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13/06/2007 | FRANCE | N°06-41333

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 juin 2007, 06-41333


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X... a été engagé par la société Défense 2000 en qualité de coursier à compter du 5 janvier 1998 ;

que contestant les modalités de sa rémunération au regard des dispositions de l'article 14 de la convention collective nationale des transports routiers rendue obligatoire aux employeurs et salariés des activités de coursiers par avenant du 24 mars 1998 étendu par arrêté du 23 juillet 1998 et estimant que sur la période de janvier à septembre 1998, il d

emeurait dans son activité de "course à course" à la disposition de l'employeur et o...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X... a été engagé par la société Défense 2000 en qualité de coursier à compter du 5 janvier 1998 ;

que contestant les modalités de sa rémunération au regard des dispositions de l'article 14 de la convention collective nationale des transports routiers rendue obligatoire aux employeurs et salariés des activités de coursiers par avenant du 24 mars 1998 étendu par arrêté du 23 juillet 1998 et estimant que sur la période de janvier à septembre 1998, il demeurait dans son activité de "course à course" à la disposition de l'employeur et obligé de prendre son repas hors de son lieu de travail sur la période quotidienne de 11 heures 45 à 12 heures 5, le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir notamment le paiement d'un rappel de salaire et d'une prime de panier, en application de l'article 3 du protocole d'accord relatif aux frais de déplacement des ouvriers du transport du 30 avril 1974 ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :

Attendu que la société Défense 2000 fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. X... des sommes à titre de rappel de salaire pour la période allant du mois d'août 1998 au 31 juillet 2005 et au titre des indemnités de congés payés afférents alors, selon le moyen :

1 / que l'article 14 de la convention collective des transports routiers prohibe les clauses de rémunération contractuelles de nature à compromettre la sécurité notamment par incitation directe ou indirecte au dépassement de la durée du travail ou des temps de conduite autorisés, telle que l'octroi de primes ou de majorations de salaire, en fonction des distances parcourues et/ou du volume des marchandises transportées ;

qu'elle avait fait valoir dans ses conclusions d'appel que le contrat de travail de M. X... ne prévoyait aucune prime ; qu'en mettant en oeuvre à l'encontre du salarié les dispositions conventionnelles précitées sans constater que la prime litigieuse ressortait d'une clause contractuelle, la cour d'appel a violé l'article 14 de la convention collective des transports routiers, ensemble l'article 1134 du code civil ;

2 / qu'elle avait fait valoir dans ses conclusions d'appel que les courses étaient affectées aux coursiers en fonction de leurs horaires, de leur disponibilité, de leur situation géographique et de leur connaissance du quartier, précisant que l'efficacité du coursier n'était pas fonction de sa vitesse mais de son expérience et de sa connaissance du secteur, rappelant que le bon était un élément de facturation correspondant à la fois à un calcul kilométrique et à un service rendu; que la cour d'appel, qui a retenu que le coursier ne pouvait qu'être incité à effectuer les livraisons le plus rapidement possible pour obtenir le plus grand nombre de bons possible dont dépend l'existence et l'importance des primes versées et que l'efficacité du coursier aurait été appréciée en considération du temps de livraison, sans rechercher l'incidence dans l'attribution des courses des horaires, de la disponibilité, de la situation géographique et de la connaissance du quartier par les coursiers, ni celle de l'existence d'un service, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-1 du code du travail ;

3 / que l'illicéité d'une prime ne peut être réparée que par l'octroi de dommages-intérêts après restitution éventuelle de la prime litigieuse et non par l'intégration au salaire de base de la prime devenue nulle en conséquence de son illicéité ; qu'en décidant que la sanction de la violation de l'article 14 ne pouvait être que l'intégration dans le salaire de base de la prime litigieuse et la détermination d'un salaire horaire sur la base de la rémunération ainsi reconstituée la plus élevée, la cour d'appel a violé les articles 1131 et 1134 du code civil ;

4 / qu'une prime dont le versement ne résulte pas de dispositions contractuelles ne peut être incorporée dans le salaire contractuel de base du salarié sans accord des parties ; qu'en procédant à une telle intégration, la cour d'appel a violé les articles L. 121-1 du code du travail et 1134 du code civil ;

5 / qu'une prime, aurait-elle été jugée illicite, a été versée en contrepartie de l'exécution d'une prestation donnée, réalisée selon des conditions de travail spécifiques ; qu'en accordant au salarié un rappel de salaire par intégration de la prime litigieuse dans le salaire de base, sans rechercher si le salarié effectuait son travail dans des conditions justifiant l'octroi de la prime litigieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 14 du chapitre II de la convention collective des transports routiers, dans sa rédaction résultant d'un avenant du 22 juillet 1992, dans un but de sécurité, les contrats de travail ne pourront contenir de clause de rémunération de nature à compromettre la sécurité, notamment par incitation directe ou indirecte au dépassement de la durée du travail ou des temps de conduite autorisés, tel que l'octroi de primes ou de majorations de salaire en fonction des distances parcourues et/ou du volume des marchandises transportées ;

Et attendu, d'une part, que la cour d'appel a retenu que le montant de la rémunération "au bon" est étroitement dépendant du nombre de courses effectuées dans un temps donné et dès lors qu'aucune limite n'étant fixée dans la délivrance des bons, il s'ensuit que le salarié est incité à effectuer le maximum de courses dans un temps donné et donc à les effectuer le plus vite possible ; que n'étant pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, elle a, à bon droit, déduit qu'un tel mode de rémunération de nature à compromettre la sécurité était prohibé par l'article 14 de l'annexe 1 de la convention collective nationale des transports routiers ;

Et attendu, d'autre part, qu'elle a exactement décidé, sans encourir les griefs des trois dernières branches du moyen et tirant les conséquences de l'illicéité du mode de rémunération appliqué au salarié, que sa rémunération devait être recalculée par intégration des primes litigieuses dans la partie fixe du salaire en application du taux horaire le plus élevé ;

Que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :

Vu l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Attendu que selon les articles 3, alinéa 1er et 4 du protocole d'accord du 30 avril 1974 annexé à la convention collective nationale des transports routiers, le personnel ouvrier qui est appelé à faire des déplacements dans la zone de camionnage autour de Paris et qui se trouve obligé de prendre un ou plusieurs repas hors de son lieu de travail, perçoit une indemnité de repas unique ;

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande en paiement de rappel de prime de panier, l'arrêt attaqué énonce que les pièces produites par les parties n'établissent pas une amplitude de la durée de travail du salarié couvrant totalement la période comprise entre 11 heures 45 et 14 heures 15, que l'employeur verse aux débats le détail des livraisons avec leurs horaires attribuées au salarié tandis que ce dernier ne fournit aucun élément de nature à le contredire ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre aux conclusions du salarié qui faisait valoir qu'il effectuait une activité de "course à course" dans la zone de camionnage autour de Paris qui impliquait nécessairement son absence de l'entreprise pendant la période comprise entre 11 heures 45 et 14 heures 15 pendant laquelle il ne pouvait prendre ses repas sur son lieu de travail, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande en paiement de prime de panier, l'arrêt rendu le 11 janvier 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la société Défense 2000 à payer à M. X... la somme de 1 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille sept.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-41333
Date de la décision : 13/06/2007
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (11e chambre), 11 janvier 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jui. 2007, pourvoi n°06-41333


Composition du Tribunal
Président : Président : Mme COLLOMP

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:06.41333
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