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12/12/2012 | FRANCE | N°10-26112

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 décembre 2012, 10-26112


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Evénement le 12 avril 2002 en qualité d'hôtesse d'accueil selon un contrat de travail à temps partiel annualisé prévoyant une durée annuelle de 50 heures ; qu' elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et d'obtenir le paiement d'un rappel de salaire ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Vu les article

s 12 et 14 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000, ensemble l'article 1134 du...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Evénement le 12 avril 2002 en qualité d'hôtesse d'accueil selon un contrat de travail à temps partiel annualisé prévoyant une durée annuelle de 50 heures ; qu' elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et d'obtenir le paiement d'un rappel de salaire ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Vu les articles 12 et 14 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu qu'au terme des premiers articles, les dispositions de l'ancien article L. 212-4-2 du code du travail relatives au temps partiel annualisé ont été abrogées ;
Attendu que pour dire le contrat de travail de la salariée nul et lui accorder des dommages-intérêts à ce titre, l'arrêt retient que la loi du 19 janvier 2000 a substitué au contrat de travail à temps partiel annualisé la formule du temps partiel modulé, subordonné à la conclusion d'une convention, d'un accord collectif étendu ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement ; que l'accord atypique produit par la société n'est pas de nature à légitimer le contrat de travail de la salariée ; qu'il s'ensuit que le contrat de travail de la salariée est nul et que la résiliation judiciaire d'un contrat qui n'existe pas ne peut être ordonnée ; que la nullité du contrat entraîne nécessairement un préjudice pour la salariée ; que la demande de dommages-intérêts formée au titre de la résiliation judiciaire du contrat inclut implicitement une demande en réparation du préjudice résultant de la nullité du contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi alors que l'illicéité du contrat de travail à temps partiel annualisé le rendait inopposable à la salariée, ce dont il se déduisait qu'elle restait liée à son employeur par un contrat de travail à temps partiel ou à temps plein, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le second moyen :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner la société au paiement d'un rappel de salaire à titre d'heures supplémentaires l'arrêt retient que les bulletins de paie des mois de décembre de chaque année courant sur la période 2002-2007 étayent sa demande, l'employeur ne fournissant pas d'éléments de nature à infirmer les calculs de l'intéressée ;
Qu'en statuant ainsi sur l'accomplissement d'heures demeurées impayées alors que le litige portait sur l'application d'un taux majoré aux heures dépassant le nombre d'heures prévu au contrat, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article susvisé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident de la salariée :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de la salariée, l'arrêt retient que le contrat de travail étant nul, la résiliation judiciaire d'un contrat qui n'existe pas ne peut être ordonnée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le contrat n'étant pas nul, il lui appartenait de rechercher si le fait pour l'employeur de ne plus avoir fourni de travail à la salariée à compter du mois de juin 2007 constituait un manquement à ses obligations contractuelles suffisamment grave pour justifier la résiliation du contrat de travail à ses torts, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit nul le contrat de travail de la salariée et lui alloué des dommages-intérêts à ce titre, condamné la société au paiement d'une somme à titre d'heures supplémentaires et n'a pas statué sur la demande de la salariée de résiliation judiciaire de son contrat de travail, l'arrêt rendu le 9 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens par elle exposés ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Evénement à payer à Mme X..., la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société Evénement, demanderesse au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société EVENEMENT à verser à Mademoiselle X... la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE la loi du 19 janvier 2000 a abrogé la loi du 20 décembre 1993 qui a créé le contrat à temps partiel annualisé et a substitué à ce type de contrat, la formule du temps partiel modulé ; que la mise en place du temps partiel modulé au sein de l'entreprise est subordonnée à la conclusion d'une convention, d'un accord collectif étendu ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement ; que la société EVENEMENT produit un accord atypique d'entreprise, signé le 9 mai 2000 entre le gérant et le délégué du personnel, mettant en oeuvre dans l'entreprise le temps partiel annualisé ; que cet accord n'est pas de nature à légitimer le contrat de travail de Madame X... car d'une part, il ne précise pas les catégories de personnel auxquelles il s'applique, ni les modalités de décompte de leurs heures de travail, d'autre part, un accord atypique ne constitue pas un accord collectif ; qu'il s'ensuit que le contrat de travail de Madame X... est nul et que la résolution judiciaire d'un contrat qui n'existe pas ne peut être ordonnée ; que les demandes de préavis et d'indemnité de licenciement seront rejetées ; que du fait de la nullité de son contrat de travail, la salariée a nécessairement subi un préjudice : la demande de dommages et intérêts formée au titre de la résolution judiciaire inclut implicitement une demande en réparation du préjudice résultant de la nullité du contrat de travail ; qu'il sera alloué de ce chef à Madame X... la somme de 10 000 euros ;
ALORS QUE, D'UNE PART, la méconnaissance des dispositions de l'article L.212-4-6 du Code du travail dans sa rédaction applicable à la cause en ce qu'elles exigent la conclusion d'un accord collectif pour la mise en place d'une modulation du travail à temps partiel n'est pas sanctionnée par la nullité des contrats de travail conclus en application dudit accord ; qu'en l'espèce, pour condamner la société EVENEMENT à verser à Mademoiselle X... des dommages et intérêts pour nullité de son contrat de travail, la Cour considère que la nullité du contrat découle de l'illicéité de l'accord d'annualisation du temps de travail conclu au sein de l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, la Cour viole l'article précité ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties et le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; qu'en l'espèce, pour condamner la société EVENEMENT à verser à Mademoiselle X... des dommages et intérêts pour nullité de son contrat de travail, la Cour considère que la demande de dommages et intérêts formée au titre de la résolution judiciaire inclut implicitement une demande en réparation du préjudice résultant de la nullité du contrat de travail ; qu'en statuant ainsi, bien que Mademoiselle X... se soit bornée dans ses conclusions d'appel à invoquer la nullité de son contrat pour obtenir des rappels de salaires, la Cour modifie l'objet du litige et partant viole les articles 4 et 5 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société EVENEMENT à verser à Mademoiselle X... la somme de 2 295 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires et celle de 229,50 euros pour les congés payés afférents;
AUX MOTIFS QUE Madame X... produit au soutien de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, ses bulletins de salaire des mois de décembre de chaque année, qui font état du nombre d'heures cumulées sur l'année; qu'il apparaît ainsi qu'elle a travaillé - en 2002 : 226, 75 heures - en 2003: 170, 5 heures - en 2004: 143, 75 heures - en 2005: 299 heures - en 2006: 328 heures - en 2007: 197, 50 heures Que ces éléments étayent la demande formée par la salariée: l'employeur ne fournit pas d'éléments de nature à infirmer les calculs de l'intéressée; que par contre c'est à juste titre qu'il souligne qu'il convient d'appliquer la prescription quinquennale et que la demande n'est recevable qu'à compter d'octobre 2002; qu'il sera alloué à Madame X... au titre des heures supplémentaires la somme de 2295 euros ainsi que celle de 229, 50 euros pour les congés payés afférents;

ALORS QUE, D'UNE PART, l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; que pour condamner la société EVENEMENT à verser à Mademoiselle X... un rappel de salaires, la Cour énonce que les bulletins versés par la salariée étayent suffisamment sa demande de rappel d'heures supplémentaires et que l'employeur n'apporte aucun élément contraire ; qu'en statuant ainsi, cependant que le litige portait sur l'application d'un taux majoré aux heures dépassant le nombre d'heures prévu au contrat et non sur l'accomplissement d'heures demeurées impayées, la Cour modifie l'objet du litige et viole l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, en toute hypothèse et subsidiairement , il résulte de l'article L.212-5 du Code du travail devenu l'article L.3121-22, dans ses rédactions successivement applicables à la cause que l'accomplissement d'heures supplémentaires suppose que des heures de travail soient effectuées au-delà de la durée légale du travail fixée à trente-cinq heures par semaine; qu'en l'espèce, pour condamner la société EVENEMENT à verser à Mademoiselle X... un rappel de salaires au titre d'heures supplémentaires, la Cour se borne à relever que durant la période 2002-2007, la salariée a accompli un nombre d'heures cumulées sur l'année qui a varié de 143, 75 heures à 328 heures; qu'en statuant ainsi, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard du texte susvisé ensemble l'article L.212-1 du Code du travail devenu l'article L.3121-10 applicable à la cause;
ET ALORS ENFIN QUE, , et tout état de cause, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant au juge ses propres éléments; que les éléments susceptibles d'étayer une demande d'heures supplémentaires doivent rendre vraisemblable l'accomplissement d'heures au-delà de la durée légale du travail ; qu'en l'espèce, pour condamner la société EVENEMENT à verser à Mademoiselle X... un rappel de salaires au titre d'heures supplémentaires, la Cour considère que la salariée étaye suffisamment sa demande puisque les bulletins de paye qu'il verse pour la période 2002-2007 établissent l'accomplissement d'un nombre d'heures cumulées sur l'année qui a varié de 143, 75 heures à 328, heures ; qu'en statuant ainsi, la Cour viole les articles L. 3171-4, L.212-5 devenu l'article L.3121-22 et L.212-1 devenu l'article L.3121-10 du Code du travail, les deux derniers textes dans leurs rédactions successivement applicables à la cause.
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour Mme X..., demanderesse au pourvoi incident subsidiaire et éventuel
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame X... de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et de paiement des indemnités de rupture, des congés payés afférents et de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE le contrat de travail de Madame X... est nul et que la résolution judiciaire d'un contrat qui n'existe pas ne peut être ordonnée ; que les demandes de préavis et d'indemnité de licenciement seront donc rejetées ;
ALORS QU'à supposer que le contrat ne soit pas nul, la stipulation d'un temps partiel modulé sans conclusion d'une convention, d'un accord collectif étendu ou d'un accord d'entreprise, est privée de fondement ; qu'il en résulte que le contrat contient des clauses illicites, ne permettant pas à l'employeur de priver le salarié de travail à certaines périodes ; qu'en refusant de rechercher si, du fait de cette nullité de la clause, en ne fournissant pas de travail à certaines périodes, l'employeur n'a pas commis une faute justifiant la résiliation aux torts de l'employeur, la Cour d'appel a violé les articles L 3123-25 (L 212-4-6 ancien) 1221-1, L. 1231-1 et L. 1232-1 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-26112
Date de la décision : 12/12/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 09 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 déc. 2012, pourvoi n°10-26112


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.26112
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