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15/12/2004 | FRANCE | N°03-15530

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 15 décembre 2004, 03-15530


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 412-8 du Code rural et l'article R. 143-4 du même Code, dans sa rédaction applicable en la cause ;

Attendu que lorsqu'un propriétaire se propose, notamment par vente, d'aliéner de gré à gré et à titre onéreux un fonds agricole ou un terrain à vocation agricole situé dans une zone où la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural est autorisée à exercer le droit de préemption, le notaire chargé d'ins

trumenter est tenu de faire connaître à ladite société le prix et les conditions demandées a...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 412-8 du Code rural et l'article R. 143-4 du même Code, dans sa rédaction applicable en la cause ;

Attendu que lorsqu'un propriétaire se propose, notamment par vente, d'aliéner de gré à gré et à titre onéreux un fonds agricole ou un terrain à vocation agricole situé dans une zone où la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural est autorisée à exercer le droit de préemption, le notaire chargé d'instrumenter est tenu de faire connaître à ladite société le prix et les conditions demandées ainsi que les modalités de l'aliénation projetée ; que cette communication vaut offre de vente au prix et conditions qui y sont contenus ; que les dispositions de l'article 1589, alinéa 1er, du Code civil sont applicables à l'offre ainsi faite ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué ( Poitiers, 26 mars 2003), que, le 31 octobre 1995, le notaire instrumentaire a notifié, à la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Poitou-Charentes (SAFER), une information relative à la vente, par Mmes X..., Marie-Josèphe et Monique Y... et M. Y... à M. Z..., de quatre parcelles de terre, d'une superficie de 2 ha 02 a 85 ca, moyennant un prix de 30 427 francs ; que cette notification précisait que les biens en cause avaient été verbalement donnés à bail à M. A..., mais que ce preneur en place avait renoncé à exercer son droit de préemption primant celui de la SAFER ; que, le 5 décembre 1995, la SAFER a fait part au notaire de sa décision d'exercer son droit de préemption aux prix et conditions par lui notifiés et en a informé l'acquéreur évincé dans les mêmes termes ; que les vendeurs se sont refusés à régulariser l'acte de vente au profit de la SAFER, soutenant n'avoir jamais donné mandat au notaire pour procéder à la vente des biens en cause ; que les 6, 10 et 24 février 1997, la SAFER a assigné Mmes Y... et X... et M. Y... pour voir juger que par la signification de son droit de préemption le 5 décembre 1995 sur la notification de vente par elle reçue le 2 novembre 1995 dont elle avait purement et simplement accepté les conditions, elle était devenue propriétaire, moyennant le prix principal de 30 427 francs des biens vendus et que le jugement à intervenir vaudrait titre de propriété ; qu'en cause d'appel, MM. Z... et le GAEC Z... frères sont intervenus volontairement à la procédure ;

Attendu que pour rejeter la demande, l'arrêt retient que la notification adressée à la SAFER se trouve entachée d'une erreur qui la vicie fondamentalement dès lors qu'elle se présente sous la forme d'une vente unique consentie par des indivisaires ce qui aurait dû faire l'objet de quatre ventes distinctes consenties par chacun des propriétaires pour sa parcelle, que cette erreur qui prive d'effet la notification s'explique par le fait, reconnu par Maître Cesbron elle-même, que le notaire n'avait reçu aucun mandat des vendeurs et n'avait jamais recueilli leur accord sur le prix proposé par M. Z... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, sauf à démontrer que la SAFER ne pouvait pas légitimement croire que le notaire, officier public et ministériel, chargé d'instrumenter et investi d'une mission légale d'information du prix, des charges, des conditions et modalités de la vente projetée, disposait des pouvoirs nécessaires pour engager le vendeur, l'acceptation par celle-ci des prix et conditions notifiés rend la vente parfaite, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 mars 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne, ensemble, Mme X..., Mme B..., Mme C..., M. Y..., le GAEC Z... frères et les consorts Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des consorts Y... et Z..., de Mme X... et du GAEC Z... frères ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 03-15530
Date de la décision : 15/12/2004
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL - Préemption - Conditions d'exercice - Notification - Prix et conditions de vente - Notification par un mandataire apparent - Notaire.

OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Notaire - Mandat - Mandataire apparent - Engagement du mandant - Conditions - Croyance légitime du tiers - Absence de circonstances le remettant en cause - Conditions suffisantes

APPARENCE - Mandat - Engagement - Condition

L'acceptation par une société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) des prix et conditions d'une vente de terres agricoles que le notaire instrumentaire lui avait notifiés, rend la vente parfaite, sauf à démontrer que la SAFER ne pouvait pas légitimement croire que le notaire, officier public ministériel, chargé d'instrumenter et investi d'une mission légale d'information du prix, des charges, des conditions et modalités de la vente projetée, disposait des pouvoirs nécessaires pour engager le vendeur. Dès lors, viole les articles L. 412-8 et R. 143-4 du Code rural une cour d'appel qui, pour rejeter la demande d'une SAFER tendant à faire dire que la vente, dont elle avait accepté les prix et conditions, était parfaite, retient que l'acte sous seing privé qui conditionnait l'existence du droit de préemption de la SAFER était nul et que la notification à celle-ci qui, dans ces conditions n'exprimait pas la volonté du propriétaire du bien, ne pouvait valoir offre de vente valable (arrêt n° 1). Viole également les mêmes articles, une cour d'appel qui, pour rejeter une demande similaire, retient que la notification se trouvait entachée d'une erreur qui la viciait fondamentalement dès lors qu'elle présentait sous la forme d'une vente unique consentie par des indivisaires ce qui aurait dû faire l'objet de quatre ventes distinctes consenties par chacun des copropriétaires pour sa parcelle et que cette erreur, qui privait la notification d'effet, s'expliquait par le fait que le notaire n'avait reçu aucun mandat des vendeurs et n'avait jamais recueilli leur accord sur le prix (arrêt n° 2).


Références :

Code rural L412-8, R413-4

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 26 mars 2003

Dans le même sens que : Chambre civile 3, 2002-06-05, Bulletin 2002, III, n° 131, p. 113 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 15 déc. 2004, pourvoi n°03-15530, Bull. civ. 2004 III N° 246 p. 220
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2004 III N° 246 p. 220

Composition du Tribunal
Président : M. Weber.
Avocat général : M. Guérin.
Rapporteur ?: M. Philippot.
Avocat(s) : Me Cossa (arrêts n°s 1 et 2), la SCP Nicolay et de Lanouvelle (arrêt n° 1), la SCP Bachellier et Potier de la Varde (arrêt n° 2), la SCP Waquet, Farge et Hazan (arrêt n° 2).

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.15530
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