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10/11/2010 | FRANCE | N°09-10587

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 novembre 2010, 09-10587


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 octobre 2008) que les consorts X..., propriétaires d'une parcelle grevée d'une servitude conventionnelle de passage au profit du fonds appartenant aux époux Y..., ont assigné ces derniers pour qu'ils soient condamnés à installer un portail fermant l'entrée de leur propriété située dans le prolongement du chemin constituant la servitude de passage, à leur payer une certaine somme au titre de la moitié des frais d'entretien de la servitude et à le

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 octobre 2008) que les consorts X..., propriétaires d'une parcelle grevée d'une servitude conventionnelle de passage au profit du fonds appartenant aux époux Y..., ont assigné ces derniers pour qu'ils soient condamnés à installer un portail fermant l'entrée de leur propriété située dans le prolongement du chemin constituant la servitude de passage, à leur payer une certaine somme au titre de la moitié des frais d'entretien de la servitude et à leur verser une indemnité pour perte de jouissance de leur propriété ;
Sur le premier moyen, après avis de la deuxième chambre civile, les avocats ayant été informés de cette demande d'avis :
Vu l'article 954 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que l'obligation faite à la partie qui conclut à l'infirmation du jugement d'énoncer expressément dans ses dernières écritures les moyens qu'elle invoque, ne s'étend pas aux écritures de cette même partie qui, sans énoncer de moyens nouveaux, sollicite la confirmation partielle du jugement ;
Attendu que pour rejeter la demande tendant à l'installation du portail, l'arrêt, infirmant le jugement, retient que les consorts X... n'ont pas motivé leur exigence ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les consorts X..., qui avaient conclu à la confirmation du jugement sans énoncer de nouveaux moyens, étaient réputés s'en être approprié les motifs, la cour d'appel, qui n'a pas répondu à ces moyens, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les autres moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande des consorts X... tendant à l'installation d'un portail fermant l'entrée de leur propriété située dans le prolongement du chemin constituant la servitude de passage, l'arrêt rendu le 20 octobre 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne les époux Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux Y... à payer aux consorts X... et Z..., ensemble, la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des époux Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils pour les consorts X... et les époux Z... ;
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts X...-Z... de leur demande tendant à voir imposer à Monsieur et Madame Y... l'installation d'un portail à l'entrée de leur propriété ;
AUX MOTIFS QUE les consorts X...
Z... n'ont pas motivé leur exigence, alors que les époux Y... s'opposent formellement à une telle installation ; que si l'article 647 du Code civil autorise tout propriétaire à clore son héritage, aucun texte ne saurait lui imposer une telle réalisation ;
1°) ALORS QUE la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs ; qu'en décidant néanmoins que les consorts X...-Z... qui, en concluant à la confirmation du jugement du Tribunal de grande instance de TOULON du 17 juillet 2006, s'en étaient appropriés les motifs, n'avaient pas motivé leur demande tendant à voir contraindre Monsieur et Madame Y... à installer un portail à l'entrée de leur propriété, la Cour d'appel a violé l'article 954, alinéa 4, du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE les consorts X...
Z... soutenaient, en concluant à la confirmation du jugement du Tribunal de grande instance de TOULON du 17 juillet 2006, de sorte qu'ils s'en étaient appropriés les motifs, que Monsieur et Madame Y... s'étaient engagés à clore l'entrée de leur propriété par l'installation d'un portail ; qu'en se bornant à affirmer que les consorts X...-Z... n'avaient pas motivé leur demande tendant à voir contraindre Monsieur et Madame Y... à installer un portail à l'entrée de leur propriété, sans répondre à leurs conclusions tirées de l'engagement verbal de Monsieur et Madame Y... de clore leur propriété privé, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE chacun peut contraindre son voisin, dans les villes et faubourgs, à contribuer aux constructions et réparations de la clôture faisant séparation de leurs maisons, cours et jardins ; qu'en décidant néanmoins qu'aucun texte ne saurait imposer à un propriétaire de clore son héritage, pour en déduire que les consorts X...-Z... ne pouvaient contraindre Monsieur et Madame Y... à installer un portail devant leur propriété, la Cour d'appel a violé les articles 647 et 663 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts X...-Z... de leur demande tendant à voir condamner Monsieur et Madame Y... à leur payer la somme de 3.380,56 € au titre de la moitié des frais d'entretien de la servitude de passage ;
AUX MOTIFS QUE, sur le portail installé par les consorts X... à l'entrée de la servitude de passage, les époux Y... avaient accepté de participer pour moitié aux frais d'installation de ce portail, soit à hauteur de 2.875,65 €, mais tout en rappelant que ce portail leur avait été imposé par les consorts X... et qu'ils ne pouvaient en faire un usage normal, puisqu'ils ne disposaient même pas de télécommandes pour les manoeuvrer, ce qui les obligeait à descendre de voiture pour actionner un digicode ; qu'ils ont donc refusé de participer aux frais d'entretien de ce portail et ils ont demandé la remise de cinq télécommandes ; que les consorts X... considèrent que l'usage du portail implique la participation à son entretien ; que toutefois, la Cour, retenant que la pose du portail avait été décidée unilatéralement par les époux X..., et que l'accord des époux Y... ne portait que sur les frais d'installation, déboute les consorts X...-Z... de leur demande relative à l'entretien de ce portail, tant que les époux Y... ne disposeront pas de télécommandes, ainsi qu'ils le précisent dans leurs conclusions ; que la condamnation que la Cour prononcera, au lieu et place du « donné acte » du Tribunal, portera sur la seule somme de 2.875,65 € ; que, quant aux télécommandes destinées aux époux Y..., la Cour réforme le jugement et en limite la remise à deux exemplaires gratuits, le surplus susceptible de leur être utile pouvant faire l'objet d'un achat séparé et à leurs frais ;
ALORS QUE le propriétaire du fonds dominant est tenu de supporter les frais d'entretien de la servitude de passage s'il est seul à l'utiliser, à moins d'un partage avec le propriétaire du fonds servant si ce dernier l'utilise également ; qu'en décidant néanmoins que Monsieur et Madame Y... n'étaient pas tenus de supporter l'entretien du portail, après avoir pourtant constaté qu'ils faisaient usage de cette servitude, peu important qu'ils n'aient pas disposé de télécommandes, la Cour d'appel a violé les articles 697 et 698 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts X...-Z... de leur demande tendant à voir condamner Monsieur et Madame Y... à leur payer la somme de 7.622,45 €, avec intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 1993, au titre de l'indemnisation pour perte de jouissance de leur propriété ;
AUX MOTIFS QUE, sur l'indemnité pour perte de jouissance demandée par les consorts X..., la demande est fondée sur le fait que la modification de l'assiette de la servitude de passage, initialement fixée à 5,50 mètres, s'est trouvée élargie à 6 mètres, puis à 11 mètres, sur leur parcelle ; que cependant, le nouveau tracé a fait l'objet d'un accord entre les parties et il profite aux deux fonds, dont l'accès est ainsi facilité; que la preuve d'un réel préjudice n'est pas rapportée ; que la Cour confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les consorts X... ;
ALORS QUE les propriétaires de fonds contigus qui conviennent d'instaurer une servitude de passage peuvent prévoir une indemnisation au profit du fonds servant ; qu'en se bornant à affirmer que le nouveau tracé de la servitude avait fait l'objet d'un accord entre Monsieur et Madame Y..., d'une part, et Monsieur et Madame X..., d'autre part, sans rechercher si les parties avaient prévu le versement d'une indemnité au profit de ce dernier, au titre de l'indemnisation pour la perte de jouissance d'une partie de leur propriété, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 682 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 09-10587
Date de la décision : 10/11/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Conclusions - Conclusions d'appel - Dernières écritures - Mentions obligatoires - Etendue - Demande de confirmation partielle de la décision entreprise - Effet

PROCEDURE CIVILE - Conclusions - Conclusions d'appel - Conclusions demandant la confirmation de la décision entreprise sans énoncer de moyens nouveaux - Office du juge - Etendue CASSATION - Moyen - Défaut de réponse à conclusions - Conclusions d'appel - Conclusions demandant la confirmation de la décision entreprise - Portée

Il résulte de l'article 954 du code de procédure civile que l'obligation faite à la partie qui conclut à l'infirmation du jugement d'énoncer expressément dans ses dernières écritures les moyens qu'elle invoque, ne s'étend pas aux écritures de cette même partie qui, sans énoncer de moyens nouveaux, sollicite la confirmation partielle du jugement. Viole dès lors les dispositions de ce texte, l'arrêt qui, pour rejeter une demande, retient que les demandeurs n'ont pas motivé leur exigence , alors qu'ayant conclu à la confirmation du jugement sans énoncer de nouveaux moyens, ils étaient réputés s'en être approprié les motifs et, en conséquence, la cour d'appel était tenue de répondre à ces moyens


Références :

article 954 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 20 octobre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 10 nov. 2010, pourvoi n°09-10587, Bull. civ. 2010, III, n° 202
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, III, n° 202

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Gariazzo (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Feydeau
Avocat(s) : Me Odent, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.10587
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