La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/10/2012 | FRANCE | N°11-23066

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 23 octobre 2012, 11-23066


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 8 juin 2011), que M. X..., propriétaire d'un terrain à Bonifacio, se plaignant des troubles causés par M. Y... qui avait entreposé des parpaings et réalisé des affouillements sur sa parcelle mitoyenne, a assigné son voisin en référé pour faire remettre les lieux en état sous astreinte ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de M. X..., alors, selon le mo

yen :
1°/ que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au suc...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 8 juin 2011), que M. X..., propriétaire d'un terrain à Bonifacio, se plaignant des troubles causés par M. Y... qui avait entreposé des parpaings et réalisé des affouillements sur sa parcelle mitoyenne, a assigné son voisin en référé pour faire remettre les lieux en état sous astreinte ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de M. X..., alors, selon le moyen :
1°/ que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ; que le demandeur à l'action doit avoir un intérêt personnel et direct ; qu'en décidant que M. X... avait intérêt à agir afin de faire obstacle au dommage imminent que les travaux réalisés par M. Y... étaient susceptibles de causer à l'environnement, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que M. X... justifiait d'un intérêt personnel et direct, mais seulement d'un intérêt collectif, a privé sa décision de base légale au regard des articles 31 et 122 du code de procédure civile ;
2°/ que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ; que le demandeur à l'action doit avoir un intérêt personnel et direct ; qu'en décidant que M. X... avait intérêt à agir afin de faire cesser le trouble manifestement illicite que les travaux réalisés par M. Y... faisaient subir à l'environnement, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que M. X... justifiait d'un intérêt personnel et direct, mais seulement d'un intérêt collectif, a violé des articles 31 et 122 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les propriétés de MM. Y... et X... étaient situées à proximité l'une de l'autre et que M. X... avait une vue directe sur la parcelle de M. Y..., la cour d'appel a souverainement retenu que M. X... avait un intérêt personnel à agir pour faire cesser les troubles apportés à son environnement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de lui ordonner sous astreinte, de remettre en état la parcelle M439 lui appartenant, en remblayant les affouillements réalisés, en ôtant les parpaings entreposés et en procédant à la démolition des constructions édifiées à l'aide de ces parpaings, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ; qu'en se bornant à énoncer que les affouillements réalisés par M. Y..., ainsi que la pose de parpaings et la construction de murs en agglo, ne respectaient pas les lois du 2 février 1995 et du 10 juillet 1976 en ce qu'ils perturbaient la qualité du site et sa richesse floristique et faunistique, modifiaient l'écoulement des eaux et occasionnaient des dommages, compte tenu notamment de leur nature et de leur ampleur, la cour d'appel, qui a constaté l'éventualité d'un dommage, mais non son caractère imminent, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 809, alinéa 1, du code de procédure civile ;
2°/ que tout projet de construction ou d'aménagement doit respecter le plan local d'urbanisme ou, à défaut, le règlement national d'urbanisme applicable ; qu'en se bornant à énoncer que les travaux entrepris par M. Y... étaient constitutifs d'un trouble manifestement illicite en ce qu'ils perturbaient la qualité du site et sa richesse floristique ou faunistique, sans constater que ces constructions n'auraient pas été conformes à la réglementation applicable en matière d'urbanisme, la cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 1, du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que M. Y... avait procédé sans autorisation à la pose de parpaings, à la construction de murs en agglos en crête de collines et à des affouillements, sur une parcelle située dans une zone naturelle d'intérêt écologique floristique et faunistique (ZNIEF) de type II, définie comme étant un grand ensemble naturel riche et peu modifié aux potentialités biologiques importantes et relevé que ces travaux perturbaient la qualité du site, modifiaient l'écoulement des eaux et occasionnaient des dommages à l'environnement, compte tenu de leur nature et de leur ampleur, la cour d'appel en a souverainement déduit que les agissements de M. Y... constituaient à la fois un danger imminent et un trouble manifestement illicite qui justifiaient la remise en état des lieux sous astreinte ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de M. Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de Monsieur Alexandre X..., soulevée par Monsieur Gustave Y..., puis d'avoir ordonné à ce dernier, sous astreinte, de remettre en état la parcelle M439, en remblayant les affouillements réalisés, en ôtant les parpaings entreposés et en procédant à la démolition des constructions édifiées à l'aide de ces parpaings ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des plans, des clichés photographiques et des constats d'huissier établis le 23 juillet et le 22 août 2007 par Maître Michel Z..., huissier de justice à SARTENE, et le 7 juin 2010 par Maître Janie A..., huissier de justice à BONIFACIO d'une part que les propriétés de Monsieur Y... et X... sont situées à proximité l'une de l'autre et pour partie sont mitoyennes, et d'autre part, que les parcelles appartenant à Monsieur X... ont une vue directe sur celle de Monsieur Y..., de sorte que l'intérêt à agir de Monsieur X... ne peut pas être sérieusement contesté ;
1°) ALORS QUE l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention; que le demandeur à l'action doit avoir un intérêt personnel et direct ; qu'en décidant que Monsieur X... avait intérêt à agir afin de faire obstacle au dommage imminent que les travaux réalisés par Monsieur Y... étaient susceptibles de causer à l'environnement, la Cour d'appel, qui n'a pas constaté que Monsieur X... justifiait d'un intérêt personnel et direct, mais seulement d'un intérêt collectif, a privé sa décision de base légale au regard des articles 31 et 122 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention; que le demandeur à l'action doit avoir un intérêt personnel et direct ; qu'en décidant que Monsieur X... avait intérêt à agir afin de faire cesser le trouble manifestement illicite que les travaux réalisés par Monsieur Y... faisaient subir à l'environnement, la Cour d'appel, qui n'a pas constaté que Monsieur X... justifiait d'un intérêt personnel et direct, mais seulement d'un intérêt collectif, a violé des articles 31 et 122 du Code de procédure civile .

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné à Monsieur Y..., sous astreinte, de remettre en état la parcelle M439 lui appartenant, en remblayant les affouillements réalisés, en ôtant les parpaings entreposés et en procédant à la démolition des constructions édifiées à l'aide de ces parpaings ;
AUX MOTIFS QUE, en application de l'article 809, alinéa 1, du Code de procédure civile, le juge des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que si Monsieur Y... discute le zonage de la parcelle en cause suite à l'annulation le 21 mai 2010 des secteurs NL 1 et NL2 du secteur de Pruniccia par la Cour administrative d'Appel de MARSEILLE et qu'il n'entre pas dans la compétence du juge judiciaire d'apprécier cette question, force est toutefois de constater que suivant procès-verbal dressé le 3 décembre 2010 par la direction départementale des territoires et de la mer, il a été constaté que "Monsieur Y... a procédé sans autorisation à la construction du murs en agglos en crête de collines sur la parcelle M439, en zone NL du PLU de BONIFACIO. La surface concernée est de 600 m2 et la hauteur des ouvrages varie de 0,20 m à 1,70 m.", et que le directeur départemental des territoires et de la mer dans un courrier en date du 3 février 2011 adressé à Monsieur Y... considère que le juge administratif a "de toute évidence annulé des sous secteurs de la zone NL en contradiction avec la vocation de cette zone dont l'existence est validée" ; que, par ailleurs, il est acquis, compte tenu des pièces versées au débat et notamment des courriers du directeur départemental des territoires et de la mer et des cartes produites, que la parcelle appartenant à Monsieur Y... est située dans une zone naturelle d'intérêt écologique floristique et faunistique (ZNIEFF) de type II, définie comme étant un grand ensemble naturel riche et peu modifié aux potentialités biologiques importantes ; que s'il est constant qu'une telle appartenance n'a pas de valeur juridique ou de portée réglementaire directe, il est tout aussi constant que cette délimitation correspond à une norme édictée au titre du principe de précaution et est l'illustration d'un patrimoine écologique à respecter posé par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement ; qu'il est acquis de plus depuis la loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature que celle-ci impose aux plans d'occupation des sols de respecter les préoccupations d'environnement et interdit aux aménagements projetés de détruire, altérer ou dégrader le milieu particulier des espèces animales ou végétales protégées ; qu'en l'espèce, les affouillements réalisés par Monsieur Y..., la pose de parpaings et la construction de murs en agglo ne respectent pas les lois du 2 février 1995 et du 10 juillet 1976, en ce qu'ils perturbent la qualité du site et notamment sa richesse floristique et faunistique, modifient l'écoulement des eaux et occasionnent des dommages à l'environnement, compte tenu notamment de leur nature et de leur ampleur ; qu'en cela, les agissements de Monsieur Y... constituent à la fois un trouble manifestement illicite et un danger imminent et imposent dès lors d'ordonner la remise en état des lieux qui est sollicitée et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard, comme l'a décidé le premier juge ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' il y a un doute certain sur le zonage de ces parcelles et il n'appartient pas au juge des référés, sans outrepasser sa compétence d'interpréter la décision de la Cour administrative d'appel de Marseille et de dire quel est le zonage de ces parcelles actuellement ; qu'en revanche, il est acquis que les parcelles en cause qui sont sises lieu-dit Pruniccia, sur le secteur de CALALONGA, sont dans une Zone Naturelle d'Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique, et que l'appartenance à cette zone, qui n'a pas de valeur juridique directe, a des conséquences sur le patrimoine écologique ; qu'en effet, il est acquis que la loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature impose aux Plans d'occupation des sols de respecter les préoccupations d'environnement et interdit aux aménagements projetés de détruire, altérer ou dégrader le milieu particulier à des espèces animales ou végétales protégées, les ZNIEFF et que la loi du 2 février 1995 dans son article L 200-1 pose le principe d'un patrimoine écologique à préserver ; qu'en la matière, le principe général est d'éviter autant que possible tout aménagement à l'intérieur d'une ZNIEFF de type 1 dont l'intérêt écologique est avéré, à l'exception des aménagements à vocation pédagogique ; que LA ZNIEFF de type 2 n'interdit pas des aménagements sous réserve du respect des écosystèmes généraux ; qu' en l'espèce, les affouillements, le dépôt de parpaings de Monsieur Y..., qui sont désormais en partie des constructions, ont été faits dans une ZNIEFF de type 2 et ils ne respectent pas la loi du 10 juillet 1976 et la loi du 2 février 1995, qui prohibent les aménagements qui altèrent ou dégradent le milieu particulier à des espaces animales ou végétales ; qu'en effet, l'ampleur des affouillements, la pose des parpaings et la construction faite à l'aide de ces parpaings sont autant de dégradation et de destruction du milieu particulier à des espèces animales ou végétales protégées ; qu'il suffit pour s'en convaincre de regarder, à travers les photos et les constatations de l'huissier, les conséquences écologiques sur un terrain écologiquement fragile et à préserver ; que le trouble causé par ces affouillements et les parpaings est un trouble manifestement illicite au regard de la loi de 1976, de la loi de 1995 et du patrimoine écologique inhérent à la ZNIEFF ;
1°) ALORS QUE le juge des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ; qu'en se bornant à énoncer que les affouillements réalisés par Monsieur Y..., ainsi que la pose de parpaings et la construction de murs en agglo, ne respectaient pas les lois du 2 février 1995 et du 10 juillet 1976 en ce qu'ils perturbaient la qualité du site et sa richesse floristique et faunistique, modifiaient l'écoulement des eaux et occasionnaient des dommages, compte tenu notamment de leur nature et de leur ampleur, la Cour d'appel, qui a constaté l'éventualité d'un dommage, mais non son caractère imminent, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 809, alinéa 1, du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE tout projet de construction ou d'aménagement doit respecter le plan local d'urbanisme ou, à défaut, le règlement national d'urbanisme applicable; qu'en se bornant à énoncer que les travaux entrepris par Monsieur Y... étaient constitutifs d'un trouble manifestement illicite en ce qu'ils perturbaient la qualité du site et sa richesse floristique ou faunistique, sans constater que ces constructions n'auraient pas été conformes à la réglementation applicable en matière d'urbanisme, la Cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 1, du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 11-23066
Date de la décision : 23/10/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Cour d'appel de Bastia,Ch. civile A, 8 juin 2011, 10/00986

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 08 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 23 oct. 2012, pourvoi n°11-23066


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.23066
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award