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22/03/2012 | FRANCE | N°10-17379

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 22 mars 2012, 10-17379


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 25 février 2010) que M. X..., gérant de la société Autoccasion rennais, a déclaré une créance de 733 292 francs (111 789,86 euros) au passif de la société Dinan utilitaire, en redressement judiciaire, dont M. Y... était le dirigeant ; qu'en contrepartie du retrait de cette déclaration, M. Y... s'est engagé, le 10 avril 1997, à lui rembourser cette somme aux termes d'une reconnaissance de dette qui lui a été ultérieurement restituée contre remise de vingt

-cinq chèques, postérieurs au 1er janvier 2002 puisque libellés en euros, ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 25 février 2010) que M. X..., gérant de la société Autoccasion rennais, a déclaré une créance de 733 292 francs (111 789,86 euros) au passif de la société Dinan utilitaire, en redressement judiciaire, dont M. Y... était le dirigeant ; qu'en contrepartie du retrait de cette déclaration, M. Y... s'est engagé, le 10 avril 1997, à lui rembourser cette somme aux termes d'une reconnaissance de dette qui lui a été ultérieurement restituée contre remise de vingt-cinq chèques, postérieurs au 1er janvier 2002 puisque libellés en euros, tirés sur le compte de son épouse, Mme Y..., mais signés par lui ; que par acte du 3 novembre 1998, M. Y... s'est par ailleurs reconnu débiteur de M. X... d'une somme de 208.200 francs qu'il s'est engagé à rembourser en cinq annuités de 41 640 francs chacune ; qu'à la suite de la défaillance persistante des époux Y..., M. X... a assigné Mme Y... en paiement de dix-huit des vingt-cinq chèques demeurés impayés, et M. Y..., placé en liquidation judiciaire, en fixation de créance, tant au titre de ces dix-huit chèques qu'au titre de la créance résultant de la reconnaissance de dette du 3 novembre 1998 ; que pour contester le montant des sommes dont le paiement lui était réclamé au titre des dix-huit chèques, Mme Y... a fait valoir que ces sommes comprenaient celle résultant de la reconnaissance de dette du 3 novembre 1998, laquelle, selon elle, était éteinte en raison des règlements effectués par son époux, le mandataire liquidateur de ce dernier s'en rapportant, pour sa part, à justice ;
Sur le premier moyen, tel qu'il figure au mémoire en demande et est produit en annexe de la présente décision :
Attendu que c'est sans encourir le grief du moyen tiré du non respect de la contradiction que la cour d'appel, qui relevait par motifs propres et adoptés, non critiqués par M. Y..., que la reconnaissance de dette souscrite le 3 novembre 1998, au profit de M. X..., lui était personnelle et qu'il n'était pas démontré qu'il s'en était libéré, a dit que Mme Y..., restée étrangère à cette reconnaissance de dette, était irrecevable à faire valoir, aux lieu et place de son mari, que celui-ci s'était libéré de ses obligations, la fin de non recevoir qui lui était opposée étant nécessairement dans le débat ;
Sur le second moyen, pris en trois branches, tel qu'il figure dans le mémoire en demande et est reproduit en annexe de la présente décision :
Attendu que par une appréciation souveraine des éléments de preuve soumis à son examen, après avoir constaté que le compte de Mme Y... avait servi à des fins commerciales liées aux activités de son mari puisque des chèques de la société Autoccasion rennaise, objet d'une procédure collective, y étaient versés, la cour d'appel a estimé qu'en mettant à disposition de son mari ses formules de chèques, alors qu'aucune fraude n'était démontrée, Mme Y... avait "adhéré", en toute connaissance de cause, à l'usage qui en serait fait par lui ; qu'ayant ainsi fait ressortir l'acceptation tacite mais non équivoque de Mme Y... de l'utilisation desdits chèques, la cour d'appel en a justement déduit que ceux-ci, bien que signés par le mari, constituaient un commencement de preuve par écrit opposable à l'intéressée, et par ce seul motif, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y..., la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils pour Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Il est reproché à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir fixé la créance de Monsieur X... au passif de la liquidation judiciaire de Monsieur Y... à la somme de 25.397 € ;
AUX MOTIFS QUE le 3 novembre 1998, Monsieur Y... s'est reconnu débiteur envers Monsieur X... d'une somme de 208.200 F et s'est engagé à la rembourser en cinq annuités de 41.640 F chacune (6.349 €); que Monsieur X... reconnaît avoir reçu paiement uniquement de la première annuité ; que madame Y..., qui est étrangère à cette reconnaissance de dette, est irrecevable à faire valoir que son mari aurait entièrement désintéressé Monsieur X..., nul ne plaidant par procureur; que seule la SCP Le Bortz-Bodelet, qui représente Monsieur Y..., serait recevable à se prévaloir de remboursements s'ajoutant à ceux reconnus par Monsieur X...; qu'il convient en conséquence de fixer la créance de monsieur X... au passif de la liquidation judiciaire de Monsieur Y... à 25.397 € au titre de la reconnaissance de dette du 3 novembre 1998;
ALORS QUE le juge ne peut fonder sa décision sur une fin de non-recevoir qu'il a relevée d'office sans avoir préalablement rouvert les débats et provoquer les explications des parties, comme l'exige le principe du contradictoire et le droit à un procès équitable ; qu'il ne résulte pas des écritures des parties, et notamment des écritures de Monsieur X..., qu'ait été soulevée, au cours des débats, la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité de Madame Y... pour combattre le chef du jugement ayant fixé au passif de la liquidation judiciaire de son mari la créance de Monsieur X... au titre de la reconnaissance de dette du 3 novembre 1998, ni qu'ait été invoquée la règle « nul ne plaide par procureur » ; qu'en s'abstenant pourtant de rouvrir les débats pour permettre aux parties de présenter leurs observations sur la fin de non-recevoir qu'elle a soulevée d'office, la Cour viole les articles 16 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame Anne Marie Z... épouse Y... à payer à Monsieur Joseph X... la somme de 88.769,89 € ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il convient de tenir pour acquis que Madame Y... n'est pas la signataire des chèques objets de la présente instance ; que les chèques ont été signés par Monsieur Y... ; que Monsieur X... l'affirmait dans son assignation introductive d'instance ; que Madame Y... le reconnaissait dans ses dernières écritures et que la SCP LE DORTZ BODELET ès qualités ne le conteste pas ; que la signature des chèques en question par Monsieur Y... constitue un commencement de preuve par écrit rendant vraisemblable la créance alléguée ; qu'un document non signé par son auteur peut constituer un commencement de preuve par écrit ; que les chèques ont été tirés sur un compte ouvert au nom de Madame Y... ; qu'il n'est nullement établi, ni même prouvé, que les formules des chèques en cause ont été obtenues par fraude ; que des extraits de son compte établissent que des chèques émis par la société AUTOCCASION RENNAISE étaient versés sur son compte, ce qui montre bien que ce compte ne servait pas uniquement à des fins privées mais aussi à des fins commerciales liées à l'activité de Monsieur Y... ; qu'en mettant à la disposition de ce dernier ses formules de chèques, Madame Y... a adhéré à l'usage qui en serait fait par lui ; que par conséquent, même si les chèques ne sont pas signés par Madame Y..., ils valent également commencement de preuve par écrit de la créance invoquée à l'égard de Madame Y... ; que le montant des 25 chèques est voisin de la déclaration de créance au passif de la société DINAN UTILITAIRES à laquelle Monsieur X... a renoncé ; que l'un de ces chèques, s'élevant à 1.550 € a été payé en janvier 2004 ; qu'il n'est pas contesté que l'arrêt de la Cour du 21 décembre 2006 condamnant les époux Y... au paiement de quatre chèques issus de la série de 25 est devenu « définitif » ; que ces éléments constituent des indices concordants, complétant le commencement de preuve par écrit ; que la preuve parfaite de la créance est donc rapportée, les affirmations de Madame Y... selon lesquelles il s'agirait de chèques de garantie étant purement gratuites ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte de l'application de l'article L 131.3 du Code monétaire et financier qu'en l'absence d'indication de la date d'un chèque le titre ne vaut pas comme chèque et qu'il est de jurisprudence constante que le chèque périmé ou prescrit n'a de valeur que comme commencement de preuve par écrit ; qu'il appartient donc à celui qui réclame l'exécution d'une obligation d'en prouver l'existence ; qu'en l'espèce les chèques en question émis en euros sont donc postérieurs au 1er janvier 2002 ; que Monsieur X... justifie de l'envoi par lettre recommandée du 12 octobre 2003 avec accusé de réception aux époux Y... d'un courrier leur rappelant leurs obligations de paiement avec la liste des 22 chèques en sa possession avec leurs numéros et leur montant tirés sur le Crédit Agricole à l'exception d'un chèque tiré sur le Crédit Mutuel ; que Monsieur X... a présenté à la banque quelques-uns des 18 'autres chèques que lui avaient remis les époux Y... lesquels sont également revenus impayés avec pour motif « perte » ; que le motif de l'opposition « perte » est sans efficacité, dans la mesure où les époux Y... ne contestent pas avoir rempli ni signé les chèques et que leur absence de protestation au courrier précis et circonstancié de Monsieur X... révèle une attitude de reconnaissance du bien-fondé de la demande de celui-ci ; que les époux Y... n'ont également émis aucune protestation à réception de la mise en demeure de la SCP CHEVREAU BAUDUIN RIVALS huissiers de justice d'avoir à payer la somme de 126.874,90 euros dont 94.656,63 euros correspondant an montant total des chèques tirés par Madame Y... Anne Marie au profit de Monsieur X... et que la réception de cette mise en demeure sans aucune protestation s'analyse, en ces circonstances, comme une acceptation tacite ; que ces 18 autres chèques constituent donc un commencement de preuve par écrit rendant vraisemblable la créance alléguée en vertu des articles 1315 et 1347 du Code civil ; qu'il y a donc lieu de condamner Madame Anne Marie Y... née SAMSON à lui payer la somme correspondant au montant de ces 18 chèques soit: 88.769,89 euros ;
ALORS QUE, D'UNE PART, un document ne peut valoir comme commencement de preuve par écrit que s'il est l'oeuvre de la personne à qui on l'oppose, à moins que celle-ci ait donné mandat à son auteur ou ne se le soit approprié en le ratifiant de façon non équivoque ; qu'en retenant comme commencement de preuve par écrit d'une obligation qu'aurait personnellement souscrite Madame Y... au profit de Monsieur X... une série de chèques qui, quoiqu'établis sur des formules de chèques lui appartenant, n'étaient pas revêtus de sa signature, mais de celle de son époux, la Cour méconnaît les exigences de l'article 1347 du Code civil et ce faisant le viole ;
ALORS QUE D'AUTRE PART, un document ne peut valoir comme commencement de preuve par écrit que s'il est l'oeuvre de la personne à qui on l'oppose, à moins que celle-ci ait donné mandat à son auteur ou ne se le soit approprié en le ratifiant de façon non équivoque ; qu'à supposer même établi la mise à disposition de son époux, par Madame Y..., de formules de chèques lui appartenant, ce fait ne saurait à lui seul faire conclure à l'existence d'un véritable mandat, au demeurant non constaté ; que sous cet angle, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article 1347 du Code civil et de l'article 1984 du même Code ;
ET ALORS QUE, ENFIN, un document ne peut valoir comme commencement de preuve par écrit que s'il est l'oeuvre de la personne à qui on l'oppose, à moins que celle-ci ait donné mandat à son auteur ou ne se le soit approprié en le ratifiant de façon non équivoque ; qu'une telle ratification ne saurait s'évincer d'un simple silence ou de l'attitude purement passive observée par le prétendu débiteur à réception des demandes du prétendu créancier ; qu'en se fondant, par motifs adoptés du jugement, sur l'absence de protestation des époux Y... à réception des lettres et mises en demeure de Monsieur X..., pour en déduire une acceptation tacite, la Cour viole de nouveau l'article 1347 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-17379
Date de la décision : 22/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 25 février 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 22 mar. 2012, pourvoi n°10-17379


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.17379
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