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06/01/2011 | FRANCE | N°09-71045

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 janvier 2011, 09-71045


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 octobre 2009), que Mme X..., engagée à compter du 12 avril 1988 par la société Resarch International, aux droits de laquelle vient la société TNS Sofres, a été licenciée le 2 septembre 2002 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement moral et licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en cas de litige relatif à l'application de

l'article L.1152-1 à L.1152-3 et L.1153-1 à L.1153-4 du code du travail, dès lors qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 octobre 2009), que Mme X..., engagée à compter du 12 avril 1988 par la société Resarch International, aux droits de laquelle vient la société TNS Sofres, a été licenciée le 2 septembre 2002 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement moral et licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en cas de litige relatif à l'application de l'article L.1152-1 à L.1152-3 et L.1153-1 à L.1153-4 du code du travail, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, le juge fondant sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instructions qu'il estime utiles ; qu'en énonçant, pour débouter Mme X... de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral, que la Société TNS-Sofres avait engagé une procédure d'enquête sur les faits dénoncés par Mme X... et organisé une réunion contradictoire, à l'issue desquelles la société avait dressé un compte-rendu constatant que les allégations de Mme X... n'étaient assorties d'aucune démonstration invitant celle-ci à apporter la preuve de faits précis et circonstanciés, demande à laquelle elle n'avait pas donné suite, et que cette carence persistait à ce jour sur des faits simples et objectifs dont la preuve serait facile à apporter s'ils étaient réels, la cour d'appel a violé l'article L.1154-1 du code du travail ;
2°/ qu'en s'abstenant de s'expliquer, comme elle y était invitée, sur les conséquences du comportement de l'employeur sur l'état de santé de Mme X..., qui faisait valoir qu'elle avait souffert d'une véritable crise d'anxiété à la suite de ce comportement, dont elle justifiait par la production de deux pièces, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, ayant constaté que l'employeur prouvait que les éléments apportés par la salariée n'étaient pas constitutifs de harcèlement moral et que les décisions litigieuses étaient justifiées par les insuffisances et l'attitude de Mme X..., c'est sans violer les textes invoqués par la première branche du moyen et sans avoir à répondre au moyen tiré d'un lien entre les faits de harcèlement inexistants et l'éventuel état d'anxiété de la salariée, qu'elle l'a déboutée de sa demande ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article L. 1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés ; que toute rupture du contrat de travail en méconnaissance des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 du code du travail, toute disposition ou tout acte contraire est nul ; qu'il s'en déduit que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis ; qu'en retenant que les défaillances de Mme X... devaient être mises en perspective avec le comportement de la salarié adoptant une attitude polémique allant jusqu'à la dénonciation d'un prétendu harcèlement moral, et qu'elle caractérisait ainsi non pas une simple insuffisance professionnelle mais une mauvaise volonté délibérée justifiant le licenciement disciplinaire prononcé par l'employeur, sans qu'il résulte de ces énonciations que Mme X... ait fait preuve de mauvaise foi en dénonçant le harcèlement dont elle estimait être l'objet, la cour d'appel a violé l'article 1152-2, l'article L. 1152-3 et l'article L. 1232-1 du code du travail ;
2°/ qu'il résulte des dispositions de l'article 133-11 du code pénal et des articles 11 et 12 de la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie qu'une sanction disciplinaire amnistiée comme étant relative à des faits commis avant le 17 mai 2002 ne peut être invoquée à l'appui d'un licenciement ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur la référence, dans la lettre de licenciement, aux deux avertissements notifiés à Mme X... le 29 octobre 2001 et le 22 mars 2002 bien qu'ils aient été amnistiés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en regard des textes susvisés, ainsi que de l'article L. 1232-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche du moyen, c'est sans se fonder sur les avertissements amnistiés que la cour d'appel, faisant usage du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, a décidé que le licenciement de Mme X... reposait sur une cause réelle et séreuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame X... de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE par courrier du 15 avril 2002, Madame Sakina X... a dénoncé à sa hiérarchie des faits de harcèlement moral imputables à Monsieur Jean-Baptiste Y..., directeur administratif et financier, et se traduisant par des ordres et des contrordres, des réunions impromptues tard le soir, des admonestations humiliantes, des reproches infondés sur la prise de congés, des imputations d'erreurs commises par d'autres, deux avertissements en quatre mois, l'oubli de la convier à un déjeuner d'équipe ; que la SAS TNS SOFRES a engagé une procédure d'enquête sur les faits dénoncés et organisé une réunion contradictoire qui s'est tenue le 20 juin 2002, après report d'un premier rendez-vous fixé au 12 juin 2002, Madame Sakina X... ayant voulu se faire assister par une personne extérieure à l'entreprise, ce qui n'a pas été accepté par l'employeur. Le 20 juin 2002, elle a été assistée par un membre du comité d'entreprise, Madame Armelle Z... ; qu'à l'issue de la réunion, la SAS TNS SOFRES en a dressé un compte-rendu constatant que les allégations de Madame Sakina X... n'étaient assorties d'aucune démonstration et invitant cette dernière à apporter la preuve de faits précis et circonstanciés ; que Madame Sakina X... n'a pas donné suite à cette demande ; que cette carence persiste à ce jour car sur des faits simples, objectifs et dont la preuve serait facile à rapporter s'ils étaient réels, tels que des ordres suivis de contrordres lorsque les premiers ont été exécutés, l'obligation d'assister à des réunions tardives ou de travailler jusqu'à 20 heures, le fait de n'avoir pas été invitée à un déjeuner d'équipe (repas de fin d'année), aucun élément sérieux, tel que des dates de réunion et le nom des participants, n'est produit aux débats ; que sur le dernier point, il a été rappelé à Madame Sakina X... lors de l'entretien du 20 juin 2002 qu'elle avait bien participé à ce repas, se trouvant placée à table entre Monsieur Y... et la directrice des ressources humaines, ce qu'elle n'a pas démenti ;
QU'en dénonçant des reproches injustifiés sur ses prises de congés, Madame Sakina X... fait manifestement allusion à une circonstance rappelée par Monsieur Y... lors du débat contradictoire : elle a informé ce dernier par un post-it de son départ lePvendredi et de son absence le lundi suivant alors qu'il était convenu de terminer un travail urgent avant la fin de la semaine ; que cela a donné lieu à un échange de courriels (pièce 28 de la SAS TNS SOFRES) où Monsieur Y... exprime certes un certain agacement maisPne remet nullement en cause la prise de congé par elle-même ; que d'ailleurs, conscient que l'organisation du service pouvait être défectueuse sur ce point, il a instauré un système de planning, apportant ainsi une réponse constructive à l'incident qui ne peut en rien s'inscrire dans une démarche de déstabilisation de la salariée ;
QUE d'une manière générale, la communication au sein de l'entreprise se faisant principalement par courriels, il ressort de l'ensemble de ceux qui sont produits aux débats que Monsieur Y... a toujours usé d'un ton courtois et respectueux à l'égard de Madame Sakina X..., même s'il pouvait être ferme en donnant ou en réitérant certaines consignes importantes, aucune de ses directives n'étant marquée par l'incohérence dénoncée par la salariée.
QUE Madame Sakina X... fait valoir qu'elle s'est vu attribuer des erreurs qu'elles n'a pas commises, faisant référence en réalité à un fait unique concernant l'envoi en juin 2001 à la société PERNOD aux lieu et place de la société RICARD d'une facture sur une étude stratégique confidentielle avec le nom du projet et le montant de l'étude. L'erreur a été commise matériellement par un intérimaire, Monsieur Frédéric A..., mais Madame Sakina X... devant superviser son travail, il n'était pas abusif pour son supérieur de lui en attribuer une part de responsabilité, d'autant que quelques jours auparavant elle avait, cette fois personnellement, commis la même erreur entre BOUYGUES TELECOM et FRANCE TELECOM ; que de plus elle a ensuite relancé la société RICARD par téléphone (pièces 33,35 et 39 de l'employeur) alors que la SAS TNS SOFRES était en négociation avec elle pour régler les conséquences de l'impair du mois de juin ; que les erreurs du mois de juin 2001 ont donné lieu à une mise en garde écrite du juillet 2001. Madame Sakina X... a ensuite fait l'objet de deux avertissements, les 29 octobre 2001 et 22 mars 2002, en raison de nouvelles erreurs commises dans son travail, ce qui ne peut caractériser une entreprise de harcèlement moral dans un contexte où son supérieur lui donne des consignes claires, attire régulièrement son attention sur les points essentiels de ses fonctions et lui propose son aide pour surmonter ses difficultés et progresser, faisant preuve, dans l'exercice légitime de ses responsabilités hiérarchiques, d'une rigueur mesurée accompagnée de la pédagogie et de la patience nécessaires, ce qu'illustre par exemple son courriel en date du 9 avril 2002 : "tu sais qu'il ne faut pas hésiter à nous tenir informés des problèmes que tu rencontres afin de t'aider à remplir la tâche prioritaire qui t'est confiée et qui ne devrait pas te créer une quelconque surcharge, sauf si tu rencontrais des difficultés que nous t'invitons donc à signaler aussitôt".
QUE sur la qualification du licenciement, les défaillances de Madame X..., mises en perspective avec le comportement de la salariée négligeant les consignes qui lui étaient données, contestant sans cesse les remarques justifiées qui lui étaient adressées, se plaçant dans une démarche d'opposition stérile et adoptant une attitude polémique allant jusqu'à la dénonciation d'un prétendu harcèlement moral, exaspérant ainsi tant sa hiérarchie que ses collègues (pièce 21 de l'employeur), ne caractérisent pas une simple insuffisance professionnelle mais sont le produit de la mauvaise volonté délibérée de Madame Sakina X..., préjudiciable à la bonne marche de l'entreprise et justifient le licenciement disciplinaire prononcé par l'employeur ;
AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE l'article L.122-49 du code du travail définit le harcèlement moral comme les agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que l'article L.122-52 précise qu'en cas de litige relatif au harcèlement moral dès lors que le salarié concerné établi des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse au vu des ces-éléments de prouver que ces agissements-ne-sont pas constitutifs d'un telharcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce Madame X... soutient que les deux avertissements prononcés à son encontre le 2 décembre 2001 et le 22 mars 2002 constituent des faits de harcèlement, n'étant ni l'un ni l'autre fondés, que malgré la dénonciation du comportement de Monsieur Y... à son égard l'employeur n'a rien fait et qu'elle n'a pu être assistée à l'occasion de l'entretien contradictoire organisé par l'employeur ; qu'il résulte des pièces de la procédure que contrairement à ce que soutient la demanderesse, l'employeur a mise en oeuvre l'instruction de la dénonciation des faits par la salariée notamment en organisant le 20 juin 2002 une réunion avec Madame X... et son supérieur hiérarchique Monsieur Y... ; que la salariée était accompagnée, contrairement à ce qu'elle soutient, par un membre du comité d'entreprise en la personne de Madame

Z...

; que cette réunion contradictoire a donné lieu à un compte rendu que la salariée n'a pas contestée ; que suite à cette réunion, l'employeur a à nouveau demandé à la salariée de lui fournir l'intégralité des informations pouvant caractériser les faits qu'elle reproche à Monsieur Y..., Madame X... étant restée imprécise sur ses accusations ; que Madame X... n'a jamais donné suite à cette demande n'y répondant pas ; qu'il ressort du compte rendu de cette réunion que le comportement de Monsieur Y... qui a notifié deux avertissement est justifié par les difficultés d'exécution de son travail rencontrées par la demanderesse ; que Madame X... qui dénonçait à son employeur par courrier du 15 avril 2002 un certain nombre de faits ne rapporte cependant pas la preuve des faits dénoncés à savoir d'avoir reçu des ordres et contre-ordres alors même que toute la communication au sein de l'entreprise se fait par courriels, d'avoir dû se rendre à des réunions impromptues, d'avoir dû supporter des remarques désobligeantes de Monsieur Y..., des reproches concernant ses congés et de ne pas avoir été invitée à un déjeuner d'équipe ; que le fait pour un supérieur hiérarchique d'adresser un courrier à son salarié lui reprochant deux erreurs de facturation consistant à avoir adressé une facture d'un client au concurrent direct de celui-ci et attirant son attention sur la nécessité de se concentrer sur son travail et de prononcer par la suite dans un délai de trois mois deux avertissements à un salarié en raison des erreurs commises dans son travail, ne peut constituer des faits laissant présumer l'existence de faits constitutifs de harcèlement moral ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en cas de litige relatif à l'application de l'article L.1152-1 à L.1152-3 et L.1153-1 à L.1153-4 du Code du travail, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, le juge fondant sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instructions qu'il estime utiles ; qu'en énonçant, pour débouter Madame X... de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral, que la Société TNS-SOFRES avait engagé une procédure d'enquête sur les faits dénoncés par Madame X... et organisé une réunion contradictoire, à l'issue desquelles la Société avait dressé un compte-rendu constatant que les allégations de Madame X... n'étaient assorties d'aucune démonstration invitant celle-ci à apporter la preuve de faits précis et circonstanciés, demande à laquelle elle n'avait pas donné suite, et que cette carence persistait à ce jour sur des faits simples et objectifs dont la preuve serait facile à apporter s'ils étaient réels, la Cour d'appel a violé l'article L.1154-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en s'abstenant de s'expliquer comme elle y était invitée sur les conséquences du comportement de l'employeur sur l'état de santé de Madame X..., qui faisait valoir qu'elle avait souffert d'une véritable crise d'anxiété à la suite de ce comportement, dont elle justifiait par la production de deux pièces, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.1152-1 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame X... de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les pièces versées aux débats par la SAS TNS SOFRES établissent de manière, objective les défaillances répétées de Madame Sakina X... dans l'accomplissement de ses tâches, y compris celles qui lui étaient signalées comme d'une particulière importance, notamment le suivi des factures et la relance des clients débiteurs de la société, avec fixation d'un critère objectif constitué par l'ancienneté de la dette, point sur lequel ses résultats ne se sont pas améliorés, le délai moyen s'étant même allongé en 2002 ; que d'ailleurs Madame Sakina X... se borne à faire valoir qu'elle relançait bien les clients par téléphone ou par fax, modalités que précisément son supérieur lui avait demandé d'abandonner en raison de son inefficacité, au profit d'une procédure écrite très précise avec des étapes bien déterminées ayant fait l'objet d'une mise au point dès juillet 2001, mais qu'elle n'a jamais mise en oeuvre réellement ; que des erreurs répétées, notamment dans la facturation, sont également établies ; que Madame Sakina X... soutient qu'elle avait une charge de travail excessive et qu'elle n'était pas suffisamment formée à l'utilisation de l'outil informatique, d'ailleurs déficient ; que la surcharge de travail n'est pas démontrée dans la durée, même si elle a pu exister ponctuellement, notamment lors des clôtures de comptes ; qu'à l'instar de ce qui a été constaté à propos des réunions tardives évoquées par ailleurs, Madame Sakina X... ne fournit aucun document justificatif sur les heures supplémentaires, les congés annulés, les impossibilités de prendre sa pause déjeuner qu'elle mentionne pour illustrer la surcharge alléguée ; que cet élément ne saurait donc expliquer les défaillances récurrentes constatées ; par ailleurs Madame Sakina X... a bénéficié de formations sur les outils spécifiques adoptés par l'entreprise (Maconomy) et en dernier lieu, à sa demande, d'une formation sur le logiciel Excel, pour lequel elle n'a toutefois suivi que le premier cours (1 heure le 11 octobre 2001), s'abstenant de prendre d'autres rendez- vous avec sa formatrice, malgré des relances ; que quant aux difficultés de matériel, elles ont pu survenir lors d'un changement de système informatique, bien antérieur aux faits visés dans la lettre de licenciement ;
QUE ces défaillances, mises en perspective avec le comportement de la salariée négligeant les consignes qui lui étaient données, contestant sans cesse les remarques justifiées qui lui étaient adressées, se plaçant dans une démarche d'opposition stérile et adoptant une attitude polémique allant jusqu'à la dénonciation d'un prétendu harcèlement moral, exaspérant ainsi tant sa hiérarchie que ses collègues (pièce 21 de l'employeur), ne caractérisent pas une simple insuffisance professionnelle mais sont le produit de la mauvaise volonté délibérée de Madame Sakina X..., préjudiciable à la bonne marche de l'entreprise, et justifient le licenciement disciplinaire prononcé par l'employeur.
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE la lettre de licenciement est articulée autour de deux griefs l'un concernant les manquements dans l'exécution des tâches et l'autre la mésentente ; qu'en ce qui concerne le premier d'entre eux, il ressort des pièces de la procédure et notamment d'un courrier électronique du 27 juin 2001 de Monsieur Y... à la demanderesse ainsi que de sa lettre du 9 juillet 2001 que l'attention de Madame X... a été attirée sur la nécessité d'un meilleur suivi du poste client avec une amélioration de la balance ; que malgré cette lettre, Monsieur Y... était amené à rappeler ses instructions le 20 septembre en prenant connaissance d'impayés depuis de nombreux mois voire d'années ainsi qu'il ressort des échanges de courriers entre les parties ; que ces erreurs ont été à l'origine d'une réunion de travail entre la salariée et Monsieur Y..., ainsi qu'à la décision de l'employeur d'assurer une formation supplémentaire à la demanderesse à compter d'octobre 2001 ; que malgré tout l'employeur a relevé par d'autres erreurs que le suivi client n'était pas assuré conformément à ses instructions par ailleurs contestées par laPdemanderesse ; que ces difficultés ont perduré lors de rétablissement des balances en février 2002, malgré toutes les demandes de l'employeur qui constatait que le temps de règlement des clients s'était allongé de onze jours en 2001 à quarante-six et même cinquante-sept jours en 2002 ; que Monsieur Y... a rappelé à plusieurs reprises à la salariée qu'elle devait le tenir informé en cas de problèmes rencontrés afin d'être aidée ; que le fait pour une salariée de ne pas tenir compte des observations, des remarques, des demandes précises de l'employeur quant à la tenue des dossiers dont elle avait la tâche, à qui a été dispensée une formation informatique complémentaire et à qui l'employeur recommande de lui faire part des difficultés rencontrées afin qu'elle puisse être aidée constitue bien le manquement professionnel reproché ;
QUE le second grief est relatif à la mésentente de la salariée avec ses collègues et sa hiérarchie ; que si la mésentente ne constitue pas en elle même un motif réel et sérieux de licenciement elle peut cependant le devenir si elle est induite par une attitude d'opposition ou de déloyauté dénature à nuire au bon fonctionnement de l'entreprise ; que les courriels adressés par la demanderesse versés aux débats ainsi que ceuxPdes autres salariés établissent que Madame X... a adopté une attitude polémique Pcontestant sans cesse les remarques qui lui étaient faites quant à la qualité de son travail et les demandes qui lui étaient faites ; que refusant d'entendre les remarques à elle faites, Madame X... a continuéPà commettre ne pas travailler conformément aux demandes de son employeur causant, par la nature de ses manquements des difficultés avec les clients en adressant par exemple la facture de l'un à son concurrent direct et en n'effectuant pas les rappels de facture comme il lui était demandé créant ainsi un retard dans le paiement au détriment de son employeur ; que dans ces circonstances, l'employeur ajustement élevé la mésentente en cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'il s'ensuit que les deux griefs articulés dans la lettre de licenciement étant établis, le licenciement de Madame X... est bien pourvu d'une cause réelle et sérieuse ;
ALORS QU'aux termes de l'article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés ; que toute rupture du contrat de travail en méconnaissance des articles L.1152-1 et L.1152-2 du Code du travail, toute disposition ou tout acte contraire est nul ; qu'il s'en déduit que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis ; qu'en retenant que les défaillances de Madame X... devaient être mises en perspective avec le comportement de la salarié adoptant une attitude polémique allant jusqu'à la dénonciation d'un prétendu harcèlement moral, et qu'elle caractérisait ainsi non pas une simple insuffisance professionnelle mais une mauvaise volonté délibérée justifiant le licenciement disciplinaire prononcé par l'employeur, sans qu'il résulte de ces énonciations que Madame X... ait fait preuve de mauvaise foi en dénonçant le harcèlement dont elle estimait être l'objet, la Cour d'appel a violé l'article 1152-2, l'article L.1152-3 et l'article L.1232-1 du Code du travail ;
ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'il résulte des dispositions de l'article 133-11 du Code pénal et des articles 11 et 12 de la loi n°2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie qu'une sanction disciplinaire amnistiée comme étant relative à des faits commis avant le 17 mai 2002 ne peut être invoquée à l'appui d'un licenciement ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur la référence, dans la lettre de licenciement, aux deux avertissements notifiés à Madame X... le 29 octobre 2001 et le 22 mars 2002 bien qu'ils aient été amnistiés, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en regard des textes susvisés, ainsi que de l'article L.1232-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-71045
Date de la décision : 06/01/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 octobre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 jan. 2011, pourvoi n°09-71045


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Ricard, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.71045
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