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29/02/2012 | FRANCE | N°10-20999

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 29 février 2012, 10-20999


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office après avis donné aux parties :
Vu l'article 829 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006, ensemble l'article 620, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu qu'il ressort du premier de ces textes que donnent lieu à rapport les dettes dont un héritier est tenu envers la succession ou l'indivision consécutive à l'ouverture de celle-ci ;
Attendu que, par acte authentique du 22 janvier 1981, Serge X... et son épouse, Mar

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office après avis donné aux parties :
Vu l'article 829 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006, ensemble l'article 620, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu qu'il ressort du premier de ces textes que donnent lieu à rapport les dettes dont un héritier est tenu envers la succession ou l'indivision consécutive à l'ouverture de celle-ci ;
Attendu que, par acte authentique du 22 janvier 1981, Serge X... et son épouse, Marthe Y..., mariés sous le régime conventionnel de la communauté de bien réduite aux acquêts, ont consenti un prêt à leur fils, M. Noël X... ; que Serge X... est décédé le 12 octobre 2000 en laissant à sa succession sa veuve et leurs trois enfants, MM. Noël et Jacky X... et Mme Marie-José X..., épouse Z... ; que, dans l'instance en liquidation-partage de la succession, M. Jacky X... a demandé que son frère Noël rapporte à la succession les sommes dues en remboursement du prêt ; qu'à la suite du décès de Marthe Y..., M. Jacky X... et Mme Z... ont repris l'instance en leur qualité d'héritiers de celle-ci ;
Attendu que, pour confirmer le jugement qui a dit que M. Noël X... devra rapport à la succession de son père de la moitié du capital augmentée des intérêts calculés selon les termes du contrat, l'arrêt attaqué, par motifs propres et adoptés, après avoir constaté qu'il n'est pas contesté que, s'agissant d'une créance commune, Marthe Y... en est titulaire en propre par l'effet de la convention matrimoniale, a retenu que, constituant une donation pour moitié, la somme due est rapportable ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de cette constatation que seule l'épouse survivante était créancière de M. Noël X..., de sorte que, celui-ci n'étant pas débiteur de la succession, sa dette ne pouvait faire l'objet d'un rapport à celle-ci, la cour d'appel a violé par fausse application le premier des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que M. Noël X... devra rapport à la succession de son père de la moitié du capital augmentée des intérêts calculés selon les termes du contrat, l'arrêt rendu le 3 mai 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne M. Jacky X... et Mme Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Jacky X... et de Mme Z... et les condamne à payer à M. Noël X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf février deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils pour M. X....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait dit que Monsieur Noël X... devra rapport à la succession de son père, Monsieur Serge X..., de la moitié du capital de 27. 440, 82 euros (180. 000 francs), augmentée des intérêts calculés selon les termes du contrat avec anatocisme à compter de l'ouverture de la succession ;
AUX MOTIFS QUE (…) 2. Quant au prêt de 180. 000 F consenti en 1981 par les époux X...- Y... à leurs fils Noël X... (outre son épouse née Madame Thérèse A...), il convient de rappeler que Madame Marthe X...- Y... a comparu en première instance et fait prendre en son nom des conclusions (par exemple, celle déposées au greffe le 25 octobre 2007 p. 17) par lesquelles elle a, entre autres demandes, sollicité qu'il soit dit et jugé : « que Monsieur Noël X... est redevable à l'égard de l'indivision successorale des sommes suivantes : 5. 335, 71 € avec intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 1983 au titre des sommes versées par son père dans le cadre de son engagement de caution, 27. 440, 82 € indexés sur l'indice du blé fermage outre les intérêts au taux de 8 % sur cette somme à compter du 22 janvier 1983 avec anatocisme au 22 janvier de chaque année et sous déduction de la somme de 30, 50 euros versée par Monsieur Noël X... depuis 1999 » ; que sur le second point, le jugement a fait droit partiellement à la demande, à hauteur de moitié du capital rapportable à la succession de Monsieur Serge X... outre intérêts avec anatocisme ; qu'il s'en déduit qu'en première instance, Madame Marthe X...- Y... a formé une demande spécifique quant à ce prêt de 180. 000 € et au nécessaire rapport par Monsieur Noël X... à la succession de Monsieur Serge X..., dans des termes qui ont pour l'essentiel été acceptés par les premiers juges ; que devant la cour, il ne se déduit pas du fait que Madame Marthe X...- Y... ne comparaît pas qu'elle aurait renoncé à demander ce rapport, d'autant qu'un co-défendeur solidaire et poursuivant les mêmes intérêts qu'elle (Monsieur Jacky X...) sollicite confirmation ; que la demande est ainsi recevable (arrêt attaqué, p. 5, § §. 2-9) ;
1°) ALORS QUE constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tels le défaut de qualité et le défaut d'intérêt ; qu'en l'espèce, en estimant recevable la demande de Monsieur Jacky X... et de Madame Marthe X... née Y... de rapport à la succession de Monsieur Serge X... de la moitié du prêt consenti en 1981 par ce dernier et Madame Marthe X... née Y..., augmentée des intérêts et avec anatocisme, aux motifs inopérants que dans des écritures de première instance, Madame Marthe X... née Y... l'avait sollicité et que le jugement entrepris avait fait droit partiellement à cette demande, à hauteur de la moitié du capital, outre intérêts avec anatocisme, sans rechercher, ainsi que le faisait pourtant valoir Monsieur Noël X... dans ses conclusions d'appel (p. 5 in fine et p. 6, § §. 1-5) si Madame Marthe X... née Y... n'avait pas souhaité, dès le cours de la première instance, ne plus solliciter de son fils Noël X... le remboursement de ce prêt de sorte que Monsieur Jacky X..., seul, n'avait pas qualité ni intérêt pour demander ce remboursement et, partant que cette demande était irrecevable, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 122 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer le sens et la portée de conclusions, de première instance comme d'appel ; qu'en l'espèce, en première instance, Monsieur Jacky X... avait fait signifier des conclusions récapitulatives en sa qualité de défendeur à l'encontre de Monsieur Noël X..., demandeur et en présence de Madame Marie-José X... épouse Z..., que Madame X... née Y... n'a fait signifier aucunes conclusions, qu'elle n'en avait pas non plus fait signifier en cause d'appel, comme l'a relevé la Cour d'appel, et que Monsieur Jacky X... avait fait signifier des conclusions d'appel en sa qualité d'intimé, à l'encontre de Monsieur Noël X... et de Madame Marie-Josée X... épouse Z... et en présence de Madame Marthe Y... veuve X... ; qu'en estimant recevable la demande de Madame Marthe X... née Y... et de Monsieur Jacky X... de rapport à la succession par Monsieur Noël X... de la moitié du capital du prêt litigieux, outre les intérêts avec anatocisme, motif pris que Monsieur Jacky X... avait sollicité, en sa qualité de co-défendeur solidaire et poursuivant les mêmes intérêts que Madame X...- Y... la confirmation du jugement entrepris ayant fait partiellement droit à cette demande, la Cour d'appel a dénaturé le sens et la portée des conclusions, de première instance comme d'appel de Monsieur Jacky X... et ainsi violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE, en toute hypothèse, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité et défaut d'intérêt ; qu'en l'espèce, au demeurant, en estimant recevable la demande de Monsieur Jacky X... et de Madame Marthe X... née Y... de rapport à la succession de Monsieur Serge X... par Monsieur Noël X... de la moitié du capital du prêt litigieux, augmentée des intérêts avec anatocisme, motif que Monsieur Jacky X..., co-défendeur solidaire et poursuivant les mêmes intérêts que Madame Marthe X... née Y... avait sollicité la confirmation du jugement entrepris ayant fait partiellement droit à cette demande de rapport, sans rechercher si la mère, donataire de la pleine propriété des biens mobiliers de Monsieur Serge X..., son défunt époux, ne poursuivait pas des intérêts autres que ceux de son fils Jacky X..., héritier de son père Serge X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 122 du Code de procédure civile ;
ET AUX MOTIFS PROPRES QUE sur le fond, le prêt, y compris le mécanisme d'indexation du capital prêté, le taux d'intérêt et la clause d'anatocisme, résulte d'un acte authentique passé devant notaire le 22 janvier 1981 ; que dès lors, les écrits contradictoires qu'a pu rédiger Madame Marthe X...- Y... à titre privé soit le 17 novembre 2006 (pièce Noël X... n° 38) soit le 5 mai 2007 (pièce Noël X... n° 48) soit le 18 décembre 2007 (pièce Noël X... n° 45), toutes pièces dont Monsieur Noël X... croit pouvoir tirer la conséquence que Madame Marthe X...- Y... aurait renoncé aux intérêts et à l'indexation, sont trop incertaines pour avoir portée utile ; qu'elles sont d'ailleurs contemporaines des premières écritures que Madame Marthe X... a fait signifier dans le présent procès (le 3 octobre 2006) par lesquelles elle réclamait déjà le rapport à la succession de Monsieur Serge X... de l'intégralité du prêt outre indexation et intérêts capitalisés ; que la thèse de Monsieur Noël X... doit dès lors être rejetée (arrêt, p. 5 et p. 6, §. 1) ;
AINSI QU'AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE, sur le prêt effectué le 22 janvier 1981 par les époux X...
Y... aux époux X... Noël-A... selon acte de Maître B... pour un montant de 180. 000 francs, Monsieur Noël X... ne conteste pas demeurer redevable de cette dette ; que les défendeurs, demandeurs reconventionnels, prétendent que Monsieur Noël X... reste devoir cette somme augmentée des intérêts capitalisés depuis la date de passation du prêt ; que Monsieur Noël X... produit aux débats une attestation, irrégulière, établie par Madame Y... veuve X... qui semble revenir sur ses déclarations et « tiens à ce que les intérêts capitalisés du prêt de 180. 000 francs soient comptés dans le partage pour compenser le corps de ferme de BERLES » ; que s'agissant d'un dépouillement sans contrepartie, l'intention doit être réelle et non équivoque ; qu'or il existe un doute sur l'intention de Madame Y... veuve X... de décharger son fils Noël X... du paiement des intérêts ; que le contrat du 22 janvier 1981 en la forme authentique contient la volonté expresse des époux X...- Y... et devra donc être exécuté ; que s'agissant de la créance commune des époux X...- Y..., il n'est pas contesté que Madame Y... est titulaire en propre par l'effet de la convention matrimoniale mais constitue une donation pour moitié et est rapportable à ce titre à la succession ; que Monsieur Noël X... s'estime libéré du remboursement du capital en produisant une reconnaissance de dette à son profit émanant de sa mère, Madame Marthe Y... d'un montant de 8. 197 euros dont la compensation devrait s'effectuer avec la créance ; que cet engagement ne répond pas aux exigences de l'article 1326 du Code civil, comme le soulèvent les défendeurs ; que la reconnaissance de dette sera déclarée nulle ; que la moitié du capital des intérêts calculés selon les termes du contrat avec la clause d'anatocisme, à compter du jour du décès de Monsieur Serge X... est donc rapportable à al succession de Monsieur Serge X... (jugement entrepris, p. 7 in fine et p. 8, § §. 1-5) ;
1°) ALORS QUE, en toute hypothèse les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; que dans ses conclusions d'appel, Monsieur Noël X... faisait valoir que par convention de mariage les époux X...- Y... avaient prévu que le survivant bénéficierait de la pleine propriété des biens mobiliers, que depuis le décès de son mari, Madame Marthe X... née Y... avait ainsi toute liberté de disposer de la créance du couple X...- Y... à son encontre née du prêt litigieux et que la demande litigieuse de rapport n'intéressait donc pas la succession de Monsieur Serge X..., son défunt père et défunt mari de Madame Marthe X... mais uniquement les rapports entre celle-ci, titulaire en propre de la créance litigieuse, et Monsieur Noël X..., prétendument débiteur de celle-ci, de sorte que la demande litigieuse de rapport était infondée ; qu'en décidant le contraire sans répondre à ce moyen déterminant, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs et ainsi violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE, en toute hypothèse, les juges doivent analyser les pièces sur lesquelles ils se fondent ; qu'en se contentant, pour écarter le moyen de défense au fond de Monsieur X... tendant à démontrer que Madame X... née Y... avait renoncé au remboursement des intérêts du prêt litigieux, de considérer que l'attestation du 17 novembre 2006 de Madame X... née Y... était trop incertaine pour avoir une portée utile, quand il ressortait de ses termes mêmes, comme l'avait fait valoir Monsieur Noël X... dans ses conclusions d'appel, que sa mère y avait écrit qu'elle tenait à ce que la somme de 180. 000 F au notaire de PAS EN ARTOIS le 22 janvier 1981 fût sans intérêt et qu'elle y entendait donc obtenir seulement le seul remboursement du capital prêté, et non les intérêts, la Cour d'appel, qui n'a pas analysé cette attestation sur laquelle elle s'est pourtant fondée, a privé sa décision de motifs et a ainsi violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-20999
Date de la décision : 29/02/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

SUCCESSION - Rapport - Rapport des dettes - Dettes envers la succession - Existence - Défaut - Applications diverses - Prêt consenti à un enfant par des époux mariés sous un régime conventionnel - Conjoint survivant devenu seul titulaire de la créance née du prêt - Rapport à la succession du père de la moitié du capital emprunté (non)

Viole par fausse application l'article 829 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006, la cour d'appel qui retient qu'est rapportable à la succession du père la moitié du capital emprunté par un enfant à ses deux parents mariés sous le régime conventionnel de la communauté de bien réduite aux acquêts, après avoir constaté que, s'agissant d'une créance commune, l'épouse survivante en est titulaire en propre par l'effet de la convention matrimoniale, de sorte qu'étant seule créancière de cet enfant, celui-ci n'est pas débiteur de la succession


Références :

article 829 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 03 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 29 fév. 2012, pourvoi n°10-20999, Bull. civ. 2012, I, n° 44
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, I, n° 44

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : Mme Petit (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Savatier
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.20999
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