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05/06/1959 | FRANCE | N°59-06218

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 juin 1959, 59-06218


Sur le premier moyen, pris de la violation des articles 1338 et 1134 du Code civil et de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, défaut de motifs et manque de base légale ;

Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir décidé que le contrat de travail de X... s'était poursuivi pour une durée indéterminée, la communication à lui faite en 1941 au cours d'une réunion du conseil d'administration de la décision d'y mettre fin ayant eu lieu avec un préavis inférieur à celui qui avait été convenu ; alors qu'en l'absence de réserves de sa part, son accord tacite val

ait ratification et couvrait l'irrégularité de la tardiveté de la notif...

Sur le premier moyen, pris de la violation des articles 1338 et 1134 du Code civil et de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, défaut de motifs et manque de base légale ;

Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir décidé que le contrat de travail de X... s'était poursuivi pour une durée indéterminée, la communication à lui faite en 1941 au cours d'une réunion du conseil d'administration de la décision d'y mettre fin ayant eu lieu avec un préavis inférieur à celui qui avait été convenu ; alors qu'en l'absence de réserves de sa part, son accord tacite valait ratification et couvrait l'irrégularité de la tardiveté de la notification ;

Mais attendu que les juges du fond ont constaté que, par contrat du 1er février 1937, la société anonyme des Etablissements Tréfousse avait confié à X... la direction générale, technique et commerciale de son entreprise, pour une durée de cinq années, à compter du 1er janvier 1937 ; qu'il était prévu qu'elle serait prorogée pour cinq autres années, par tacite reconduction, si, douze mois avant l'expiration de la première période en cours, l'une des parties n'avait pas dénoncé par lettre lesdits accords à l'autre partie ; que, si le conseil d'administration avait décidé, le 24 décembre 1940, d'y mettre fin pour le 31 décembre 1941, il n'était pas établi que X... eut assisté à cette réunion, et que, si le procès-verbal en avait été approuvé en sa présence lors de la séance du 7 avril 1941, cette dernière réunion, tenue moins d'un an avant l'expiration de la première période quinquennale, était tardive ; que X... avait, d'ailleurs, continué à percevoir, jusqu'en 1956, les rémunérations fixées par le contrat du 1er février 1937 ; qu'en en déduisant que le contrat de travail de X... n'avait pas été résilié pour le 31 décembre 1941 et s'était poursuivi après cette date, le jugement attaqué a légalement justifié sa décision ;

Sur le deuxième moyen, pris de la violation de l'article 2 de la loi du 16 novembre 1940, modifié par l'article 13 de la loi du 4 mars 1943, de l'article 16 de la loi du 4 mars 1943 et de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, défaut de motifs et manque de base légale ; Attendu qu'il est reproché au jugement attaqué d'avoir décidé que X..., devenu en 1945 administrateur de la société anonyme, avait pu cumuler son mandat avec les fonctions de directeur général salarié de la même société, alors que la loi du 4 mars 1943, applicable aux contrats et situations en cours à la date de son entrée en vigueur, interdit à tout administrateur autre que le président, le directeur général délégué et le directeur général adjoint d'assurer les fonctions de direction dans la société ;

Mais attendu que les juges du fond ont constaté que le contrat de travail conclu par X... en 1937 n'avait pas eu pour but de supprimer la révocabilité ad nutum d'un mandataire ce qu'il n'était devenu que bien après ; qu'ils relèvent à juste titre qu'à défaut de fraude, la loi du 16 novembre 1940, modifiée par celle du 4 mars 1943, ne comporte aucune prohibition d'un cumul entre les fonctions d'administrateur, directeur général adjoint mandataire d'une société anonyme et celle de directeur technique ou commercial lié à la société par un contrat de louage de service ; qu'ils ont ainsi légalement justifié leur décision ;

Et sur le troisième moyen, pris de la violation de l'article 1134 du Code civil et de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, dénaturation de documents, défaut de motifs et manque de base légale ;

Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir décidé que X... n'avait donné sa démission que de directeur général mandataire et d'administrateur, alors qu'il était nettement précisé dans les documents versés aux débats qu'il avait démissionné de ses fonctions de directeur technique et commercial, lié par un contrat de louage de services ;

Mais attendu que les juges du fond, appréciant la portée des documents versés aux débats et interprétant l'intention des parties quand ils étaient susceptibles de plusieurs sens, ont estimé que si X... avait présenté oralement à deux reprises sa démission, celle-ci ne concernait que ses fonctions de directeur général mandataire et d'administrateur de la société ; qu'ils ont ainsi donné une base légale à leur décision que la rupture du contrat de travail de X... avait été le fait de la société ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 59-06218
Date de la décision : 05/06/1959
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1) CONTRAT DE TRAVAIL - Durée déterminée - Tacite reconduction - Conditions - Clauses de reconduction pour la même durée - sauf dénonciation.

Est légalement justifiée la décision qui déclare reconduit pour la même durée le contrat à durée déterminée de cinq ans liant un directeur technique et commercial à une société anonyme, dès lors qu'il est constaté, d'une part, que ce contrat, était renouvelable par tacite reconduction pour une même période, sauf dénonciation par une partie douze mois avant l'expiration de la première période en cours, d'autre part, que le Conseil d'administration, ayant décidé de mettre fin audit contrat, il n'était pas établi que l'intéressé ait assisté à cette réunion et que, si le procès-verbal en avait été approuvé en sa présence lors d'une séance postérieure, cette dernière réunion tenue moins d'un an avant l'expiration de la première période quinquennale était tardive.

2) SOCIETE ANONYME - Administrateur - Cumul avec les fonctions de directeur salarié (oui).

A défaut de fraude, la loi du 16 novembre 1940, modifiée par celle du 4 mars 1943, ne comporte aucune prohibition d'un cumul entre les fonctions d'administrateur, directeur général adjoint mandataire d'une société anonyme, et celle de directeur technique ou commercial lié à la société par un contrat de louage de service.

3) CONTRAT DE TRAVAIL - Rupture par le salarié - Preuve - Démission - Directeur salarié d'une société ayant également la qualité de mandataire social - Démission ne s'appliquant qu'au mandat.

Les juges du fond, appréciant la portée des documents versés aux débats et interprétant l'intention des parties, susceptibles de plusieurs sens, peuvent estimer que, si un directeur général mandataire et administrateur d'une société, cumulant ses fonctions avec celles de directeur technique et commercial, lié par un contrat de louage de service, avait présenté oralement à deux reprises sa démission, celle-ci ne concernait que ses fonctions de directeur général mandataire et d'administrateur de ladite société.


Références :

LOI du 16 novembre 1940
LOI du 04 mars 1943

Décision attaquée : Tribunal civil Chaumont, 28 mai 1956


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 jui. 1959, pourvoi n°59-06218, Bull. civ. des arrêts Cour de Cassation Soc. N. 690 p. 552
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles des arrêts Cour de Cassation Soc. N. 690 p. 552

Composition du Tribunal
Président : Pdt M. Carrive
Avocat général : Av.Gén. M. Albucher
Rapporteur ?: Rpr M. Laroque
Avocat(s) : Av. Demandeur : M. Galland

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1959:59.06218
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