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19/02/2014 | FRANCE | N°12-14144

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 février 2014, 12-14144


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles R. 1456-11 du code du travail et 488, alinéa 1, du code de procédure civile ;
Attendu que l'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant en référé, que M. X..., employé depuis 1999 en qualité de chauffeur poids lourd par la société Servair, a saisi la juridiction prud'homale, d'abord en référé puis au fond, de diverses demandes relatives à la reprise de son ancienneté, à la planifica

tion de ses horaires, au paiement de majorations de nuit, de primes et au caractèr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles R. 1456-11 du code du travail et 488, alinéa 1, du code de procédure civile ;
Attendu que l'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant en référé, que M. X..., employé depuis 1999 en qualité de chauffeur poids lourd par la société Servair, a saisi la juridiction prud'homale, d'abord en référé puis au fond, de diverses demandes relatives à la reprise de son ancienneté, à la planification de ses horaires, au paiement de majorations de nuit, de primes et au caractère discriminatoire d'un avertissement prononcé à son encontre ; que par jugement du 2 août 2011, le conseil de prud'hommes, statuant au fond, l'a débouté de l'intégralité de ses demandes ;
Attendu que pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 2 août 2011 et accueillir les demandes du salarié, l'arrêt retient que le jugement litigieux n'est pas produit, que seule une attestation du greffe de la juridiction prud'homale faisant état du débouté de M. X... par cette décision, est versée au débats, que les motifs du jugement litigieux et partant le fondement et la portée de cette décision, rendue depuis trois mois, demeurent ainsi inconnus ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'il n'était pas contesté que la décision au fond du 2 août 2011 avait rejeté les mêmes demandes que celles présentées devant elle, la cour d'appel, qui a méconnu l'autorité de la chose jugée au fond, a violé les textes susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il constate qu'en cours de délibéré, la société Servair a payé à M. X... les sommes réclamées à titre d'heures supplémentaires, dit n'y avoir plus lieu de statuer sur ses demandes, abandonnées par M. X..., l'arrêt rendu le 15 décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Servair

MOYEN D'ANNULATION

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR ordonné à la société SERVAIR, sous astreinte, de planifier M. X... sur des horaires de travail de 21 h/ 5 h 40 et 15 h 40/ 0 h 20, ou similaires en nombre d'heures de nuit, à parts égales des jours de travail de chaque mois, tant que ces horaires de travail seront applicables dans l'établissement et que les chauffeurs PL seront affectés à ces horaires, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme provisionnelle de 1500 ¿ au titre des salaires non perçus depuis mai 2010, à la suite de la modification de ses horaires de travail, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme de 1000 ¿ à titre d'indemnité provisionnelle pour violation du statut protecteur de M. X..., ordonné à la société SERVAIR de rectifier l'ancienneté de M. X...-celle-ci courant à compter du 1er juin 1999- sur toutes les feuilles de paye de celui-ci et, en cas d'impossibilité justifiée, en tout état de cause, sur les feuilles de paye qui seront établies pour l'avenir et dans le mois suivant la date de la notification du présent arrêt, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme provisionnelle globale de 10 773 ¿ à titre de rappel de primes, dit que l'avertissement notifié le 23 juin 2010 à M. X... est constitutif d'un trouble manifestement illicite en conséquence, dépourvu d'effet, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme de 1000 ¿ à titre d'indemnité provisionnelle pour violation des dispositions de l'article L. 1132-2 du Code du travail, condamné la société SERVAIR à payer à M. X... la somme de 1000 ¿ en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
ALORS QUE la décision rendue en référé à la suite d'une décision sur le fond ayant le même objet est nulle ; que par décision au fond du 2 août 2011, le Conseil de Prud'hommes de Bobigny a rejeté toutes demandes du salarié relatives à la prise en compte de son ancienneté à compter du 1er juin 1999, à l'annulation de la sanction du 23 juin 2010, à une prétendue discrimination à raison de la participation à des mouvements de grève, à la modification de ses horaires et au non-respect de son statut protecteur ; que doit donc être prononcée l'annulation de l'arrêt du 15 décembre 2011 rendu dans le cadre d'une procédure de référé qui fait droit aux mêmes demandes, par application de l'article 488, alinéa 1, du code de procédure civile ;

(SUBSIDIAIREMENT)

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR ordonné à la société SERVAIR, sous astreinte, de planifier M. X... sur des horaires de travail de 21 h/ 5 h 40 et 15 h 40/ 0 h 20, ou similaires en nombre d'heures de nuit, à parts égales des jours de travail de chaque mois, tant que ces horaires de travail seront applicables dans l'établissement et que les chauffeurs PL seront affectés à ces horaires, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme provisionnelle de 1500 ¿ au titre des salaires non perçus depuis mai 2010, à la suite de la modification de ses horaires de travail, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme de 1000 ¿ à titre d'indemnité provisionnelle pour violation du statut protecteur de M. X..., ordonné à la société SERVAIR de rectifier l'ancienneté de M. X...-celle-ci courant à compter du 1er juin 1999- sur toutes les feuilles de paye de celui-ci et, en cas d'impossibilité justifiée, en tout état de cause, sur les feuilles de paye qui seront établies pour l'avenir et dans le mois suivant la date de la notification du présent arrêt, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme provisionnelle globale de 10 773 ¿ à titre de rappel de primes, dit que l'avertissement notifié le 23 juin 2010 à M. X... est constitutif d'un trouble manifestement illicite en conséquence, dépourvu d'effet, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme de 1000 ¿ à titre d'indemnité provisionnelle pour violation des dispositions de l'article L. 1132-2 du Code du travail, condamné la société SERVAIR à payer à M. X... la somme de 1000 ¿ en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « sur les demandes de M. X... relatives à la reprise de son ancienneté. Considérant que la société SERVAIR prétend que M. X... est irrecevable en ses demandes au motif que le conseil de prud'hommes, statuant au rond par jugement du 2 août 2011, a débouté M. X... de ces mêmes demandes ; qu'en application des dispositions de l'article 1351 du Code civil, ces mêmes demandes se heurtent au principe de l'autorité de la chose jugée, attachée à celle décision par les dispositions de l'article 480 du code de procédure civile ; mais considérant que le jugement litigieux n'est pas produit, seule, une attestation du greffe de la juridiction prud'homale faisant état du débouté de M. X... par cette décision, étant versée aux débats ; que les motifs du jugement litigieux, et partant, le fondement et la portée de cette décision, rendue depuis trois mois, demeurent ainsi inconnus ; qu'en l'état, la société SERVAIR ne saurait donc affirmer que le seul prononcé de ce jugement suffit à rendre M. X... irrecevable en ses demandes étant, de surcroît, rappelé que la procédure de référé, distincte de la procédure au fond, répond à des conditions particulières qui lui sont propres et doit pouvoir être mise en oeuvre, dès lors que ces conditions sont réunies, tant que les mesures sollicitées du juge des référés ne sont pas susceptibles de contredire une décision du juge du fond exécutoire ou passée en force de chose jugée ; considérant que par son arrêt de référé définitif en date du 5 mars 2009, cette cour a requalifié en contrat de travail à durée indéterminée, les contrats de travail temporaire par lesquels la société SERVAIR avait engagé M. X... entre le 1er juin 1999 et le 16 janvier 2000 ; que les demandes présentement soumises par M. X... ont trait, d'une part à la rectification consécutive de ses bulletins de paye-de façon à ce que soit prise en compte la date du 1er juin 1999 comme celle de son entrée dans l'entreprise ¿ et d'autre part, au paiement provisionnel des rappels de primes subséquentes, auxquelles M. X... est en droit de prétendre, au regard de cette ancienneté ; considérant que ces prétentions ne se heurtent à aucune contestation sérieuse dès lors qu'elles ne sont que l'application pratique des dispositions de principe, énoncées par la cour dans son arrêt du 5 mars 2009 conformément à la demande de M. X... ; qu'il convient de les accueillir, les mesures sollicitées par l'appelant ne relevant pas de la compétence du juge de l'exécution, comme le soutient à tort la société SERVAIR ; qu'en effet. M. X... poursuit présentement, non pas l'inexécution par la société SERVAIR de l'arrêt du 5 mars 2009 de cette cour, qui n'a pas statué à cet égard, mais la violation par cette même société de ses obligations contractuelles qui ne sont pas sérieusement contestables et justifient ainsi, en référé, la rectification et les provisions requises » ;
1) ALORS QUE les juges du fond statuant en référé ne peuvent pas méconnaitre l'autorité de la chose jugée attachée au dispositif d'une précédente décision sur le fond ; qu'en l'espèce, l'employeur justifiait par la production d'une attestation du greffe du Conseil de Prud'hommes de Bobigny que par jugement au fond du 2 aout 2011, Monsieur X... avait été débouté de l'ensemble de ses demandes ; que par ailleurs, l'employeur établissait précisément, par la production des conclusions du salarié dans le cadre de cette procédure au fond, quelle était la consistance des demandes rejetées tenant à la régularisation de l'ancienneté, à la modification de ses horaires de travail en violation de son statut protecteur, à des mesures discriminatoires à raison de l'exercice du droit de grève ; qu'en écartant cependant toute atteinte à l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 2 août 2011 au prétexte que cette décision n'étant pas versée aux débats ses motifs « et partant le fondement et la portée de cette décision » restaient inconnus, quand l'autorité de la chose jugée était attachée au seul dispositif, parfaitement compréhensible au regard des demandes formulées par le salarié dans ses conclusions, la Cour d'appel a violé les articles 480 et 488, alinéa 1, du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas méconnaitre les limites du litige telles qu'elles sont fixées par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur se prévalait (conclusions d'appel page 9 et suivantes) de l'autorité attachée au jugement du 2 aout 2011 pour « toutes les demandes » déjà formulées et rejetées au fond avant d'être présentées en référé, à savoir toutes celles relatives à la modification des horaires, à la discrimination syndicale et à l'atteinte au statut protecteur et à l'atteinte au droit de grève ; qu'en retenant cependant que l'employeur ne se serait prévalu de l'autorité de la chose jugée que concernant les demandes de Monsieur X... relatives à la reprise de son ancienneté, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR ordonné à la société SERVAIR, sous astreinte, de planifier M. X... sur des horaires de travail de 21 h/ 5 h 40 et 15 h 40/ 0 h 20, ou similaires en nombre d'heures de nuit, à parts égales des jours de travail de chaque mois, tant que ces horaires de travail seront applicables dans l'établissement et que les chauffeurs PL seront affectés à ces horaires, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme provisionnelle de 1500 ¿ au titre des salaires non perçus depuis mai 2010, à la suite de la modification de ses horaires de travail, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme de 1000 ¿ à titre d'indemnité provisionnelle pour violation du statut protecteur de M. X..., condamné la société SERVAIR à payer à M. X... la somme de 1000 ¿ en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « Sur les demandes de M. X... relatives aux majorations de nuit. Considérant qu'il n'est pas contesté que bien que M. X... fût, à l'époque, salarié protégé, la société SERVAIR a modifié ses conditions de travail à compter du mois de mai 2010, puisqu'elle a modifié les horaires de ce salarié-qui, jusqu'alors effectuait un nombre important d'heures de nuit (représentant une rémunération mensuelle de 400 ¿, en moyenne)- en diminuant sensiblement les heures de nuit attribuées à M. X...-celui-ci subissant, depuis lors, une perte de rémunération totale de 1674, 36 ¿, selon ses calculs ; considérant que M. X... conteste l'argumentation des premiers juges qui ont retenu celle de la société SERVAIR, fondée sur l'existence, dans le contrat de travail, d'une clause par laquelle le salarié " s'engage à effectuer tous types d'horaires y compris en horaires décalés (...) sans que ladite affectation soit assimilée à une modification du contrat de travail " ; mais considérant qu'aucune modification de son contrat de travail ou de ses conditions de travail ne peut être imposée à un salarié protégé sans son accord et qu'il appartient à l'employeur, en cas de refus, d'engager une procédure de licenciement ; qu'en l'espèce, la société SERVAIR ne justifie pas avoir recueilli l'accord de M. X... sur ces changements d'horaires de travail, alors que ceux-ci avaient une répercussion significative sur sa rémunération ; qu'enfin, l'employeur ne peut se soustraire à l'observation de la protection exorbitante du droit commun dont bénéficie un salarié protégé, au moyen d'une clause insérée à l'avance dans le contrat de travail, alors même que le salarié ne dispose pas encore de la qualité de salarié protégé ; que la société SERVAIR ne saurait clone invoquer des dispositions contractuelles dont l'existence-inopérante, face à un dispositif d'ordre public-ne caractérise pas une contestation sérieuse et dont l'application constituerait, en revanche, un trouble manifestement illicite ; considérant qu'il y a lieu, par conséquent, d'accueillir, comme dit ci-après au dispositif la demande de M. X..., tendant à voir ordonner, sous astreinte, à la société SERVAIR de " le planifier " sur des horaires conformes à ceux qui étaient les siens antérieurement au mois de mai 2010, soit de 21 h/ 5 h 40 et de 15 h 40/ 0 h 20,- ou similaires en nombre d'heures de nuit ¿ à parts égales des jours de travail à chaque mois ; considérant que s'agissant de la demande provisionnelle, formée par M. X... au titre des sommes non perçues par lui, du fait de la modification de ses horaires-et de la réduction concomitante de ses majorations pour heures de nuit-la cour dispose des éléments suffisants, au vu des pièces et décomptes produits par l'appelant, pour évaluer à 1500 ¿ la provision due à ce titre à l'appelant ; considérant que la modification litigieuse imposée sans son accord à M. X... traduit en outre une violation par la société SERVAIR des dispositions d'ordre public relatives au statut protecteur des représentants du personnel qui justifie, en faveur de l'appelant, l'allocation d'une indemnité provisionnelle de 1000 ¿ » ;
ALORS QUE seules les heures de travail effectivement travaillées peuvent donner lieu au paiement d'un salaire ; qu'en condamnant en l'espèce l'employeur à payer une « somme provisionnelle de 1500 ¿ au titre des salaires non perçus depuis mai 2010, à la suite de la modification de ses horaires de travail » quand le salarié ne pouvait prétendre au paiement d'heures de nuit qu'il n'avait pas effectivement réalisées, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L 3211-1 et sq. du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que l'avertissement notifié le 23 juin 2010 à M. X... est constitutif d'un trouble manifestement illicite en conséquence, dépourvu d'effet, condamné la société SERVAIR à verser à M. X... la somme de 1000 ¿ à titre d'indemnité provisionnelle pour violation des dispositions de l'article L. 1132-2 du Code du travail, condamné la société SERVAIR à payer à M. X... la somme de 1000 ¿ en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « Sur les demandes de M. X... relatives à l'avertissement prononcé contre lui le 23 juin 2010. Considérant que l'avertissement litigieux a sanctionné le comportement de M. X... qui, d'une part, le 9 avril 2010, aurait manqué, envers un agent de contrôle, au respect des règles de sûreté et de savoir-vivre prescrites par le règlement intérieur, et d'autre part, le 18 mai 2010, aurait commis une infraction aux règles de sûreté en vigueur sur une zone réservée aéroportuaire, sans rapport avec son état de gréviste, ce jour-là ; considérant que selon la société SERVAIR cet avertissement est justifié par la commission de fautes disciplinaires caractérisées ; que d'après M. X... les reproches fondant cet avertissement ne sont que des prétextes visant, en réalité, à sanctionner l'exercice qu'il a fait de son droit de grève, le 18 mai 2011 ; considérant qu'ainsi que le démontre son bulletin de paye du mois de mai 2010, M. X... était incontestablement en grève le 18 mai 2010 ; or considérant qu'en application des dispositions de l'article 1132-2 du Code du travail, un salarié gréviste ne peut être licencié ou sanctionné à raison d'un fait commis au cours de la grève, que si ce fait est constitutif d'une faute lourde ; et considérant qu'en cas de contestation par le salarié, sanctionné alors qu'il était en grève, il appartient à l'employeur-qui est à l'origine de la sanction contestée-de démontrer que la sanction intervenue revêt le caractère d'une faute lourde ; qu'en l'espèce, en l'absence de production de toute autre pièce, la lettre d'avertissement, seule, décrit le comportement reproché à M. X..., en précisant que celui-ci s'est fait remettre un " objet ", par un tiers qui se trouvait en zone publique, à travers le grillage séparant cette zone de la " zone réservée " où était M. X...-l'objet litigieux, une paire de lunettes selon M. X..., demeurant aussi indéterminé dans les conclusions de la société SERVAIR que dans sa lettre d'avertissement ; qu'ainsi à défaut de tout élément précis permettant d'établir qu'une faute lourde ait pu être imputable, le 18 mai 2010, à M. X..., l'avertissement critiqué apparaît, d'évidence, dépourvu de tout fondement ; considérant que les autres faits visés par ce même avertissement sont tout aussi inconsistants et corroborent davantage l'inanité des faits du 18 mai 2010, qu'ils ne justifient la sanction prononcée ; qu'ils n'ont, en effet, donné lieu à aucune constatation, ni plainte ; qu'en outre, les propos reprochés à l'appelant, rappelés ci-dessus dans l'exposé des faits, ne contiennent, de la part de M. X..., ni refus de se laisser contrôler, ni terme outrageant ou de mépris envers l'agent de contrôle ; qu'en définitive, au regard des paroles prêtées à M. X..., la cour constate, avec l'évidence requise en référé, que le comportement de l'intéressé, ce 9 avril 2010, n'a été contraire ni à la correction, ni aux règles de savoir-vivre prescrites par le règlement intérieur de la société SERVAIR ; qu'au demeurant, le caractère tardif de la sanction intervenue établit lui aussi, la vanité du reproche invoqué et traduit, par là, le soin qu'a pris l'employeur d'adjoindre d'autres faits à ceux imputés à M. X..., le jour de la grève du 18 mai 2010 ; considérant que les faits invoqués par la société SERVAIR au soutien de l'avertissement infligé à M. X... et contesté par celui-ci s'avèrent ainsi inexistants qu'il s'agisse de leur matérialité, pour ceux du 9 avril 2010 ou de leur nature juridique, pour ceux du 18 mai 2010 ; que la concomitance de cet avertissement avec la participation de M. X... à la grève du 18 mai 2010 et l'absence de fondement de cette sanction, justement contestée par l'appelant, constituent des éléments laissant supposer la discrimination qu'allègue M. X... sur le fondement des dispositions de l'article L. 1132-2 du Code du travail et que la société SERVAIR ne vient contredire par aucun élément objectif ; que l'avertissement litigieux apparaît, dès lors, constituer une mesure discriminatoire, prohibée par ces dispositions et, donc, un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser, en privant cette sanction de tout effet » ;
1) ALORS QUE si aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire mentionnée à l'article L. 1132- 1en raison de l'exercice normal du droit de grève, en revanche un salarié peut être sanctionné, autrement que par un licenciement, à raison, non pas de l'exercice normal du droit de grève, mais d'un manquement à une obligation de sécurité commise alors qu'il exerçait son droit de grève ; qu'en jugeant en l'espèce qu'un salarié ne peut être sanctionné à raison d'un fait commis au cours de la grève si ce fait n'est pas constitutif d'une faute lourde pour en déduire que le simple avertissement du 23 juin 2010 était injustifié en l'absence de faute lourde, quand elle avait constaté que le salarié avait manqué aux règles de sécurité en vigueur dans la zone aéroportuaire en se faisant remettre un objet à travers un grillage au mépris des contrôles de sécurité impératifs, la Cour d'appel a violé les articles L. 1132-2 et L. 2511-1 du Code du travail ;
2) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas relever un moyen d'office sans inviter les parties à faire valoir leurs observations sur ce point ; qu'en l'espèce, le salarié ne contestait pas la réalité et le bien-fondé du grief tiré du comportement du salarié le 9 avril 2010 ; qu'en jugeant cependant que ces faits étaient « inconsistants » voire « inexistants » et ne justifiaient pas la sanction prononcée dès lors qu'ils n'avaient « donné lieu à aucune contestation, ni plainte », les propos reprochés au salarié ne contenant « ni refus de se laisser contrôler, ni terme outrageant ou de mépris envers l'agent de contrôle », sans au préalable inviter les parties à faire valoir leurs observations sur ce point, la Cour d'appel a violé les articles 4 et 16 du Code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-14144
Date de la décision : 19/02/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 décembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 fév. 2014, pourvoi n°12-14144


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Roger, Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.14144
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