Sur le premier moyen pris en ses deux branches :
Vu la loi des 16-24 août 1790 ;
Attendu qu'une parcelle de terrain appartenant à Mme X... et située le long d'une route nationale, a été expropriée en vue de l'aménagement routier environnant ; que la société Shell, locataire de cette parcelle sur laquelle elle exploitait une station service, bénéficiait, à titre précaire et révocable, d'une autorisation d'occupation du domaine public pour l'aménagement des pistes d'accès au poste de distribution d'essence ; que l'autorisation de voirie n'ayant pas été renouvelée après 1983 et la société Shell n'ayant pas déféré à la demande de l'Administration de fermer la station service, la direction départementale de l'Equipement a procédé, au mois de février 1997, à la pose de plots de béton interdisant l'accès à la station ; que la société Shell et Mme X... ont assigné l'Etat en référé afin de faire constater la voie de fait ;
Attendu que pour ordonner sous astreinte l'enlèvement des plots et condamner l'Etat à payer des dommages-intérêts à la société Shell, l'arrêt attaqué relève, qu'en empêchant l'accès à la parcelle occupée par la société Shell, l'Administration a commis une voie de fait, dès lors que la pose des plots entraînant une prise de possession forcée, était manifestement illicite et que si l'ordonnance d'expropriation opère transfert de propriété, l'Administration n'est autorisée, aux termes de l'article L. 15-2 du Code de l'expropriation, à prendre possession du bien exproprié qu'après paiement ou consignation de l'indemnité et que tel n'était pas le cas ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que ni la pose de plots sur l'accès, dépendant du domaine public, desservant une station service, en l'absence de renouvellement de l'autorisation de voirie accordée à l'exploitant, ni la prise de possession, fussent-elles illégales et réalisées avant paiement ou consignation de l'indemnité d'expropriation, n'étaient manifestement insusceptibles de se rattacher à un pouvoir appartenant à l'Administration, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il y a lieu de faire application de l'article 627, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile, la cassation n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 mars 1998, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare les juridictions de l'ordre judiciaire incompétentes pour connaître du litige opposant la société Shell et Mme X... à l'Etat ;
Renvoie les parties à mieux se pourvoir.