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24/11/2009 | FRANCE | N°08-42974

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 novembre 2009, 08-42974


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix en Provence, 21 avril 2008) que M. X..., engagé le 5 février 1973 par la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), ayant été secrétaire de section syndicale et candidat aux élections prud'homales, a saisi le juge prud'homal d'une demande de dommages intérêts pour discrimination syndicale ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir ordonner à

la SNCF de le classer au grade D 2 18 à compter de juin 2003 alors, selon le moyen qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix en Provence, 21 avril 2008) que M. X..., engagé le 5 février 1973 par la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), ayant été secrétaire de section syndicale et candidat aux élections prud'homales, a saisi le juge prud'homal d'une demande de dommages intérêts pour discrimination syndicale ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir ordonner à la SNCF de le classer au grade D 2 18 à compter de juin 2003 alors, selon le moyen que le salarié a le droit d'obtenir l'exécution forcée du contrat de travail en cas de manquement de l'employeur à ses obligations ; que lorsque la demande du salarié tend à l'obtention d'une classification, le juge qui la lui reconnaît doit donc ordonner à l'employeur de procéder au classement effectif du salarié au grade correspondant, nonobstant l'allocation de sommes venant indemniser ou compenser les conséquences du manquement contractuel de l'employeur ; qu'en l'espèce, outre divers rappels de salaires et autres dommages intérêts, M. X... sollicitait que la SNCF soit condamnée à le classer au grade D 2 18 à compter de juin 2003 ; qu'en retenant, pour le débouter de sa demande sur ce point, que les diverses sommes allouées englobaient « le différentiel de retraite, ainsi que les pertes sur la rente accident du travail et sur les salaires ultérieurs », après avoir estimé que le salarié "aurait dû être classé en position D 2 18 à compter de juin 2003", la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1143 du code civil, ensemble les articles L. 121 1 et L. 140 1 du code du travail (devenus L. 1221 1 et s. et L. 3211 1 du même code) ;

Mais attendu qu'il ne résulte pas des motifs de la décision se limitant à débouter le salarié de ses demandes indemnitaires incidentes que la cour d'appel ait examiné cette prétention à un reclassement ; que l'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable ;

Sur le second moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de limiter la condamnation de la SNCF aux sommes de 10 485 euros pour la période postérieure à juin 2003 et de 25 000 euros à titre de dommages intérêts alors, selon le moyen :

1°/ qu'en cause d'appel, le salarié sollicitait la condamnation de la SNCF à lui payer la somme de 19 063,80 euros « en réparation du préjudice causé par la perte de salaire correspondant à la différence de rémunération entre les positions D 1 13 et D. 2 18 de juin 2003 à décembre 2007 » ; que la cour d'appel a reconnu le droit du salarié à cet égard ; qu'en retenant que les sommes allouées par les premiers juges, correspondant à 30 mois de salaires (soit de juin 2003 à début 2006) compensaient valablement les salaires et la retraite perdus depuis juin 2003, la cour d'appel a violé les articles L. 121 1 et L. 140 1 du code du travail (devenus L. 1221 1 et s. et L. 3211 1 du même code) et l'article 1134 du code civil ;

2°/ que les premiers juges avaient seulement alloué des dommages intérêts venant d'une part compenser la perte de salaire et le calcul des droits à la retraite, d'autre part indemniser le préjudice moral et financier subi par M. X... ; qu'en affirmant que les premiers juges auraient inclus dans ces sommes la perte de rémunération de la rente accident du travail, la cour d'appel a dénaturé le jugement et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé le jugement et, usant de son pouvoir souverain d'appréciation, a évalué le montant de la réparation du préjudice, n'était pas tenue d'en préciser les divers éléments ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le pourvoi incident de l'employeur :

Attendu que la SNCF fait grief à l'arrêt de la condamner à payer les sommes de 28 275 à titre de dommages intérêts sur la perte de salaire par rapport à la différence de niveau, 10 485 à titre de dommages intérêts correspondant à la perte de salaire sur le calcul des droits à la retraite, 25 000 à titre de dommages intérêts pour préjudice moral et financier alors, selon le moyen :

1°/ que d'une part, dans ses écritures, la SNCF soulignait que le choix des délégués s'était porté sur une candidature considérée comme ayant une qualité de service supérieure à celle de M. X... ; qu'à défaut de rechercher si cette autre candidature ne présentait pas des qualités de services supérieures à celle de M. X..., ce qui aurait permis d'établir l'absence de discrimination, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 1134 1 du code du travail ;

2°/ qu'en faisant peser sur l'employeur non seulement la charge de la preuve d'éléments objectifs justifiant la situation du salarié mais également la charge de la preuve de l'absence de prise en compte d'autres éléments, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1315 du code civil et L. 1134 1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que des collègues du salarié, de même filière et de grade identique, avaient été préférés nonobstant une ancienneté moindre et que l'employeur n'apportait aucun élément objectif de nature à établir que la situation professionnelle de l'intéressé était la seule cause de la disparité constatée alors que l'appartenance du salarié à un parti politique et à un syndicat avait été prise en considération, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

Rejette les pourvois, tant principal qu'incident ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté monsieur X... de sa demande tendant à voir ordonner à la SNCF de le classer au grade D-2-18 à compter de juin 2003 ;

AUX MOTIFS QUE le traitement discriminatoire de monsieur Alain X... est avéré, et il convient de l'indemniser de son entier préjudice ; que dès lors que monsieur Alain X... était classé en position C-1-9 en 1998 alors qu'il aurait dû être classé C-2-15, il est fondé à obtenir à titre de dommages et intérêts la somme de 28.275 euros correspondant à cinq années de perte de salaire selon le calcul des premiers juges que la Cour entérine ; que de surcroît, compte tenu de la réussite de monsieur Alain X... à ses examens professionnels de commis matériel et d'agent de mouvement qualifié, il aurait dû être classé en position D-2-18 (au lieu de D-1-13) en juin 2003, en sorte que c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes lui a alloué des chefs de perte de salaire et de retraite la somme supplétive de 10.485 euros ; que des éléments fournis par monsieur Alain X..., il apparaît que l'évaluation par les premiers juges du préjudice financier et moral est correcte ; qu'elle sera donc entérinée ; qu'étant donné que ces diverses sommes englobent le différentiel de retraite, ainsi que les pertes sur la rente accident du travail et sur les salaires ultérieurs, monsieur Alain X... doit être débouté des chefs de demande de son appel incident (y compris la modification du point de départ des intérêts légaux) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le conseil dit que M. X... a été victime d'un traitement discriminatoire vis-à-vis de son appartenance syndicale et de ses opinions politiques et condamne la SNCF au paiement de la somme de 28.275 euros à titre de dommages et intérêts correspondant à la perte de salaire sur le grade D-2-18 à compter de juin 2003, grade auquel il aurait pu bénéficier s'il avait eu le même déroulement de carrière que ses collègues à qualification égale ; que de plus, M. Alain X... a été victime, lors de ce traitement discriminatoire, sur son avancement et sa rémunération, et compte tenu de sa réussite à ses examens professionnels de commis matériel et d'agent de mouvement qualifié, M. Alain X... était classé en catégorie D-1-13 en juin 2003 alors qu'il aurait dû être classé en D-2-18 à cette même date qui équivaut à une perte de rémunération de plus de trente mois ; qu'en conséquence le conseil dit que cette perte de salaire a eu un effet négatif sur le calcul de sa retraite à hauteur de 10.485 euros ; que le conseil condamne la SNCF au paiement de la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts en fonction du préjudice subi par M. Alain X... tel que calculé par le conseil ;

ALORS QUE le salarié a droit d'obtenir l'exécution forcée du contrat de travail en cas de manquement de l'employeur à ses obligations ; que lorsque la demande du salarié tend à l'obtention d'une classification, le juge qui la lui reconnaît doit donc ordonner à l'employeur de procéder au classement effectif du salarié au grade correspondant, nonobstant l'allocation de sommes venant indemniser ou compenser les conséquences du manquement contractuel de l'employeur ; qu'en l'espèce, outre divers rappels de salaires et autres dommages et intérêts, monsieur X... sollicitait que la SNCF soit condamnée à le classer au grade D-2-18 à compter de juin 2003 ; qu'en retenant, pour le débouter de sa demande sur ce point, que les diverses sommes allouées englobaient « le différentiel de retraite, ainsi que les pertes sur la rente accident du travail et sur les salaires ultérieurs », après avoir estimé que le salarié "aurait dû être classé en position D-2-18 à compter de juin 2003", la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1143 du code civil, ensemble les articles L.121-1 et L 140-1 du code du travail (devenus L 1221-1 et s. et L 3211-1 du même code) ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la condamnation de la SNCF à payer à monsieur X... les sommes de 10.485 euros pour la période postérieure à juin 2003 et de 25.000 euros à titre de dommages intérêts ;

AUX MOTIFS QUE le traitement discriminatoire de monsieur Alain X... est avéré, et il convient de l'indemniser de son entier préjudice ; que dès lors que monsieur Alain X... était classé en position C-1-9 en 1998 alors qu'il aurait dû être classé C-2-15, il est fondé à obtenir à titre de dommages et intérêts la somme de 28.275 euros correspondant à cinq années de perte de salaire selon le calcul des premiers juges que la Cour entérine ; que de surcroît, compte tenu de la réussite de monsieur Alain X... à ses examens professionnels de commis matériel et d'agent de mouvement qualifié, il aurait dû être classé en position D-2-18 (au lieu de D-1-13) en juin 2003, en sorte que c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes lui a alloué des chefs de perte de salaire et de retraite la somme supplétive de 10.485 euros ; que des éléments fournis par monsieur Alain X..., il apparaît que l'évaluation par les premiers juges du préjudice financier et moral est correcte ; qu'elle sera donc entérinée ; qu'étant donné que ces diverses sommes englobent le différentiel de retraite, ainsi que les pertes sur la rente accident du travail et sur les salaires ultérieurs, monsieur Alain X... doit être débouté des chefs de demande de son appel incident (y compris la modification du point de départ des intérêts légaux) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le conseil dit que M. X... a été victime d'un traitement discriminatoire vis-à-vis de son appartenance syndicale et de ses opinions politiques et condamne la SNCF au paiement de la somme de 28.275 euros à titre de dommages et intérêts correspondant à la perte de salaire sur le grade D-2-18 à compter de juin 2003, grade auquel il aurait pu bénéficier s'il avait eu le même déroulement de carrière que ses collègues à qualification égale ; que de plus, M. Alain X... a été victime, lors de ce traitement discriminatoire, sur son avancement et sa rémunération, et compte tenu de sa réussite à ses examens professionnels de commis matériel et d'agent de mouvement qualifié, M. Alain X... était classé en catégorie D-1-13 en juin 2003 alors qu'il aurait dû être classé en D-2-18 à cette même date qui équivaut à une perte de rémunération de plus de trente mois ; qu'en conséquence le conseil dit que cette perte de salaire a eu un effet négatif sur le calcul de sa retraite à hauteur de 10.485 euros ; que le conseil condamne la SNCF au paiement de la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts en fonction du préjudice subi par M. Alain X... tel que calculé par le conseil ;

1. – ALORS QU'en cause d'appel, le salarié sollicitait la condamnation de la SNCF à lui payer la somme de 19.063,80 euros « en réparation du préjudice causé par la perte de salaire correspondant à la différence de rémunération entre les positions D-1-13 et D.2-18 de juin 2003 à décembre 2007 » ; que la Cour d'appel a reconnu le droit du salarié à cet égard ; qu'en retenant que les sommes allouées par les premiers juges, correspondant à 30 mois de salaires (soit de juin 2003 à début 2006) compensaient valablement les salaires et la retraite perdus depuis juin 2003, la Cour d'appel a violé les articles L.121-1 et L.140-1 du code du travail (devenus L 1221-1 et s. et L 3211-1 du même code) et l'article 1134 du code civil ;

2. – ALORS QUE les premiers juges avaient seulement alloué des dommages et intérêts venant d'une part compenser la perte de salaire et le calcul des droits à la retraite, d'autre part indemniser le préjudice moral et financier subi par monsieur X... ; qu'en affirmant que les premiers juges auraient inclus dans ces sommes la perte de rémunération de la rente accident du travail, la Cour d'appel a dénaturé le jugement et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

Moyen produit au pourvoi incident, avocat aux Conseils pour la Société nationale des chemins de fer français.

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné un employeur (la SNCF) à verser à un agent les sommes de 28.275 à titre de dommages intérêts sur la perte de salaire par rapport à la différence de niveau, 10.485 à titre de dommages-intérêts correspondant à la perte de salaire sur le calcul des droits à la retraite, 25.000 à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral et financier ;

AUX MOTIFS QUE des attestations avaient indiqué que Monsieur X... avait fait l'objet d'un traitement discriminatoire en ce qui concerne l'absence d'avancement sur rémunération en mars 1998 et que la SNCF n'avait pas rapporté la preuve que la disparité de situation constatée était justifiée par des éléments objectifs et que ces éléments étaient la seule cause de la disparité constatée ;

ALORS QUE, d'une part, dans ses écritures, la SNCF soulignait que le choix des délégués s'était porté sur une candidature considérée comme ayant une qualité de service supérieure à celle de Monsieur X... (conclusions, p. 6, §7) ; qu'à défaut de rechercher si cette autre candidature ne présentait pas des qualités de services supérieures à celle de Monsieur X..., ce qui aurait permis d'établir l'absence de discrimination, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 1134-1 du code du travail ;

ALORS QUE, d'autre part, en faisant peser sur l'employeur non seulement la charge de la preuve d'éléments objectifs justifiant la situation du salarié mais également la charge de la preuve de l'absence de prise en compte d'autres éléments, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1315 du code civil et L. 1134-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-42974
Date de la décision : 24/11/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 21 avril 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 nov. 2009, pourvoi n°08-42974


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Odent, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.42974
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