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21/11/2012 | FRANCE | N°11-10829

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 novembre 2012, 11-10829


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 16 octobre 1998 par la société BW marketing, aux droits de laquelle se trouve la société Service innovation group, occupant en dernier lieu les fonctions de promoteur des ventes, a obtenu, par avenant au contrat de travail du 1er avril 2002 portant conclusion d'une convention de forfait en jours, le statut de "cadre" ; que l'employeur a adhéré le 23 mai 2003 à la convention collective nationale des prestataires de service dans le domaine du secteur tertiair

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 16 octobre 1998 par la société BW marketing, aux droits de laquelle se trouve la société Service innovation group, occupant en dernier lieu les fonctions de promoteur des ventes, a obtenu, par avenant au contrat de travail du 1er avril 2002 portant conclusion d'une convention de forfait en jours, le statut de "cadre" ; que l'employeur a adhéré le 23 mai 2003 à la convention collective nationale des prestataires de service dans le domaine du secteur tertiaire ; que l'employeur a été placé en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce du 2 juin 2008 et la société Laureau-Jeannerot nommée commissaire à l'exécution du plan ; que le salarié a été licencié pour motif économique par lettre du 31 juillet 2008 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappel de salaire, pour la période d'août 2002 à juillet 2008, au titre de la qualité de cadre de niveau VIII coefficient 360, subsidiairement de niveau VII, coefficient 300 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande fondée sur le coefficient 360, alors, selon le moyen, que la qualification du salarié correspond aux fonctions exercées telles que définies dans la convention collective et les accords applicables dans l'entreprise ; qu'un accord collectif d'entreprise peut prévoir une classification plus favorable que celle de la convention collective ; que si un nouvel accord collectif intervient, les salariés conservent les avantages individuellement acquis, a fortiori si la convention en a ainsi stipulé ; qu'en l'espèce, l'article 7 de l'accord d'entreprise du 4 février 2002 reconnaît la qualité de cadre « autonome » aux promoteurs des ventes confirmés, qui sont soumis à une convention de forfait jours ; qu'au regard de la convention collective du personnel des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire conclue ultérieurement, les « cadres au forfait jour », « disposant d'une grande autonomie dans l'organisation de leur travail », tels les promoteurs des ventes confirmés, ne peuvent être que des cadres de niveau VIII, au coefficient minimum de 360 ; qu'en refusant de leur faire application de ces dispositions, promoteurs des ventes confirmé, la cour d'appel a violé l'article 7 de l'accord du 4 février 2002, ensemble la convention collective susvisée ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 212-15-3 III du code du travail, alors applicable, et de l'article 7 de l'accord d'entreprise portant sur la mise en place des 35 heures, du 4 février 2002, que les cadres susceptibles de conclure une convention de forfait en jours doivent obligatoirement bénéficier d'une autonomie à la fois dans la fixation de leur horaire de travail et dans le mode d'organisation de leur travail ;
Et attendu que la cour d'appel a retenu que le salarié ne disposait d'aucune autonomie dans l'exercice de ses fonctions ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche qui est recevable :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de reconnaissance de la qualification de cadre, l'arrêt retient que l'intéressé avait pour seul objectif d'assurer la présence des produits, de développer les ventes, de renforcer l'image de la marque, de recruter de nouveaux consommateurs, de conquérir des réseaux de distribution différents, et que sa mission ne comportait aucune technicité, complexité ou polyvalence, qu'il ne disposait d'aucune autonomie dans l'exercice de ses fonctions, qu'il n'avait pas d'équipe placée sous sa responsabilité et ne prenait donc aucune initiative dans l'exécution de ces tâches, en sorte qu'il ne remplissait pas les conditions prévues pour la qualification de cadre par la convention collective des prestataires de services dans le secteur tertiaire ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'avenant au contrat de travail du 1er avril 2002 stipulait que le salarié bénéficierait du statut de cadre, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la troisième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de M. X... au titre du bénéfice de la qualité de cadre au coefficient 300 de ladite convention collective, l'arrêt rendu le 19 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société Service innovation group aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Service innovation group à payer à M. X... la somme de 1 000 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X....
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de rappel de salaire, pour la période d'août 2002 à juillet 2008, fondée sur l'application du coefficient 360, ou à titre subsidiaire du coefficient 300, de la convention collective des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire, outre les congés payés afférents, de ses demandes subséquentes en paiement de dommages et intérêts au titre du préjudice subi en raison du refus par l'employeur d'appliquer les textes conventionnels, de ses jours de congés pour ancienneté conventionnels et d'un rappel d'indemnité de licenciement, ainsi que de ses demandes subséquentes tendant à la réactualisation de son coefficient et de son salaire, et à la remise de bulletins de paie rectifiés, et de sa demande d'allocation d'une indemnité de procédure, et de l'AVOIR condamné au paiement des dépens de la procédure devant le Conseil de prud'hommes ;
AUX MOTIFS QUE, sur les demandes formées par Monsieur X... fondées sur l'application de la convention collective, l'intimé fait valoir qu'il remplissait les conditions prévues par les partenaires sociaux de l'entreprise pour bénéficier du statut de cadre autonome et donc pour être soumis au forfait jour et partant de se voir appliquer le coefficient 360 de la convention collective des prestataires de services laquelle dispose que le cadre au forfait jour, c'est-à-dire le cadre autonome, ne peut être qu'un cadre de niveau VIII, donc disposant d'une grande autonomie dans l'organisation de son travail ; que s'agissant des critères classants de la convention collective, ceux-ci sont parfaitement remplis par lui s'agissant tant de la complexité des tâches confiées, de l'autonomie dans l'exécution de son travail et de l'initiative dans l'exercice de ses fonctions ; qu'à titre subsidiaire Monsieur X... invoque que pour le moins le coefficient 280 de la convention collective lui est au minimum applicable et que dans la mesure où la qualification de cadre a fait l'objet d'un avenant exprès au contrat de travail, lequel a bel et bien été rédigé et signé entre les parties, le coefficient 280, converti automatiquement en coefficient 300 une année plus tard en vertu de l'avis interprétatif numéro 20 de la commission nationale de conciliation et d'interprétation, doit au minimum lui être reconnu comme acquis ; mais que la cour constate qu'en sa qualité de promoteur des ventes, l'intimé :- avait pour seul objectif d'assurer la présence des produits, de développer les ventes, de renforcer l'image de la marque, de recruter de nouveaux consommateurs de conquérir des réseaux de distribution différents, et que sa mission ne comportait aucune technicité, complexité ou polyvalence comme l'impose la convention collective applicable pour bénéficier du statut cadre,- ne disposait d'aucune autonomie dans le cadre de l'exercice de ses fonctions, de même qu'il n'avait pas d'équipe placée sous sa responsabilité et ne prenait donc aucune initiative dans l'exécution de ces tâches,que la convention collective des prestataires de services dans le secteur tertiaire ne permettant la qualification de cadre qu'à la condition que le salarié gère une équipe et ait des responsabilités supposant une autonomie des initiatives, la cour constate que c'est à bon droit que la société Service Innovation Group, venant aux droits de la société BW Marketing, a refusé de faire application de la convention à l'intimé ; qu'aussi il convient d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris en ce qu'il a notamment alloué à l'intimé des dommages et intérêts pour exécution irrégulière du contrat de travail et Monsieur X... doit être déboutée de ses demandes présentées tant à titre de rappels de salaires d'août 2002 à octobre 2008, d'indemnité de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement, que d'indemnité au titre des jours d'ancienneté de la convention collective et de dommages et intérêts pour non application de la convention collective des prestataires de services et de l'accord d'entreprise ;
ALORS QUE la qualification du salarié correspond aux fonctions exercées telles que définies dans la convention collective, et les accords applicables dans l'entreprise ; qu'un accord collectif d'entreprise peut prévoir une classification plus favorable que celle de la convention collective ; que si un nouvel accord collectif intervient, les salariés conservent les avantages individuellement acquis, a fortiori si la convention en a ainsi stipulé ; qu'en l'espèce, l'article 7 de l'accord d'entreprise du 4 février 2002 reconnaît la qualité de cadre « autonome » aux promoteurs des ventes confirmés, qui sont soumis à une convention de forfait jours ; qu'au regard de la convention collective du personnel des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire conclue ultérieurement, les « cadres au forfait jour », « disposant d'une grande autonomie dans l'organisation de leur travail », tels les promoteurs des ventes confirmés, ne peuvent être que des cadres de niveau VIII, au coefficient minimum de 360 ; qu'en refusant de faire application de ces dispositions à Monsieur X..., promoteur des ventes confirmé, la Cour d'appel a violé l'article 7 de l'accord du 4 février 2002 ensemble la convention collective susvisée ;
ALORS subsidiairement QUE, si, en principe, la qualification du salarié correspond aux fonctions réellement exercées par lui, rien ne s'oppose à ce que l'employeur exprime une volonté claire et non équivoque de lui reconnaître une qualification supérieure à celle résultant des fonctions réellement exercées ; qu'en l'espèce, Monsieur X... soutenait dans ses écritures qu'il devait se voir appliquer le niveau conventionnel VIII, coefficient 360, correspondant à la catégorie des cadres autonomes au forfait jour, ou à tout le moins le niveau VII, correspondant au premier niveau hiérarchique des cadres, coefficient 300, dans la mesure où l'employeur lui avait attribué la qualification de cadre par un avenant exprès à son contrat de travail, le salarié ajoutant qu'il avait cotisé à la mutuelle des cadres, qu'il s'était vu appliquer les dispositions conventionnelles relatives au préavis des cadres lors du licenciement et que sa qualification de cadre ressortait également de ses bulletins de salaire ; que toutefois, pour débouter Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes formées à ce titre, la Cour d'appel s'est bornée à examiner les fonctions exercées par le salarié « en sa qualité de promoteur des ventes », retenant que, « la convention collective des prestataires de services dans le secteur tertiaire ne permettant la qualification de cadre qu'à la condition que le salarié gère une équipe et ait des responsabilités supposant une autonomie des initiatives », « c'était à bon droit que la société Service Innovation Group, venant aux droits de la société BW Marketing, avait refusé de faire application de la convention à l'intimé » ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas de l'ensemble des éléments invoqués par le salarié que la société lui avait contractuellement, de manière claire et non équivoque, reconnu la qualification de cadre, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
ALORS à tout le moins QU'en omettant de répondre à ce moyen précis des écritures de Monsieur X..., la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-10829
Date de la décision : 21/11/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION, REMUNERATION - Salaire - Fixation - Coefficient de rémunération correspondant à un emploi de cadre - Bénéficiaire - Cadre - Conditions - Détermination - Portée

Doit être cassée une décision qui refuse d'attribuer à un salarié un coefficient de rémunération correspondant à un emploi de cadre, en raison de la nature de ses fonctions, alors qu'un avenant au contrat de travail lui accordait le bénéfice du statut de cadre


Références :

Sur le numéro 2 : article 7 de l'accord d'entreprise portant sur la mise en place des 35 heures, du 4 février 2002

article 1134 du code civil
Sur le numéro 2 : article L. 212-15-3 III du code du travail, dans ses rédactions issues des lois n° 2000-37 du 19 janvier 2000 et n° 2003-47 du 17 janvier 2003

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 19 novembre 2010

Sur le n° 1 : Sur l'application du régime de forfait en jours aux seuls cadres, dans le même sens que :Soc., 31 octobre 2007, pourvoi n° 06-43876, Bull. 2007, V, n° 180 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 nov. 2012, pourvoi n°11-10829, Bull. civ. 2012, V, n° 303
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, V, n° 303

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Aldigé
Rapporteur ?: M. Becuwe
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.10829
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