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30/10/2013 | FRANCE | N°12-22310

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 30 octobre 2013, 12-22310


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 22 mai 2012), que M. et Mme X... ont donné à bail à long terme, le 17 décembre 1998, à M. et Mme Y... une ferme constituée, d'une part, de terres et de bâtiments à usage d'exploitation et, d'autre part, d'une maison d'habitation ; que Mme Fabienne X... et M. Emmanuel X..., venus aux droits de Norbert X... décédé, et Mme Monique X... (les consorts X...) ont demandé la résiliation du bail, pour défaut de paiement de fermages et mauvaise exploitation du fonds

, contre M. Y..., resté seul exploitant des lieux loués ;
Sur le premie...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 22 mai 2012), que M. et Mme X... ont donné à bail à long terme, le 17 décembre 1998, à M. et Mme Y... une ferme constituée, d'une part, de terres et de bâtiments à usage d'exploitation et, d'autre part, d'une maison d'habitation ; que Mme Fabienne X... et M. Emmanuel X..., venus aux droits de Norbert X... décédé, et Mme Monique X... (les consorts X...) ont demandé la résiliation du bail, pour défaut de paiement de fermages et mauvaise exploitation du fonds, contre M. Y..., resté seul exploitant des lieux loués ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 411-11 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article L. 411-31 (I,1°) du même code ;
Attendu que le prix du fermage est constitué, d'une part, du loyer des bâtiments d'habitation et, d'autre part, du loyer des bâtiments d'exploitation et des terres nues ;
Attendu que pour rejeter la demande de résiliation pour défaut de paiement du fermage, l'arrêt, relève, par motifs propres et adoptés, que, s'il existe un seul bail, celui-ci fixe séparément le prix du fermage « en ce qui concerne les parcelles de terre et les bâtiments d'exploitation » et le prix du loyer « concernant les bâtiments d'habitation » et vise la clause résolutoire en faisant référence, pour le commandement de payer, à la loi du 6 juillet 1989, et retient que les bailleurs ne peuvent invoquer, à l'appui d'une demande de résiliation fondée sur un texte visant le défaut de paiement des « fermages », le non-paiement du loyer stipulé pour les bâtiments d'habitation ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les biens objets du litige étaient loués en vertu d'un unique bail soumis au statut du fermage et que les dispositions relatives au prix du fermage, lequel est constitué des loyers fixés distinctement pour les biens à usage agricoles et à usage d'habitation, sont d'ordre public, la cour d'appel a violé le texte sus-visé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation du bail, l'arrêt rendu le 22 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer aux consorts X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente octobre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour les consorts X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a refusé de prononcer la résiliation du bail à long terme consenti par M. et Mme X... à M. Y... le 17 décembre 1998 et rejeté les demandes des consorts X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « le bail rural est d'ordre public ; que le bail litigieux est intitulé bail rural à long terme par lequel le bailleur donne à titre de bail rural diverses parcelles de terre et pré outre des bâtiments d'habitation et d'exploitation ; qu'au paragraphe "charges et conditions", il est encore précisé que ce bail est soumis aux dispositions du statut du fermage incluses dans le titre premier du livre quatrième du code rural ; qu'il n'est surtout pas discuté qu'il s'agit d'une mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l'article L 311-1 du code rural ; qu'il résulte des dispositions de l'article L 411-11 du code rural que le prix du fermage est composé de plusieurs éléments que les parties doivent fixer distinctement, "compte tenu d'une éventuelle clause de reprise en cour de bail, de l'état et de l'importance des bâtiments d'habitation et d'exploitation, de la qualité des sols ainsi que de la structure parcellaire du bien loué et le cas échéant de l'obligation faite au preneur de mettre en oeuvre des pratiques culturales respectueuses de l'environnement ;que ce prix est constitué d'une part du loyer des bâtiments d'habitation et d'autre part du loyer des bâtiments d'exploitation et des terres nues" ; que ce même texte décline ensuite séparément comment doit être fixé en monnaie entre des maxima et des minima arrêtés par l'autorité administrative chacun de ces loyers ; qu'il résulte de ces dispositions que le fermage comprend deux loyers qui forment le prix d'un bail unique, chacun devant être fixé séparément à la seule fin purement financière d'une détermination exacte des prix respectifs de chaque loyer et eu égard aux exigences administratives propres à chacune de ses composantes ; que certes, les clauses contraires au statut du fermage sont réputées non écrites par application de l'article L 415-12 du code rural ; que cependant, le contrat litigieux a fixé séparément, dans un paragraphe I intitulé "Fixation du fermage", le prix du fermage "en ce qui concerne les parcelles de terre et les bâtiments d'exploitation" et, dans un paragraphe II intitulé " Fixation du loyer" le prix du loyer "concernant les bâtiments d'habitation", et, ensuite, visé la clause résolutoire en référence, s'agissant du commandement de payer, à la loi du 6 juillet 1989 ; qu'ainsi, et contrairement aux dispositions d'ordre public de l'article L 411-11 précité, les parties n'ont pas divisé le prix du fermage en deux composantes distinguant la partie exploitation de la partie habitation mais ont explicitement séparé ce qui relève de la fixation du fermage de la fixation du loyer d'habitation, distinction confortée par l'introduction tout aussi expresse d'une clause résolutoire visant les dispositions également d'ordre public de la loi sur les baux d'habitation ; que cette même distinction est au demeurant reprise dans le commandement du 10 décembre 2007 ; qu'il doit donc être constaté que les bailleurs poursuivent la résiliation du bail au seul motif du non-paiement du fermage par le preneur, par application de l'article L411-31 du code rural, fermage qu'ils ont contractuellement fixé à un prix calculé par la seule prise en compte des parcelles de terre et des bâtiments d'exploitation, sans qu'aucune requalification a posteriori de ces dispositions contractuelles puisse opérer de manière rétroactive la régularisation de l'action telle qu'engagée ; qu'en conséquence de ce qui précède, il convient comme le premier juge de ne tenir compte, pour apprécier les éventuels manquement du preneur, que des seuls fermages tels que circonscrits par la convention liant les parties à l'exclusion des loyers d'habitation ; que le premier commandement du 10 décembre 2007 vise un arriéré de fermages qui seuls doivent être pris en compte à l'exclusion de toute autre demande (frais, impôts) correspondant aux sommes suivantes : fermage novembre 2005 : 3 815,29 euros, fermage novembre 2006: 5 934,26 euros, fermage mai 2007 : 2967,13 euros, fermage novembre 2007: 3 001,40 euros ; qu'après déduction de versements opéras par le preneur à hauteur de montants respectifs de 7 530,51 euros et de 4477,00 euros il restait dû un total de 3 881,57 euros ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que Monsieur Y... a réglé les sommes suivantes : - 11 décembre 2007 : 1 424,63 euros, - 14 janvier 2008 : 1 424,63 euros, - 18 février 2008 : 2 264,48 euros, - soit un total de 5 113,74 euros ; qu'étant observé que les appelants admettent qu'il est constant que si l'on ne tient pas compte des loyers les causes du commandement du 10 décembre 2007 ont été acquittées dans le délai de trois mois imparti au preneur, il s'ensuit que le premier juge a justement décidé que ce commandement ne peut valoir mise en demeure infructueuse ; que dès lors, il importe peu que les causes du second commandement du 4 décembre 2008 visant le fermage du 1er novembre 2008 d'un montant de 6 187,67 euros n'aient pas été acquittées, du fait des deux seuls versements de 2 500 euros chacun opérés les 22 janvier et 18 février 2009, dans le délai de trois mois imparti au-delà duquel il restait dû une somme de 1187, 67 euros, puisqu'il suit de ce qui précède que les bailleurs ne justifient que d'un seul défaut de paiement de fermage persistant au-delà du délai susvisé qui ne peut suffire à prononcer la résiliation sollicitée » (arrêt, p. 6, 7 et 8) ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU' « aux termes des dispositions des articles L411-31 et L411-53 al. 1er du code rural, le bailleur ne peut faire résilier son bail que s'il justifie notamment : 1°) de deux défauts de paiement de fermage ayant persisté à l'expiration d'un délai de trois mois après mise en demeure postérieure à l'échéance ; 2°) d'agissements du preneur de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; que M. Y... ne conteste pas l'absence de régularisation de son fermage dans le délai de trois après la délivrance du commandement de payer du 4 décembre 2008 ; que cependant il soutient qu'il a régularisé les causes du commandement du 10 décembre 2007, avant l'expiration du délai légal ; que ce commandement vise un certain nombre de sommes dues par le preneur dont des fermages (terres et bâtiments d'exploitation), des parts d'impôts fonciers, des loyers, et des frais, le tout pour 8 681,46 ¿ ; qu'or, le commandement ne peut légitiment inclure des fermages et des loyers pour la maison d'habitation ; qu'en effet, s' il existe un seul bail à long terme conclu le 17 décembre 1998, devant Maître A... François, notaire à la Flèche, ce contrat stipule clairement que les terres et bâtiments d'exploitation sont données à bail moyennant un fermage et que les bâtiments d'habitation sont loués conformément aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989, moyennant un loyer ; que les modalités de paiement et d'indexation sont distinctes et obéissent chacune à des dispositions d'ordre public ; qu'il s'ensuit, contrairement à ce que soutiennent les consorts X..., que ces stipulations contractuelles ne constituent pas des clauses réputées non écrites, au sens de l'article L415-12 du code rural , et sont tout à fait valables ; qu'en conséquence, le commandement de payer litigieux vise au titre des fermages les sommes suivantes : - fermage novembre 2005 : 3 815,29 ¿, - fermage novembre 2006 : 5 934,26¿ -fermage mai 2007 : 2 967,13 ¿, - fermage novembre 2007: 3 001,40 ¿ - versements SCP FRANS VENISSE : 7 359,51 ¿, - versements Maître B...: 4 477,00 ¿ - total dû : 3 881,57 ¿ ; qu'or il ressort des pièces versées aux débats, et des conclusions concordantes sur ce point des parties, que M. Y... a réglé les sommes suivantes : - 11 décembre 2007 : 1 424,63 ¿, - 14 janvier 2008 : 1 424,63 ¿, - 18 février 2008 : 2 264,48 ¿, - soit un total versé de 5 113,74 ¿ ; qu'il s'ensuit que les causes du commandement ont été acquittées par M. Y..., avant le 11 mars 2008, soit dans le délai de trois mois qui lui était imparti » (jugement, p. 3-4) ;
ALORS QUE, premièrement, devant s'entendre de la même façon, dans le cadre de l'article L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime, comme dans le cadre de l'article L. 411-11, le vocable de fermage, en cas de mise à disposition de bâtiments d'habitation, recouvre non seulement la contrepartie financière de la mise à disposition des terres et des bâtiments d'exploitation, mais également la contrepartie financière de la mise à disposition des bâtiments d'habitation ; que dès lors, le non-paiement de la contrepartie financière afférente à une mise à disposition des bâtiments d'habitation entre dans le champ de l'article L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime, et qu'en décidant le contraire, au cas d'espèce, les juges du fond ont violé les articles L. 411-11 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
ALORS QUE, deuxièmement, les dispositions de l'article L. 411-11, relatives au prix du bail, sont d'ordre public ; que dès lors, si, dans le cadre d'une seule et même convention, répondant à la qualification de bail rural, les parties conviennent, pour les terres et les bâtiments d'exploitation, d'une première contrepartie financière, puis, pour les bâtiments d'habitation, d'une seconde contrepartie financière, les dispositions de l'article L. 411-11 du code rural et de la pêche maritime s'appliquent impérativement et les juges du fond doivent les traiter comme tels, au regard de l'article L. 411-31 du même code ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles L. 411-11 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
ALORS QUE, troisièmement, et en tout cas, quelles que soient les dénominations dont les parties ont usé, et quelles que soient les références qu'elles ont pu faire dans leurs conventions à tel ou tel texte, en toute hypothèse il appartient aux juges du fond de restituer aux conventions leur exacte qualification ; qu'en refusant de satisfaire à cette obligation, pour déterminer si la stipulation contractuelle ne devait pas être regardée comme ayant fixé les deux composantes du fermage, comme le prévoit l'article L. 411-11 du code rural et de la pêche maritime, et si dès lors, ce texte étant applicable, le non-paiement de ces deux composantes ne pouvait pas être invoqué, dans le cadre de l'action en résiliation, les juges du fond ont violé l'article 12 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, quatrièmement, la stipulation relative à la clause résolutoire, quels qu'en aient été les termes, ne pouvait être utilement invoquée, dès lors que le bailleur entendait exercer une action en résiliation ; que de ce point de vue, les juges du fond ont violé les articles 1134 du code civil, L. 411-11 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
ALORS QUE, cinquièmement, et en tout cas, quel qu'ait été le libellé de la clause résolutoire et de la référence qu'elle pouvait comporter, les juges du fond se devaient d'appliquer les règles d'ordre public qui régissaient l'accord des parties et qu'en refusant de ce faire, ils ont violé les articles L. 411-11 et L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
ALORS QUE, sixièmement, et en tout état de cause, quel que soit le libellé de la clause ou de la référence qu'elle comportait, les juges du fond se devaient à tout le moins de mettre en oeuvre leur pouvoir de requalification et que faute de se faire, ils ont violé l'article 12 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a refusé de prononcer la résiliation judiciaire du bail du 17 décembre 1998 et a rejeté les demandes des consorts X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « les bailleurs font valoir comme deuxième motif de résiliation que les agissements du preneur seraient de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; que les motifs de résiliation doivent s'apprécier au moment de la demande en justice soit au 5 mai 2009 ; que les bailleurs s'appuient sur un procès verbal de constat d'huissier du 4 septembre 2009 pour reprocher au preneur d'avoir abattu des pommiers, mal entretenu des parcelles, détruit une haie, supprimé un point d'eau pour laisser place à des chardons et des ronces ainsi qu'à des blocs de pierres alors que l'huissier n'a retrouvé aucune borne ; que même si ce constat est postérieur de quatre mois à la demande, il peut toutefois établir une situation existante au moment de la saisine ; que toutefois, aucun de ces éléments, dont la gravité est justement relativisée par Monsieur Y... qui conteste avoir pris l'initiative d'un quelconque arrachage de bornes, précise que les pommiers arrachés étaient en piteux état ont été remplacés par la suite, réplique que la présence de chardons est limitée à certaines parcelles et produit un constat d'huissier du 06 juillet 2010 qui montre le très bon état des parcelles, haies, clôtures, fossés et bâtiments d'habitation, de telle sorte que, même s'il ne peut être tenu compte d'améliorations apportées par le preneur depuis la demande pour faire disparaître les causes de résiliation, la qualité qu'il révèle de la tenue générale de l'exploitation qui ne peut être l'oeuvre d'un rattrapage récent seulement justifié par la procédure, ne peut fonder le prononcé de cette résiliation ; que le preneur justifie en outre avoir fait évoluer son exploitation en passant de 133 895 litres de lait en 1998 à 293 862 litres en 2009 ; que si les pièces produites en dernier lieu par le preneur montrent que celui-ci a livré 224 168 litres sur la campagne 2010/2011, c'est à dire comme le font valoir les bailleurs en dessous de son quota de 358 274 litres, il résulte du document relatif aux résultats techniques / qualité du lait que les livraisons corrigées du 1er avril 2011 au 29 février 2012 sont en progression de 51,24% par rapport à l'année précédente ; qu'ainsi, il ne peut être considéré que les résultats obtenus en 2009 auraient été révélateurs, à l'époque de la saisine, d'une situation compromettant l'exploitation du fonds alors que celle-ci au contraire était en progression, laquelle a été confortée par la suite ; que les autres griefs tenant au ramonage, à l'entretien de la chaudière ne sont pas de ceux qui peuvent justifier la résiliation du bail pour agissements du preneur seraient de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; qu'enfin, Monsieur Y... produit une attestation d'assurances du 1er janvier au 31 décembre 2009 couvrant ainsi la date de saisine de la juridiction » (arrêt, p. 8-9) ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « les consorts X... font état à l'appui de leur demande de résiliation du bail, des agissements du preneur de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds ; qu'il ressort du procès-verbal de constat dressé par Me C..., huissier de justice, le 04 septembre 2009 que M. Y... aurait abattu des pommiers ; que celui-ci ne conteste pas cette opération, mais soutient qu'il a remplacé ces arbres par de nouveaux, et établit, en versant un second procès-verbal de constat dressé le 06 juillet 2010 par Me D..., huissier de justice le bon état d'entretien des parcelles, des haies, clôtures, fossés, ainsi que des bâtiments d'habitation » (jugement, p. 4) ;
ALORS QUE, premièrement, pour statuer sur les manquements de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds, le juge a l'obligation de statuer à la date de la demande introductive d'instance ; qu'une pièce établie postérieurement à la demande ne peut être retenue que dans la mesure où il est constaté qu'elle relate un fait antérieur à la demande ; qu'en application de l'article 885 du code de procédure civile, le tribunal paritaire des baux ruraux est saisi par une déclaration faite ou adressée au greffe ; qu'en l'espèce, cette déclaration a été faite le 05 mai 2009 ; qu'en confirmant le jugement qui avait retenu, au travers d'un constat d'huissier établi à cette date, que le 06 juillet 2010, les parcelles et les bâtiments étaient en bon état d'entretien, les juges du fond ont violé l'article L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime en tant qu'il impose au juge d'apprécier la situation à la date de la demande ;
ALORS QUE, deuxièmement, si le fermier a produit une attestation d'assurance établie le 3 juin 2009, révélant que l'assureur couvrait la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2009, les juges du fond étaient tenus pour respecter la règle suivant laquelle le juge doit se placer à la date de la demande, de déterminer si, à la date du 05 mai 2009, date de la demande, le fermier était en mesure de justifier d'une assurance ; que faute de s'être expliqués sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
ALORS QUE, troisièmement, faute de s'être expliqués sur l'arrachage d'une haie (conclusions du 27 septembre 2011, p. 8, alinéa 5), sur la suppression d'un fossé (p. 8, avant-dernier alinéa), sur le caractère inutilisable d'un chemin menant à la route nationale (p. 9, alinéa 1er), et sur la suppression d'un point d'eau (p. 8, alinéa 5 et p. 9, alinéa 1er), à l'effet de déterminer si ces divers manquements ne compromettaient pas la bonne exploitation du fonds, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 12-22310
Date de la décision : 30/10/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

BAIL RURAL - Bail à ferme - Résiliation - Causes - Manquements du preneur - Défaut de paiement du loyer de l'immeuble à usage d'habitation - Bail unique soumis au statut du fermage - Forme - Location d'un immeuble à usage d'habitation et de biens à usage agricole - Cas

Le défaut de paiement du loyer d'un immeuble à usage d'habitation loué, avec des biens à usage agricole, en vertu d'un bail unique soumis au statut du fermage, peut fonder une action en résiliation de ce bail sur le fondement de l'article L. 411-31 (I, 1°) du code rural et de la pêche maritime nonobstant toute clause contraire


Références :

articles L. 411-11 et L. 411-31 (I, 1°) du code rural et de la pèche maritime

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 22 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 30 oct. 2013, pourvoi n°12-22310, Bull. civ. 2013, III, n° 137
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, III, n° 137

Composition du Tribunal
Président : M. Terrier
Avocat général : M. Bruntz
Rapporteur ?: M. Crevel
Avocat(s) : Me Foussard

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.22310
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