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26/09/2012 | FRANCE | N°11-20452

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 septembre 2012, 11-20452


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 3 de l'avenant "Mensuels" du 2 mai 1979 à la convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne et l'article L. 2254-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que toute modification apportée à l'établissement dans lequel l'emploi est exercé, qui doit faire l'objet d'une notification préalable écrite, est considérée dans le cas où elle n'e

st pas acceptée par le salarié, comme une rupture du contrat de travail du fai...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 3 de l'avenant "Mensuels" du 2 mai 1979 à la convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne et l'article L. 2254-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que toute modification apportée à l'établissement dans lequel l'emploi est exercé, qui doit faire l'objet d'une notification préalable écrite, est considérée dans le cas où elle n'est pas acceptée par le salarié, comme une rupture du contrat de travail du fait de l'employeur et réglée comme telle ; que sauf stipulations plus favorables, ces dispositions se substituent à celles du contrat de travail relativement au lieu de travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... et deux autres salariés de la société cartes et services, employés au sein de son établissement de Rungis conformément aux stipulations de leur contrat de travail, ont été informés le 13 février 2007 qu'un projet de restructuration interne entraînerait leur mutation dans des locaux sis 14 rue Lincoln à Paris (8e) à compter du 19 mars 2007 ; que les salariés ont refusé de rejoindre ce nouveau lieu de travail estimant qu'il s'agissait d'une modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail qui ne pouvait leur être imposée sans leur accord ; qu'ayant été licenciés pour faute grave le 1er juin 2007 pour avoir refusé de se présenter à leur nouveau poste à Paris et persisté à se présenter au siège de Rungis, ils ont saisi la juridiction prud'homale pour en contester le bien fondé ;
Attendu que pour débouter les salariés de leurs demandes, l'arrêt retient que si l'article 3 de la convention collective des industries métallurgiques OETAM de la région parisienne prévoit effectivement que le contrat doit préciser notamment l'établissement dans lequel cet emploi doit être exercé, puis que toute modification de caractère individuel apporté à cet élément doit faire préalablement l'objet d'une nouvelle notification écrite, et qu'en cas de refus de modification acceptée par l'intéressé, elle sera considérée comme une rupture de contrat du fait de l'employeur et réglée comme telle, ce texte n'a cependant pas pour effet de conférer automatiquement au lieu de travail un caractère contractuel ni de statuer par avance sur le bien-fondé du licenciement consécutif au refus du salarié ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le contrat de travail des salariés ne contenait pas de stipulation plus favorable et qu'ils n'avaient pas accepté de modification de l'établissement où ils exerçaient leur emploi, ce dont il résulte que la rupture du contrat était imputable à l'employeur, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société cartes et services aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société cartes et services à payer à Mmes X..., Y... et à M. Z... la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour Mmes X..., Y... et M. Z....
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR débouté Madame X..., Madame Y... et Monsieur Z... de leurs demandes respectives tendant à voir dire chacun leur licenciement sans cause réelle et sérieuse, et obtenir diverses indemnités à ce titre ;
AUX MOTIFS QU' il convient d'observer que Monsieur Z..., Mesdames X... et Y... n'apportent en cause d'appel aucun élément nouveau de nature à remettre en cause la décision des premiers juges, lesquels ont fait une juste appréciation des circonstances de la cause tant en droit qu'en fait par des motifs pertinents que la cour fait siens, étant observé : - que si l'article 3 de la convention collective des industries métallurgiques OETAM de la région parisienne prévoit effectivement que le contrat doit préciser notamment l'établissement dans lequel cet emploi doit être exercé, que toute modification de caractère individuel apporté à cet élément doit faire préalablement l'objet d'une nouvelle notification écrite, et qu'en cas de refus de modification acceptée par l'intéressé, elle sera considérée comme une rupture de contrat du fait de l'employeur et sera réglée comme telle, ce texte n'a cependant pas pour effet de conférer automatiquement au lieu de travail un caractère contractuel ni de statuer par avance sur le bien fondé du licenciement consécutif au refus du salarié ; - qu'en l'espèce, la SAS CARTE ET SERVICES a parfaitement respecté les dispositions de la convention collective en précisant dans le contrat de travail l'établissement dans lequel travaillait chacun des salariés, en leur notifiant individuellement par écrit la modification de ce lieu de travail et en prenant l'initiative de les licencier à la suite de leur refus de rejoindre leur nouveau site ; - que ces éléments, qui fixent le cadre juridique de la rupture, n'empêchent pas l'appréciation du bien fondé de cette rupture ; - qu'en l'espèce, il ressort de chacun des contrats en cause que le lieu de travail des salariés n'était pas contractualisé et n'avait qu'une valeur informative ; que ces contrats précisaient en outre clairement pour Monsieur Z... et Madame X... que leur lieu de travail pouvait être déplacé en n'importe quel endroit de la région parisienne et pour Madame Y... que ce lieu pouvait être déplacé dans un rayon de 15 kilomètres ; - que le changement de lieu de travail notifié à chacun des salariés de Rungis à Paris est intervenu dans un même secteur géographique bien desservi en moyens de transports ; qu'il ne pouvait donc constituer une modification d'un élément essentiel du contrat de travail mais un changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur ; - que dès lors le refus des salariés de rejoindre leur nouveau site constitue une faute grave justifiant le bien fondé des trois licenciements ; qu'il y a donc lieu de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et de débouter Monsieur Olivier Z..., Madame Guylène X... et Madame Nathalie Y... de l'intégralité de leurs demandes ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le texte dont les demandeurs se prévalent a seulement pour effet de définir l'imputabilité de la rupture, en cas de refus par le salarié d'un changement de son lieu de travail (qui doit alors faire l'objet d'une procédure de licenciement sans pouvoir être considéré ou réputé démissionnaire), mais ne peut être compris comme se prononçant par avance sur le bien fondé d'un licenciement intervenu dans de telles circonstances, lequel ne saurait être regardé ainsi que les salariés le soutiennent, comme nécessairement entaché d'abus ou dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en l'occurrence, il importe que la mutation refusée par ces derniers (qui au surplus rentrait dans les prévisions de la clause de mobilité figurant dans leurs contrats de travail) correspondait à un simple changement de leurs conditions de travail (étant observé qu'il n'est pas allégué par les intéressés sur d'autres points une modification de leurs contrats de travail), Paris et Rungis se trouvant à l'évidence dans le même secteur géographique, de sorte que la mesure litigieuse relevait incontestablement du pouvoir de direction de l'employeur ; qu'en outre, il doit être estimé que les salariés n'ont avancé aucune raison légitime pour justifier de leurs refus persistants et réitérés de leurs nouvelles affectations, l'absence d'augmentations des salaires en cette occasion constituant un motif inopérant ; que dans ces conditions, c'est à juste titre que la défenderesse s'est prévalue d'une faute grave pour rompre les contrats de travail des demandeurs ; qu'il s'ensuit que ceux-ci seront déboutés de l'intégralité de leurs prétentions ;
ALORS QUE les conventions et accords collectifs sont applicables, sauf dispositions contraires, à partir du jour qui suit leur dépôt ; que lorsqu'un employeur est lié par les clauses d'une convention collective, ces clauses s'appliquent au contrat de travail conclu avec lui, sauf stipulations plus favorables ; que l'article 3 de la convention collective régionale des industries métallurgiques OETAM (région parisienne) dispose que toute modification de caractère individuel apportée à l'établissement dans lequel l'emploi du salarié doit être exercé fera l'objet d'une nouvelle notification écrite, laquelle, si elle n'est pas acceptée par l'intéressé, sera considéré comme une rupture de contrat de travail du fait de l'employeur et réglée comme telle ; qu'en jugeant que ce texte n'avait cependant pas pour effet de conférer automatiquement au lieu de travail un caractère contractuel ni de statuer par avance sur le bien fondé du licenciement consécutif au refus du salarié pour en conclure que l'article 3 fixait le cadre juridique de la rupture mais n'empêchait pas l'appréciation du bien fondé de celle-ci, et décider que le refus des salariés de rejoindre leur nouveau site constituait une faute grave justifiant le bien fondé de leurs licenciements, sans prendre en considération le dernier alinéa de l'article 3 précisant que le refus sera considéré comme une rupture du contrat de travail du fait de l'employeur qui excluait le licenciement disciplinaire du salarié, la Cour d'appel a violé l'article 3 de la convention collective régionale des industries métallurgiques OETAM région parisienne ;
ALORS encore QUE lorsqu'un employeur est lié par les clauses d'une convention collective, ces clauses s'appliquent au contrat de travail conclu avec lui, sauf stipulations plus favorables ; que l'article 3 de la convention collective régionale des industries métallurgiques OETAM (région parisienne) dispose que toute modification de caractère individuel apportée à l'établissement dans lequel l'emploi du salarié doit être exercé fera l'objet d'une nouvelle notification écrite, laquelle, si elle n'est pas acceptée par l'intéressé, sera considérée comme une rupture de contrat de travail du fait de l'employeur et réglée comme telle ; qu'en décidant que le refus des salariés de rejoindre leur nouveau site à Paris constituait une faute grave justifiant le bien fondé des trois licenciements sans tenir compte de la disposition conventionnelle plus favorable au salarié qui imputait la rupture du contrat de travail à l'employeur, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et partant violé les articles L. 2254-1 du Code du travail et 3 de la convention collective régionale du 16 juillet 1954 (OETAM région parisienne) ;
ALORS à tout le moins QUE le seul refus d'un salarié d'accepter une modification de ses conditions de travail, s'il rend son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, ne constitue pas à lui seul une faute grave ; qu'en considérant que le changement de lieu de travail de Rungis à Paris constituait un changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur et que le refus des salariés, fut-il réitéré et persistant, de rejoindre leur nouveau site constituait une faute grave justifiant leur licenciement sans la caractériser, la Cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail ;
ALORS en tout état de cause QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que la cause du licenciement doit être réelle et sérieuse ; que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en retenant que le refus des salariés de rejoindre leur nouveau site constitue une faute grave justifiant le bien fondé des trois licenciements sans rechercher si le refus des trois salariés de rejoindre le nouveau site de travail rendait impossible leur maintien dans l'entreprise, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 ensemble les L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-20452
Date de la décision : 26/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 sep. 2012, pourvoi n°11-20452


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.20452
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