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23/09/2014 | FRANCE | N°13-16184

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 septembre 2014, 13-16184


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 26 février 2013), que M. X... a été engagé en qualité de directeur général à compter du 1er janvier 1997 par la société Beauplet-Languille ; que mis à pied à titre conservatoire par lettre du 26 mai 2009 il a été convoqué à un entretien préalable qui s'est tenu le 8 juin 2009 puis à un second entretien tenu le 16 juin 2009 avant l'être licencié pour faute grave par lettre du 22 juin 2009 ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrê

t de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à vers...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 26 février 2013), que M. X... a été engagé en qualité de directeur général à compter du 1er janvier 1997 par la société Beauplet-Languille ; que mis à pied à titre conservatoire par lettre du 26 mai 2009 il a été convoqué à un entretien préalable qui s'est tenu le 8 juin 2009 puis à un second entretien tenu le 16 juin 2009 avant l'être licencié pour faute grave par lettre du 22 juin 2009 ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à verser une certaine somme au salarié et à rembourser les indemnités de chômage dans la limite d'un mois alors, selon le moyen :
1°/ que l'article 27 de la convention collective nationale des cadres des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipement de la maison du 23 juin 1971 prévoit un second entretien entre l'employeur ou son représentant et le cadre pour recueillir les observations de celui-ci sur la décision de le licencier, laquelle ne peut lui être notifiée « officiellement » qu'à l'expiration d'un délai de trois jours ; qu'il résulte de ce dispositif que la convocation du salarié à un second entretien ne peut avoir d'autre objet que de lui signifier la décision de l'employeur de le licencier et lui permettre, le cas échéant, de formuler ses observations dans un délai de trois jours ; qu'il ne peut dès lors être reproché à l'employeur, lequel ne peut notifier « officiellement » au salarié sa décision que postérieurement à ce second entretien, de ne pas s'être formellement ménagé la preuve de ce qu'il a, au cours de l'entretien, informé le salarié de sa décision de le licencier ; que satisfait dès lors aux obligations prévues par le texte conventionnel, l'employeur qui établit avoir convoqué le salarié pour un second entretien en vue de recueillir ses observations sur le licenciement envisagé ; qu'en exigeant de la société Languille qu'elle rapporte la preuve formelle de ce qu'elle avait fait part à M. X... de le licencier lors du second entretien, cependant qu'une telle preuve ne pourrait résulter que d'une notification « officielle » immédiate, expressément exclue par le texte, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 27 de la convention collective susvisée ;
2°/ que doit être regardé comme ayant rempli les obligations mises à sa charge par l'article 27 de la convention collective nationale des cadres des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipement de la maison du 23 juin 1971, l'employeur qui convoque le salarié à un nouvel entretien après la tenue de l'entretien préalable de droit commun et lui accorde ensuite un délai de trois jours pour formuler ses observations ; qu'il en va d'autant plus ainsi lorsque, comme en l'espèce, la convocation remise au salarié précise expressément que le nouvel entretien a pour objet de satisfaire aux dispositions de l'article 27 de la convention collective susvisée, ce dont il résulte que le salarié est réputé avoir connaissance de l'objet du nouvel entretien et des droits qui lui sont reconnus ; qu'en reprochant à la société Languille de ne pas rapporter la preuve qu'elle « a bien fait signifier à M. X... sa décision de le licencier dès le 16 juin 2009 en lui rappelant qu'il disposait d'un délai de trois jours pour faire valoir ses observations », cependant qu'elle constatait que M. X... avait bien été informé de ce que l'entretien du 16 juin 2009 « était fixé par application des dispositions de l'article 27 de la convention collective susvisée », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 27 de la convention collection nationale des cadres des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipement de la maison du 23 juin 1971 ;
3°/ subsidiairement qu'une convention ou un accord collectif ne peut déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d'ordre public ; que tel est le cas de l'article L. 1232-6 du code du travail dont il résulte que la lettre de licenciement, qui fixe les termes du litige, constitue le seul mode régulier de notification du licenciement et que le licenciement prononcé verbalement, antérieurement à l'envoi de la lettre, est nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'une convention ou un accord collectif ne peut déroger à ces dispositions en autorisant ou en obligeant l'employeur à « signifier », au cours d'un entretien préalable, sa décision de prononcer le licenciement préalablement à la notification « officielle » de la lettre de licenciement ; qu'en exigeant, sur le fondement de l'article 27 de la convention collective nationale des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipement de la maison du 23 juin 1971, que l'employeur devait apporter la preuve matérielle de ce qu'il avait formellement, lors du second entretien prévu par le texte, signifié au salarié sa décision de le licencier antérieurement à l'envoi de la lettre de licenciement, pour en déduire qu'à défaut le licenciement était nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 27 de la Convention collective nationale des cadres des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipements de la maison du 23 juin 1971 et par refus d'application, les articles L. 1232-6 et L. 2251-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant justement retenu que l'article 27 de la convention collective nationale des cadres des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipement de la maison du 23 juin 1971 prévoyant un second entretien entre l'employeur ou son représentant et le cadre pour recueillir les observations de celui-ci sur la décision de le licencier ne devant lui être notifiée officiellement qu'à l'expiration d'un délai de trois jours, constituait en plus des dispositions du code du travail, une garantie de fond protectrice des intérêts du cadre, la cour d'appel, qui a estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis, qu'il n'était pas établi que l'employeur avait, à l'occasion du second entretien, signifié au salarié sa décision de le licencier pour lui permettre de faire valoir ses éventuelles observations, en a exactement déduit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Beauplet-Languille aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Beauplet-Languille.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, d'AVOIR en conséquence condamné la société LANGUILLE, aux droits de laquelle se trouve désormais la société BEAUPLET-LANGUILLE, à lui payer les sommes de 300. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié et 2. 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et de lui AVOIR ordonné de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage perçues par le salarié, dans la limite d'un mois d'indemnités ;
AUX MOTIFS QUE « M. Gilles X... a été convoqué par lettre recommandée du 26 mai 2009 à l'entretien préalable prévu par l'article L. 1232-2 du code du travail, lequel entretien a été fixé au 8 juin suivant et s'est déroulé à cette date ; Que par courrier du 11 juin 2009, la société Languille l'a convoqué à un second entretien fixé au 16 juin 2009 à 10 h en lui précisant seulement que ce nouvel entretien était fixé par application des dispositions de l'article 27 de la convention collective susvisée ; Que M. X... s'est ensuite vu notifier son licenciement pour faute grave par lettre recommandée du 22 juin 2009 ; qu'il soutient que, contrairement aux exigences de l'article 27 de la convention collective, l'employeur ne lui a pas, lors de l'entretien du 16 juin 2009, signifier sa décision de le licencier de sorte qu'il l'a privé de la faculté de faire valoir ses observations pendant le délai qui lui était ouvert ; que la procédure conventionnelle prévue à l'article 27 de la convention collective nationale des cadres des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipement de la maison du 23 juin 1971, étendue par arrêté du 13 juillet 1973, qui consiste à imposer à l'employeur de convoquer le salarié à un second entretien au cours duquel il doit lui signifier sa décision constitue pour le salarié une garantie de fond en ce que cette signification préalable à la notification officielle lui ouvre un délai de trois jours au cours duquel, informé de la teneur de la décision de l'employeur, il peut, avant toute notification officielle, faire valoir des observations seul ou avec l'assistance d'un conseiller ; qu'à l'appui de sa position selon laquelle elle aurait bien signifier à M. X... sa décision de le licencier dès le 16 juin 2009, l'intimée verse aux débats une attestation établie par Mme Martine Y..., responsable ressources humaines au sein d'une autre société du Groupe, attestation qui n'est, au demeurant, ni datée, ni signée, et aux termes de laquelle le témoin indique seulement avoir participé à l'élaboration du dossier de licenciement de M. X... et avoir constaté que M. Z..., le chef d'entreprise, était parfaitement au courant des obligations résultant pour l'employeur de l'article 27 de la convention collective applicable ; mais qu'il ne ressort pas de ce témoignage que Mme Y... ait personnellement constaté, le 16 juin 2009, que l'employeur a bien satisfait à son obligation de signifier sa décision à M. X... dès cette date, étant observé qu'il ne fait pas débat que ce témoin n'a pas assisté à l'entretien dont s'agit ; que, faute pour l'employeur de rapporter la preuve, qui lui incombe, de ce qu'il a bien signifier à M. X... sa décision de le licencier dès le 16 juin 2009 en lui rappelant qu'il disposait d'un délai de trois jours pour faire valoir ses éventuelles observations, au besoin avec le concours d'un conseiller, avant que puisse intervenir toute notification officielle, force est de constater que M. X... n'a eu connaissance de la décision de la société Languille de le licencier que par le biais de la lettre de licenciement qui lui a été adressée le 22 juin 2009, de sorte qu'il a été privé de la possibilité de faire valoir, en connaissance de la décision de l'employeur et avant toute notification officielle, des observations propres à assurer sa défense ; que le licenciement de M. X... doit être déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse pour avoir été ainsi prononcé en violation de la garantie de fond instituée par l'article 27 de la convention collective applicable en l'espèce » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'article 27 de la convention collective nationale des cadres des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipement de la maison du 23 juin 1971 prévoit un second entretien entre l'employeur ou son représentant et le cadre pour recueillir les observations de celui-ci sur la décision de le licencier, laquelle ne peut lui être notifiée « officiellement » qu'à l'expiration d'un délai de trois jours ; qu'il résulte de ce dispositif que la convocation du salarié à un second entretien ne peut avoir d'autre objet que de lui signifier la décision de l'employeur de le licencier et lui permettre, le cas échéant, de formuler ses observations dans un délai de trois jours ; qu'il ne peut dès lors être reproché à l'employeur, lequel ne peut notifier « officiellement » au salarié sa décision que postérieurement à ce second entretien, de ne pas s'être formellement ménagé la preuve de ce qu'il a, au cours de l'entretien, informé le salarié de sa décision de le licencier ; que satisfait dès lors aux obligations prévues par le texte conventionnel, l'employeur qui établit avoir convoqué le salarié pour un second entretien en vue de recueillir ses observations sur le licenciement envisagé ; qu'en exigeant de la société LANGUILLE qu'elle rapporte la preuve formelle de ce qu'elle avait fait part à Monsieur X... de le licencier lors du second entretien, cependant qu'une telle preuve ne pourrait résulter que d'une notification « officielle » immédiate, expressément exclue par le texte, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 27 de la convention collective susvisée ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE doit être regardé comme ayant rempli les obligations mises à sa charge par l'article 27 de la convention collective nationale des cadres des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipement de la maison du 23 juin 1971, l'employeur qui convoque le salarié à un nouvel entretien après la tenue de l'entretien préalable de droit commun et lui accorde ensuite un délai de trois jours pour formuler ses observations ; qu'il en va d'autant plus ainsi lorsque, comme en l'espèce, la convocation remise au salarié précise expressément que le nouvel entretien a pour objet de satisfaire aux dispositions de l'article 27 de la convention collective susvisée, ce dont il résulte que le salarié est réputé avoir connaissance de l'objet du nouvel entretien et des droits qui lui sont reconnus ; qu'en reprochant à la société LANGUILLE de ne pas rapporter la preuve qu'elle « a bien fait signifier à M. X... sa décision de le licencier dès le 16 juin 2009 en lui rappelant qu'il disposait d'un délai de trois jours pour faire valoir ses observations », cependant qu'elle constatait que Monsieur X... avait bien été informé de ce que l'entretien du 16 juin 2009 « était fixé par application des dispositions de l'article 27 de la convention collective susvisée », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 27 de la convention collection nationale des cadres des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipement de la maison du 23 juin 1971 ;
ALORS, DE TROISIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QU'une convention ou un accord collectif ne peut déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d'ordre public ; que tel est le cas de l'article L. 1232-6 du Code du travail dont il résulte que la lettre de licenciement, qui fixe les termes du litige, constitue le seul mode régulier de notification du licenciement et que le licenciement prononcé verbalement, antérieurement à l'envoi de la lettre, est nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'une convention ou un accord collectif ne peut déroger à ces dispositions en autorisant ou en obligeant l'employeur à « signifier », au cours d'un entretien préalable, sa décision de prononcer le licenciement préalablement à la notification « officielle » de la lettre de licenciement ; qu'en exigeant, sur le fondement de l'article 27 de la convention collective nationale des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipement de la maison du 23 juin 1971, que l'employeur devait apporter la preuve matérielle de ce qu'il avait formellement, lors du second entretien prévu par le texte, signifié au salarié sa décision de le licencier antérieurement à l'envoi de la lettre de licenciement, pour en déduire qu'à défaut le licenciement était nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 27 de la Convention collective nationale des cadres des commerces de quincaillerie, fournitures industrielles, fers, métaux et équipements de la maison du 23 juin 1971 et par refus d'application, les articles L. 1232-6 et L. 2251-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-16184
Date de la décision : 23/09/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel d'Angers, 26 février 2013, 10/03193

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 26 février 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 sep. 2014, pourvoi n°13-16184


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.16184
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