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11/12/2013 | FRANCE | N°12-18511

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 décembre 2013, 12-18511


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 9 décembre 2011), que Mme X... et son fils M. X... (les consorts X...) ont conclu avec Mme Y..., notaire de profession, une promesse synallagmatique de vente d'un terrain à bâtir sous diverses conditions suspensives notamment celles de l'obtention par l'acquéreur, d'une part, d'un permis de démolir le bâtiment existant et d'un permis de construire un immeuble collectif à usage d'habitation d'une surface utile minimum de

1 000 m², d'autre part, d'un prêt ; que la vente ne s'étant pas réa...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 9 décembre 2011), que Mme X... et son fils M. X... (les consorts X...) ont conclu avec Mme Y..., notaire de profession, une promesse synallagmatique de vente d'un terrain à bâtir sous diverses conditions suspensives notamment celles de l'obtention par l'acquéreur, d'une part, d'un permis de démolir le bâtiment existant et d'un permis de construire un immeuble collectif à usage d'habitation d'une surface utile minimum de 1 000 m², d'autre part, d'un prêt ; que la vente ne s'étant pas réalisée, les consorts X... ont assigné Mme Y... en paiement d'une indemnité d'immobilisation ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de la condamner à payer aux consorts X... une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que le débiteur obligé sous condition suspensive ne peut être condamné à indemniser le créancier du défaut de réalisation de cette condition que si, par sa faute, il en a empêché l'accomplissement ; qu'en se fondant, pour condamner Mme Y... à indemniser les consorts X... du préjudice subi en raison de l'immobilisation de leur bien, sur la circonstance qu'avant la signature de l'acte, elle avait dû se rendre compte de l'empiétement litigieux et qu'elle aurait dû réaliser un bornage, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la circonstance, confirmée seulement après la signature du compromis, que le projet de construction était irréalisable, ne justifiait pas que des demandes de permis de démolir, de permis de construire et de prêt, ne soient pas déposées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1178 du code civil ;
2°/ qu'un motif hypothétique équivaut à un défaut de motifs ; qu'en déduisant de la seule profession de notaire de Mme Y... et de ce qu'elle a acquis l'immeuble en cause en vue de réaliser une opération immobilière sous la maîtrise oeuvre déléguée à la Sobefi, qu' il y a lieu de considérer qu'elle n'a pu signer le compromis sans avoir visité les lieux et s'être rendu compte du problème que causait l'accès à la parcelle voisine et du fait que le passage existant au profit de cette parcelle voisine était manifestement plus large que celui figurant au titre, la cour d'appel s'est fondée sur une simple hypothèse et a donc violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que le compromis de vente prévoyait la réalisation d'un bornage après sa signature ; qu'en jugeant cependant, pour lui reprocher le non-respect de ses obligations contractuelles, qu'il appartenait à Mme Y..., avant de signer le compromis, avec les délais qui lui étaient imposés, de solliciter des vendeurs un bornage et que toutes les démarches dont elle fait état pour justifier ses carences, auraient pu et auraient dû être faites par elle avant la signature du compromis immobilisant le bien, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce compromis et par conséquent violé l'article 1134 du code civil ;
4°/ qu'en imputant à faute à Mme Y... de ne pas avoir sollicité un bornage avant la signature du compromis, la cour d'appel a méconnu la force obligatoire de ce contrat et violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;
5°/ qu'aucune obligation d'informer son cocontractant sur ses difficultés d'exécution du contrat dans les délais impartis ne pèse sur l'autre cocontractant tant qu'il n'est pas acquis que ce cocontractant ne pourra pas respecter les délais prévus au contrat ; qu'en jugeant que Mme Y..., qui a eu connaissance des difficultés qu'elle allègue dès la signature du compromis, a commis une faute en n'avisant pas immédiatement ses vendeurs du fait qu'elle ne respecterait pas les délais prévus, cependant qu'il n'était pas acquis, tant que les démarches entreprises par Mme Y... pour remédier aux difficultés de bornage et d'accès du terrain n'avaient pas échoué, que les délais contractuels de dépôt des demandes de permis de démolir, de permis de construire et de prêt, ne seraient pas tenus, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que Mme Y... n'avait déposé, ni demande de permis de démolir et de construire, ni demande de prêt, puis relevé que, pour un professionnel du droit immobilier, un examen attentif de la configuration des lieux aurait révélé l'existence, au profit de la parcelle voisine, d'un passage matérialisé par la construction d'un mur et susceptible d'empiéter sur une partie du terrain vendu compromettant ainsi la réalisation de l'opération envisagée, la cour d'appel, qui, sans statuer par des motifs hypothétiques, a souverainement estimé que les diverses démarches, spécialement celles de vérification de la contenance réelle, invoquées par Mme Y... pour justifier ses carences, auraient dû être effectuées avant la signature de la promesse de vente, a pu, sans dénaturer la convention des parties, en déduire que la défaillance des conditions suspensives était la conséquence d'un manquement fautif de cette dernière à son obligation de diligence et a légalement justifié sa décision d'indemniser les vendeurs du préjudice résultant de la vaine immobilisation du bien pendant plusieurs mois ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné Mme Nathalie Y... à verser aux consorts X... la somme de 10 000 ¿ à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE pour contester le jugement entrepris M. et Mme X... font valoir comme devant le premier juge que Mme Y... n'a pas respecté les termes du compromis l'obligeant à déposer les demandes de permis et de prêt dans un certain délai ; que ce non-respect qui a conduit à la caducité du compromis lui est imputable et caractérise une faute contractuelle ; qu'il en est découlé pour eux un préjudice constitué par l'immobilisation inutile de leur bien pendant dix mois soit jusqu'à la caducité du compromis requise par eux et acceptée par Mme Y... ; qu'aux termes du compromis du 7 août 2007, il est expressément prévu que Mme Y... avait jusqu'au 7 novembre 2007 pour déposer les demandes de permis de démolir et de construire et que la vente était soumise à la condition suspensive de l'obtention de ces permis avant le 7 avril 2008 avec possibilité de prorogation en cas de réponse tardive de l'administration, permis qui, une fois obtenu, devait être purgé de tout recours des tiers ce qui prolongeait ce délai au moins jusqu'au 7 juin 2008, que Mme Y... avait jusqu'au 7 janvier 2008 pour déposer sa demande de prêt et que la vente était soumise à la condition suspensive d'obtention du prêt au plus tard le jour de la délivrance du permis, que la date limite prévue de signature de l'acte authentique était le 7 août 2008 ; que Mme Y... a été mise en demeure par M. et Mme Y... par lettre recommandée du 30 mai et Mme Y... par lettre recommandée du 30 mai 2008 de justifier des démarches contractuellement prévues et elle a leur fait connaître le 17 juin 2008 qu'elle n'entendait pas donner suite au compromis ; qu'il est incontestable que Mme Y... n'a jamais formalisé, ni demandé de permis de démolir et de construire ni demande de prêt ce qui caractérise incontestablement un non-respect par elle de ses obligations contractuelles ; que contrairement à ce qu'elle soutient et à ce qu'a considéré le premier juge, ce non-respect ne peut être justifié par les arguments qu'elle avance et qui consistent en un retard pris dans les démarches nécessaires à un dépôt efficace des permis en raison de difficultés de bornage et d'accès et du fait que l'acte de propriété des consorts X... ne mentionnait pas l'existence sur leur fonds d'une servitude de passage en diminuant la superficie réelle et constructible ; qu'il ne peut être fait abstraction du fait que Mme Y... est notaire et qu'elle a acquis l'immeuble en cause en vue de réaliser une opération immobilière sous la maîtrise d'oeuvre déléguée à la SOBEFI, il y a lieu de considérer tout d'abord qu'elle n'a pu signer le compromis sans avoir visité les lieux et s'être rendu compte du problème que causait l'accès à la parcelle voisine et du fait que le passage existant au profit de cette parcelle voisine était manifestement plus large que celui figurant au titre ; qu'à cet égard et la situation sur le terrain était particulièrement claire puisque la parcelle BOYER était délimitée par un mur, elle est particulièrement mal venue à soutenir avoir été victime d'une réticence dolosive de la part de ses vendeurs néophytes ; qu'elle n'a pas davantage pu signer le compromis sans savoir que la contenance cadastrale pouvait ne pas être conforme à la contenance réelle et il lui appartenait alors avant de signer celui-ci, avec les délais qui lui étaient imposés, de solliciter de ses vendeurs un bornage ; que toutes les démarches dont elle fait état pour justifier ses carences auraient pu et auraient dû être faites par elle avant la signature du compromis immobilisant le bien ; qu'au surplus, il est patent, alors qu'elle a eu connaissance des difficultés qu'elle allègue dès la signature du compromis, qu'il lui appartenait alors d'aviser immédiatement ses vendeurs du fait qu'elle ne respecterait pas les délais prévus ce qui aurait permis à ceux-ci dès le mois de janvier 2008 de se prévaloir de la caducité du compromis et de récupérer la libre disposition de leur immeuble ; que ce non-respect incontestable et inexcusable de ses obligations par Mme Y... a eu pour conséquence une immobilisation injustifiée et préjudiciable du bien pendant au moins quatre mois et il justifie sa condamnation à verser aux consorts X... la somme de 10 000 ¿ à titre de dommages et intérêts ;
ALORS EN PREMIER LIEU QUE le débiteur obligé sous condition suspensive ne peut être condamné à indemniser le créancier du défaut de réalisation de cette condition que si, par sa faute, il en a empêché l'accomplissement ; qu'en se fondant, pour condamner Mme Y... à indemniser les consorts X... du préjudice subi en raison de l'immobilisation de leur bien, sur la circonstance qu'avant la signature de l'acte, elle avait dû se rendre compte de l'empiétement litigieux et qu'elle aurait dû réaliser un bornage, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions, 2ème et 3ème § p. 10, 1er § p. 11 et antépénultième et avant-dernier § p. 12), si la circonstance confirmée seulement après la signature du compromis que le projet de construction était irréalisable ne justifiait pas que des demandes de permis de démolir, de permis de construire et de prêt, ne soient pas déposées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1178 du code civil ;
ALORS EN DEUXIEME LIEU QU'un motif hypothétique équivaut à un défaut de motifs ; qu'en déduisant de la seule profession de notaire de Mme Y... et de ce qu'elle a acquis l'immeuble en cause en vue de réaliser une opération immobilière sous la maîtrise oeuvre déléguée à la SOBEFI, qu'« il y a lieu de considérer qu'elle n'a pu signer le compromis sans avoir visité les lieux et s'être rendu compte du problème que causait l'accès à la parcelle voisine et du fait que le passage existant au profit de cette parcelle voisine était manifestement plus large que celui figurant au titre », la cour d'appel s'est fondée sur une simple hypothèse et a donc violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS EN TROISIEME LIEU QUE le compromis de vente prévoyait la réalisation d'un bornage après sa signature (dernier § p. 2 et premier § p. 3 du compromis) ; qu'en jugeant cependant, pour lui reprocher le non-respect de ses obligations contractuelles, qu'« il appartenait à Mme Y... avant de signer le compromis , avec les délais qui lui étaient imposés, de solliciter des vendeurs un bornage » et que « toutes les démarches dont elle fait état pour justifier ses carences, auraient pu et auraient dû être faites par elle avant la signature du compromis immobilisant le bien », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce compromis et par conséquent violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QU'en imputant à faute à Mme Y... de ne pas avoir sollicité un bornage avant la signature du compromis, la cour d'appel a méconnu la force obligatoire de ce contrat et violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;
ALORS EN DERNIER LIEU QU'aucune obligation d'informer son cocontractant sur ses difficultés d'exécution du contrat dans les délais impartis ne pèse sur l'autre cocontractant tant qu'il n'est pas acquis que ce cocontractant ne pourra pas respecter les délais prévus au contrat ; qu'en jugeant que Mme Y..., qui « a eu connaissance des difficultés qu'elle allègue dès la signature du compromis », a commis une faute en n'avisant pas « immédiatement à la date de signature du compromis ses vendeurs du fait qu'elle ne respecterait pas les délais prévus », cependant qu'il n'était pas acquis, tant que les démarches entreprises par Mme Y... pour remédier aux difficultés de bornage et d'accès du terrain n'avaient pas échoué, que les délais contractuels de dépôt des demandes de permis de démolir, de permis de construire et de prêt, ne seraient pas tenus, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-18511
Date de la décision : 11/12/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 09 décembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 déc. 2013, pourvoi n°12-18511


Composition du Tribunal
Président : M. Gridel (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Monod et Colin, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP de Nervo et Poupet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.18511
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