien ceux figurant au tableau 57 'travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé ou avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé' ;

- constate que du fait de sa maladie il a été reconnu en invalidité à 50 % ;

- constate qu'il a été rayé des effectifs de sa Société au 30 janvier 2018 au motif d'un licenciement pour inaptitude ( maladie professionnelle ) ;

- dise et juge que la maladie dont il souffre à l'épaule droite est une maladie professionnelle depuis son premier arrêt de travail et en relation avec ladite pathologie ;

- dise et juge qu'il est recevable en son action ;

- l'y dise bien fondé ;

- dise que ses droits sont des droits acquis pour le salarié.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions et aux pièces déposées et soutenues à l'audience.

MOTIFS

Sur le caractère professionnel de la maladie

La Caisse explique que l'enquête administrative a été diligentée par un inspecteur assermenté, lequel a pris connaissance de l'ensemble des éléments du dossier et a interrogé l'assuré ainsi qu'un formateur de l'entreprise et qu'il en a conclu que les conditions relevant du tableau n°57 des maladies professionnelles n'étaient pas observées s'agissant de la liste des travaux susceptibles de provoquer la maladie déclarée par M. [H]. Cette analyse a ensuite été confirmée par le CRRMP. L'appelante observe que dans son certificat médical produit en défense, le médecin du travail, qui considère que le poste de travail de M. [H] l'amenait à effectuer des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction avec un angle supérieur ou égal à 60° durant deux heures par jour, ne fait que reproduire le libellé de la condition figurant au tableau 57 des maladies professionnelles et ne justifie nullement son avis alors que, contrairement à l'enquêteur assermenté de la Caisse, il n'a pas analysé les conditions de travail de l'assuré.

Pour remettre en cause les conclusions de l'enquête administrative, M. [H] produit un avis de son médecin du travail qui indique qu'il effectue, dans le cadre de son activité, les mouvements mentionnés dans le tableau n°57 des maladies professionnelles. Il détaille également ses conditions de travail, notamment le fait qu'il a toujours conduit des cars avec des vitesses en passage manuel, et souvent sans maintien du bras.

Sur ce,

L'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose que

Les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles, la date à laquelle la victime est informée par certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident.

Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

(...)

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.

Pour bénéficier de la présomption d'imputabilité édictée par l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, il appartient à la victime ou à ses ayants droit de rapporter la preuve de l'exposition aux risques mentionnés aux tableaux, cette preuve pouvant être apportée par tous moyens ou découler de présomptions graves, précises et concordantes et étant observé que cette présomption n'a pas un caractère irréfragable et qu'il est possible à l'employeur ou à la Caisse d'apporter la preuve contraire, c'est-à-dire d'établir l'absence de relation entre l'état de l'intéressé et le risque considéré.

En l'espèce, il est établi et non contesté que la maladie déclarée par M. [H] est prévue au tableau n°57 des maladies professionnelles intitulé 'affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail'.

Par contre, l'assuré conteste le fait que la Caisse a considéré que ses conditions de travail ne répondent pas à la liste limitative des travaux énumérés par ledit tableau.

La Caisse a conclu ainsi en se fondant sur l'enquête réalisée par un inspecteur assermenté qui a procédé à l'audition de M. [H] et à celle de M. [P] [Q], formateur, et a pris connaissance d'un ensemble de documents relatifs aux conditions de travail du salarié avant de rendre son rapport. La CPAM s'est également fondée sur la réponse de l'employeur du 18 novembre 2015 au courrier envoyé dans le cadre de l'instruction de la demande de maladie professionnelle le 13 octobre 2015.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les tâches effectuées par M. [H] n'impliquaient pas de mouvement de décollement du bras par rapport au corps avec un angle supérieur ou égal à 60 degrés pendant deux heures au moins en cumulé, ni à 90 degrés pendant une heure au moins en cumulé, et que la condition tenant à la liste limitative des travaux n'est pas remplie.

Par contre, le médecin du travail, le docteur [T], avait conclu le 19 octobre 2015 que 'l'état de l'épaule droite de M. [H] paraît imputable à son activité professionnelle'.

Le 6 septembre 2016, suite à la demande de M. [H] du 1er septembre 2016, ce même médecin a attesté en indiquant qu'il 'confirme l'avis posé le 19 octobre 2015, demandé par la CRAMIF, concernant la relation entre la pathologie de votre épaule droite et votre poste de conducteur de cars et de bus ; en effet, le maniement du levier de vitesses et le maniement du volant entraînent des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction, avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé'.

Or, force est de constater que pour aboutir à cette conclusion générale et imprécise, le médecin du travail ne s'est pas rendu sur les lieux et n'a pas procédé à un examen du poste de travail de M. [H].

Ce faisant, M. [H] ne démontre pas que les conclusions de l'enquête administrative seraient erronées, pas davantage que l'avis du CRRMP dont le rôle n'est plus d'analyser si les conditions de travail correspondent à la liste limitative de travaux du tableau mais, de façon plus souple, de vérifier si l'affection est directement causée par le travail habituel de la victime.

Sans qu'il soit nécessaire de saisir un second CRRMP, ce qui n'est d'ailleurs pas sollicité par le salarié, ni d'ordonner un complément d'enquête comme l'ont fait les premiers juges, la cour considère qu'elle dispose d'éléments suffisants pour dire que la maladie déclarée par M. [H] ne bénéficie pas de la législation sur les risques professionnels.

La décision de la Caisse de refus de prise en charge était bien fondée.

Le jugement est infirmé en ce sens.

Sur les dépens

M. [H] succombant, il convient de le condamner aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines en date du 25 juin 2018 (RG n°16-00257/V) en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Confirme la décision de la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines du 20 mai 2016 ayant refusé le bénéfice de la législation sur les risques professionnels à la maladie déclarée le 15 juillet 2015 par M. [G] [H] ;

Condamne M. [G] [H] aux dépens d'appel.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Florence Purtas, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 18/03449
Date de la décision : 07/11/2019

Références :

Cour d'appel de Versailles 05, arrêt n°18/03449 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-07;18.03449 ?
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