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19/02/2014 | FRANCE | N°12-28543

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 février 2014, 12-28543


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er août 2003 par la société Coopérative agricole de vinification de la "Cave du pays de Quarante et du pays d'Heric" en qualité de chef de cave ; que, licencié le 4 janvier 2008 pour absence injustifiée qualifiée de faute grave, il a conclu avec son employeur une transaction le 8 janvier 2008 prévoyant le versement d'une somme en contrepartie de la renonciation à toute action liée au contrat de travail ; que le salarié a saisi la juridiction pr

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er août 2003 par la société Coopérative agricole de vinification de la "Cave du pays de Quarante et du pays d'Heric" en qualité de chef de cave ; que, licencié le 4 janvier 2008 pour absence injustifiée qualifiée de faute grave, il a conclu avec son employeur une transaction le 8 janvier 2008 prévoyant le versement d'une somme en contrepartie de la renonciation à toute action liée au contrat de travail ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour contester cette transaction et obtenir le paiement de diverses sommes tant au titre de la rupture que de l'exécution du contrat de travail ;
Sur les premier et deuxième moyens, réunis :
Vu les articles 2044 et 2052 du code civil ;
Attendu que l'existence de concessions réciproques, qui conditionne la validité d'une transaction, doit s'apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l'acte ; que si, pour déterminer si ces concessions sont réelles, le juge peut restituer aux faits, tels qu'ils ont été énoncés par l'employeur dans la lettre de licenciement, leur véritable qualification, il ne peut, sans heurter l'autorité de chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette transaction avait pour objet de clore en se livrant à l'examen des éléments de fait et de preuve ;
Attendu que pour déclarer nulle la transaction et condamner l'employeur à payer diverses sommes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le versement au salarié d'une somme inférieure au montant de l'indemnité de licenciement à laquelle il aurait eu droit dans le cas où la faute grave aurait été écartée par le conseil de prud'hommes, constitue une concession dérisoire au regard de l'ancienneté de M. X... dans l'entreprise ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la lettre de licenciement était motivée par une faute grave, la cour d'appel, qui a apprécié le caractère dérisoire de la concession au regard du licenciement dont il ne lui appartenait pas de vérifier le bien-fondé, a violé les textes susvisés ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'ayant conclu devant la cour d'appel à la confirmation du jugement ayant expressément statué sur la demande du salarié en paiement d'heures supplémentaires, sollicitée indépendamment de celle en nullité de la transaction qui avait été rejetée, l'employeur n'est pas recevable à présenter devant la Cour de cassation un moyen contraire à ses propres écritures ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule la transaction conclue le 8 janvier 2008 entre la société Coopérative agricole de vinification de la "Cave du pays de Quarante et du pays d'Heric" et M. X..., dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamne la société Coopérative agricole de vinification de la "Cave du pays de Quarante et du pays d'Heric" au paiement de dommages-intérêts, d'indemnités compensatrices de préavis et de congés payés et d'un reliquat d'indemnité de licenciement et en ce qu'il ordonne la remise des bulletins de salaire, de l'attestation Pôle emploi et d'un certificat de travail rectifiés, l'arrêt rendu le 26 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Coopérative agricole de vinification de la Cave du pays de Quarante et du pays d'Heric
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé la transaction conclue le 8 janvier 2008 entre la Société Coopérative agricole de vinification de la Cave du Pays de Quarante et du Pays d'Héric et M. X... ;
Aux motifs que « En l'espèce, la transaction a été conclue entre les parties le 8 janvier 2008, c'est-à-dire postérieurement à la rupture définitive du contrat de travail intervenue selon la lettre de licenciement en date du 4 janvier 2008, avec avis de réception signé par le salarié le 7 janvier 2008 ; la validité de la transaction n'est d'ailleurs par remise en cause à ce titre en cause d'appel.
En revanche, pour l'essentiel, la somme de 7.798,70 euros versée par l'employeur, en contrepartie de la renonciation par le salarié à toute contestation, instance et action de sa part, est constituée à hauteur de la somme de 5.699,67 euros par le salaire des premiers jours de janvier 2008, la prime de 13ème mois, les RTT acquis et la prime d'ancienneté, toutes sommes dues en tout état de cause ; la différence, soit la somme de (7.798,70 ¿ 5.669,67 =) 2.099,33 euros ne couvre pas même la totalité de l'indemnité de licenciement de 2.275,24 euros telle qu'elle figure sur le bulletin de paie du 31 janvier 2008 correspondant à la transaction.
Ainsi le versement au salarié d'une somme inférieure de 175,91 euros au montant de l'indemnité de licenciement à laquelle il aurait eu droit dans le cas où la faute grave aurait été écartée par le Conseil de prud'hommes, constitue une concession dérisoire au regard de l'ancienneté de M. Jean Paul X... dans l'entreprise de plus de huit années.
En conséquence, par infirmation du jugement déféré, la transaction signée par les parties le 8 janvier 2008, est annulée » ;
Alors que les concessions réciproques dont l'existence détermine la validité de la transaction s'apprécient à la date de la signature de l'accord transactionnel en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l'acte ; qu'en relevant en l'espèce que le versement par l'employeur au salarié d'une indemnité transactionnelle inférieure au montant de l'indemnité de licenciement à laquelle il aurait eu droit si la faute grave avait été écartée par le Conseil de prud'hommes, pour en déduire qu'elle constitue une concession dérisoire de la part de l'employeur et annuler en conséquence la transaction, quand, aux termes de cet acte, le salarié reconnaissait expressément l'existence de la faute grave invoquée par l'employeur, privative de toute indemnité, la Cour d'appel a violé les 2044 et 2052 du code civil ;
Alors, en outre, que la faute grave est privative de l'indemnité de licenciement ; qu'en ayant annulé la transaction après avoir relevé que l'indemnité transactionnelle versée au salarié, inférieure à l'indemnité de licenciement, était dérisoire quand, licencié pour faute grave, ce dernier ne pouvait prétendre au paiement d'une telle indemnité, de sorte que l'indemnité transactionnelle versée par l'employeur constituait nécessairement une contrepartie appréciable, la Cour d'appel a violé les articles 2044 et 2052 du code civil, ensemble l'article du code du travail L.1234-9 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que le licenciement de M. X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir en conséquence condamné la Société Coopérative agricole de vinification de la Cave du Pays de Quarante et du Pays d'Héric à verser à celui-ci diverses sommes à ce titre ;
Aux motifs que « Dans la lettre de licenciement datée du 4 janvier 2008, l'employeur reproche au salarié son absence de son poste de travail depuis le 12 décembre 2007.
Cependant, les attestations produites par l'employeur selon lesquelles il aurait été absent de la cave à plusieurs reprises en décembre 2007, ne sont pas assez précises et circonstanciées pour permettre de retenir des absences répétées fautives de la part de M. Jean Paul X..., eu égard à ses fonctions impliquant des déplacements à l'extérieur.
En outre, à l'examen des bulletins de paie du mois de décembre 2007 et des premiers jours de janvier 2008, il apparaît qu'il n'est pas fait mention de retenues pour absences du salarié, y compris pour la période d'absence à compter du 12 décembre 2007 telle que reprochée dans la lettre de licenciement : la totalité du salaire correspondant à 151 heures 67 travaillées en décembre 2007 et à 32 heures pour début janvier 2008, a été payée.
En conséquence, il y a lieu de dire et juger que le licenciement de M. Jean Paul X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Compte tenu de son âge (plus de 49 ans), de sa rémunération (2.769,49 euros en moyenne sur les douze derniers mois) et de son ancienneté (8 ans et 10 mois) au moment du licenciement, il convient de lui allouer la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L.1235-3 du code du travail.
En outre, il est fondé à solliciter une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents, ainsi qu'un solde d'indemnité de licenciement.
S'agissant du quantum de ces indemnités, le salarié invoque le principe d'égalité pour bénéficier des stipulations plus favorables de la convention collective applicable dans l'entreprise en faveur des cadres.
Il convient de rappeler que la seule différence de catégories professionnelles ne peut en elle-même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement entre les salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage, cette différence devant reposer sur des raisons objectives et pertinentes.
En l'espèce, aux termes de l'article 16 de l'annexe III de la convention collective des caves coopératives et de leur union, les cadres bénéficient, sauf en cas de faute grave, d'un préavis de trois mois, alors qu'en sa qualité de non-cadre il ne bénéficierait que d'un préavis de deux mois ; de même, le calcul de l'indemnité de licenciement est plus avantageux pour les cadres par application de l'article 18 de la convention applicable selon lequel : « indépendamment du préavis, tout cadre ayant trois ans de présence effective dans la coopérative recevra une indemnité égale à un mois de traitement augmenté d'un tiers de mois par année de présence au-delà de trois ans. La date prise pour le calcul des indemnités sera celle de l'entrée dans l'entreprise, le salaire servant de base au calcul de l'indemnité est celui défini à l'article 47-3 des clauses générales de la présente convention ».
Force est de constater qu'il ne résulte nullement des dispositions de la convention collective considérée que les partenaires sociaux qui l'ont négociée, aient justifié objectivement de la différence qui est faite d'une catégorie à l'autre dans l'octroi des avantages consentis en cas de licenciement d'un salarié cadre.
L'employeur qui se contente d'indiquer que les demandes formées à ce titre par le salarié seraient exagérées, n'apporte pas d'éléments de nature à justifier que pour l'attribution des avantages réservés aux cadres, M. X... qui occupait des fonctions à responsabilité, ne serait pas placé dans une situation identique à celle d'un cadre.
Aucune raison objective et pertinente ne justifiant la différence de traitement pratiqué tant en terme de durée de préavis que de mode de calcul de l'indemnité de licenciement, M. Jean Paul X... est fondé, en raison de cette méconnaissance du principe d'égalité de traitement, à demander que lui soient appliquées les dispositions de la convention collective dont s'agit prévoyant un préavis de trois mois, ainsi que le calcul de l'indemnité de licenciement à raison d'un mois de salaire par année de présence dans la limite de douze mois augmenté d'un tiers de mois par année de présence au-delà de 3 ans d'ancienneté.
Il est donc alloué à Jean Paul X... les sommes qu'il réclame, non discutée dans leur quantum par l'intimée, au titre du préavis, soit 8.938,31 euros, outre celle de 830,81 au titre des congés payés afférents en application de l'article 16 annexe III de la convention collective applicable, ainsi que 3.747,25 euros à titre de complément sur l'indemnité conventionnelle de licenciement (au-delà de la somme de 2.099,03 euros versée à ce titre le 31 janvier 2008), en application de l'article 18 de ladite convention collective ; ces sommes porteront intérêt à compter du 25 février 2010, date de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes de Béziers » ;
Alors que la cassation à intervenir du chef du premier moyen concernant la validité de la transaction du 8 janvier 2008, qui avait pour objet de mettre fin à toute contestation quant à la conclusion, l'exécution ou la rupture du contrat de travail, entraînera nécessairement l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt du chef du licenciement du salarié en application de l'article 625 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la Société Coopérative agricole de vinification de la Cave du Pays de Quarante et du Pays d'Héric à verser à M. X... un rappel de salaire et les congés payés y afférents au titre des heures supplémentaires et d'avoir ordonné la remise des bulletins de paie, de l'attestation Pôle Emploi et du certificat de travail rectifiés ;
Aux motifs que « Au soutien de sa demande, M. X... produit son planning et ses relevés heures de 2004 à 2008, ainsi que des témoignages de plusieurs personnes attestant de son activité importante, pièces suffisamment précises pour permettre de à l'employeur de justifier de la durée de travail du salarié.
L'employeur ne conteste pas avoir versé, sous forme de prime, les heures supplémentaires accomplies dont il est fait état au soutien de la demande.
Or le versement, même volontaire, de primes ne peut tenir lieu de règlement d'heures supplémentaires.
En conséquence, comme « Qui paie mal, paie deux fois », il y a lieu d'allouer à M. X... les heures supplémentaires qu'il justifie avoir accomplies au mois de novembre 2004 pour un montant total de 1.423,40 euros, à hauteur de 1.518,27 euros en décembre 2005 et pour un montant de 3.134,90 euros au mois de décembre 2007, soit un montant total dû de 6.076,57 euros augmenté de 607,65 euros au titre des congés payés y afférents ; ces sommes porteront intérêt à compter du 25 février 2010, date de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes de Béziers. (¿)Il y a lieu d'ordonner la remise des bulletins de salaire, de l'attestation Pôle Emploi et du certificat de travail rectifiés conformément au présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une astreinte » ;
Alors que la cassation à intervenir du chef du premier moyen concernant la validité de la transaction du 8 janvier 2008 qui avait pour objet de mettre fin à toute contestation quant à la conclusion, l'exécution ou la rupture du contrat de travail, entraînera nécessairement, en application de l'article 625 du code de procédure civile, l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt en ce qu'il a accordé au salarié un rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre les congés payés y afférents.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-28543
Date de la décision : 19/02/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 26 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 fév. 2014, pourvoi n°12-28543


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Roger, Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.28543
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