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13/11/2013 | FRANCE | N°12-24080

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 13 novembre 2013, 12-24080


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, qu'ayant relevé que, par lettre du 23 mai 2003, la société Vast avait expressément reconnu que sa locataire-gérante, la société Do, percevait une redevance de la société AVS en compensation de l'arrêt de l'activité de lavage automobile et retenu, par une interprétation de cette lettre, rendue nécessaire par son ambiguïté et exclusive de dénaturation, que la société Vast avait consenti à l'occupation et à l'aménagement de l'a

ire de lavage par la société AVS, la cour d'appel, sans dénaturation, a exactemen...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, qu'ayant relevé que, par lettre du 23 mai 2003, la société Vast avait expressément reconnu que sa locataire-gérante, la société Do, percevait une redevance de la société AVS en compensation de l'arrêt de l'activité de lavage automobile et retenu, par une interprétation de cette lettre, rendue nécessaire par son ambiguïté et exclusive de dénaturation, que la société Vast avait consenti à l'occupation et à l'aménagement de l'aire de lavage par la société AVS, la cour d'appel, sans dénaturation, a exactement déduit, de ces seuls motifs, que la société Vast n'était pas fondée à rechercher la responsabilité de la bailleresse pour manquement à son obligation de jouissance paisible des lieux loués ;
Attendu, d'autre part, que la société Vast n'ayant pas invoqué dans ses conclusions la violation des articles 544 et 1728 du code civil, le moyen est de ce chef nouveau, mélangé de fait et de droit ;
D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, qu'ayant relevé que M. X..., gérant de la société Vast jusqu'au 25 février 2002, avait assuré la présidence du conseil d'administration de la société AVS jusqu'au 15 décembre 2000, soit jusqu'à une date très proche de la délivrance du permis de construire, le 13 septembre 2001, qu'il était demeuré associé de la société AVS jusqu'en février 2002 et que les travaux de restructuration de la concession avaient été réalisés au vu et au su de la locataire-gérante, qui n'avait émis aucune protestation ni réserve, la cour d'appel a pu en déduire que la société Vast avait donné son accord tacite à la réalisation des travaux ayant entraîné le déplacement du portail d'accès au site et ne pouvait, par suite, reprocher à la bailleresse un manquement à son obligation de jouissance paisible des lieux loués ;
Attendu, d'autre part, que la société Vast n'ayant pas invoqué dans ses conclusions les dispositions de l'article 1842 du code civil, le moyen est de ce chef nouveau, mélangé de fait et de droit ;
D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Vast aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Vast à payer à la société de l'Isle la somme de 3 000 euros et à la société AVS la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Vast ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour la société Vast.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR débouté la société VAST de toutes ses demandes concernant le poste de lavage et ses équipements ;
AUX MOTIFS QU'il est prétendu à tort que la société AUTOMOBILES VIENNE SUD aurait régulièrement occupé la station de lavage et disposé de ses équipements conformément à son titre locatif ; il résulte en revanche sans ambiguïté des courriers échangés entre les trois parties intéressées au cours des années 2002 et 2003 que c'est avec l'accord exprès de la société VAST que le poste de lavage a été sous-loué à la société AUTOMOBILES VIENNE SUD par le locataire gérant du fonds de station service, la SARL DO ; par courrier du 22 mars 2002, la société VAST a en effet demandé à la SCI DE L'ISLE l'autorisation de sous-louer l'emplacement de lavage à la société AUTOMOBILES VIENNE SUD, qui souhaitait supprimer cette activité ; que par courrier à la société VAST du 25 mars 2003, la SCI, sans s'opposer à cette sous-location a exprimé son refus d'accepter la suppression de cette activité, dont elle a indiqué qu'elle constituait un complément important pour la station service ; par lettre du 2 mai 2003, la société AUTOMOBILES VIENNE SUD a rappelé à la société VAST l'existence du contrat de sous-location portant sur l'aire de lavage et le portique automatique, tout en se plaignant du mauvais état de cet équipement et en sollicitant l'accord de sa colocataire pour leur remplacement, à défaut duquel elle menaçait de restituer l'emplacement ; enfin, en réponse à ce dernier courrier, la société VAST a expressément reconnu que la société AUTOMOBILES VIENNE SUD s'acquittait d'une redevance au profit de la SARL DO en compensation de l'arrêt de l'activité de lavage d'automobiles et ce dans le but de lui permettre « d'installer un portail pour clore la partie séparant la concession et le hall V.O », précisant même qu'elle l'avait informée au moment de sa demande qu'elle devait se mettre directement d'accord avec le locataire gérant en attendant l'accord du propriétaire ; dès lors qu'il résulte explicitement de ces courriers que c'est avec son accord que, malgré l'interdiction de sous-location contenue à la fois dans le bail de location gérance consenti à la société DO et dans le bail des murs du 6 août 1993, le poste de lavage a été repris contre le paiement d'un sous-loyer, puis supprimé par le concessionnaire CITROËN, la société VAST ne peut sérieusement se plaindre de la démolition du local technique abritant la machinerie du portique de lavage ni de la mise en place d'un portail interdisant l'accès à l'aire de lavage en dehors des heures ouvrables ; ayant consenti à l'occupation et aux aménagements litigieux, elle n'est donc pas fondée à rechercher sur ce point la responsabilité du bailleur pour manquement à ses obligations de jouissance paisible et de garantie, ce qui conduit à l'infirmation du jugement de ce chef et au rejet des demandes de libération de l'aire de lavage, d'enlèvement du portail d'accès de cette aire et de reconstruction du local technique (arrêt, pages 7 et 8) ;
ALORS D'UNE PART QU'aux termes du bail conclu le 6 août 1993 entre la SCI DE L'ISLE et la société VAST, le preneur ne pouvait sous-louer les locaux loués « sans l'assentiment exprès et par écrit de la société bailleresse, le tout sous peine de résiliation » ; que, dès lors, en se bornant à énoncer que par courrier du 25 mars 2003, le bailleur « sans s'opposer à cette sous-location » concernant le poste de lavage, avait exprimé son refus de supprimer cette activité, pour en déduire que les parties se seraient entendues pour consentir une sous-location du poste de lavage à la société AVS, et qu'ainsi la société exposante ne pourrait, de ce chef, rechercher la responsabilité du bailleur pour manquement à son obligation de jouissance paisible, quand le courrier susvisé ne pouvait valoir accord exprès du bailleur en faveur d'une telle sous-location, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
ALORS D'AUTRE PART QU'aux termes de son courrier du 23 mai 2003, répondant à celui de la société AVS en date du 2 mai 2003, l'exposante énonçait expressément d'une part « qu'il ne nous est pas possible de satisfaire à votre demande, le propriétaire n'autorisant pas la sous-location projetée », d'autre part que « vous ne sous-louez pas actuellement une parcelle mais que vous payez une somme à la SARL DO, en compensation de son arrêt de l'activité lavage », enfin que « lorsque vous nous avez fait votre demande, nous vous avons dit de vous mettre d'accord directement avec Monsieur DO, en attendant l'accord du propriétaire » ; qu'il résulte des termes clairs et précis de cette lettre que loin de donner son accord à une sous-location du poste de lavage au profit de la société AVS, la société VAST a au contraire précisé que l'intéressée ne bénéficiait pas d'une sous-location proprement dite, et qu'il convenait, pour lui permettre une utilisation régulière du poste de lavage, d'attendre l'accord du propriétaire ; que, dès lors, en estimant cependant qu'il résulte de ce courrier que l'exposante aurait consenti à l'occupation et aux aménagements litigieux, la Cour d'appel qui dénature cette lettre, a violé l'article 1134 du Code civil ;
ALORS DE TROISIEME PART QU'il ne résulte d'aucun des courriers des 22 mars 2002, 25 mars 2003, 2 mai 2003 ou 23 mai 2003 que la société VAST ait donné son accord à la suppression du poste de lavage ou de son local technique par la société AVS ; qu'en estimant le contraire, la Cour d'appel a dénaturé ces courriers et violé l'article 1134 du Code civil ;

ALORS, ENFIN et SUBSIDIAIREMENT, QUE le bail est exclusif de tout transfert de propriété et emporte obligation, pour le preneur, d'user de la chose en bon père de famille et suivant la destination qui lui a été donnée par le contrat et, partant, de la restituer en fin de bail ; qu'un tel contrat ne saurait permettre au preneur d'en disposer ni, par conséquent, de détruire la chose louée, la perte totale de la chose louée, soit par cas fortuit, soit par la faute de l'une des parties, emportant de plein droit la fin du contrat ; que, dès lors, en estimant qu'il résulte des courriers échangés entre les trois parties intéressées que c'est avec l'accord de la société VAST que le poste de lavage a été sous-loué à la société AVS, pour en déduire que l'exposante ne peut se plaindre de la démolition du local technique abritant la machinerie du portique de lavage, quand il résulte de ces énonciations que seule la location du poste de lavage aurait été consentie à la société AVS, laquelle était exclusive de tout transfert de propriété de la chose au profit de cette dernière, et, partant, interdisait nécessairement à l'intéressée de détruire la chose ainsi louée, la Cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1728 du Code civil, ensemble les articles 544 et 1134 du même code.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR débouté la société VAST de toutes ses demandes concernant le portail d'entrée du garage CITROËN et l'accès à l'aire de distribution des carburants ;
AUX MOTIFS QU'à l'occasion des travaux de restructuration de sa concession automobile, réalisés au cours des années 2001 et 2002, la société AUTOMOBILES VIENNE SUD, qui ne le conteste pas, a déplacé de 5 m environ vers le sud la porte d'accès à ses ateliers, empiétant ainsi sur la partie de la piste de sortie de la station-service dont le bail du 6 août 1993 réservait la jouissance à la société VAST ; comme précédemment, il sera tout d'abord observé que la société appelante ne peut sérieusement soutenir que l'occupation de l'espace litigieux est conforme à son propre bail du 28 décembre 2000, qui réserve expressément les droits de la société VAST, sur la nature et étendue desquelles il n'existait aucune ambiguïté puisque le bail du 6 août 1993 lui avait été remis et que la jouissance des lieux avait été partagée pendant 17 années ; s'il ne résulte d'aucune pièce du dossier qu'elle aurait expressément consenti au déplacement de l'accès (il n'y est fait aucune allusion dans les courriers sus analysés, tandis que le protocole du 28 décembre 2000 non signé dont l'objet est de prévoir les conséquences d'un arrêt éventuel de l'exploitation de la station-service ne lui est pas opposable), la société VAST ne peut toutefois sérieusement soutenir que les travaux auraient été réalisés à son insu ; M. Joël X..., son gérant jusqu'au 25 février 2002, a en effet assuré la présidence du conseil d'administration de la société AUTOMOBILES VIENNE SUD jusqu'au 15 décembre 2000, soit jusqu'à une date très proche de la délivrance le 13 septembre 2001, du permis de construire, qui a nécessairement été précédée d'une étude technique dont la durée peut être estimée à plusieurs mois compte tenu de l'importance des travaux de restructuration engagés ; il est en outre et surtout demeuré salarié et associé au sein de la société AUTOMOBILES VIENNE SUD jusqu'au mois de février 2002, ainsi qu'il le reconnaît lui-même dans son courrier à la SCI du 22 mars 2002, en sorte qu'il n'a pas pu ignorer la nature et l'étendue des travaux entrepris dès la fin de l'année 2001, ni par voie de conséquence la réalité de l'empiètement litigieux ; enfin, par ses courriers des 22 mars 2002 et 23 mai 2003, la société VAST démontre qu'elle avait une parfaite connaissance de la situation matérielle après réalisation des travaux de restructuration de la concession, qui ont nécessairement été réalisés au vu et au su de la société DO, sa locataire gérante, laquelle n'a émis aucune protestation ou réserve, ce qui laisse présumer qu'il existait un accord tacite entre toutes les parties intéressées ; il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société VAST ne peut là encore se plaindre d'une éviction partielle, ni par voie de conséquence rechercher la responsabilité de la SCI bailleresse, en sorte que le jugement sera également infirmé en ce qu'il a condamné la SCI DE L'ISLE sous astreinte à libérer l'aire de distribution des carburants et à enlever le portail d'entrée du garage empiétant sur la piste d'accès louée à la société VAST (arrêt, pages 8 et 9) ;
ALORS D'UNE PART QUE conformément à l'article 1842 du Code civil, la société a une autonomie juridique par rapport aux personnes physiques qui la dirigent et par rapport à ses associés ; que, dès lors, en se déterminant par la circonstance que Monsieur X..., gérant de la société exposante jusqu'au 25 février 2002, avait également assuré la présidence du conseil d'administration de la société AUTOMOBILES VIENNE SUD jusqu'en décembre 2000, puis était demeuré associé de cette dernière jusqu'au mois de février 2002, et, à ce titre, n'avait pu ignorer la nature et l'étendue des travaux litigieux, pour en déduire que la société VAST aurait tacitement accepté lesdits travaux et, partant, ne pourrait rechercher de ce chef la responsabilité du bailleur sur le fondement de l'article 1719-3° du Code civil, la Cour d'appel, qui se détermine par un motif inopérant, a privé sa décision de toute base légale au regard de ce texte ;
ALORS D'AUTRE PART QU'en application de l'article 1719-3° du Code civil, le bailleur est responsable envers le preneur des troubles de jouissance causés par les autres locataires et n'est exonéré de cette responsabilité qu'en cas de force majeure, laquelle ne saurait résulter du seul fait que le preneur aurait tardé à s'opposer aux troubles litigieux ni qu'il aurait été informé desdits troubles ; qu'en l'espèce, après avoir admis que les travaux de restructuration entrepris par la société AUTOMOBILES VIENNE SUD ont abouti à un empiètement de la porte d'accès du garage sur la piste de sortie de la station-service, la Cour d'appel a relevé que la société VAST aurait eu une parfaite connaissance des travaux litigieux et n'aurait, lors de leur exécution, émis aucune protestation, pour en déduire que l'exposante ne saurait se plaindre d'une éviction partielle ni, par conséquent, rechercher la responsabilité de la bailleresse ; qu'en l'état de ces énonciations qui ne sont nullement de nature à caractériser, pour la bailleresse, un cas de force majeure lui permettant de s'exonérer de sa responsabilité au regard du trouble de jouissance ainsi causé au preneur, la Cour d'appel, qui se détermine par un motif inopérant, a privé sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 12-24080
Date de la décision : 13/11/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 26 avril 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 13 nov. 2013, pourvoi n°12-24080


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.24080
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