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06/10/2010 | FRANCE | N°09-12686

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 octobre 2010, 09-12686


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu qu'à la suite de la suspension, par ordonnance du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans du 2 mai 2007, de l'exécution de la décision du 15 mars 2007 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial (CDEC) du Cher avait autorisé la société Samdis à créer un supermarché, un juge des référés de l'ordre judiciaire a, le 6 juillet 2007, ordonné la fermeture de l'établissement sous astreinte ; que, par arrêt du 19 octobre 2007, le Conseil d'Etat a annulé l'

ordonnance du 2 mai 2007 ; que, par arrêt du 28 mai 2008 (1re civ., n° 07-18....

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu qu'à la suite de la suspension, par ordonnance du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans du 2 mai 2007, de l'exécution de la décision du 15 mars 2007 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial (CDEC) du Cher avait autorisé la société Samdis à créer un supermarché, un juge des référés de l'ordre judiciaire a, le 6 juillet 2007, ordonné la fermeture de l'établissement sous astreinte ; que, par arrêt du 19 octobre 2007, le Conseil d'Etat a annulé l'ordonnance du 2 mai 2007 ; que, par arrêt du 28 mai 2008 (1re civ., n° 07-18.518) la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Bourges qui avait confirmé l'ordonnance du 6 juillet 2007 ; que, par arrêt du 2 décembre 2008, frappé d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé la décision de la CDEC du 15 mars 2007;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que la société Samdis fait grief à l'arrêt attaqué (Bourges, 19 mars 2009), rendu sur renvoi après cassation, d'avoir rejeté sa demande tendant à écarter les conclusions de la société CSF déposée le 4 février 2009, jour de l'ordonnance de clôture ;
Attendu qu'ayant constaté que les dernières écritures de la société CSF étaient des conclusions en réponse à celles produites par la société Samdis le 20 janvier 2009 qui faisaient état de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 2 décembre 2008 et du pourvoi formé contre cette décision, la cour d'appel a souverainement retenu qu'en tirant argument de cet arrêt produit par son contradicteur, la société CSF n'avait pas violé le principe de la contradiction ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le troisième moyen, pris en ses deux premières branches, ci-après annexé :
Attendu que la société Samdis fait grief à l'arrêt d'avoir jugé que la poursuite de l'exploitation du magasin constituait un trouble manifestement illicite ;
Attendu qu'ayant relevé que, par arrêt du 2 décembre 2008, la cour administrative d'appel de Nantes avait confirmé la décision du tribunal administratif d'Orléans du 12 février 2008 annulant la décision de la CDEC du 15 mars 2007 et que cet arrêt était exécutoire nonobstant le pourvoi en cassation formé par la société Samdis, la cour d'appel a constaté que cet arrêt avait pour conséquence de faire disparaître la décision de la CDEC et qu'il s'ensuivait que la société Samdis exploitait sans autorisation ; qu'elle en a exactement déduit l'existence d'un trouble manifestement illicite ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le deuxième moyen et la troisième branche du troisième, ci-après annexés :
Attendu que ces griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Samdis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Samdis à payer à chacune des sociétés CSF et Aineco la somme de 2 000 euros ; rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils pour la société Samdis.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de la Société SAMDIS visant à écarter les conclusions de la Société CSF du 4 février 2009 ;
AUX MOTIFS QUE ces conclusions sont des conclusions en réponse à celles produites par la Société SAMDIS le 20 janvier 2009 ; qu'au titre de la réponse aux conclusions adverses, la Société CSF tire argument de l'arrêt de la Cour Administrative de NANTES du 2 décembre 2008, décision à laquelle la Société SAMDIS était partie et dont elle ne pouvait dès lors pas ignorer la teneur d'autant qu'il s'agit d'un arrêt confirmant la décision du Tribunal Administratif d'ORLEANS du 12 février 2008 et qu'elle l'évoque expressément dans ses conclusions du 20 janvier 2009 produisant le pourvoi interjeté devant le Conseil d'Etat ; qu'il s'ensuit que le principe du contradictoire a été respecté et qu'il n'y a pas lieu à rejeter les conclusions de la Société CSF du 4 février 2009 ;
ALORS QU'il résulte des constatations mêmes de l'arrêt que dans ses conclusions en réponse déposées le jour de l'audience, la Société CSF invoquait pour la première fois des conséquences de droit de l'arrêt rendu le 2 décembre 2008 par la Cour Administrative d'Appel de NANTES ; que par ailleurs l'arrêt attaqué (p. 6, paragraphe 4) est fondé sur ces mêmes prétendues conséquences de droit de l'arrêt du 2 décembre 2008 en ce que celuici aurait impliqué une exploitation sans autorisation par la Société SAMDIS ; qu'en conséquence, en admettant, sans rouvrir les débats ou écarter les conclusions tardives, pouvoir retenir le bien-fondé d'un moyen de droit nouveau soulevé le jour même de l'audience, sans justifier par aucun motif comment la Société SAMDIS aurait été en mesure de s'expliquer sur ce moyen, qui nécessitait une réponse, et en quoi ce moyen avait été soulevé « en temps utile » pour permettre le respect du principe de la contradiction, la Cour d'Appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 15, 16 et 135 du Code de Procédure Civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR retenu la compétence du juge judiciaire ;
AUX MOTIFS QU'il y a lieu de constater que c'est à bon droit que le premier juge a retenu sa compétence dès lors qu'il était saisi sur le fondement de l'exercice d'une concurrence déloyale constitutive de trouble manifestement illicite qu'il convenait de faire cesser ; que par arrêt du 2 décembre 2008, la Cour Administrative d'Appel de NANTES a confirmé la décision du Tribunal Administratif d'ORLEANS du 12 février 2008 annulant la décision de la CDEC du 15 mars 2007 ; que cet arrêt nonobstant le pourvoi en cassation interjeté par la Société SAMDIS est exécutoire ; que cet arrêt a pour conséquence de faire disparaître la décision de la CDEC ; que par arrêt du 28 mars 2007, la Cour Administrative d'Appel de NANTES avait déjà confirmé le jugement du Tribunal Administratif d'ORLEANS annulant l'autorisation donnée par la CDEC le 24 février 2004 à Monsieur X... sous le couvert de la Société AMANDIS de créer un supermarché d'une surface de vente de 1 800 m² et deux boutiques de 90 m² à SAINT AMAND MONTROND ;
ALORS QUE le juge administratif est seul compétent pour apprécier la portée d'une autorisation d'une Commission Dé35 partementale d'Equipement Commercial ; que la solution du litige dépendait de l'appréciation de la portée de l'autorisation de la Commission Départementale d'Equipement Commercial du Cher du 15 mars 2007 en ce qui concerne le droit de continuer à exploiter l'établissement, en l'état de l'obtention par la Société SAMDIS par arrêté du 31 janvier 2005 d'un permis de construire délivré sur le fondement d'une autorisation valable de la CDEC en date du 20 février 2004, qui n'avait pas été annulé, et qui était de nature en conséquence à valoir maintien de l'autorisation d'exploitation de la surface commerciale au profit de la Société SAMDIS au moins jusqu'à la décision irrévocable à intervenir sur cette autorisation devant la juridiction administrative, toujours saisie en l'état du pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour Administrative d'Appel de NANTES du 2 décembre 2008 ; qu'ainsi la Cour d'Appel a méconnu le principe de la séparation des pouvoirs et la loi des 16 et 24 août 1790.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que la poursuite de l'exploitation du magasin constituait un trouble manifestement illicite ;
AUX MOTIFS QUE le défaut de respect de la réglementation administrative dans l'exercice d'une activité commerciale constitue une faute génératrice de trouble commercial pour un concurrent ; que les Sociétés AINECO et CSF qui exploitent respectivement dans la même zone de chalandise un supermarché Route de Moulins, à AINAY LE CHATEAU, sous l'enseigne ECOMARCHE pour la première, et d'un magasin à l'enseigne CHAMPION dans la Commune de SAINT AMAND MONTROND pour la seconde subissent cette concurrence déloyale qu'il y a lieu de faire cesser ;
ALORS QUE, D'UNE PART, le trouble dont un juge peut ordonner la cessation en référé en l'absence d'une contestation sérieuse doit être manifestement illicite ; Qu'ainsi, la Cour d'Appel n'était pas saisie du caractère exécutoire ou non de l'arrêt du 2 décembre 2008, mais de l'existence d'un trouble manifestement illicite ; qu'à défaut d'une décision irrévocable de la juridiction administrative annulant l'autorisation de la CDEC du 15 mars 2007, la poursuite de l'activité autorisée par cette décision ne pouvait constituer un trouble manifestement illicite, si bien que l'arrêt attaqué est privé de toute base légale au regard de l'article 873 du Code de Procédure Civile ; Qu'en conséquence, la Cour d'Appel n'a pas légalement établi le caractère manifestement illicite du trouble allégué, en l'état de la contestation sérieuse existant sur la portée respective du permis de construire non annulé et de la décision d'autorisation d'exploitation non annulée de manière irrévocable, violant l'article 873 du Code de Procédure Civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, le trouble dont un juge peut ordonner la cessation en référé en l'absence d'une contestation sérieuse doit être manifestement illicite ; Qu'ainsi, dès lors qu'il résultait de ses propres constatations que sur le fondement d'une autorisation valable du 20 février 2004, la Société SAMDIS avait obtenu la délivrance d'un permis de construire par arrêté du 28 avril 2005, qui avait fait l'objet de recours en annulation rejeté par la juridiction administrative, et qui était donc en l'état valable, il en résultait que cet arrêté du 28 avril 2005, qui valait autorisation d'exploitation commerciale, conférait à la Société SAMDIS un titre administratif non annulé pour la continuation de l'exploitation au moins jusqu'à l'issue de la procédure en cassation en cours sur l'annulation de l'autorisation donnée par la CDEC, et l'annulation de l'arrêté du 28 avril 2005 ; Qu'en conséquence, la Cour d'Appel n'a pas légalement établi le caractère manifestement illicite du trouble allégué, en l'état de la contestation sérieuse existant sur la portée respective du permis de construire non annulé et de la décision d'autorisation d'exploitation non annulée de manière irrévocable, violant l'article 873 du Code de Procédure Civile ;
ALORS, DE DERNIERE PART, QU'en ordonnant sous astreinte la fermeture d'un magasin en l'état d'une annulation non irrévocable de la décision d'autorisation d'exploitation, et de la délivrance d'un permis de construire non annulé, la Cour d'Appel a violé le principe de liberté d'établissement et l'article 43 du Traité Européen relatif à la liberté d'établissement.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 09-12686
Date de la décision : 06/10/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

REFERE - Mesures conservatoires ou de remise en état - Trouble manifestement illicite - Applications diverses - Exploitation sans autorisation d'un supermarché

Relevant qu'un arrêt d'une cour administrative d'appel confirmant l'annulation d'une autorisation donnée par une commission départementale d'équipement commercial est exécutoire nonobstant un pourvoi en cassation, une cour d'appel, constatant que cet arrêt a pour conséquence de faire disparaître la décision initiale, d'où il suit une exploitation sans autorisation, en déduit exactement l'existence d'un trouble manifestement illicite


Références :

Sur le numéro 1 : articles 15 et 16 du nouveau code de procédure civile
Sur le numéro 2 : article 873 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 19 mars 2009

Sur le n° 1 : Sur le caractère souverain de l'appréciation par les juges du fond de la communication en temps utile des pièces, à rapprocher : Ch. mixte, 3 février 2006, pourvoi n° 04-30592, Bull. 2006, Ch. mixte, n° 2 (rejet), et les arrêts cités. Sur le caractère souverain de l'appréciation par les juges du fond de moyens nouveaux ou de demandes nouvelles dans les dernières conclusions, à rapprocher :Ch. mixte, 26 mai 2006, pourvoi n° 03-16800, Bull. 2006, Ch. mixte, n° 3 (rejet). Sur le n° 2 : A rapprocher :1re Civ., 15 mai 2001, pourvoi n° 99-19334, Bull. 2001, I, n° 137 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 oct. 2010, pourvoi n°09-12686, Bull. civ. 2010, I, n° 194
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, I, n° 194

Composition du Tribunal
Président : M. Pluyette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Sarcelet
Rapporteur ?: M. Falcone
Avocat(s) : Me Odent, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.12686
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