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09/07/2014 | FRANCE | N°13-16032

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 juillet 2014, 13-16032


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1232-1 et L. 1331-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 30 juin 2003 par la société Astra Tech France aux droits de laquelle vient la société Dentsply IH, en qualité de responsable de secteur pour occuper en dernier lieu les fonctions de directeur régional de secteur, a été licencié par lettre du 18 novembre 2008 ;

Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse sans caractèr

e disciplinaire, l'arrêt retient que l'employeur ne parle pas dans la lettre de ruptu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1232-1 et L. 1331-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 30 juin 2003 par la société Astra Tech France aux droits de laquelle vient la société Dentsply IH, en qualité de responsable de secteur pour occuper en dernier lieu les fonctions de directeur régional de secteur, a été licencié par lettre du 18 novembre 2008 ;

Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse sans caractère disciplinaire, l'arrêt retient que l'employeur ne parle pas dans la lettre de rupture de faute mais uniquement de cause réelle et sérieuse de licenciement, reprochant au salarié son comportement général et ses méthodes managériales dont il donne divers exemples et qu'il s'est ainsi situé sur le terrain de l'insuffisance professionnelle, non disciplinaire et que la preuve est rapportée d'un comportement managérial inadapté ayant conduit à un stress excessif et au découragement de ses collaborateurs ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la lettre de licenciement énonçait comme motifs de rupture un « comportement agressif et irrespectueux envers l'équipe dont il a la responsabilité », « une gestion « dictatoriale et agressive » de son équipe », l'usage « d'un ton méprisant » ou de propos « injurieux ou déplacés à l'égard de ses subordonnés, outre « sa propension à remettre en cause de manière systématique la pertinence de leur travail », la formulation « d'accusations infondées exprimées sur un ton ouvertement menaçant à l'égard d'un autre directeur régional » et son « attitude hostile, alternant provocation, menaces et dénigrement » à l'encontre de son supérieur hiérarchique, ce dont il résultait que le licenciement avait été prononcé pour des motifs disciplinaires et qu'il lui appartenait de vérifier si les dispositions applicables aux licenciements disciplinaires avaient été respectées, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. X... d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 14 février 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau ; Condamne la société Dentsply IH aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Dentsply IH à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X.... Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; AUX MOTIFS QUE, sur le caractère justifié du licenciement, en application des articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les termes du litige, le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur et forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; que si un doute persiste, il profite au salarié ; que dans sa lettre de licenciement l'employeur ne parle à aucun moment de faute, mais seulement de cause réelle et sérieuse ; qu'il reproche au salarié son comportement général et ses méthodes managériales et donne divers exemples ; qu'il se situe sur le terrain de l'insuffisance professionnelle, non disciplinaire, ainsi qu'il le soutient dans ses conclusions, de sorte qu'il importe peu qu'il ne cite pas de noms et de dates, et que certains faits remontent à plus de 2 mois, l'article L 1332-4 du code du travail relatif à la prescription de 2 mois ne concernant que les faits fautifs donnant lieu à poursuites disciplinaires ; qu'à l'appui de ses griefs d'insuffisance professionnelle, l'employeur verse aux débats les pièces suivantes : i) - une attestation de Mme
Z...
, responsable de secteur, indiquant que M. X... a changé de comportement lorsqu'il est devenu directeur régional, et que son ambition à être le premier l'a rendu stressé, critique et sarcastique, ce qui se traduisait par des ordres à exécuter sans délai, des tableaux à remplir - que les collègues des autres régions n'avaient pas à renseigner - et à recommencer continuellement, des mails nombreux, des rapports à faire, des annulations et retards lors des « journées en duo », des accusations injustes de mauvaise organisation et de travail non fait, une méfiance envers les collaborateurs avec paranoïa et interdiction de se téléphoner, un comportement manipulateur, des propos négatifs voire insultants envers les collègues ; qu'elle se dit soulagée que sa grossesse l'ait éloignée de l'entreprise à partir de juin 2008 et ajoute que, si M. X... avait été encore présent à son retour de congé maternité, elle aurait envisagé de quitter l'entreprise ; ii) - une attestation de Mme A...; responsable de secteur, qui décrit elle aussi M. X... comme stressant, critique et dénigrant ses collaborateurs, lunatique (tantôt agressif, tantôt « passant la pommade »), exerçant des pressions, prêchant le faux pour savoir le vrai, arrivant en retard aux rendez-vous en duo ou les annulant au dernier moment, réclamant toujours plus de rapports et de tableaux ; que pour conclure, elle indique que M. X... était un bon responsable de secteur mais un mauvais directeur régional, et qu'elle a eu envie de quitter ASTRA TECH ; iii) une attestation de Mme
B...
, assistante de division, décrivant par le menu le même comportement de M. X... que ses deux collègues ; qu'elle insiste sur l'inorganisation du directeur régional et ses instructions confuses et contradictoires et indique elle aussi avoir envisagé de quitter l'entreprise à cause de lui ; qu'elle joint des mails échangés avec M. X... illustrant les ordres et contre-ordres et son ton sarcastique, ainsi que la trace de 9 mails envoyés par lui pour la seule journée du 19 mars 2008 ; iv) des mails échangés entre MM X... et C..., M. C... demandant à M. X... le 4 octobre 2008 de ne plus s'occuper des affaires de sa région (Nord) et d'éviter de lancer des accusations infondées, et M. X... répondant (le 6 octobre 2008 à 8h36) « je te retourne le même compliment quand à t'occuper des affaires de nos régions respectives, pour ma part il n'y a aucune attaque sur ton intégrité et professionnalise (même si je n'en pense pas moins ¿) pour ta part, j'ai cru comprendre que tes vieux démons étaient réapparus et qu'au sein de la propre région tu étais venu porter des allégations anti déontologiques à valeurs personnelles comme tu fais habituellement y compris avec les autres DR uro, sache que ces propos ont largement fait le tour de la société et ne m'ont en aucun cas affecté, mais j'en ai référé à ma direction. Garde bien tes distances à l'avenir n'ayant aucun leçon à recevoir de toi tant au niveau moral que professionnel », puis (le 6 octobre à 9h) « mon temps est utilisé à bon escient et je n'ai aucune leçon à recevoir de toi sur le sujet et encore moins de compte à te rendre (...) ton animosité à mon égard n'est plus un secret de polichinelle l'ayant officialisé, mais je te mets en garde contre toute velléité de nuire à mon image, la pratique du diviser pour mieux régner ne te mènera à rien de bon à ton niveau » ; qu'il apparaît donc que la réponse faite par M. X... à un mail bref et plutôt neutre, a été faite sur un ton agressif, accusateur et polémique, disproportionné et inadapté ; v) des mails envoyés par M. X... concernant les demandes de tableaux, à remettre toujours à bref délai, et souvent à refaire ; vi) - un échange de mails entre M. X... et Mme A..., Mme A... lui disant qu'elle ne souhaitait pas travailler tous les week-ends, le samedi n'étant ni payé ni récupérable, et M. X... lui répondant sur un ton ironique qu'en tant que responsable de secteur elle prenait ses responsabilités en choisissant de ne pas travailler le weel-end ; que l'employeur s'appuie aussi sur des pièces versées par M. X... lui même, par exemple : i) un échange de mails d'octobre 2008 avec Mme
B...
; que M. X... demandait à Mme
B...
des renseignements le vendredi 5 octobre 2008 à 22h12 ; que Mme
B...
n'ayant pas répondu pendant le week-end, il la relançait dès le lundi 8 octobre à 9h15 ; ii) - sa fiche d'évaluation, ASTRA TECH DIALOG 2008 concluant « points à améliorer : gestion du stress pour savoir s'en servir comme moteur sans en être victime ; savoir être précis dans ses demandes et dans les échéances ; ne pas être trop affectif dans ses comportements sous stress ; savoir prendre du recul nécessaire pour ne pas être trop autoritaire ou trop tranché dans ses jugements » ; iii) un échange de mails avec M. E..., son supérieur hiérarchique : celui-ci l'ayant rencontré de manière informelle le 23 octobre 2008 pour l'inviter à plus de souplesse envers les membres de son équipe, M. X... a réfuté tout reproche ; que M. X... excipe de mails cordiaux échangés avec les trois salariées qui ont attesté (bon week-end, bonne année, bon rétablissement, félicitations, remerciements, demande de conseils) ; que toutefois, ces mails ne font que confirmer que M. X... pouvait être à certains moments parfaitement civil voire paternaliste ou décalé dans ses propos (cf. termes employés dans certains mails « mes chers petit », « mon poulet ») et à d'autres moments désagréable, ce qui déstabilisait ses interlocuteurs ; que s'agissant de Mme A..., M. X... verse aux débats une fiche « suivi période d'essai et intégration », un document « valeurs de vie », une fiche d'entretien et une fiche ASTRE TECH DIALOG 2008, dans lesquels Mme A... se disait satisfaite ; qu'à la question « que m'apporte mon manager », elle répondait « écoute, motivation, encouragements, conseils » ; que néanmoins, dans la mesure où M. X... était le supérieur hiérarchique direct de Mme A..., celle-ci ne pouvait évidemment pas, lorsqu'elle espérait que son contrat de travail deviendrait définitif ou lorsqu'elle était évaluée, critiquer son manager ; que ses réponses « langues de bois » n'étaient guère représentatives de l'ambiance de travail réelle ; que M. X... produit aussi deux attestations de personnes vantant ses qualités professionnelles ; que néanmoins, l'une émane de M. F..., musicien qui a animé une soirée professionnelle en juin 2008 ; que M. F... n'ayant pas travaillé avec M. X..., il n'a pas pu en une soirée juger de l'ambiance de travail au sein du service, et il aurait été peu probable que M. C... et Mme A... aillent lui confier leur déboires professionnels avec M. X... ; que quant à Mme H..., elle peut témoigner de son vécu professionnel avec M. X..., avec qui elle a travaillé en 2002 dans une autre société, mais non du comportement de M. X... en 2007-2008 au sein de la société ASTRATECH en qualité de directeur régional ; que l'employeur apporte donc la preuve d'un comportement managérial inadapté de la part de M. X... ayant conduit à un stress excessif et à un découragement de ses collaborateurs, ce qui caractérise une insuffisance professionnelle, même si par ailleurs il avait de bons résultats en termes de chiffre d'affaires ; que les premiers juges ont à juste titre relevé que, l'employeur étant tenu à une obligation de résultat quant à la sécurité et à la santé de ses salariés sur le plan physique et moral, il est fondé à licencier un manager qui exerce son pouvoir avec un autoritarisme excessif au point de déstabiliser les membres de son équipe ; qu'il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement pourvu d'une cause réelle et sérieuse et a débouté M. X... de sa demande relative à la rupture (dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse). ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, sur le licenciement, il résulte des dispositions de l'article L. 1232-1 du Code du travail que la cause du licenciement invoquée doit être réelle, ce qui implique à la fois que le motif existe, qu'il soit exacte et qu'il présente un caractère d'objectivité, excluant les préjugés et les convenances personnelles ; que le motif du licenciement doit également être sérieuse et présenter une gravité suffisante rendant impossible, sans dommage pour l'entreprise, la poursuite du contrat de travail ; que l'article L. 1235-1 du Code du travail dispose qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieuse des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estimes utiles ; que si un doute subsiste, il profite au salarié ; que par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article L. 1232-6 du Code du travail que la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement en date du 18 novembre 2009 vise de manière circonstanciée, sur trois pages, un comportement agressif et irrespectueux de Monsieur Franck X... envers l'équipe dont il avait la responsabilité, et envers son homologue de la région nord, ainsi que des méthodes de gestion du personnel autoritaires malgré divers rappels à l'ordre ; que l'employeur vise également la réticence de Monsieur Franck X... à suivre une formation de gestion du stress et de management de l'équipe et reproche au salarié d'avoir anormalement stressé et démotivé son équipe notamment en exigent l'établissement de tableaux de suivi représentant une charge de travail considérable pour un intérêt limité ; qu'enfin, la SAS ASTRA TECH FRANCE reproche à Monsieur Franck X... de ne pas avoir pris en compte les remarques de son supérieurs hiérarchique, Monsieur E..., et de lui avoir répondu par une attitude hostile, provocante et menaçante ; que la SAS ASTRA TECH FRANC verse aux débats l'attestation de Madame Françoise Z..., responsable de secteur sous l'autorité de Monsieur Franck X..., qui confirme les griefs évoqués dans la lettre de licenciement ; qu'en particulier, elle évoque les instructions données sur la rédaction de tableaux inutiles, le comportement excessivement autoritaire de Monsieur Franck X... avec ses collaborateurs et notamment avec Monsieur Dominique J... qui aurait connu un état dépressif important en raison du comportement de son supérieur hiérarchique ; que l'attestation de Madame Estelle A..., également responsable de secteur sous l'autorité de Monsieur Franck X..., confirme elle aussi de manière circonstanciée le comportement qualifié de « manipulateur » et « stressant » de ce dernier, ainsi que le travail administratif inutile qu'il demandait à son équipe contrairement aux autres directeurs de région ; que la SAS ASTRA TECH FRANCE produit en pièce n° 4 un échange de courriers électroniques entre Monsieur Franck X... et son homologue de la région nord, Monsieur Guy C..., dont il ressort que le demandeur a injustement accusé son collègue de détourner les clients de sa région ; que de même, les échanges de courriers électroniques produits en pièce n° 10 par le défendeur démontrent que Monsieur Franck X... utilisait le 8 octobre 2008 un ton peu professionnel, voire méprisant, à l'égard de ses collègues et de sa hiérarchie à propos de l'organisation d'une réunion téléphonique ; qu'il en va de même dans un courrier électronique en date du 5 octobre 2007 adressé par Monsieur Franck X... à Madame Pascale B..., sa subordonnée devenue également assistante de Monsieur E... (pièce n° 5 du défendeur) ; que dans son attestation, cette dernière évoque, elle aussi, des instructions contradictoires, et l'envoi répété de mails en rouge dans lesquels il lui était demandé systématiquement fait des reproches ; qu'elle évoque une situation psychologiquement difficile sur son lieu de travail ; que la pièce n° 3 du défendeur fait également apparaître pas moins de 12 e-mails en provenance de Monsieur Franck X... à l'égard de Madame B... en moins de 24 heures, et les pièces n° 23 et 35 produites par le demandeur font apparaître quant à elles des demandes de nombreuses informations chiffrées dont Monsieur Franck X... exigeait qu'elles lui soient fournies dans un délai extrêmement bref, voire le week-end ; que trois des salariées attestant dans ce dossier ont indiqué avoir envisagé de quitter la société en raison du comportement de Monsieur Franck X... (pièce n° 1, 2 et 3 du défendeur) ; que par ailleurs, Monsieur Franck X... ne conteste pas, dans le cadre des débats, l'indication dans la lettre de licenciement de la situation d'un collaborateur de son équipe ayant souhaité mettre fin à sa période d'essai au mois d'avril 2008, et d'une collaboratrice ayant demandé à changer de secteur en raison de ces tensions ; que l'employeur est tenu de veiller à la santé et la sécurité de ses salariés sur le plan physique et moral, il s'agit d'une obligation de résultat ; que dès lors, il ne peut être reproché à celui-ci de licencier un salarié qui, ne tenant pas compte des rappels à l'ordre qui lui sont adressés, ni des observations formulées dans son entretien d'évaluation, ni des formations en gestion du personnel qui lui sont proposées, exerce de manière excessivement autoritaire et inadaptée son pouvoir hiérarchique sur les salariés de son équipe, au point de déstabiliser celle-ci ; que les éléments auxquels le salarié fait référence pour expliquer un certain état de stress, à savoir la dissimulation par l'employeur d'une partie de son chiffre d'affaires et la mise à l'écart de certaines réunions, ne sont aucunement étayés par les pièces produites aux débats (pièces n° 11 et 74 du demandeur) ; que dans ces conditions, le licenciement de Monsieur Franck X... repose bien sur une cause réelle et sérieuse et les demandes afférentes à la rupture du contrat de travail sont rejetées. ALORS, D'UNE PART, QUE le motif de rupture mentionné dans la lettre de licenciement détermine le caractère disciplinaire ou non du licenciement ; que constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par lui comme fautif ; que la lettre de licenciement visait notamment le « comportement incompatible » du salarié avec ses fonctions managériales « malgré (de) divers rappels à l'ordre », son « comportement agressif et irrespectueux » envers l'équipe dont il avait la responsabilité, son « ton souvent méprisant » et sa propension à remettre en cause de manière systématique la pertinence du travail de ses subordonnés, sa « manière dictatoriale et agressive » de gérer son équipe, ses « propos injurieux ou déplacés » envers certains de ses subordonnées, son « ton menaçant » à l'égard de la directrice marketing de division urologie et de son homologue de la région nord, ses « écrits vexatoires », ses méthodes de gestion « autoritaires » et déstabilisantes, son « attitude hostile, alternant provocation, menaces et dénigrement » à l'encontre de son supérieur hiérarchique, son comportement intolérable, ce dont il découlait que, pour l'employeur, la cause du licenciement n'était pas une insuffisance professionnelle, mais des agissements considérés par lui comme fautifs ; que l'arrêt a toutefois retenu, par motifs propres, que dans sa lettre de licenciement, l'employeur ne parle à aucun moment de faute, mais seulement de cause réelle et sérieuse, qu'il reproche au salarié son comportement général et ses méthodes managériales et qu'il se situe sur le terrain de l'insuffisance professionnelle, non disciplinaire ; qu'en refusant ainsi d'apprécier la régularité et la validité du licenciement au regard du droit disciplinaire alors que, par motifs éventuellement adoptés, l'arrêt a retenu par ailleurs que la lettre de licenciement vise un comportement agressif et irrespectueux du salarié envers l'équipe dont il avait la responsabilité, et envers son homologue de la région nord, ainsi que des méthodes de gestion du personnel autoritaires malgré divers rappels à l'ordre, que l'employeur vise également la réticence du salarié à suivre une formation de gestion du stress et de management de l'équipe et reproche au salarié d'avoir anormalement stressé et démotivé son équipe ainsi que de ne pas avoir pris en compte les remarques de son supérieur hiérarchique et de lui avoir répondu par une attitude hostile, provocante et menaçante, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6, L. 1235-1 et L. 1331-1 du Code du travail. ALORS, D'AUTRE PART, QUE, l'insuffisance professionnelle, lorsqu'elle procède de la mauvaise volonté délibérée du salarié ou d'une abstention fautive, est constitutive d'une faute disciplinaire ; que les juges du fond ont, d'abord, relevé que les attestations versées par l'employeur à l'appui des griefs énoncés dans la lettre de licenciement faisaient état notamment de l'attitude critique et sarcastique du salarié, de sa méfiance et de son comportement manipulateur, de ses propos négatifs voire insultants et de son agressivité, ensuite, estimé que la réponse du salarié à un mail bref et plutôt neutre de son homologue de la région nord a été faite sur un ton agressif, accusateur et polémique, disproportionné et inadapté, que le salarié pouvait être à certains moments parfaitement civil voire paternaliste ou décalé dans ses propos et à d'autres moments désagréable, ce qui déstabilisait ses interlocuteurs et qu'il avait exercé son pouvoir avec un autoritarisme excessif ; qu'aussi, par motifs éventuellement adoptés, les juges du fond se sont bornés, d'une part à estimer que les échanges de courriers électroniques produits en pièce n° 10 par le défendeur démontrent que le salarié utilisait le 8 octobre 2008 un ton peu professionnel, voire méprisant, à l'égard de ses collègues et de sa hiérarchie à propos de l'organisation d'une réunion téléphonique, que la pièce n° 3 du défendeur fait également apparaître pas moins de 12 e-mails en provenance du salarié à l'égard de Madame B... en moins de 24 heures, et les pièces n° 23 et 35 produites par le salarié font apparaître quant à elles des demandes de nombreuses informations chiffrées dont il exigeait qu'elles lui soient fournies dans un délai extrêmement bref, voire le week-end, d'autre part, relevé que trois des salariées attestant dans ce dossier ont indiqué avoir envisagé de quitter la société en raison du comportement du salarié et, enfin, retenu qu'il il ne peut être reproché à l'employeur de licencier un salarié qui, ne tenant pas compte des rappels à l'ordre qui lui sont adressés, ni des observations formulées dans son entretien d'évaluation, ni des formations en gestion du personnel qui lui sont proposées, exerce de manière excessivement autoritaire et inadaptée son pouvoir hiérarchique sur les salariés de son équipe, au point de déstabiliser celle-ci ; qu'il résulte de ces motifs que les juges du fond ont caractérisé des manquements fautifs du salarié de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise, étant constant que le salarié a été dispensé de l'exécution de son préavis ; que dès lors, en décidant que le licenciement du salarié n'était pas de nature disciplinaire, la cour d'appel, qui a refusé d'apprécier la régularité et la validité du licenciement au regard du droit disciplinaire, n'a pas tiré les conséquences légales qui résultaient de ses propres constatations et a violé les articles L. 1232-6, L. 1235-1 et L. 1331-1 du Code du travail. ALORS, EN CONSEQUENCE, QU'aucun fait fautif ne pouvant donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, en omettant de rechercher, bien qu'elle y ait été invitée, si les griefs énoncés dans la lettre de licenciement ne visaient pas des faits prescrits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-4 du Code du travail. ET ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, si par extraordinaire il était considéré que l'arrêt attaqué a relevé de fautes commises dans le délai de deux mois avant l'envoi du courrier de convocation à entretien préalable (échange de mails entre le salarié et Monsieur C... et Madame
B...
), QUE le licenciement pour faute obéit aux règles du droit disciplinaire ; que les juges du fond étaient tenus de rechercher si les prétendues fautes isolées commises par le salarié après cinq ans et demi de carrière irréprochable au sein de la société étaient d'une gravité suffisante pour entrainer une telle sanction ; qu'en s'abstenant de rechercher si le licenciement n'était pas disproportionné eu égard aux prétendues fautes commises isolées, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1235-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-16032
Date de la décision : 09/07/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 14 février 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 jui. 2014, pourvoi n°13-16032


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Le Bret-Desaché, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.16032
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