La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/06/2009 | FRANCE | N°08-15386;08-16902

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 24 juin 2009, 08-15386 et suivant


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° Q 08-15. 386 et N 08-16. 902 ;

Donne acte aux consorts Nicolas et Françoise X... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Benoît X... ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° Q 08-15. 386 :

Vu l'article L. 411-34 du code rural ;

Attendu qu'en cas de décès du preneur, le bail continue au profit de son conjoint, du partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, de ses ascendants et de ses descendants ; que le ba

illeur a la faculté de demander la résiliation du bail dans les six mois à compter du déc...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° Q 08-15. 386 et N 08-16. 902 ;

Donne acte aux consorts Nicolas et Françoise X... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Benoît X... ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° Q 08-15. 386 :

Vu l'article L. 411-34 du code rural ;

Attendu qu'en cas de décès du preneur, le bail continue au profit de son conjoint, du partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, de ses ascendants et de ses descendants ; que le bailleur a la faculté de demander la résiliation du bail dans les six mois à compter du décès du preneur ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 6 juin 2007), que M. Guy X... est propriétaire de parcelles données à bail à M. Jean-Pierre X... et à son épouse, Mme Françoise Y... ; que M. Jean-Pierre X... est décédé le 7 janvier 1996 ; que, le 7 février 2005, le bailleur a demandé qu'il soit dit que les baux consentis se poursuivaient au profit exclusif de Mme Y... ;

Attendu que pour accueillir la demande, l'arrêt retient que M. Nicolas X..., fils de Jean-Pierre X..., ne rapportait pas la preuve de sa participation effective à l'exploitation au moment du décès de son père ou pendant les cinq années antérieures à son décès ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'action en résiliation des baux à l'encontre des enfants de M. Jean-Pierre X... n'avait été introduite que plus de six mois après son décès, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi n° N 08-16. 902 qui ne serait pas de nature à permettre son admission ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement ce qu'il a dit que les baux consentis à M. Jean-Pierre X... et Mme Françoise Y... le 11 octobre 1985 se sont poursuivis au profit exclusivement de Mme Françoise Y..., veuve X..., l'arrêt rendu le 6 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims, autrement composée ;

Condamne M. Guy X... aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Guy X... à payer à M. Nicolas X... et Mme Françoise Y..., ensemble, la somme de 2 500 euros ; rejette les demandes de M. Guy X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille neuf.

Moyen produit, au pourvoi n° N 08-16. 902, par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. Guy X... ;

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Guy X... de sa demande de résiliation du bail ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « sur la résiliation du bail pour échange prohibé, Monsieur Guy X... ne rapporte pas la preuve que la parcelle ZB n° 15 de 15 ares sur la finage de CHAPELLE VALLON a été louée à Monsieur Jean Pierre X... et à Madame Y... ; qu'aucune pièce, émanant de Madame Y... ne permet d'affirmer qu'elle a payé un loyer pour cette parcelle ; que cette parcelle figure sur le relevé parcellaire du GAEC du Guet lequel n'est pas mis en cause dans la présente procédure ; que pour ces motifs et ceux non contraires des premiers juges il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur Guy X... de sa demande de résiliation de bail en raison d'un échange prohibé » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE, aux termes du jugement entrepris, « aux termes de l'article L. 411-39 du code rural, pendant la durée du bail, le preneur peut effectuer les échanges ou locations de parcelles qui ont pour conséquence d'assurer une meilleure exploitation ; que le preneur les notifie au propriétaire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; que le non respect de la procédure d'information de l'échange du terrain loué par le preneur justifie le prononcé de la résiliation du bail ; qu'aux termes des articles 1315 du code civil et 6 du nouveau code de procédure civile, celui qui soutient une prétention doit rapporter la preuve des faits propres à la fonder ; qu'en l'espèce, la parcelle cadastrée ZB n° 15 située au lieu-dit « Derrière Biaune » à Chapelle Vallon appartient à Monsieur Guy X... suite à une donation-partage de Madame Suzanne X...veuve Lucien X... du 30 mars 1995 à son profit ; que Monsieur Jean-Paul C... a reconnu exploiter cette parcelle, non en tant qu'exploitant, mais à titre d'échange, tout en précisant qu'elle figurait sur le relevé MSA du GAEC du GUET ; qu'à cet égard Monsieur Guy X... a indiqué au tribunal que Madame Suzanne X...aurait mis à disposition du GAEC DU GUET la parcelle cadastrée ZB n° 15 sur la commune de Chapelle Vallon selon une lettre de notification du 6 octobre 1993 ; que cependant, les baux consentis par l'ayant droit de Monsieur Guy X..., Madame Suzanne X..., à Monsieur Emile X... et Monsieur et Madame Jean-Pierre X... d'une part, et à Monsieur et Madame Jean-Pierre X... d'autre part, par acte d'huissier du 11 octobre 1985, ne mentionnent pas, parmi les parcelles louées, celle cadastrée ZB n° 15 sur le finage de Chapelle Vallon ; qu'ont été donnés à bail uniquement des parcelles situées sur le finage de Rilly Sainte Syre ; que dès lors, Monsieur Guy X... ne rapporte pas la preuve que la parcelle cadastrée ZB n° 15 est louée à Madame Françoise X..., partie assignée ; qu'il sera en conséquence débouté de sa demande en résiliation de bail » ;

ALORS d'une part QUE pour prouver que Madame Françoise Y... avait bien loué la parcelle cadastrée ZB n° 15 à Monsieur Guy X..., son bailleur, celui-ci produisait, pour la première fois en cause d'appel, une lettre écrite de la main de Madame Françoise Y..., adressée à Monsieur Guy X..., portant sur le montant total des fermages 2004 et visant formellement parmi ceux-ci la parcelle « ZB 15 », qu'il produisait également la requête du 16 avril 2004 formée par l'avocat de Madame Y... au nom de celle-ci, pour contester devant le Tribunal paritaire des baux ruraux le congé que lui avait délivré Monsieur Guy X... le 18 mars 2004 « sur 21 ha 27 a 99 ca de terres sur les finages de RILLY SAINTE SYRE et CHAPELLE VALLON » et comprenant expressément la parcelle « ZB n° 15 » ; qu'en jugeant, pour rejeter la demande de résiliation du bail de Monsieur Guy X... pour échange prohibé de la parcelle ZB n° 15, qu'« aucune pièce, émanant de Madame Y... ne permet d'affirmer qu'elle a payé un loyer pour cette parcelle » (arrêt, p. 5 § 4), la Cour d'appel a dénaturé l'ensemble des pièces précitées, violant ainsi l'article 1134 du Code civil et l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS en deuxième lieu QUE, par voie de conséquence, en ne vérifiant pas si lettre écrite de la main de Madame Françoise Y... portant sur le montant total des fermages 2004 et visant formellement parmi ceux-ci la parcelle « ZB 15 » ou encore la requête du 16 avril 2004 formée par l'avocat de Madame Y... au nom de celle-ci, pour contester devant le Tribunal paritaire des baux ruraux le congé que lui avait délivré Monsieur Guy X... le 18 mars 2004 « sur 21 ha 27 a 99 ca de terres sur les finages de RILLY SAINTE SYRE et CHAPELLE VALLON » et comprenant expressément la parcelle « ZB n° 15 », n'établissaient pas que Madame Y... avait effectivement loué cette parcelle et qu'elle avait consécutivement procédé à l'échange litigieux, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 411-39 du Code rural ;

ALORS en troisième lieu QU'en jugeant qu'« aucune pièce, émanant de Madame Y... ne permet d'affirmer qu'elle a payé un loyer pour cette parcelle », sans s'expliquer sur la lettre écrite de la main de Madame Françoise Y... portant sur le montant total des fermages 2004 et incluant formellement la parcelle « ZB 15 », la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS en quatrième lieu QU'est irrecevable la mise en cause d'un tiers à seule fin d'obtenir des renseignements sur des faits susceptibles d'être en relation avec le litige ; qu'en jugeant, pour écarter la preuve tirée de la mention expresse de la parcelle « ZB n° 15 » dans le relevé parcellaire du GAEC DU GUET, dont Madame Y... est associée et à qui elle a mis à disposition l'ensemble des terres qu'elle loue à Monsieur Guy X..., que le GAEC, à l'encontre de qui aucune demande n'était formulée, « n'est pas mis en cause dans la présente procédure » (arrêt, p. 5 § 5), la Cour d'appel a statué par un motif inopérant, privant sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 411-39 du Code rural, ensemble l'article 311 du Code de procédure civile.

Moyen produit, au pourvoi n° Q 08-15. 386, par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils, pour les consorts Nicolas et Françoise X... ;

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, par confirmation du jugement entrepris, dit que les baux consentis à Monsieur Jean-Pierre X... et Madame Françoise Y..., le 11 octobre 1985, se sont poursuivis au profit exclusivement de Madame François Y... veuve X...

AUX MOTIFS QUE sur la poursuite des baux au profit de Monsieur Nicolas X..., à la suite du décès le 7 janvier 1996 de Monsieur Jean Pierre X... co-titulaire des baux du 11 octobre 1985, en application de l'article L 411-34 du Code rural le bail se poursuit au bénéfice de Monsieur Nicolas X... dès lors que celui-ci a participé à l'exploitation au cours des cinq années antérieures au décès ; que les premiers juges ont considéré à bon droit que Monsieur Nicolas X... ne rapportait pas la preuve de sa participation effective à l'exploitation de son père au moment du décès de son père ou pendant les cinq années antérieures à ce décès ; qu'à cet égard le Tribunal paritaire des baux ruraux a justement considéré que les seuls bilans annuels des assurances de personnes produits aux débats et mentionnant que Monsieur Nicolas X... réalisait des travaux sédentaires et un travail manuel occasionnel sur l'exploitation agricole n'étaient pas de nature à caractériser une exploitation réelle et suivie pendant un temps suffisant ;

ALORS QU'en l'absence de toute demande de résiliation formée par le bailleur dans le délai de six mois à compter du décès du preneur, le droit au bail de ce dernier se poursuit néanmoins au profit de son conjoint et de ses descendants, même s'ils ne répondent pas aux conditions de l'article L. 411-34 du Code rural ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant qu'à la suite du décès de Monsieur Jean-Pierre X... co-titulaire des baux, le 7 janvier 1996, le bailleur, Monsieur Guy X... n'avait formé aucune demande de résiliation des baux dans le délai de six mois, la Cour d'appel a procédé d'une violation de l'article L. 411-34 du Code rural ;

ALORS, EN OUTRE, QU'en toute hypothèse, la participation à l'exploitation de celui qui envisage de continuer le bail au décès du preneur, ne doit pas être nécessairement continue au cours de la période de cinq ans précédant le décès, mais seulement réelle et suivie pendant un temps suffisant ; qu'en l'espèce, les consorts Z... avaient fait valoir que Nicolas X..., titulaire d'un brevet de technicien supérieur agricole depuis 1991 bénéficiait depuis 1993, auprès de GROUPAPAMA ‘ d'une assurance pour les travaux agricoles accomplis dans l'exploitation de son père, ce dont il résultait qu'il participait effectivement à l'exploitation au moment du décès de ce dernier ou pendant les cinq années antérieures à ce décès ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant la réalité des travaux sédentaires et d'un travail manuel occasionnel sur l'exploitation agricole familiale, la Cour d'appel a violé l'article L 411-34 du Code rural.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 08-15386;08-16902
Date de la décision : 24/06/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

BAIL RURAL - Bail à ferme - Preneur - Décès - Droit au bail des héritiers - Faculté pour le bailleur de résilier le bail - Exercice - Défaut - Portée

En l'absence de demande en résiliation du bail rural par le bailleur dans les six mois du décès du preneur, le droit au bail passe aux héritiers de ce dernier. Viole ainsi l'article L. 411-34 du code rural une cour d'appel qui retient que le bail consenti ne s'était pas poursuivi au profit du fils du preneur au motif qu'il ne rapportait pas la preuve de sa participation effective à l'exploitation au moment du décès de son père ou pendant les cinq années antérieures à son décès, alors qu'elle avait constaté que le bailleur avait introduit son action plus de six mois après le décès du preneur


Références :

article L. 411-34 du code rural

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 06 juin 2007

A rapprocher :3e Civ., 21 janvier 2009, pourvoi n° 07-21272, Bull. 2009, III, n° 17 (cassation), et les arrêts cités


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 24 jui. 2009, pourvoi n°08-15386;08-16902, Bull. civ. 2009, III, n° 159
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, III, n° 159

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Bruntz
Rapporteur ?: M. Peyrat
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.15386
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award