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08/12/2009 | FRANCE | N°08-43158

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 décembre 2009, 08-43158


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Grenoble, 5 novembre 2007 et 5 mai 2008), que par contrat de cogérance du 6 mars 2004, la société Distribution Casino France (ci-après la société) a confié aux époux Stéphane X... et Patricia Y... la gestion de la succursale exploitée à Vienne à l'enseigne "Petit Casino" ou "SPAR" ; que M. X... a été, par application de l'article 37 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés, "gérants-mandataires" du 18 juill

et 1963 révisé et étendu par arrêté du 25 avril 1985 (ci-après l'accord co...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Grenoble, 5 novembre 2007 et 5 mai 2008), que par contrat de cogérance du 6 mars 2004, la société Distribution Casino France (ci-après la société) a confié aux époux Stéphane X... et Patricia Y... la gestion de la succursale exploitée à Vienne à l'enseigne "Petit Casino" ou "SPAR" ; que M. X... a été, par application de l'article 37 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés, "gérants-mandataires" du 18 juillet 1963 révisé et étendu par arrêté du 25 avril 1985 (ci-après l'accord collectif national), élu le 19 avril 2004 pour une durée de deux ans membre suppléant du comité d'établissement des succursales de la société Casino de la région centre ; que la société a notifié aux époux X..., par lettre du 24 octobre 2005, la résiliation de leur contrat de cogérance ; que contestant la rupture de leur contrat, notamment en raison de l'absence de l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail, les époux X... ont saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt du 5 mai 2008 d'avoir prononcé la nullité de la résiliation du contrat de cogérance et de l'avoir condamnée en conséquence à payer à M. X... diverses indemnités alors, selon le moyen :

1°/ que les institutions représentatives crées par voie conventionnelle doivent, pour donner à leurs membres le bénéfice de la procédure spéciale protectrice prévue en faveur des représentants du personnel et des syndicats, être de même nature que celles prévues par le code du travail, c'est-à-dire que leurs attributions doivent être identiques ; que tel n'est pas le cas du comité d'établissement de succursales tenues par des gérants non salariés dont l'existence n'est pas prévue par le code du travail et dont les attributions sont extrêmement limitées par rapport à celles d'un comité d'entreprise prévu par la loi ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le comité d'établissement pour succursales était consulté uniquement sur les déclassements éventuels de gérances et sur les moyens de prévention en matière de risque professionnels, qu'il faisait seulement l'objet d'une information par le chef d'entreprise sur certaines questions ayant trait à l'activité économique des succursales, mais qu'il n'avait pas les autres attributions dévolues par la loi au comité d'entreprise ; qu'en considérant néanmoins qu'il y avait identité de nature entre l'institution légale que constituait le comité d'entreprise et le comité d'établissement pour succursales prévu par l'article 37 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales du 18 juillet 1963, et partant que M. X..., membre suppléant d'un comité d'établissement succursales, devait bénéficier de la protection spécifique, la cour d'appel a violé les articles L. 431-4 et suivants (devenu l'article L. 2323-1 et suivants), L. 436-1 (devenu l'article L. 2411-8) et L. 782-1 et suivants (devenu L. 7322-2) du code du travail, ensemble l'accord collectif national précité ;

2°/ qu'une institution représentative du personnel créée par voie conventionnelle n'est de même nature que celle prévue par le code du travail que si ses attributions sont identiques, peu important en revanche l'identité de son mode de consultation ou des heures de délégations de ses membres ; qu'en se fondant sur l'identité des modalités d'avis et des heures de délégations des membres du comité d'établissement succursales, avec celles du comité d'entreprise, pour déduire que ces deux institutions seraient de même nature, la cour d'appel a violé les articles L. 431-4 et suivants (devenu l'article L. 2323-1 et suivants), L. 436-1 (devenu l'article L. 2411-8) et L. 782-1 et suivants (devenu L. 7322-2) du code du travail, ensemble l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales du 18 juillet 1963 ;

3°/ qu'il résulte de l'article 37 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales du 18 juillet 1963 que les dispositions légales relatives aux institutions représentatives du personnel ne sont applicables aux gérants non salariés de succursales que «selon des mesures d'application particulières (…) nécessités par les particularités inhérentes aux fonctions desdits gérants» ; qu'il en résulte que les signataires de l'accord n'ont pas entendu faire application de l'ensemble des dispositions du code du travail aux gérants non salariés membres des comités d'établissement succursales compte tenu des particularité inhérentes à leurs fonctions ; qu'en se fondant sur les dispositions de cet accord pour décider qu'ils devaient bénéficier du statut protecteur garanti par l'article L. 436- 1 (devenu l'article L. 2411-8) du code du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 431-4 et suivants (devenu l'article L. 2323-1 et suivants), L. 436-1 (devenu l'article L. 2411-8) et L. 782-1 et suivants (devenu L. 7322-2) du code du travail, ensemble l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales du 18 juillet 1963 ;

4°/ que les avantages accordés par l'article L. 782-7 du code du travail aux gérants non salariés des succursales des maisons d'alimentation, ne sauraient comprendre la protection spéciale accordée aux représentants du personnel, compte tenu de ce qu'ils exercent leur fonction en dehors de tout lien de subordination ; que d'ailleurs, dans la nouvelle codification à droit constant, l'article L. 7322-1, qui renvoie à l'article L. 7321-1 du code du travail, prévoit que les dispositions du code ne sont applicables aux gérants de succursales que dans la mesure de ce qui est prévu au titre II, lequel titre ne comprend aucune disposition relative à la protection des représentants du personnel ; qu'en affirmant que tant l'article L. 782-7 que le nouvel article L. 7322-1 du code du travail permettaient aux gérants non salariés de bénéficier de cet avantage, la cour d'appel a violé l'article 782-7 du code du travail (devenu l'article L. 7322-1 du Code du travail), l'article L. 436-1 (devenu l'article L. 2411-8), l'article L. 7321-1 et suivants du code du travail, ensemble l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales du 18 juillet 1963 ;

Mais attendu qu'il résulte des dispositions combinées des alinéas 6 et 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, de l'article 1er de la convention n° 135 de l'OIT relative à la protection des représentants des travailleurs et de l'article L. 782-7, recodifié L. 7322-1 du code du travail, que le gérant non salarié, investi d'un mandat représentatif en application de l'article 37 de l'accord collectif national, qui précise les modalités d'application particulières, aux gérants non-salariés de succursales, des dispositions légales relatives aux syndicats professionnels et aux institutions représentatives du personnel, doit être en mesure d'exprimer et de défendre librement les revendications de la collectivité des gérants qu'il représente et doit bénéficier, à ce titre, du régime protecteur prévu aux articles L. 2411-3 et L. 2411-8 du code du travail ;

Et attendu qu'ayant constaté que M. X... avait été élu membre suppléant du comité d'établissement en application de l'accord collectif national, la cour d'appel en a exactement déduit que la rupture du contrat sans autorisation préalable de l'inspecteur du travail était entachée de nullité ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt du 5 mai 2008 de l'avoir condamnée à payer à Mme X... diverses indemnités au titre de la rupture du contrat alors, selon le moyen :

1°/ que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige oblige les juges à examiner l'ensemble des griefs ; qu'en l'espèce, il résultait de la lettre du 24 octobre 2005 que l'exposante avait résilié le contrat de co-gérance non seulement en raison d'un manquant de marchandises ou d'espèces, mais surtout en raison de l'absence de justification de ces manquants par les co-gérants contrairement à l'article 8 de leur contrat prévoyant «tout manquant non justifié entraînant la résiliation immédiate du contrat de co-gérance» ; qu'en disant cette résiliation abusive, faute pour l'exposante d'avoir démontré que les manquants seraient imputables à la co-gérante, sans rechercher si les co-gérants avaient justifié de l'origine des manquants avant la résiliation de leur contrat, la cour d'appel, qui n'a pas examiné le grief tel qu'il était invoqué dans la lettre de licenciement, a violé l'article L. 122- 14-2 (devenu L. 1232-6) du code du travail ;

2°/ qu'il appartient au gérant non salarié des succursales des maisons d'alimentation de détail, tenu contractuellement d'assumer la charge de tout déficit d'inventaire, de prouver que ce déficit ne lui est pas imputable pour s'exonérer de toute responsabilité ; qu'en reprochant à la société Casino de ne pas avoir démontré que les manquants ayant entraîné un déficit d'inventaire étaient imputable (sic) à la co-gérante non salariée, lorsqu'il appartenait à cette dernière, tenue contractuellement d'assumer la charge de tout déficit d'inventaire, de prouver que les manquants litigieux ne lui étaient pas imputables pour s'exonérer de toute responsabilité, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du code civil ;

3°/ qu'il résulte de l'article 24 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 et de l'article 4 de l'avenant au contrat des co-gérance du 6 mars 2004, que le gérant ne s'exonère de sa responsabilité à raison des manquants de marchandises ou d'espèces pour cause de vol que si ce vol a été commis dans certaines circonstances, s'il a immédiatement été porté à la connaissance de la société et déclaré aux autorités de police et si un inventaire a été effectué à la demande de l'une des parties dans les plus brefs délais dès sa constatation ; qu'en considérant que la co-gérante pouvait s'exonérer de toute responsabilité à raison de l'énorme manquant constaté en août 2005 aux seuls prétextes qu'elle aurait signalé en octobre 2004 des problèmes de sécurité et de vol et qu'il n'y aurait pas eu d'inventaire avant et après ses congés-payés, la cour d'appel qui n'a pas constaté que la co-gérante aurait justifié, après cette date, avoir subi des vols qu'elle aurait dénoncés dans les conditions prévues par l'accord collectif national et le contrat de co-gérance précité, a privé sa décision de base légale au regard des articles précités, ensemble les articles L. 122-14-3 (devenu L. 1232-1 et suivants) et L. 122-14-4 (devenu L. 1235-2 et suivants) du code du travail ;

4°/ que les jugements doivent être motivés, la contradiction de motifs équivalant à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que les manquants constatés le 1er août 2005 n'étaient pas imputables à la co-gérante mais à des problèmes de sécurité et de vol ; qu'en se déterminant ainsi, tout en constatant que la société Casino, informée de problèmes de sécurité et de vol en octobre 2004, avait versé des sommes aux gérants pour financer la présence d'un vigile pendant quelques mois en 2004 et 2005, ce dont il résulte que les problèmes de sécurité et de vol étaient résolus lors du déficit d'inventaire de 2005, la cour d'appel, qui a statué par des motifs contraires, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté que la société ne démontrait pas que les manquants litigieux de 45 858,33 euros en marchandises et de 4 281,24 euros en emballages mentionnés sur la fiche d'inventaire du 1er août 2005 étaient imputables à Mme X... alors que, selon les pièces produites aux débats par les parties, cette dernière avait fait valoir dans des correspondances adressées à la société après la rupture, notamment que leur magasin était confronté à des problèmes de sécurité et de vols signalés dès octobre 2004 et que la société en avait tenu compte en finançant pendant quelques mois la présence d'un vigile et qu'en outre il n'y avait pas eu d'inventaire notamment avant et après les congés-payés du couple ; qu'elle a par ces seuls motifs, abstraction faite des motifs erronés relatifs aux conséquences de la nullité de la rupture du contrat de cogérance à l'égard de M. X..., légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Casino France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. et Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Casino France

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité de la résiliation du contrat de cogérance et d'AVOIR condamné la société CASINO à payer à Monsieur X... les sommes de 13.230 euros à titre d'indemnité pour violation de son statut protecteur, 1.890 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 299, 26 euros à titre d'indemnité de résiliation et 24.600 euros à titre de dommages-intérêts pour résiliation abusive du contrat de cogérance.

AUX MOTIFS QUE pour conclure à la nullité de son licenciement, en réalité à la nullité de la résiliation du contrat de cogérance, Stéphane X... se place dans le cadre du statut légal de « gérant non salarié de succursale de maison d'alimentation de détail », au sens des articles L. 782-1 et suivants du code du travail ; que seuls ces dispositions légales seront prises en considération dans la mesure où elles avaient cours à la date de la résiliation litigieuse et non les articles L. 7322-1 et suivants du code du travail qui régissent le statut légal de « gérant non salarié de succursale de commerciale de détail alimentaire » invoqués par la société CASINO, articles qui n'étaient pas encore en vigueur à cette même date ; qu'il y a bien identité de nature entre l'institution légale que constitue le comité d'entreprise, d'une part, et le comité d'établissement pour les succursales prévu par l'article 37 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales, supermarchés, hypermarchés « Gérants-Mandataires » du 18 juillet 1963, refondu le 24 septembre 1984, d'autre part ; qu'en premier lieu, cet article rappelle que les dispositions légales relatives notamment aux institutions représentatives du personnel sont applicables aux gérants non salarié de succursales, selon des mesures d'application particulières décrites dans la suite de cet accord collectif, le même article expliquant que ces mesures d'application sont « nécessités par les particularités inhérentes aux fonctions desdits gérant » ; que sous cette simple réserve d'application, cet article permet de considérer que les parties ont bien entendu doter le personnel des succursales dont il s'agit d'une institution représentative ; qu'en second lieu, les attributions de ce comité d'établissement conventionnel sont bien de même nature que celles du comité d'entreprise instituées par le code du travail ; que le fait que cet accord collectif ne prévoit pas que ces comités aient un rôle en matière d'épargne salariale et de contrôle des aides publiques, le fait qu'il ne prévoit pas la possibilité, pour le comité d'établissement, d'avoir recours à un expert comptable aux frais de l'entreprise ou de constituer une commission économique, qu'il ne prévoit pas de consultation de ce comité pour les questions portant sur l'aménagement du temps de travail ou l'évolution de la propriété du capital social ou qu'il ne prévoit pas de consultation en matière de prévention des difficultés économiques ou, plus généralement, en cas de décision susceptible de provoquer des licenciements pour motif économique, le fait aussi que cet accord ne prévoit pas que ce comité soit présent au sein de l'organe de représentation de la société Casino, n'introduit pas de dissemblances significatives ; qu'en effet, par le seul fait que cet accord collectif prévoit expressément : - que le comité est périodiquement informé par le chef d'entreprise notamment sur l'activité et les résultats des succursales, sur l'évolution du nombre de ces dernières, sur l'évolution du nombre des gérants, sur les commissions qui leurs sont versées, sur les dépenses engagées pour l'amélioration de l'habitat des gérants, la cour relevant que le comité de la région centre a d'ailleurs été consulté, en l'espèce, à propos de la résiliation du contrat des époux X... ; - que le comité est consulté sur les déclassements éventuels ; - que le comité procède à l'analyse des risques professionnels et formule un avis sur les moyens de prévention à mettre en oeuvre au vu d'un rapport annuel de l'entreprise ; - que le comité examine les questions relatives à l'hygiène et à la sécurité qui lui sont signalées par les délégués gérants ; que les attributions de ce comité d'établissement des succursales consistent bien à assurer l'expression collective des gérants permettant la prise en compte de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière de l'entreprise, relatives à l'organisation du travail et relatives aux techniques de production ; que, de plus, cet accord collectif renvoie purement et simplement aux conditions légales en ce qui concerne les modalités d'avis de ce comité sur le plan de la formation des gérants et renvoie encore aux conditions légales en ce qui concerne les heures de délégation accordées, ce qui contribue encore à reconnaître une identité de nature entre cette institution représentative conventionnelle et le comité d'entreprise ; que par application de l'article L. 782-7 du Code du travail, les gérants non salariés bénéficient de tous les avantages, dont ce texte ne donne pas une liste limitative, accordés aux salariés par la législation sociale ; que d'ailleurs, même sous le régime de l'article L. 7322-1 sur lequel la société CASINO fonde une partie de son argumentation, « les dispositions du code du travail sont applicables aux gérants non-salariés» et le chapitre dans lequel est inséré ce nouvel article ne contient aucune disposition réservant un statut différent aux représentants du personnel conventionnels, sur la question de la protection ; qu'ainsi, même sous l'empire des dispositions nouvelles, dont il a été précédemment indiqué qu'elles n'étaient pas applicables au litige, ces gérants bénéficient encore de ces avantages, ce qui rendrait encore inopérant le moyen invoqué par l'intimée ; que la procédure légale de licenciement réservée aux représentants du personnel, en vigueur à la date du 24 octobre 2005, était donc applicable à la résiliation du contrat du gérant non salarié des succursales des maisons d'alimentation membre de l'un des comités institués par voie conventionnelle ; que l'existence et la durée du mandat dont était titulaire l'appelant ne sont pas remises en cause par l'intimée ; que la société CASINO devait dès lors recueillir l'autorisation de l'inspection du travail, préalablement à la résiliation du contrat de cogérance dont était titulaire Stéphane X..., ce dont elle s'est abstenue ; que cette résiliation est donc nulle (…) ; qu'il revient à Stéphane X..., au titre de l'indemnité pour violation de son statut protecteur et sur la base du montant de la commission qu'il aurait dû percevoir entre la rupture de son contrat (24 octobre 2005) et l'expiration de la période de protection, qui se prolonge six mois au-delà du terme du mandat, mais dans la limite du quantum de 7 mois invoqué, la somme de 1.890 euros x 7 = 13.230 euros ; que les dommages-intérêts revenant à Stéphane X... pour résiliation illicite de son contrat de cogérance seront fixés à 24.600 euros (…) ; que par application de l'article L. 782-7, ils sont fondés à obtenir une indemnité de résiliation et une indemnité compensatrice de préavis, calculées selon les mêmes modalités que l'indemnité légale de licenciement et que le délai-congé pour licenciement par référence à la commission mensuelle de 1.890 euros, soit les sommes respectives de 1.890 euros et de 299,26 euros.

1° - ALORS QUE les institutions représentatives crées par voie conventionnelle doivent, pour donner à leurs membres le bénéfice de la procédure spéciale protectrice prévue en faveur des représentants du personnel et des syndicats, être de même nature que celles prévues par le Code du travail, c'est-à-dire que leurs attributions doivent être identiques ; que tel n'est pas le cas du comité d'établissement de succursales tenues par des gérants non salariés dont l'existence n'est pas prévue par le Code du travail et dont les attributions sont extrêmement limitées par rapport à celles d'un comité d'entreprise prévu par la loi; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que le comité d'établissement pour succursales était consulté uniquement sur les déclassements éventuels de gérances et sur les moyens de prévention en matière de risque professionnels, qu'il faisait seulement l'objet d'une information par le chef d'entreprise sur certaines questions ayant trait à l'activité économique des succursales, mais qu'il n'avait pas les autres attributions dévolues par la loi au comité d'entreprise ; qu'en considérant néanmoins qu'il y avait identité de nature entre l'institution légale que constituait le comité d'entreprise et le comité d'établissement pour succursales prévu par l'article 37 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales du 18 juillet 1963, et partant que Monsieur X..., membre suppléant d'un comité d'établissement succursales, devait bénéficier de la protection spécifique, la Cour d'appel a violé les articles L. 431-4 et suivants (devenu l'article L.2323-1 et s), L. 436-1(devenu l'article L.2411-8) et L. 782-1 et suivants (devenu L.7322-2) du Code du travail, ensemble l'accord collectif national précité.

2° - ALORS QU'une institution représentative du personnel créée par voie conventionnelle n'est de même nature que celle prévue par le Code du travail que si ses attributions sont identiques, peu important en revanche l'identité de son mode de consultation ou des heures de délégations de ses membres ; qu'en se fondant sur l'identité des modalités d'avis et des heures de délégations des membres du comité d'établissement succursales, avec celles du comité d'entreprise, pour déduire que ces deux institutions seraient de même nature, la Cour d'appel a violé les articles L. 431-4 et suivants (devenu l'article L.2323-1 et s), L. 436-1(devenu l'article L.2411-8) et L. 782-1 et suivants (devenu L.7322-2) du Code du travail, ensemble l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales du 18 juillet 1963.

3° - ALORS QU'il résulte de l'article 37 de l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales du 18 juillet 1963 que les dispositions légales relatives aux institutions représentatives du personnel ne sont applicables aux gérants non salariés de succursales que « selon des mesures d'application particulières (…) nécessités par les particularités inhérentes aux fonctions desdits gérants » ; qu'il en résulte que les signataires de l'accord n'ont pas entendu faire application de l'ensemble des dispositions du Code du travail aux gérants non salariés membres des comités d'établissement succursales compte tenu des particularité inhérentes à leurs fonctions ; qu'en se fondant sur les dispositions de cet accord pour décider qu'ils devaient bénéficier du statut protecteur garanti par l'article L. 436-1(devenu l'article L.2411-8) du Code du travail, la Cour d'appel a violé les articles L. et suivants (devenu l'article L.2323-1 et s), L. 436-1 (devenu l'article L.2411-8) et L. 782-1 et suivants (devenu L.7322-2) du Code du travail, ensemble l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales du 18 juillet 1963.

4° - ALORS QUE les avantages accordés par l'article L. 782-7 du Code du travail aux gérants non salariés des succursales des maisons d'alimentation, ne sauraient comprendre la protection spéciale accordée aux représentants du personnel, compte tenu de ce qu'ils exercent leur fonction en dehors de tout lien de subordination ; que d'ailleurs, dans la nouvelle codification à droit constant, l'article L. 7322-1, qui renvoie à l'article L. 7321-1 du Code du travail, prévoit que les dispositions du Code ne sont applicables aux gérants de succursales que dans la mesure de ce qui est prévu au titre II, lequel titre ne comprend aucune disposition relative à la protection des représentants du personnel ; qu'en affirmant que tant l'article L. 782-7 que le nouvel article L. 7322-1 du Code du travail permettaient aux gérants non salariés de bénéficier de cet avantage, la Cour d'appel a violé l'article 782-7 du Code du travail (devenu l'article L. 7322-1 du Code du travail), l'article L. 436-1(devenu l'article L.2411-8), l'article L. 7321-1 et suivants du Code du travail, ensemble l'accord collectif national des maisons d'alimentation à succursales du 18 juillet 1963.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité de la résiliation du contrat de cogérance et d'AVOIR condamné la société CASINO à payer à Madame X... les sommes de 1.890 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 299, 26 euros à titre d'indemnité de résiliation et 12.300 euros à titre de dommages-intérêts pour résiliation abusive du contrat de cogérance.

AUX MOTIFS QUE Patricia X... était titulaire conjointement et solidairement avec son époux du même contrat de cogérance ; que, dès lors que la résiliation de ce contrat est nulle et de nul effet à l'égard de l'un, elle ne peut demeurer valable ni produire effet à l'égard de l'autre titulaire du même contrat ; que, surabondamment, la société CASINO ne démontre pas que les manquants litigieux de 45.858, 33 euros en marchandises et de 4.281, 24 euros en emballages mentionnés sur la fiche d'inventaire du 1er août 2005, sont imputables à Patricia X..., qui, selon les pièces produites aux débats par les parties, avait fait valoir dans des correspondances adressées par le couple à la société CASINO après la résiliation, notamment que leur magasin était confronté à des problèmes de sécurité et de vols signalés dès octobre 2004 à la société Casino, laquelle avait versé des sommes aux gérants pour financer la présence d'un vigile pendant quelques mois en 2004 et 2005 et Patricia X... ayant fait valoir, dans ces mêmes correspondances, qu'il n'y avait pas eu d'inventaire notamment avant et après les congés-payés du couple (…) ; que Patricia X... est fondée à obtenir 12.300 euros de dommages et intérêts pour résiliation de son contrat ; que par application de l'article L. 782-7, ils sont fondés à obtenir une indemnité de résiliation et une indemnité compensatrice de préavis, calculées selon les mêmes modalités que l'indemnité légale de licenciement et que le délai-congé pour licenciement par référence à la commission mensuelle de 1.890 euros, soit les sommes respectives de 1.890 euros et de 299,26 euros.

1° - ALORS QUE la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige oblige les juges à examiner l'ensemble des griefs; qu'en l'espèce, il résultait de la lettre du 24 octobre 2005 que l'exposante avait résilié le contrat de co-gérance non seulement en raison d'un manquant de marchandises ou d'espèces, mais surtout en raison de l'absence de justification de ces manquants par les co-gérants contrairement à l'article 8 de leur contrat prévoyant « tout manquant non justifié entraînant la résiliation immédiate du contrat de co-gérance » ; qu'en disant cette résiliation abusive, faute pour l'exposante d'avoir démontré que les manquants seraient imputables à la co-gérante, sans rechercher si les co-gérants avaient justifié de l'origine des manquants avant la résiliation de leur contrat, la Cour d'appel qui n'a pas examiné le grief tel qu'il était invoqué dans la lettre de licenciement, a violé l'article L. 122-14-2 (devenu L. 1232-6) du Code du travail.

2° - ALORS QU'il appartient au gérant non salarié des succursales des maisons d'alimentation de détail, tenu contractuellement d'assumer la charge de tout déficit d'inventaire, de prouver que ce déficit ne lui est pas imputable pour s'exonérer de toute responsabilité ; qu'en reprochant à la société CASINO de ne pas avoir démontré que les manquants ayant entraîné un déficit d'inventaire étaient imputable à la co-gérante non salariée, lorsqu'il appartenait à cette dernière, tenue contractuellement d'assumer la charge de tout déficit d'inventaire, de prouver que les manquants litigieux ne lui étaient pas imputables pour s'exonérer de toute responsabilité, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil.

3° - ALORS QU'il résulte de l'article 24 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 et de l'article 4 de l'avenant au contrat des co-gérance du 6 mars 2004, que le gérant ne s'exonère de sa responsabilité à raison des manquants de marchandises ou d'espèces pour cause de vol que si ce vol a été commis dans certaines circonstances, s'il a immédiatement été porté à la connaissance de la société et déclaré aux autorités de police et si un inventaire a été effectué à la demande de l'une des parties dans les plus brefs délais dès sa constatation; qu'en considérant que la co-gérante pouvait s'exonérer de toute responsabilité à raison de l'énorme manquant constaté en août 2005 aux seuls prétextes qu'elle aurait signalé en octobre 2004 des problèmes de sécurité et de vol et qu'il n'y aurait pas eu d'inventaire avant et après ses congés-payés, la Cour d'appel qui n'a pas constaté que la co-gérante aurait justifié, après cette date, avoir subi des vols qu'elle aurait dénoncés dans les conditions prévues par l'accord collectif national et le contrat de co-gérance précité, a privé sa décision de base légale au regard des articles précités, ensemble les articles L. 122-14-3 (devenu L. 1232-1 et s) et L. 122-14-4 (devenu L. 1235-2 et s) du Code du travail.

4° - ALORS QUE les jugements doivent être motivés, la contradiction de motifs équivalant à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a considéré que les manquants constatés le 1er août 2005 n'étaient pas imputables à la co-gérante mais à des problèmes de sécurité et de vol ; qu'en se déterminant ainsi tout en constatant que la société CASINO, informée de problèmes de sécurité et de vol en octobre 2004, avait versé des sommes aux gérants pour financer la présence d'un vigile pendant quelques mois en 2004 et 2005, ce dont il résulte que les problèmes de sécurité et de vol étaient résolus lors du déficit d'inventaire de 2005, la Cour d'appel, qui a statué par des motifs contraires, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-43158
Date de la décision : 08/12/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 05 mai 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 déc. 2009, pourvoi n°08-43158


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Odent, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.43158
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