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30/10/2007 | FRANCE | N°575

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Ct0028, 30 octobre 2007, 575


DOSSIER N 2004 / 00375
ARRÊT DU 30 OCTOBRE 2007
YR-No 2005 / 00

COUR D'APPEL D'ORLEANS

Prononcé publiquement le MARDI 30 OCTOBRE 2007, par la 2ème Chambre des Appels Correctionnels, section 2.

Sur appel d'un jugement du Tribunal correctionnel de TOURS du 03 MAI 2004.

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

X... Patrick Michel Guy
né le 30 Mars 1952 à ANGOULEME (16)
Fils de X... Michel et de J... Micheline
commercial
Marié
De nationalité française
Déjà condamné

Demeurant ...SUR MAULNE

Prévenu, appelant

, intimé
Comparant
Assisté de Maître AZOULAY Eric, avocat au barreau de PONTOISE de la scp FEDARC

LE Z...Joël Georges Emi...

DOSSIER N 2004 / 00375
ARRÊT DU 30 OCTOBRE 2007
YR-No 2005 / 00

COUR D'APPEL D'ORLEANS

Prononcé publiquement le MARDI 30 OCTOBRE 2007, par la 2ème Chambre des Appels Correctionnels, section 2.

Sur appel d'un jugement du Tribunal correctionnel de TOURS du 03 MAI 2004.

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

X... Patrick Michel Guy
né le 30 Mars 1952 à ANGOULEME (16)
Fils de X... Michel et de J... Micheline
commercial
Marié
De nationalité française
Déjà condamné

Demeurant ...SUR MAULNE

Prévenu, appelant, intimé
Comparant
Assisté de Maître AZOULAY Eric, avocat au barreau de PONTOISE de la scp FEDARC

LE Z...Joël Georges Emile
né le 26 Avril 1942 à PARIS 15, PARIS (075)
Fils de LE Z...Roger et de A...Marcelle
Retraité
Divorcé
De nationalité française
Déjà condamné

Demeurant ..., case postale 1724 1221 GENEVE (Suisse)

Prévenu, appelant, intimé
Comparant
Assisté de Maître PICARD Jean-Luc, avocat au barreau de PARIS

LE MINISTERE PUBLIC
Appelant

ME VILLA Francis pris en sa qualité de liquidateur judiciaire des sociétés EAS SERVICES et EURASPHALTE, demeurant ...

Partie civile, appelant, intimé
Non comparant
Représenté par Maître BRILLATZ Antoine, avocat au barreau de TOURS
de la scp CHAS BRILLATZ GAZZERI B...

COMPOSITION DE LA COUR,

lors des débats, du délibéré,
Président : Monsieur ROUSSEL, Conseiller faisant fonction de Président,
Conseillers : Madame PAUCOT-BILGER,
Madame C...,

arrêt prononcé par Monsieur ROUSSEL, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre

GREFFIER :
lors des débats et au prononcé de l'arrêt, Madame D....

MINISTÈRE PUBLIC :
représenté aux débats au prononcé de l'arrêt par Monsieur GESTERMANN, Avocat Général.

RAPPEL DE LA PROCÉDURE :

LE JUGEMENT :
Le Tribunal correctionnel de TOURS, par jugement contradictoire :

SUR L'ACTION PUBLIQUE :
-a rejeté l'exception de nullité de la citation
-a dit n'avoir lieu à supplément d'information ni à instituer une mesure d'expertise

-a relaxé Patrick X... du délit de :
BANQUEROUTE PAR DETOURNEMENT d'une cuve à goudron ZIVO au préjudice de EURASPHALTE

-a déclaré X... Patrick Michel Guy coupable de :
BANQUEROUTE : TENUE D'UNE COMPTABILITE INCOMPLETE OU IRREGULIERE, du 01 / 01 / 1997 au 04 / 01 / 2000, à TOURS-BALLAN MIRE (37), LA ROCHE SUR YON-LES ESSARTS (VENDEE), NATINF 020777, infraction prévue par les articles L. 626-2 5, L. 626-1, L. 626-3 du Code de commerce et réprimée par les articles L. 626-3 AL. 1, L. 626-5, L. 626-6, L. 625-8 AL. 1 du Code de commerce
BANQUEROUTE : DETOURNEMENT OU DISSIMULATION DE TOUT OU PARTIE DE L'ACTIF, du 01 / 01 / 1997 au 04 / 01 / 2000, à TOURS-BALLAN MIRE (37), LA ROCHE SUR YON-LES ESSARTS (VENDEE), NATINF 001692, infraction prévue par les articles L. 626-2 2, L. 626-1, L. 626-3 du Code de commerce et réprimée par les articles L. 626-3 AL. 1, L. 626-5, L. 626-6, L. 625-8 AL. 1 du Code de commerce
PRESENTATION DE COMPTES ANNUELS INEXACTS PAR GERANT DE SARL POUR DISSIMULER LA SITUATION DE LA SOCIETE, du 01 / 01 / 1997 au 04 / 01 / 2000, à TOURS-BALLAN MIRE (37), LA ROCHE SUR YON-LES ESSARTS (VENDEE), NATINF 000353, infraction prévue par les articles L. 241-3 3, L. 241-9 du Code de commerce et réprimée par l'article L. 241-3 du Code de commerce
et, en application de ces articles, a condamné X... Patrick Michel Guy à :
-une peine d'emprisonnement délictuel de deux ans avec SURSIS
-une amende délictuelle de 10. 000 euros
-a prononcé à son encontre l'interdiction de gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale (art L625-8 du code du commerce)

-a déclaré LE Z...Joël Georges Emile coupable de :
COMPLICITE DE BANQUEROUTE : TENUE D'UNE COMPTABILITE INCOMPLETE OU IRREGULIERE, du 01 / 02 / 1998 au 04 / 01 / 2000, à TOURS-BALLAN MIRE (37), LA ROCHE SUR YON et LES ESSARTS (VENDEE), NATINF 020777, infraction prévue par les articles L. 626-2 5, L. 626-1, L. 626-3 du Code de commerce, Art. 121-6 et 121-7 du Nouveau Code Pénal et réprimée par les articles L. 626-3 AL. 1, L. 626-5, L. 626-6, L. 625-8 AL. 1 du Code de commerce, Art. 121-6 et 121-7 du Nouveau Code Pénal
COMPLICITE DE BANQUEROUTE : DETOURNEMENT OU DISSIMULATION DE TOUT OU PARTIE DE L'ACTIF, du 01 / 02 / 1998 au 04 / 01 / 2000, à TOURS-BALLAN MIRE (37), LA ROCHE SUR YON-LES ESSARTS (VENDEE), NATINF 001692, infraction prévue par les articles L. 626-2 2, L. 626-1, L. 626-3 du Code de commerce, Art. 121-6 et 121-7 du Nouveau Code Pénal et réprimée par les articles L. 626-3 AL. 1, L. 626-5, L. 626-6, L. 625-8 AL. 1 du Code de commerce, Art. 121-6 et 121-7 du Nouveau Code Pénal

COMPLICITE DE PRESENTATION DE COMPTES ANNUELS INEXACTS PAR GERANT DE SARL POUR DISSIMULER LA SITUATION DE LA SOCIETE, du 01 / 02 / 1998 au 04 / 01 / 2000, à TOURS-BALLAN MIRE (37), LA ROCHE SUR YON-LES ESSARTS (VENDEE), NATINF 000353, infraction prévue par les articles L. 241-3 3, L. 241-9 du Code de commerce, Art. 121-6 et 121-7 du Nouveau Code Pénal et réprimée par l'article L. 241-3 du Code de commerce, Art. 121-6 et 121-7 du Nouveau Code Pénal

et, en application de ces articles, a condamné LE Z...Joël Georges Emile à :
-une peine d'emprisonnement délictuel de deux ans avec SURSIS
-une amende délictuelle de 10. 000 euros
-a prononcé à son encontre l'interdiction de gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale (art L625-8 du code du commerce)
-a prononcé à son encontre l'interdiction pendant une durée de 5 ans d'exercer une activité professionnelle d'expert comptable ou de commissaire aux comptes

SUR L'ACTION CIVILE :
-a reçu Maître E...agissant es qualités de liquidateur des sociétés EAS SERVICES et EURASPHALTE en sa constitution de partie civile ;
-lui a donné acte de ce qu'il se réservait de solliciter l'indemnisation du préjudice résultant pour ces deux sociétés des infractions commises par Patrick X... et Vincent F...devant la juridiction civile
-a condamné Joël G...à payer à la partie civile :
-la somme de 80. 000 euros à titre de dommages-intérêts
-la somme de 1. 000 euros en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale
-a rejeté toutes autres conclusions
-a condamné en outre Joël G...aux dépens de l'action civile.

LES APPELS :
Appel a été interjeté par :
Monsieur G...Joël, le 03 Mai 2004, son appel portant tant sur les dispositions pénales que civiles
M. le Procureur de la République, le 05 Mai 2004 contre Monsieur G...Joël
Monsieur ME VILLA Francis, le 10 Mai 2004 contre Monsieur G...Joël, son appel étant limité aux dispositions civiles
Monsieur X... Patrick, le 12 Mai 2004, son appel portant tant sur les dispositions pénales que civiles
M. le Procureur de la République, le 12 Mai 2004 contre Monsieur X... Patrick

Vu l'arrêt de la Cour de Céans en date du 10 mai 2005 qui a :
-reçu les appels, réguliers en la forme,
-Avant dire droit,
afin de permettre à la Cour de déterminer si les infractions ci-dessus détaillées à la prévention, sont constituées et si elles peuvent être imputées aux prévenus,

-a ordonné une expertise judiciaire
-a sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport et renvoie l'affaire à l'audience du mardi 17 janvier 2006, à 14 heures,
-a donné acte à Messieurs X... et LE Z...de ce qu'ils avaient, chacun, donné mandat à leur conseil respectif, avec faculté de subdélégation, pour les représenter aux prochaines audiences, dans l'hypothèse où l'éventuelle prolongation du délai d'expertise amènerait la Cour à, le cas échéant, renvoyer à nouveau l'affaire à une audience ultérieure.

Vu le rapport d'expertise en date du 27 mars 2007

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l'audience publique du 11 SEPTEMBRE 2007

Ont été entendus :

Monsieur ROUSSEL en son rapport

Le Ministère Public a fait savoir qu'il renonçait à son appel concernant la relaxe prononcée pour Patrick X... du délit de BANQUEROUTE PAR DETOURNEMENT d'une cuve à goudron ZIVO au préjudice de EURASPHALTE

LE Z...Joël et X... Patrick en leurs explications.

Maître BRILLATZ Antoine, Avocat de la partie civile en sa plaidoirie, à l'appui des conclusions déposées sur le bureau de la Cour.

Le Ministère Public en ses réquisitions.

Maître AZOULAY Eric, Avocat du prévenu en sa plaidoirie, à l'appui des conclusions déposées sur le bureau de la Cour.

Maître PICARD Jean-Luc, Avocat du prévenu en sa plaidoirie, à l'appui des conclusions déposées sur le bureau de la Cour.

X... Patrick et LE Z...Joël à nouveau ont eu la parole en dernier.

Le Président a ensuite déclaré que l'arrêt serait prononcé le 30 OCTOBRE 2007.

DÉCISION :

La société EURASPHALTE, spécialisée dans la conception et la construction de centrales d'enrobage à goudron a été placée en redressement judiciaire le 4 janvier 2000, puis déclarée en liquidation judiciaire le 25 avril 2000, après qu'elle ait arrêté un bilan au 31 décembre 1999 faisant état de fortes pertes.

À la suite des informations communiquées par le mandataire liquidateur, Me E..., ainsi que des résultats d'une expertise judiciaire confiée à M. H..., une enquête était confiée au SRPJ d'Orléans, qui était saisi simultanément de la situation d'une société filiale EAS SERVICES, et d'une autre filiale, la société AB TECHNICS, également en difficulté.

Les reproches adressés aux dirigeants s'articulaient sur le fait que :

-la société EURASPHALTE avait publié un bilan clos au 31 août 1997 faisant état d'un bénéfice de 481 377 F, un bilan clos au 31 décembre 1998 faisant état d'un bénéfice de 547 720 F et un bilan clos au 31 décembre 1999, établi sous la direction d'un expert judiciaire, faisant état d'une perte de 6 003 412 F, l'importance de cette perte paraissant suspecte au regard des résultats précédents.
-La société EAS SERVICES avait publié un bilan clos au 31 août 1997 faisant état d'un bénéfice de 25 429 F et un bilan clos au 31 décembre 1998, faisant apparaître une perte de 1 556 733 F, perte considérée également comme suspecte.
-La société AB TECHNICS avait publié un bilan clos au 31 août 1997 faisant état d'un bénéfice de 34 249 F et un bilan clos au 31 décembre 1998, dégageant une perte de 5 062 033 F.

L'enquête de police tentait d'établir que des manipulations et des omissions volontaires dans la comptabilité avaient permis de retarder la mise en évidence d'une situation de cessation des paiements dès 1997.

Dans cet esprit, les enquêteurs relevaient que la société EURASPHALTE avait repris les activités de la société AB TECHNICS, qui était alors un simple atelier de mécanique générale installé en Vendée, le 17 juillet 1996, en vue de la fabrication d'éléments de centrales d'enrobage et de travaux techniques de remise en état ; que cependant à la même époque EURASPHALTE était déjà en difficulté, pour afficher une perte de 2 747 156 F au 31 août 1996 ; que la situation de sa filiale EAS SERVICES était tout aussi problématique, celle-ci enregistrant une perte de 1 413 109 F ; que cette situation ne permettait pas à EURASPHALTE d'assumer correctement les besoins en fonds de roulement de l'usine AB TECHNICS, alors par ailleurs qu'une dette fiscale importante se faisait jour ; que bien plus, AB TECHNICS subissait une ponction de trésorerie indue sous la forme d'une minoration du prix des prestations qu'elle facturait à EURASPHALTE ; que cette sous-facturation, source de déséquilibre financier pour AB TECHNICS, avait été dénoncée par le comptable salarié de cette société, mais que cela lui avait valu d'être licencié ; que dans ce contexte le cabinet d'expertise comptable de M. GENET avait obtenu des dirigeants qu'ils saisissent le tribunal de commerce de Tours ; que M. Jacques I...avait alors été désigné en qualité de mandataire ad hoc ; que deux projets de bilan pour l'exercice clos au 31 août 1997 avaient été faits, présentant des résultats différents ; qu'en définitive le bilan déposé au greffe du tribunal de commerce au titre de cet exercice faisait apparaître un bénéfice de 481 377 F ; qu'en début d'année 1998 un nouveau personnage entrait en scène, en la personne de Joël G..., appelé à la rescousse par Patrick X..., dirigeant d'EURASPHALTE ; qu'aussitôt l'intéressé prenait le contre-pied du projet comptable de M. J..., considérant que le bilan consolidé du groupe EURASPHALTE était bénéficiaire de 72 000 F et que le passif à court terme était couvert par l'actif circulant ; que cette analyse était cependant vivement critiquée par M. J...; que sur ces bases, un règlement amiable était accordé par le tribunal de commerce ; que M. J...était alors déchargé de sa mission d'expert-comptable et remplacé par M. G....

Au terme de l'enquête, l'officier de police judiciaire estimait être en présence de différentes irrégularités, ainsi intitulées dans son rapport de synthèse :

1. Malversations concernant le bilan AB TECHNICS clos au 31 décembre 1997 :

L'enquêteur faisait valoir que Patrick X... avait mis en place un « pillage organisé » de la société AB TECHNICS en imposant, en dépit de l'avis de l'ancien comptable salarié de la société une facturation horaire des travaux commandés par EURASPHALTE à AB TECHNICS de 114,82 F, alors que le seuil de rentabilité passait par un minimum de 160 F de l'heure ; que l'expert-comptable, M. GENET, à l'insu duquel M. Patrick X... avait ainsi opéré, avait néanmoins procédé à la rectification qui s'imposait en termes d'une facturation complémentaire de 2 162 631 F ; que cette correction et diverses autres avaient pénalisé le résultat d'EURASPHALTE à hauteur de 940 186 F, mais qu'elles avaient été annulées par une écriture en « opérations diverses » ; que différentes autres opérations contestables affectant les comptes « travaux en cours » ; « variation des stocks » et « charges à payer » avaient permis de « regonfler » artificiellement le résultat de 1 995 336 F ; que d'autres manipulations ayant pour effet de « gonfler » le stock et d'inventer des immobilisations, notamment dans le poste « frais de recherche et de développement », avaient, ajoutées aux précédentes, abouti à la création d'un bilan faux, faisant état d'un bénéfice de 34 249 F, qui avait été déposé au greffe du tribunal de commerce de Tours le 26 août 1998.

2. Malversations concernant le bilan EAS SERVICES clos au 31 août 1997 :

Il était relevé que, dans le cadre de la manipulation des comptes d'AB TECHNICS, trois factures émises au nom de cette dernière par EAS SERVICES pour un montant total de 1 446 982 F avaient été exclues des comptes, ceci ayant eu pour effet de priver EAS SERVICES de cette somme et de la placer « dans le rouge » ; qu'il avait alors été créé, pour compenser cette perte, une fausse écriture affectant le compte « travaux en cours » à hauteur de ce même montant, alors que le débiteur, la société EURASPHALTE, avait comptabilisé seulement à ce titre 995 000 F ; qu'en définitive, le bilan ainsi falsifié avait été déposé au greffe du tribunal de commerce de Tours le 26 août 1998 faisant état d'un bénéfice de 24 429 F ;

3. Malversations concernant le bilan EURASPHALTE clos au 31 août 1997 :

Les enquêteurs estimaient que les manipulations avaient concerné le compte « frais de recherche de développement », inscrit à l'actif du bilan pour un faux montant de 1 859 161 F, alors que sa valeur comptable nette était seulement de 1 399 161 F ; que le compte « client litigieux » ne figurait pas au bilan pour 2 736 000 F comme il aurait dû l'être ; qu'une provision pour risques de fin de chantier avait été indûment éliminée alors que le risque s'était réalisé plus tard ; qu'une autre provision, de 1 400 000 F instituée pour déprécier le compte courant débiteur de la filiale EAS SERVICES avait été éliminée ; qu'une provision pour intérêts de retard en matière fiscale avait été réduite de 1 052 159 F à 650 000 F ; que le compte « stocks matière première » avait été « gonflé » pour passer de 1 811 405 F à 2 035 405 F ; que le même « gonflement » avait concerné le compte « travaux en cours » qui était passé de 637 000 F à 947 000 F ; qu'à ces éléments s'ajoutait la minoration des factures AB TECHNICS à hauteur de 1 995 336 F ; que ces manipulations faisaient remonter frauduleusement d'environ 8 millions de francs le résultat comptable du bilan qui était déposé au greffe le 8 juin 1998, avec un bénéfice de 481 377 F ;

S'agissant de l'imputation des responsabilités, il était relevé que Patrick X... avait déclaré s'en être remis à Joël K..., dont la double qualité d'expert-comptable et de commissaire aux comptes l'avait rassuré et qu'il avait cependant reconnu avoir imposé une minoration de ses recettes à AB TECHNICS.

L'enquêteur regrettait cependant le positionnement de Joël K...qui considérait notamment que « rien n'exigeait la passation de provisions » et qualifiait son attitude de « malsaine ».

4. Pillage d'AB TECHNICS assurant la survie d'EURASPHALTE

Il était rappelé à ce sujet que les travaux du comptable salarié de la société avaient montré de manière suffisamment probante que l'heure de travail devait être facturée à un minimum de 160 F ; que le chiffre de 181 F avait même été avancé ; que le choix avait néanmoins été fait par Patrick X... d'établir la facturation sur la base de 114,81 F ; que ceci avait naturellement eu pour effet de transférer les pertes d'EURASPHALTE sur AB TECHNICS ; qu'au 31 août 1997 la facturation des travaux AB TECHNICS aurait dû ainsi être de 11 408 000 F, alors qu'elle avait été seulement de 8 943 000 F.

5. Autres faits

Il était relevé qu'une cuve de 80 m3, de marque ZIVO, avait été retrouvée chez
un tiers dans le cadre d'une procédure de gendarmerie, alors qu'elle appartenait à la
société EURASPHALTE et qu'elle aurait dû, à ce titre, être incluse dans
l'inventaire de la liquidation judiciaire.

L'enquêteur mettait en doute la validité juridique du montage ayant eu pour effet,
de la part de la société EURASPHALTE qui était le propriétaire initial de la cuve,
de vendre celle-ci à un tiers tout en continuant à l'utiliser sous le régime de la
location.

Sur la base de cette enquête, les prévenus ont été poursuivis pour :

-Patrick X... avoir, entre le 1e janvier 1997 et le 4 janvier 2000, étant gérant de droit et de fait des sociétés EURASPHALTE, AB TECHNICS et AB TECHNICS, mises en redressement puis en liquidation judiciaire, commis le délit de banqueroute en tenant une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière, en détournant ou dissimulant tout ou partie de l'actif social de deux sociétés, notamment en faisant travailler à perte ou sans rémunération la société AB TECHNICS au profit d'EURASPHALTE et en détournant une cuve à goudron ZIVO au préjudice d'EURASPHALTE et commis le délit de présentation de faux bilans, clos au 31 août 1997 pour ces sociétés puis clos le 31 décembre 1998 pour la société EURASPHALTE,
-Joël K..., s'être rendu complice du délit de banqueroute par tenue d'une comptabilité incomplète ou irrégulière, s'être rendu complice du délit de banqueroute par détournement d'actif commis au préjudice de la société AB TECHNICS et s'être rendu complice du délit de présentation et publication des faux bilans clos au 31 août 1997 et 31 décembre 1998.

Statuant par le jugement déféré, le tribunal, avalisant l'enquête de police a statué que ci-dessus rappelé.

L'affaire a été examinée une première fois par la cour qui a décidé de nommer un expert en comptabilité, en la personne de M. Jean L...lequel a été invité à donner tous éléments permettant d'apprécier si les infractions poursuivies étaient ou non constituées.

M. Jean L...a achevé son rapport le 27 mars 2007 et a déposé celui-ci au greffe de la cour où il a été mis à la disposition des parties.

À l'audience du 11 septembre 2007, où l'affaire a été rappelée, les prévenus et la partie civile ont déposé des conclusions.

Me Francis E..., agissant en sa qualité de liquidateur des sociétés EAS SERVICES et EURASPHALTE a fait valoir que les trois sociétés concernées par la poursuite étaient dirigées, en droit ou en fait par les deux prévenus ; qu'après le prononcé de la liquidation judiciaire le patrimoine de la société EAS SERVICES a été jugé confondu avec celui de la société EURASPHALTE ; qu'en l'état des pièces du dossier et des aveux de M.X..., la culpabilité de ce dernier ne fait aucun doute ; que celle de M. K...est également établie ainsi que l'a montré l'expertise ordonnée par la cour ; que les infractions ont permis la poursuite d'une exploitation déficitaire, aggravant le passif de manière considérable.

Il demande à la cour de lui donner acte de ce qu'il se réserve le droit de solliciter l'indemnisation de son préjudice par M.X... devant la juridiction civile, et de condamner M. K...à lui payer la somme de 600 000 euros à titre de dommages-intérêts, outre 2500 euros par application de l'article 475-1 du code de procédure pénale.

Monsieur l'avocat général déclare se désister de son appel, s'agissant de la relaxe prononcé par le tribunal à propos de la cuve ZIVO. Il demande à la cour de puiser les éléments nécessaires à sa conviction dans le rapport et dans l'audition détaillée de M. M..., de même que dans l'audition de M. J....

Il requiert la confirmation du jugement entrepris et demande que la durée de l'interdiction de gérer soit précisée.

Dans ses conclusions, le conseil de M. Joël G...fait valoir que ce dernier n'a jamais été dirigeant de fait des sociétés concernées, ni même leur expert-comptable, sa mission ayant été celle d'un conseiller financier ; que s'agissant de l'infraction de présentation de faux bilan qui lui est reprochée pour la société EURASPHALTE, il est à noter que cette société n'a pas déposé de bilan pour l'exercice clos le 31 décembre 1998 ; que dès lors l'infraction poursuivie n'est pas constituée ; que s'agissant du délit de banqueroute au préjudice de la société AB TECHNICS, les faits ont eu lieu en 1997 et ne constituent pas une infraction pénale puisque le détournement allégué a été commis avant l'état de cessation de paiements ; que le fait que des situations comptables intermédiaires aient été irrégulières ne tombent pas sous le coup de l'article L. 626-2 du code de commerce ; que l'expert désigné ne relève d'ailleurs aucune irrégularité dans la comptabilité de la société ; que s'agissant des facturations critiquées par l'enquêteur de police, l'expert a considéré qu'il s'agissait d'un choix économique sans conséquences au niveau de la situation du groupe de sociétés ; que M. G...est intervenu comme expert financier le 1e février 1998, chargé notamment d'étudier la possibilité d'un rapprochement industriel avec CFH ; qu'il n'y a eu aucune tromperie lors de l'établissement des comptes des exercices s'achevant le 31 août 1997, puisque ces derniers ont été établis après discussion avec le mandataire ad hoc et alors que les modifications comptables conseillées par M. G...ont fait l'objet de commentaires qui ont été communiqués à M. J..., expert-comptable ; que la société EURASPHALTE disposait d'ailleurs des services d'un actionnaire ayant une grande notoriété, puisqu'il s'agissait de M. N..., ancien président du tribunal de commerce ; que dès lors qu'aucun des intervenants, parfaitement informés, n'a émis de critique sur les comptes de l'exercice 1997, il n'y a pas lieu de les considérer comme faux ; que d'ailleurs, selon l'expert judiciaire les comptes pour 1997 ne sont pas entachés d'irrégularité ; que concernant les comptes 1998 de la société EURASPHALTE, l'expert considère qu'il existe des inexactitudes importantes ; que cependant les comptes EURASPHALTE ont été arrêtés dans le sens de la continuité de l'exploitation de la société, dès lors qu'il n'y avait pas de raison de constituer une provision pour risques à cette époque et alors qu'une dette envers le trésor public provisionnée à hauteur de 1 877 000 francs a fait l'objet d'un dégrèvement, ce qui a rendu disponible la somme correspondante ; qu'il n'y avait pas lieu de constituer une provision pour l'exploitation déficitaire des filiales ni pour la dépréciation des titres de participation ; que pour ces derniers une provision pour risques de 3 millions de francs incluant la dette fiscale abandonnée, permettait de parer à toute éventualité ; que surtout la société était sous la surveillance officielle d'un mandataire de justice ; que sur le plan de l'élément intentionnel, l'expert a relevé qu'il n'y a pas eu d'enrichissement personnel ; que, d'autre part, l'intention devant s'apprécier au jour où les faits ont été commis, il n'est pas établi que les prévenus savaient que la société était condamnée ou qu'ils ont accompli délibérément des actes en vue de la maintenir en vie artificiellement ; que les faits de banqueroute ne sont pas établis, puisque la comptabilité était régulière et complète ; que l'expert judiciaire ne peut considérer, comme il le fait que le bilan 1998 est irrégulier alors qu'il admet que la comptabilité ne peut être critiquée.

Quant aux demandes civiles, il est fait valoir que depuis le 28 janvier 2003 Messieurs X... et F...sont respectivement liquidateurs amiables des sociétés EURASPHALTE et EAS SERVICES ; que la nomination tardive de Me E...ne peut couvrir l'irrégularité de sa constitution de partie civile, le parquet ayant déjà été entendu en ses réquisitions ; que l'état liquidatif présenté au tribunal contient de nombreuses erreurs, notamment sur une créance fiscale et sur des créances bancaires ; que la cour n'est pas en mesure de connaître l'état du passif de chacune des sociétés alors même qu'aucune confusion de patrimoine n'a été prononcée ; que M. J...ayant chiffré la perte d'EURASPHALTE en cas de liquidation pour les comptes arrêtés au 31 août 1997 à 7 millions de francs, la preuve est faite que la poursuite de l'exploitation n'a pas aggravé la situation de cette société, Me E...faisant état dans ses conclusions de ce que la perte constatée au 31 décembre 1999 a été moindre, soit 6 003 412 F.

Dans ses conclusions, le conseil de M.X... fait valoir que la comptabilité des sociétés EURASPHALTE et AB TECHNICS a toujours été tenue régulièrement, les comptes annuels ayant été scrupuleusement publiés ; que d'ailleurs l'enquêteur de police ne décrit aucun manquement à la tenue d'une comptabilité régulière concernant ces deux sociétés ; qu'au surplus la comptabilité était entre les mains de professionnels qualifiés ; que les conclusions de l'expert judiciaire nommé par la cour montrent bien que la poursuite n'est pas fondée sur ce point, alors par ailleurs que les comptes ont été faits sous l'égide de M. I...mandataire ad hoc désigné par le tribunal de commerce ; que le délit de banqueroute par détournement ou dissimulation d'actif n'est pas davantage établi ; qu'en effet la société EURASPHALTE avait donné sa caution pour un emprunt de 2 millions et demi contracté par la société AB TECHNICS, en sorte qu'elle n'avait aucun intérêt à la disparition de cette dernière ; que le manque à gagner d'AB TECHNICS ne constitue pas un détournement d'actifs ; que la baisse de tarification s'explique par la baisse des prix consécutive et une diminution des compétences et des coûts chez AB TECHNICS ; que l'expert a lui-même relevé que la situation doit s'apprécier dans le cadre d'une activité économique de groupe, EAS SERVICES et AB TECHNICS étant filiales à 100 % d'EURASPHALTE et concourant pour une large part à la production de la société mère ; que quant à l'infraction de publication de faux bilans, celle-ci ne peut être constituée que lorsqu'il y a publication des comptes ; que les comptes EURASPHALTE au 31 décembre 1998 n'ont pas été déposés au greffe du tribunal de commerce de Tours et n'ont donc pas été publiés ; que pour les bilans clos au 31 août 1997 l'enquêteur s'est basé sur des documents manuscrits non datés, donc non probants, alors que le comptable BELAUD a reconnu qu'il participait à l'établissement des comptes annuels, ce en quoi la responsabilité de M.X... ne peut être recherchée pour des écritures dont il n'est pas prouvé qu'elles procèdent de sa décision ; que l'expert judiciaire n'a pas retenu le délit de publication de faux bilans ; que s'agissant des comptes EURASPHALTE, le bilan 31 décembre 1998 n'a pas été déposé, ainsi qu'il a été dit, alors par ailleurs que la liquidation intervenue a rejailli sur les comptes qui ont été présentés en valeur de liquidation et non en valeur de continuation, certains actifs ayant été considérés comme nuls ; que si l'expert judiciaire considère qu'il aurait dû être établi un complément de provision sur les risques clients, notamment par rapport au 31 août 1997, tout au plus peut-il être reproché au comptable de la société EURASPHALTE de ne pas avoir provisionné les frais de recherche et de développement en valeur liquidative, ce qui n'est cependant pas très significatif ; que sur l'absence de provision pour faire face aux pertes des filiales, EURASPHALTE n'ayant aucune créance sur elles, elle n'était pas tenue de constituer de provision à cet égard.

Quant aux demandes civiles, le conseil de M.X... fait valoir qu'il a été nommé liquidateur amiable de la société EURASPHALTE en date du 28 janvier 2003 et que M. F...a été nommé liquidateur amiable de la société EAS SERVICES ; que Me E...ne peut se prévaloir de la qualité de liquidateur judiciaire desdites société, en sorte que ces demandes sont irrecevables.

SUR CE, LA COUR,

Sur les délits de banqueroute par détournement d'actifs,

Il convient de donner acte au ministère public de ce qu'il se désiste de son appel concernant le chef de jugement concernant la relaxe prononcée à propos du délit de banqueroute par détournement d'actif concernant une cuve à goudron.

Le second aspect des poursuites exercées contre les prévenus de ce chef, concerne le fait d'avoir fait travailler à perte ou sans rémunération suffisante la société AB TEHNICS au profit d'EURASPHALTE.

En droit, pour échapper aux sanctions, le concours financier apporté par les dirigeants de droit ou de fait d'une société à une autre entreprise d'un même groupe dans laquelle ils sont directement ou indirectement intéressés, doit être dicté par un intérêt économique, social ou financier commun, apprécié au regard d'une politique élaborée pour l'ensemble de ce groupe.

Si, ainsi que cela a été jugé, ces conditions ne sont pas remplies en l'absence de politique de groupe caractérisée, ou en l'absence de plan d'ensemble ou de justification économique, de telles circonstances interdisant la prise en considération d'un groupe ne se rencontrent pas en l'espèce.

En effet, l'interdépendance économique entre les différentes sociétés concernées par les poursuites était forte ainsi que l'ont fait valoir les prévenus et que cela est clairement exprimé par un professionnel peu suspect de complaisance à l'égard de ces derniers, puisqu'il s'agit de M. Sylvain H..., expert-comptable mandaté par le tribunal de commerce de Tours pour examiner les comptes EURASPHALTE (audition par l'officier de police judiciaire le 22 septembre 2000) : « au cours de cette mission, j'ai constaté que les trois sociétés EURASPHALTE, AB TECHNICS et EAS SERVICES étaient totalement impliqués financièrement, économiquement et qu'elles étaient toutes trois interdépendantes ».

Il existait d'ailleurs des garanties données par l'une envers les autres, ceci donnant encore plus de corps à la notion d'unité économique formée entre les trois sociétés.

Cet aspect des choses a été justement mis en évidence par l'expert-comptable désigné par la cour, qui en a conclu que les facturations entre sociétés du groupe étaient sans incidence sur l'activité consolidée.

Ses travaux ont également montré, de manière circonstanciée, que des erreurs de fabrication d'AB TECHNICS, qui travaillait pour EURASPHALTE, avaient induit un coût de fabrication supplémentaire qu'il avait été décidé de répercuter sur AB TECHNICS et l'expert a relevé à ce propos : « il fallait donc, en raison de la mauvaise qualité des prestations fournies par AB TECHNICS, faire un choix au sein du groupe de sociétés ne formant qu'un tout au plan économique, de l'imputation des pertes liées à cette « non qualité ». Le choix a été fait de la faire supporter à l'unité de production. Un choix différent, en imputant à la société mère aurait-il changé le cours de l'histoire du groupe ? Selon toute vraisemblance, non ».

Ils ne doit donc pas s'agir pour la cour de sanctionner des irrégularités en ramenant les prescriptions de la loi relatives au délit de banqueroute à des exigences plutôt formelles, mais de rechercher s'il y a eu rupture d'équilibre entre les engagements respectifs des diverses sociétés concernées.

Sur ce point, la conclusion qui s'impose est qu'il existait des raisons objectives et acceptables de procéder ainsi qu'il a été décidé de le faire, ne fût-ce qu'en raison des problèmes de qualité.

La relaxe s'impose de ce chef.

Sur le délit de banqueroute par tenue de comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière,

La poursuite a été malheureusement arrêtée sur la base d'une simple enquête de police, dont il n'est pas exagéré de dire qu'elle fait une part importante aux affirmations péremptoires en matière de tenue de la comptabilité et, en ce domaine les affirmations du tribunal ne sont guère étayées.

Procédant à un examen complet des comptes avec le recul nécessaire, l'expert-comptable mandaté par la cour a considéré que les comptes annuels arrêtés au 31 août 1997 pour AB TECHNICS étaient très différents de ceux présentés par M. J...dans leurs composants, mais qu'ils étaient très peu différents au niveau du résultat net comptable en résultant. Il a également considéré que cet arrêté de compte lui paraissait respecter les règles de sincérité des comptes, ajoutant : « étant entendu qu'un certain nombre d'écritures, notamment de provisions présentent un caractère aléatoire qui peut amener deux praticiens avoir des interprétations différentes ».

Un avis semblable a été exprimé à propos des Comptes EAS SERVICES pour le bilan arrêté au 31 août 1997, l'expert soulignant que les comptes avaient été établis dans un contexte de continuité d'exploitation et que l'incidence des suggestions faites par M. G...avait entraîné une différence non significative de 22 576 euros par rapport au projet établi par M. GENET.

S'agissant par ailleurs des comptes annuels d'EURASPHALTE arrêtés au 31 août 1997, l'expert a considéré qu'il existait une différence notable entre le projet de compte de M. GENET et celui arrêté sous l'égide de M. K...; que cependant l'analyse des écarts entre les postes des deux bilans ne permettait pas d'identifier la surévaluation d'actif de 7 200 000 F visés dans la poursuite, alors que la comptabilisation d'une somme 1 859 161 F au titre des frais de recherche de développement était imputable seulement à l'initiative de M. J..., ce en quoi M. G...a été injustement mis en cause.

Faute de preuve de manipulations comptables imputables aux prévenus ayant eu pour effet de donner une image fausse du patrimoine de la société EURASPHALTE au 31 août 1997, la poursuite ne peut aboutir à une condamnation pénale, en ce qui concerne tant M.X... que M. G....

Reste la situation du bilan de la société EURASPHALTE arrêté au 31 décembre 1998, à propos duquel l'expert judiciaire fait de nombreuses réserves.

Mais la poursuite dirigée contre M. DEVAUTOUR concernant ce bilan vise le fait, par lui, : « d'avoir (…) Sciemment présenté puis publié au tribunal de commerce de (..) TOURS (le) 13 / 6 / 1999, un bilan clos au 31 / 12 / 1998 (…) ».

La date des faits, comme étant celle du 13 juin 1999, résulte du procès-verbal de synthèse de l'officier de police judiciaire.

En droit, l'infraction n'est consommée que si le bilan inexact a été publié ou présenté aux associés ou aux actionnaires. Selon la jurisprudence, le délit n'est donc pas caractérisé en l'absence de présentation des comptes litigieux en assemblée générale et de preuve de la volonté du dirigeant de communiquer des comptes inexacts pour dissimuler la véritable situation de la société.

Or, les pièces du dossier montrent qu'une telle présentation n'était toujours pas intervenue à la date du 13 juin 1999.

Ceci résulte sans ambiguïté de la requête présentée par le gérant de la SARL EURASPHALTE, au président du tribunal de commerce de TOURS, reçue au greffe de cette juridiction le 16 juin 1999 par laquelle celui-ci a sollicité l'autorisation de proroger d'un mois, soit au 31 juillet 1999, le délai au terme duquel devait être réunie l'assemblée générale annuelle appelée à statuer sur les comptes de l'exercice écoulé.

D'autre part, par publication, il faut entendre tout procédé quelconque d'information collective destiné à porter à la connaissance des tiers ou des membres de la société les comptes annuels, dans le cadre de l'administration de la société et pour les besoins de celle-ci. Le dépôt des comptes au greffe du tribunal de commerce illustre une telle publicité.

En l'espèce la poursuite vise exclusivement le fait de cette publication au greffe, ainsi que cela résulte du libellé de la poursuite, rappelé ci-dessus.

Or, le bilan incriminé n'a jamais été publié au greffe du tribunal de commerce de TOURS, ainsi que cela résulte du procès-verbal établi par l'officier de police judiciaire lui-même le 28 janvier 2002 (P.V. numéro 38) qui recense les documents qui lui ont été remis par le greffe relativement à la publication des bilans des trois sociétés concernées pour les exercices clos entre le 30 avril 1994 et le 31 décembre 1998.

La cour ne pouvant étendre sa saisine à des faits de publication autres que celui du dépôt au greffe visé dans la poursuite, il en résulte que M.X... a été retenu à tort dans les liens de la prévention, de ce chef.

M. G...ne pouvant être complice de cette infraction qui n'existe pas, sera également renvoyé des fins de la poursuite.

Sur le plan civil, la cour rejettera les demandes dont elle est saisie.

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement et contradictoirement

DONNE ACTE au Ministère Public de son désistement d'appel concernant la relaxe partielle prononcée par le jugement entrepris,

INFIRMANT ledit jugement, quant au surplus,

RENVOIE les prévenus des fins de la poursuite,

REJETTE les demandes civiles,

LE GREFFIERLE PRESIDENT

Maryse D...Yves ROUSSEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Ct0028
Numéro d'arrêt : 575
Date de la décision : 30/10/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal correctionnel de Tours, 03 mai 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2007-10-30;575 ?
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