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19/07/2000 | FRANCE | N°98-18620

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 juillet 2000, 98-18620


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / la société compagnie générale de Chauffe, devenue la société Dalkia, société anonyme, dont le siège est ... deTassigny, 59875 Saint-André,

2 / la société Cometherm SCA, dont le siège est Hermès X..., ...,

3 / la société compagnie Aixoise de Réalisations Thermiques, société anonyme, dont le siège est ZUP d'Aix, 13100 Aix-en-Provence,

4 / la société Berruyère d'exploitation de chauffage Sobec SCA, dont le siè

ge est ...,

5 / la société CGME, société anonyme, dont le siège est ...,

6 / la société Provencale de distr...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / la société compagnie générale de Chauffe, devenue la société Dalkia, société anonyme, dont le siège est ... deTassigny, 59875 Saint-André,

2 / la société Cometherm SCA, dont le siège est Hermès X..., ...,

3 / la société compagnie Aixoise de Réalisations Thermiques, société anonyme, dont le siège est ZUP d'Aix, 13100 Aix-en-Provence,

4 / la société Berruyère d'exploitation de chauffage Sobec SCA, dont le siège est ...,

5 / la société CGME, société anonyme, dont le siège est ...,

6 / la société Provencale de distribution de chaleur SCA, dont le siège est ...,

7 / la société UTEC SCA, dont le siège est ...,

8 / la société Sotris, société anonyme, dont le siège est ...,

9 / la société en nom collectif Sthal (SNC), dont le siège est ...,

10 / la société de Réalisations Thermiques du Nord (SCA), dont le siège est ...,

11 / la société de Réalisation Exploitation chauffage urbain de Vandoeuvre (SOREV) SCA, dont le siège est ... les Nancy,

12 / la société Nimoise de Chauffage Sonic SCA , dont le siège est ...,

13 / la société Sonitherm, société anonyme, dont le siège est ...,

14 / la société Thermulis GIE, dont le siège est ...,

15 / la société d'Exploitation thermique du centre Beaubourg dite "SETCB" SNC, dont le siège est ...,

16 / la société SETB SNC, dont le siège est ...,

17 / la société Montpelliéraine de distribution de Chaleur, société anonyme, aux droits de laquelle vient la "société anonyme Somesys", dont le siège est Hermès X..., ...,

18 / la SGE Entreprise, dont la raison sociale est devenue "SA Crystal", dont le siège est ...,

19 / la société Bouchez, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,

20 / la société EGCS, société anonyme, dont le siège est ...,

21 / la société Bele et Compagnie, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 29 mai 1998 par la cour d'appel de Douai (Chambre sociale), au profit de l'Union de recouvrement des

cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Lille, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

En présence du Directeur régional des affaires sanitaires et sociales du Nord Pas de Calais, ayant ses bureaux, ...,

L'URSSAF de Lille a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 8 juin 2000, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Dupuis, conseiller rapporteur, MM. Gougé, Ollier, Thavaud, Mmes Ramoff, Duvernier, M. Duffau, conseillers, M. Petit, Mme Guilguet-Pauthe, M. Leblanc, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Dupuis, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la société Dalkia, de la société Cometherm SCA, de la compagnie Aixoise de Réalisations Thermiques, de la société Berruyère d'exploitation de chauffage SOBEC, de la société CGME, de la société Provencale de distribution de chaleur SCA, de la société UTEC SCA, de la société Sotris, de la SNC Sthal, de la SCA de Réalisations thermiques du Nord, de la SCA Réalisation Exploitation chauffage urbain de Vandoeuvre, de la SCA Nimoise de chauffage Sonic, de la société Sonitherm, de la société Thermulis GIE, de la société d'Exploitation Thermique du centre Beaubourg dite "SETCB", de la société SETB, de la société Montpelliéraine de distribution de chaleur, de la société Crystal, de la société Bouchez, de la société EGCS et de la société Bele et Compagnie, de la SCP Peignot et Garreau, avocat de l'URSSAF de Lille, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société Compagnie générale de chauffe (CGC), devenue société Dalkia, et vingt sociétés appartenant à son groupe, ont fait l'objet en 1992 d'un contrôle de l'URSSAF, portant sur la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1991 ; que plusieurs redressements ont été notifiés à chacune des sociétés, qui ont déposé des recours partiellement rejetés par la cour d'appel (Douai, 29 mai 1998) ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses deux branches :

Attendu que les sociétés reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré bien fondés les redressements au titre des primes de panier, alors, selon le moyen, 1 / que sont présumées utilisées conformément à leur objet les primes de panier prévues par une convention collective au profit de salariés dont les conditions de travail, particulièrement salissantes, leur interdisent de rentrer chez eux -même s'ils en avaient le temps- ou à leur lieu de travail ; qu'en l'espèce, I'employeur faisait valoir que les salariés affectés aux chaufferies travaillaient dans des conditions tellement salissantes et éprouvantes qu'ils étaient obligés, selon l'usage de la profession, de prendre leurs repas dans la chaufferie où ils travaillaient soit de manière temporaire, soit de manière continue, qu'ils ne pouvaient prendre leur repas, dans l'état où ils se trouvaient, ni dans un restaurant d'entreprise où ils n'auraient pas été acceptés, ni chez eux, où, même s'ils avaient le temps de s'y rendre, ils n'auraient pas disposé du temps nécessaire à se laver avant de prendre leur repas ; qu'outre cet usage imposé par les circonstances, l'employeur faisait valoir la convention collective qui avait prévu les primes de panier pour tenir compte des circonstances imposant aux salariés de prendre leur repas sur les lieux de travail ; qu'en estimant que l'employeur ne pouvait se fonder sur la seule convention collective pour rapporter la preuve de l'utilisation conforme des primes de panier, sans s'expliquer ni sur l'usage expressément invoqué ni sur les conditions de travaiI des salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale et de l'arrêté du 26 mai 1975 ; alors, 2 / que la société Compagnie générale de chauffe soutenait devant la cour d'appel qu'en tout état de cause, il résultait de la circulaire ACOSS n° 75-11 du 10 juillet 1975 que, lorsque l'employeur n'était pas en mesure d'apporter la justification des dépenses effectivement engagées par les salariés, la réintégration dans l'assiette des cotisations devait s'effectuer par différence entre le montant de l'allocation forfaitaire et la limite d'exonération fixée par l'arrêté du 26 mai 1975 ; qu'en l'espèce, l'URSSAF n'avait pas suivi cette règle, et avait au contraire réintégré dans l'assiette des cotisations l'intégralité des primes versées aux salariés dits non postés ; que la cour d'appel, qui a fait droit à la demande de l'URSSAF, sans à aucun moment répondre au moyen présenté, a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, et partant, violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé les dispositions des articles 1 et 2 de l'arrêté du 26 mai 1975, relatif aux frais professionnels, dont il résulte que l'employeur doit établir l'utilisation des allocations forfaitaires conformément à leur objet, dans la limite du montant fixé par l'arrêté, et exactement énoncé que le seul fait que le versement de ces allocations soit prévu par la convention collective ne prouve pas que leur utilisation soit conforme à leur objet, l'arrêt relève que, pour le personnel posté dont la présence continue sur un site est établie, seule la partie de la prime excédant la limite règlementaire d'exonération a été réintégrée dans l'assiette des cotisations, et que, pour les autres salariés, l'URSSAF n'a réintégré que la valeur des primes allouées à ceux dont les conditions réelles de travail ne leur interdisaient pas de regagner leur résidence ou leur lieu habituel de repas ; qu'elle en a exactement déduit, sans avoir à répondre à des conclusions invoquant une simple tolérance administrative admise par une circulaire dépourvue de force obligatoire, que le redressement était justifié ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal :

Attendu que les sociétés reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré bien fondés les redressements au titre des primes de salissure, alors, selon le moyen, que sont présumées utilisées conformément à leur objet les primes de salissure d'un montant modique, non hiérarchisées, variant en fonction de l'emploi occupé, et versées seulement pendant la période de travail (à l'exclusion des périodes de congés et d'arrêt maladie), aux salariés accomplissant une tâche salissante nécessitant un lavage fréquent des vêtements de travail ; qu'en l'espèce, les sociétés faisaient valoir que les chauffagistes travaillaient dans un milieu surchauffé de graisses de poussières et d'huile nécessitant le lavage quasi quotidien de leur bleu de travail qu'ils portaient à même la peau ;

que l'URSSAF n'avait reconnu la nécessité que d'un lavage hebdomadaire, bien qu'elle avait reconnu le caractère salissant de l'activité en cause ; qu'en exigeant de l'employeur qu'il rapporte la preuve matérielle que les primes litigieuses étaient bien utilisées conformément à leur objet, quand la modicité et la nature de la prime de même que le caractère salissant de l'activité faisaient présumer cette utilisation conforme, la cour d'appel a violé les articles 1315 du Code civil et L.242-1 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé justement que le seul fait que l'entreprise soit spécialisée dans les travaux salissants et que les salariés soient exposés à un surcroît de dépenses vestimentaires ne suffit pas à établir l'utilisation effective des primes conformément à leur objet, l'arrêt relève que les allocations forfaitaires de salissure étaient versées sur une base journalière, alors qu'aucune pièce ne démontre que les salariés devaient procéder au nettoyage quotidien de leurs vêtements de travail, et que, néanmoins, elles ont été exonérées partiellement par l'URSSAF de cotisations compte tenu de circonstances de fait relevées par les agents contrôleurs ; qu'elle en a exactement déduit, sans inverser la charge de la preuve, que le redressement est justifié ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen du pourvoi principal, pris en ses trois branches :

Attendu que les sociétés reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré bien fondés les redressements au titre des avantages en nature de fourniture de véhicules, alors, selon le moyen, 1 / que le déplacement du salarié assuré par un véhicule servant par ailleurs en même temps aux divers besoins de l'entreprise et notamment au transport du personnel ou du matériel ne constitue pas un avantage en nature, et ne donne pas lieu à réintégration dans l'assiette des cotisations sociales ; qu'en l'espèce, les sociétés soutenaient que les véhicules en question servaient principalement à l'entreprise, au transport de matériel, et étaient équipés d'instruments de communication nécessaires à l'entreprise ; que l'URSSAF elle-même avait implicitement reconnu que ces véhicules ne servaient pas uniquement aux salariés pour se rendre de leur domicile à leur lieu de travail ; que la cour d'appel, qui a fait droit au redressement de l'URSSAF, prétexte pris de ce qu'il concernait des chefs de secteur disposant d'un simple véhicule de service pour parcourir le trajet séparant leur domicile du lieu de travail, sans à aucun moment rechercher si ces mêmes véhicules ne servaient pas les besoins de l'entreprise, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale ; alors, 2 / que les juges du fond ne peuvent procéder par simple voie d'affirmation, mais sont au contraire tenus de motiver leurs décisions ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que la Compagnie générale de chauffe ne pouvait se prévaloir de la circulaire ACOSS du 11 février 1993, sans à aucun moment expliquer pour quelles raisons ce texte, porteur de droits, ne pouvait bénéficier aux sociétés ; que la cour d'appel a de la sorte privé sa décision de base légale au regard de cette circulaire, ainsi que de l'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale ;

alors, 3 / que la circulaire de l'ACOSS du 11 février 1993 exclut de son champ d'application le personnel d'encadrement, conducteurs de travaux, chefs de chantier, bénéficiant de la mise à disposition permanente d'un véhicule ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a rejeté l'application de cette circulaire invoquée par les sociétés, arguant de ce qu'elle ne s'appliquerait pas au personnel d'encadrement, conducteurs de travaux et chefs de chantier dans les entreprises du bâtiment et de travaux publics, sans à aucun moment constater, ni même rechercher si en l'espèce, les véhicules étaient mis à la disposition des salariés à titre permanent, a privé sa décision de base légale au regard de la circulaire et de l'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que le redressement n'a concerné que la mise de véhicules de service à la disposition de chefs de secteurs non itinérants, pour parcourir seulement le trajet séparant leur domicile du lieu de travail, et a été limité dans son montant pour tenir compte de certains trajets parcourus à titre exceptionnel pour des interventions urgentes ; qu'elle a pu décider, sans prendre en considération une circulaire dépourvue de valeur règlementaire, et en ayant procédé aux recherches prétendument omises, que la mise à disposition de véhicules qui permettaient aux bénéficiaires de faire l'économie des frais de transport qu'ils auraient dû normalement assumer pour se rendre à leur lieu de travail et en revenir, constitue un avantage en nature devant être inclus dans l'assiette des cotisations ;

que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le quatrième moyen du pourvoi principal :

Attendu que les sociétés reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré bien fondés les redressements au titre du cumul de l'abattement de 10% et de l'avantage véhicule, alors, selon le moyen, que les entreprises relevant du secteur du bâtiment et des travaux publics peuvent par exception cumuler la déduction de l'abattement de 10% avec la déduction des frais occasionnés par l'utilisation par les salariés de véhicules d'entreprise conçus pour le transport du matériel, lesquels ne constituent pas un avantage en nature ; qu'en l'espèce, ils faisaient valoir que les véhicules mis à disposition des salariés étaient des véhicules de service, remis dans l'intérêt exclusif de l'entreprise pour le transport de matériels, de sorte que ces véhicules ne constituaient pas un avantage en nature ; qu'en affirmant le contraire pour refuser le cumul de déductions sans s'expliquer sur l'utilisation professionnelle des véhicules, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que les sociétés en cause, qui ne relèvent pas du secteur du bâtiment et des travaux publics, ont pratiqué l'abattement litigieux sur l'assiette des cotisations prévue par l'article 4 de l'arrêté du 26 mai 1975, pour tenir compte des frais professionnels supportés par certains salariés afin de se rendre de leur domicile à leur chantier, ou d'un chantier à un autre chantier, et leur ont également fourni un véhicule ; qu'elle a pu décider, en ayant procédé aux recherches nécessaires, que cette fourniture du véhicule a constitué un avantage en nature devant être réintégré dans l'assiette des cotisations ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le cinquième moyen du pourvoi principal :

Attendu que les sociétés reprochent enfin à l'arrêt attaqué d'avoir dit bien fondé le redressement au titre de l'intéressement, alors, selon le moyen, 1 / que les URSSAF sont tenues, lorsqu'elles entendent opérer un redressement fondé sur l'irrégularité d'un accord d'intéressement, de prendre, préalablement au redressement, l'avis de la DDTEFP ; qu'en l'espèce, l'accord d'intéressement litigieux et ses avenants avaient été déposés à la DDTEFP, sans que celle-ci n'y voie rien d'irrégulier ; que la DDTEFP l'avait transmis à l'URSSAF, qui n'avait elle non plus rien relevé d'irrégulier ; que pourtant l'URSSAF a prononcé un redressement sur le fondement d'une irrégularité de l'accord d'intéressement, sans à aucun moment suivre la procédure nécessaire ;

que les sociétés invoquaient donc à bon escient dans leurs écritures le moyen tiré de l'irrespect par l'URSSAF de la procédure à suivre ; que la cour d'appel, qui n'a pas répondu à ce moyen, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, 2 / que lorsque l'URSSAF a, antérieurement au contrôle ayant donné lieu au redressement litigieux, implicitement reconnu la légitimité de la pratique suivie par l'employeur, elle ne peut prononcer de redressement sur ce fondement sans avoir au préalable notifié une décision en sens opposé ;qu'en l'espèce, l'accord d'intéressement litigieux avait été transmis par la DDTEFP à l'URSSAF, qui n'y avait décelé aucune irrégularité, et n'avait présenté aucune observation ; qu'il en résultait implicitement que l'accord d'intéressement ouvrait droit à exonération ; que la cour d'appel, qui a fait droit au redressement, sans à aucun moment rechercher si, en l'absence de notification préalable au redressement par l'URSSAF d'une décision affirmant l'irrégularité de l'accord, le redressement était possible, a privé sa décision de base légale au regard de l'ordonnance du 21 octobre 1986 et de l'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale ; alors, 3 / que la différenciation de la répartition de l'intéressement en considération d'unités de travail cohérentes, avec des objectifs permettant de retenir des critères proches de l'action des salariés, ne fait pas obstacle au caractère collectif de l'intéressement, et permet ainsi son exonération de cotisations sociales ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a fait droit au redressement du seul fait que l'intéressement des directeurs régionaux pouvait dépendre des résultats de leur région, a violé l'ordonnance du 21 octobre 1986 et l'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que l'URSSAF qui constate, lors d'un contrôle, que les conditions ne sont pas remplies pour que les primes d'intéressement bénéficient d'une exonération de cotisations sociales, peut procéder à leur réintégration dans l'assiette des cotisations, sans être tenue de solliciter l'avis de la Direction départementale du travail et de l'emploi, dont l'absence d'observation lors du dépôt de l'accord ne vaut pas approbation ;

Attendu, en outre, qu'en l'absence de contrôle antérieur des sociétés du groupe CGC, l'URSSAF n'était liée à leur égard par aucune décision implicite concernant l'accord d'intéressement et ses avenants ;

Et attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que l'intéressement des directeurs régionaux dépendait seulement des résultats de leur propre région, de telle sorte qu'en 1990, la prime litigieuse n'a été accordée qu'à un seul d'entre eux, et que l'intéressement de leurs subordonnés était versé selon des conditions différentes de calcul, d'objectif et de plafond ; que la cour d'appel en a exactement déduit que le caractère collectif de l'intéressement n'avait pas été respecté, et que le redressement était justifié ; qu'en aucune de ses branches, le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident de l'URSSAF :

Attendu que l'URSSAF fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé le redressement au titre du cumul de l'abattement de 10 % pour frais professionnels avec la fourniture de vêtements de travail, alors, selon le moyen, que la circulaire ACOSS du 4 avril 1978 ne permet la déduction, dans l'industrie du bâtiment et des travaux publics, que des équipements de protection et de sécurité au sens de l'article 16 du décret n° 65-48 du 8 janvier 1965 ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher en quoi les simples bleus de travail en coton fournis par la Compagnie générale de chauffe pouvaient répondre à ces caractéristiques, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce dernier texte, ainsi que des articles L.242-1 du Code de la sécurité sociale, 1 et 4 de l'arrêté du 26 mai 1975 ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les vêtements de travail fournis aux salariés étaient adaptés aux risques de brûlures inhérents aux activités des salariés dans les installations de chauffage, la cour d'appel a retenu qu'ils constituaient des équipements personnels et de protection appropriée au sens de l'article 16 du décret du 8 janvier 1965, dans sa rédaction alors en vigueur ; qu'elle a pu estimer, en ayant procédé aux recherches nécessaires, que ces vêtements ne constituaient pas des avantages en nature, et ne devaient pas être réintégrés dans l'assiette des cotisations des salariés, peu important que ceux-ci bénéficient en outre de la déduction supplémentaire de 10 % pour frais professionnels ;

Sur le second moyen du pourvoi incident, pris en ses deux branches :

Attendu que l'URSSAF reproche à l'arrêt d'avoir annulé le redressement au titre de l'indemnité forfaitaire de douche, alors, selon le moyen, 1 / que les seules circonstances que des salariés prennent une douche après avoir effectué des travaux salissants et que le montant de la prime forfaitaire qui leur est allouée n'est pas élevé ne suffisent pas à prouver l'utilisation de ladite prime conformément à son objet ; qu'en justifiant pourtant par ces seuls motifs l'exclusion de ces sommes de l'assiette des cotisations sociales, la cour d'appel a violé les articles L.242-1 du Code de la sécurité sociale, 1 et 4 de l'arrêté du 26 mai 1975 ; alors, 2 / qu'en statuant ainsi, sans rechercher si l'employeur avait rapporté la preuve, qui lui incombait, de l'utilisation effective de la prime allouée à ce titre conformément à son objet, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.242-1 du Code de la sécurité sociale, 1 et 4 de l'arrêté du 26 mai 1975 ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé que plusieurs travaux, énumérés par elle, justifiaient la prise quotidienne d'une douche, et constaté que l'indemnité forfaitaire et journalière correspondante n'était pas versée aux salariés n'ayant pas à assurer ces travaux ; qu'elle en a exactement déduit que cette prime, utilisée conformément à son objet, devait être exclue de l'assiette des cotisations ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des sociétés demanderesses ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juillet deux mille.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 98-18620
Date de la décision : 19/07/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SECURITE SOCIALE - Cotisations - Assiette - Avantages en nature - Vêtements de travail - Primes diverses (de panier, d'habillement, de nettoyage ...) - Conditions de leur exclusion ou de leur réintégation.


Références :

Arrêté du 26 mai 1975 art. 1, 2 et 4
Code de la sécurité sociale L242-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai (Chambre sociale), 29 mai 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 jui. 2000, pourvoi n°98-18620


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GELINEAU-LARRIVET

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.18620
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