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23/02/2011 | FRANCE | N°09-72420

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 23 février 2011, 09-72420


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Nîmes, 26 juin 2009) et les pièces de la procédure, que la rétention administrative de Mme X..., de nationalité nigériane, qui faisait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière, a été prolongée pour une durée de 15 jours par une ordonnance du 20 juin 2009 rendue par un juge des libertés et de la détention ; que le 21 juin 2009 Mme X... a été placée en garde à vue pour des faits commis pendant son

placement en rétention ; qu'à l'issue de l'audience du tribunal correctionne...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Nîmes, 26 juin 2009) et les pièces de la procédure, que la rétention administrative de Mme X..., de nationalité nigériane, qui faisait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière, a été prolongée pour une durée de 15 jours par une ordonnance du 20 juin 2009 rendue par un juge des libertés et de la détention ; que le 21 juin 2009 Mme X... a été placée en garde à vue pour des faits commis pendant son placement en rétention ; qu'à l'issue de l'audience du tribunal correctionnel devant lequel elle a comparu le 22 juin 2009 elle a été reconduite au centre de rétention administrative ; que le 23 juin 2009, Mme X... a demandé à un juge des libertés et de la détention de mettre fin à sa rétention sur le fondement de l'article R. 552-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur le premier moyen et les première et troisième branches du second moyen, ci-après annexés :

Attendu que ces griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le second moyen, pris en sa deuxième branche, ci-après annexé :

Attendu que Mme X... fait grief à l'ordonnance d'avoir rejeté sa requête tendant à sa remise en liberté et dit que l'ordonnance du 20 juin 2009 ayant autorisé la prolongation de la rétention administrative devait continuer à produire ses pleins et entiers effets ;

Attendu qu'ayant retenu que la privation de liberté dont Mme X... avait fait l'objet était régulière puisqu'autorisée par un juge des libertés et de la détention et que cette privation de liberté ne pouvait conférer à l'étranger retenu une quelconque immunité contre les actions judiciaires dont il pouvait être amené à répondre pour un délit commis au cours et dans le cadre de la rétention, le premier président en a exactement déduit que la procédure judiciaire ouverte et achevée pendant le temps de la rétention n'avait pas pu mettre un terme à cette mesure destinée à organiser et exécuter une décision d'éloignement et qui devait continuer à produire ses effets pendant tout le temps pour lequel elle avait été judiciairement autorisée ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois février deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir rejeté la requête de Mme X... tendant à sa remise en liberté et dit que l'ordonnance du 20 juin 2009 ayant autorisé la prolongation de la rétention administrative devait continuer à produire ses pleins et entiers effets ;

Aux motifs qu'« le MP a développé les motifs de son recours exposé dans l'acte d'appel » ;

Alors que l'étranger est seulement maintenu à la disposition de la justice jusqu'à ce que le premier président a statué sur la demande du ministère public visant à déclarer l'appel suspensif ou, s'il a donné un effet suspensif à cet appel, jusqu'à ce qu'il soit statué sur le fond ; qu'en l'absence d'une ordonnance ayant accordé un effet suspensif à l'appel du ministère public, l'étranger ne peut être maintenu à la disposition de la justice ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans déclarer, par une ordonnance distincte, l'appel du ministère public suspensif, le Premier Président de la cour d'appel a violé l'article R552-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir rejeté la requête de Mme X... tendant à sa remise en liberté et dit que l'ordonnance du 20 juin 2009 ayant autorisé la prolongation de la rétention administrative devait continuer à produire ses pleins et entiers effets ;

Aux motifs qu'« en exécution d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière, Madame X...
Y... a été placée au centre de rétention administrative de Nîmes, le 19 juin 2009 ; que celle-ci a été mise en garde à vue à l'hôtel de police de cette même localité, le 21 juin 2009, à 16 heures, aux fins d'enquête sur des faits commis au cours de la rétention et a, sans solution de continuité, comparu devant le tribunal correctionnel qui l'a condamnée ; qu'après ce jugement, cette étrangère a regagné le centre de Nîmes, le 22 juin 2009, à 18h40 ; que par une requête enregistrée le 23 juin 2009 à 17h45 la même saisissait, sur le fondement de l'article R 552-17 du CESEDA, le juge des libertés et de la détention à qui elle demandait sa mise en liberté ; qu'il était fait droit à cette requête par une décision du 25 juin, dont le Ministère public interjetait aussitôt appel ; qu'il est reproché à l'autorité administrative d'avoir ainsi replacé Madame X...
Y... dans le centre d'où elle avait été extraite pour les suites de la procédure judiciaire susmentionnée, sans qu'il y ait eu un nouvel arrêté de maintien en rétention ; que cette étrangère conclut, ainsi, que la mesure de garde à vue a mis un terme définitif à la rétention décidée par le Préfet du Gard ; que la privation de liberté dont cette étrangère a fait l'objet est régulière, puisqu'autorisée par le juge des libertés et de la détention qui, le 20 juin 2009, a prolongé la rétention pour une durée de quinze jours ; que cette privation de liberté ne peut conférer à l'étranger une quelconque immunité contre les actions judiciaires, qui a donc pu être régulièrement amené à répondre d'un délit commis au cours et dans le cadre de la rétention ; que cette procédure judiciaire ouverte et achevée pendant le temps de la rétention n'a donc pu mettre un terme à cette mesure qui est destinée à organiser et exécuter une décision d'éloignement et qui doit continuer à produire ses entiers effets pendant tout le temps pour lequel a été, notamment judiciairement, autorisée ; qu'il n'est justifié d'aucun fait particulier qui pouvait amener le juge judiciaire à sanctionner une irrégularité attentatoire à une liberté qui avait déjà été régulièrement retirée à l'étranger dont il s'agit ; que dans de pareilles circonstances, il n'y avait pas lieu à nouvel arrêté de maintien en rétention, et à l'accomplissement des formalités subséquentes » ;

Alors, d'une part, qu'un étranger en rétention administrative est placé sous le contrôle du juge des libertés et de la détention qui doit être informé de tout déplacement de cet étranger du centre de rétention ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il l'y était invitée, si la rétention administrative de Mme X... n'était pas irrégulière, faute pour le juge des libertés et de la détention d'avoir été informé de son déplacement du centre de rétention administrative, de son placement en garde à vue puis de son retour en centre de rétention, le Premier Président de la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 553-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Alors, d'autre part, que le placement en garde à vue interrompt la mesure de rétention administrative qui cesse de produire ses effets ; qu'en retenant que le placement en garde à vue de Mme X... n'avait pas mis un terme à la procédure de rétention administrative, le Premier Président de la cour d'appel, qui a méconnu l'effet interruptif de la garde à vue, a violé l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Alors, enfin, que le juge, gardien de la liberté individuelle, s'assure par tous moyens que l'intéressé a été pendant son placement en rétention administrative pleinement informé de ses droits et placé en mesure de les faire valoir ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans s'assurer que Mme X... avait été, pendant la période de sa garde à vue, mise en mesure d'exercer effectivement les droits qui lui sont reconnus, le premier président de la cour d'appel a violé les articles 66 de la Constitution du 4 octobre 1958 et L. 552-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 09-72420
Date de la décision : 23/02/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ETRANGER - Mesures d'éloignement - Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire - Procédure judiciaire pendant le temps de rétention administrative - Effet interruptif (non)

La procédure judiciaire ouverte et achevée pendant le temps de la rétention administrative d'un étranger ne met pas un terme à cette mesure qui continue à produire ses effets jusqu'à l'expiration du délai judiciairement fixé


Références :

article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 26 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 23 fév. 2011, pourvoi n°09-72420, Bull. civ. 2011, I, n° 36
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, I, n° 36

Composition du Tribunal
Président : M. Pluyette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Mellottée
Rapporteur ?: M. Falcone
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.72420
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