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22/10/2014 | FRANCE | N°13-23908

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 22 octobre 2014, 13-23908


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... et la société GPW investissement ont conclu un pacte d'actionnaires avec la société Efigest Asset Management (Efigest AM) comportant une clause compromissoire ; que la société Efigest AM a saisi un juge des référés d'une demande de provision pour des faits de concurrence déloyale ;
Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter la société Efigest AM de sa demand

e de paiement d'une provision en raison des actes de concurrence déloyale qu'elle...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... et la société GPW investissement ont conclu un pacte d'actionnaires avec la société Efigest Asset Management (Efigest AM) comportant une clause compromissoire ; que la société Efigest AM a saisi un juge des référés d'une demande de provision pour des faits de concurrence déloyale ;
Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter la société Efigest AM de sa demande de paiement d'une provision en raison des actes de concurrence déloyale qu'elle imputait à Mme X... et à la société GPW investissement, la cour d'appel retient qu'il est sans portée de discuter de la compétence matérielle du juge des référés ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Efigest AM qui soutenaient que le pacte d'actionnaires attribuait expressément en marge de la clause compromissoire compétence exclusive au tribunal de grande instance de Paris pour connaître de toute difficulté y afférente, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ; Sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que, pour condamner la société Efigest AM à payer à la société GPW investissement des dommages-intérêts d'un montant de 10 000 euros résultant de l'assignation de cette dernière en appel provoqué dans le but de tenter de retarder l'appel principal et alors même que la société Efigest AM a violé le principe selon lequel il est interdit de faire état de pièces saisies en vertu d'une ordonnance rétractée, l'arrêt retient que les faits sont avérés et que le comportement de la société Efigest AM est manifestement fautif ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la légitimité de la prétention avait été reconnue par la juridiction du premier degré, la cour d'appel qui n'a caractérisé aucune circonstance particulière ayant fait dégénérer en abus l'exercice du recours, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la société Efigest AM de sa demande de provision et condamné celle-ci à payer à la société GPW investissement la somme provisionnelle de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 4 juillet 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne Mme X... et la société GPW investissement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour la société Efigest Asset Management et autres
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué, statuant en référé, D'AVOIR écarté la demande que la société EFIGEST AM avait formée afin d'obtenir le paiement d'une provision en raison des actes de concurrence déloyale qu'elle imputait à Mme Y... et à la société GPW ;
AUX MOTIFS QU'en cause d'appel, l'objet du litige ne consiste plus que dans l'octroi d'une provision, la société EFIGEST AM ne maintenant plus ses demandes initiales, dont elle a été déboutée par le premier juge ; que Mme Y... et la société GPW soutiennent que le juge des référés ne pouvaient octroyer une provision à la société EFIGEST AM en l'absence d'urgence en présence d'une clause d'arbitrage et qu'en toute hypothèse, il existe des contestations sérieuses tenant à l'absence d'agissements illicites de Mme Y... et de préjudice subi par la société EFIGEST AM ; que la société EFIGEST AM fait valoir que Mme Y... et la société GPW ont renoncé au bénéfice de la clause compromissoire et que le juge des référés a vocation à faire cesser un trouble manifestement illicite et/ ou à permettre l'octroi d'une provision en présence d'une obligation non sérieusement contestable ; qu'il est constant que le pacte d'actionnaire comporte une clause de conciliation et d'arbitrage (article 19 intitulé « Litiges ») qui s'impose aux parties ; que l'article 1459 du Code de procédure civile dans sa rédaction issue de la loi du 13 janvier 2011 dispose : « l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle tant que le tribunal arbitral n'est pas constitué à ce qu'une partie saisisse une juridiction d'Etat aux fins d'obtenir une mesure provisoire ou conservatoire. Sous réserve des dispositions régissant les saisies conservatoires et les sûretés judiciaires, la demande est portée devant le président du tribunal de grande instance ou de commerce qui statue sur les mesures d'instruction dans les conditions prévues à l'article 145 et en cas d'urgence, sur les mesures provisoires ou conservatoires sollicitées par les parties à l'arbitrage » ; qu'il est constant qu'est assimilée à une mesure provisoire ou conservatoire une demande de provision ; que la constitution du tribunal arbitral fait obstacle dans tous les cas à la compétence du juge des référés ; que lorsque le tribunal arbitral n'est pas constitué, comme en l'espèce, la voie du référé provision est ouverte devant le juge étatique mais à la condition que l'urgence soit démontrée ; que l'urgence apparaît ainsi comme le fondement de la compétence exceptionnelle du juge étatique malgré la convention d'arbitrage ; qu'il s'ensuit qu'une provision ne pouvait pas être accordée par le premier juge au vu de prétendus faits de concurrence déloyale au visa de l'article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile et de l'absence de contestations sérieuses sans caractériser l'urgence de sa saisine ; que la société EFIGEST AM n'a justifié d'aucune situation d'urgence en première instance et qu'elle ne satisfait pas plus à cette obligation en cause d'appel, s'abstenant de répondre aux conclusions circonstanciées de Mme Y... et de la société GPW sur ce point ; qu'il est sans portée à cet égard de discuter de la compétence matérielle du juge des référés ou d'opposer une prétendue renonciation au bénéfice de la clause compromissoire du fait de la saisine du tribunal de commerce par Mme Y... d'une action portant sur la révocation de ses mandats sociaux sans rapport avec l'actionnariat de la société EFIGEST AM ou encore et « surabondamment » de soutenir que l'article 48 exclut le recours à la clause compromissoire en visant le cas de la société GPW, société civile, dès lors que la clause compromissoire est valable dans les contrats conclu à raison de l'activité professionnelle ce qui est manifestement le cas ; qu'il s'ensuit qu'en l'absence d'urgence, le juge des référés n'a pas le pouvoir d'accorder une provision à la société EFIGEST AM de sorte que sans même qu'il y ait lieu d'examiner si Mme Y... s'est rendue coupable d'agissements illicites ayant causé un préjudice à la société EFIGEST AM, cette dernière ne peut qu'être déboutée de sa demande de provision ;
1. ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'il résulte des dernières conclusions déposées par la société EFIGEST AM qu'elle a sollicité le paiement d'une provision à raison des dommages et intérêts qui lui étaient dus en conséquence des actes de concurrence déloyale commis par Mme Y... et la société GPW en violation de la clause d'exclusivité stipulée dans le pacte d'actionnaire ; qu'en retenant, pour décider, en l'absence d'allégation d'un cas d'urgence, que la stipulation d'une clause compromissoire privait la juridiction des référés de sa compétence pour allouer une provision sans que la société EFIGEST AM puisse se prévaloir d'une renonciation de Mme Y... à l'arbitrage pour avoir saisi le Tribunal de commerce d'une action portant sur la révocation de ses mandats sociaux dès lors qu'une telle saisine serait étrangère à l'actionnariat de la société EFIGEST AM dont la juridiction des référés était saisie, quand la demande de la société EFIGEST AM portait non sur son actionnariat mais sur le point de savoir si Mme Y... et la société GPW avaient commis des actes de concurrence déloyale constitutifs d'un trouble manifestement illicite en détournant des clients et en débauchant des personnels par la création d'une entité concurrente, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige ; qu'ainsi, elle a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2. ALORS en toute hypothèse QUE les parties à une convention d'arbitrage ont nécessairement la possibilité de renoncer à son bénéfice ; que le fait pour l'une d'elles de présenter devant les tribunaux étatiques une demande au fond qui aurait dû être soumise à l'arbitrage vaut renonciation de la part de cette partie au bénéfice de la clause compromissoire non seulement en ce qui concerne la demande présentée mais encore pour tous les effets de la clause compromissoire ; qu'en retenant, pour décider, en l'absence d'urgence, que la stipulation d'une clause compromissoire interdisait à la juridiction d'allouer une provision sans que la société EFIGEST AM puisse se prévaloir d'une renonciation de Mme Y... à l'arbitrage pour avoir saisi le tribunal de commerce d'une action portant sur la révocation de ses mandats sociaux dès lors qu'une telle saisine serait étrangère à l'actionnariat de la société EFIGEST AM dont elle était saisie, quand la renonciation non équivoque à la compétence arbitrale vaut pour tous les effets de la clause compromissoire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles 809, alinéa 2, et 1449, alinéa 2, du Code de procédure civile ;
3. ALORS si tel n'est pas le cas QUE les parties à une convention d'arbitrage ont nécessairement la possibilité de renoncer à son bénéfice ; que le fait pour l'une d'elles de présenter devant les tribunaux étatiques une demande au fond qui aurait dû être soumise à l'arbitrage vaut renonciation de la part de cette partie au bénéfice de la clause compromissoire ; qu'il appartient alors aux juges du fond de rechercher ce qu'une partie a voulu et quelle était sa croyance légitime quant au sort futur de la clause compromissoire lorsqu'elle a décidé, pour un litige donné, de ne pas mettre en oeuvre cette clause, en saisissant la juridiction étatique ; qu'en retenant, pour décider, en l'absence d'allégation d'un cas d'urgence, que la stipulation d'une clause compromissoire interdisait à la juridiction des référés d'allouer une provision sans que la société EFIGEST AM puisse se prévaloir d'une renonciation de Mme Y... à l'arbitrage pour avoir saisi le tribunal de commerce d'une action portant sur la révocation de ses mandats sociaux, au lieu de rechercher, au cas particulier, quelle était l'intention de Mme Y... lorsqu'elle avait saisi la juridiction étatique, la cour d'appel a, subsidiairement, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles 809, alinéa 2, et 1449, alinéa 2, du Code de procédure civile ;
4. ALORS QU'en se déterminant en considération de la saisine de la juridiction étatique par Mme Y... sans répondre aux conclusions par lesquelles la société EFIGEST AM soutient que la renonciation à la clause compromissoire ne résultait également de la saisine de la juridiction étatique par la société GPW en exécution du pacte d'actionnaire (conclusions, p. 13, pénultième alinéa), la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
5. ALORS QUE la société EFIGEST AM a rappelé, dans ses conclusions, que « le Pacte signé tant par Mme Y... que par la Société GPW Investissements, notamment en ses articles 19 et 22 attribue expressément, en marge de la clause compromissoire, compétence exclusive au TRIBUNAL de GRANDE INSTANCE de PARIS pour connaître de toute difficulté y afférent » (conclusions, p. 13, pénultième alinéa), ce dont elle avait convaincu le juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen tiré de ce que la clause compromissoire était manifestement inapplicable et qu'elle ne pouvait pas être opposée à la demande en référé de la société EFIGEST AM tendant au paiement d'une provision, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société EFIGEST AM à payer à la société GPW des dommages et intérêts d'un montant de 10 000 euros ;
AUX MOTIFS QUE la société GPW sollicite le paiement d'une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive résultant de l'assignation en appel provoqué formé contre elle au visa des articles 550 alinéa 2 et 32-1 du Code de procédure civile dans le but de tenter de retarder l'appel principal interjeté contre l'ordonnance du 27 juillet 2012 et alors même que la société EFIGEST AM a violé le principe selon lequel il est interdit de faire état de pièces saisies en vertu d'une ordonnance rétractée ; que la société EFIGEST AM n'a pas répondu sur cette demande ; que les faits sont avérés ; que le comportement manifestement fautif de la société EFIGEST AM justifie sa condamnation à réparer le préjudice subi par la société GPW qui peut être justement apprécié à la somme provisionnelle de 10 000 euros ;
1. ALORS QUE le silence à l'affirmation d'un fait n'emporte pas reconnaissance de ce fait ; qu'en tenant pour établis et constants, dans le silence de la société EFIGEST AM, les faits allégués par la société GPW qui lui reprochait d'avoir délivré à son encontre une assignation en appel provoqué formé, dans le but de tenter de retarder l'appel principal interjeté contre l'ordonnance du 27 juillet 2012, tout en méconnaissant le principe selon lequel il est interdit de faire état de pièces saisies en vertu d'une ordonnance rétractée, la cour d'appel qui s'est déterminée à tort en considération du silence de la société EFIGEST AM, a violé l'article 1315 du Code civil ;
2. ALORS QUE l'abus du droit d'agir en justice suppose que soit caractérisée une intention de nuire ou, à tout le moins, une faute grossière équipollente au dol ; qu'en se bornant à énoncer que la société EFIGEST AM n'a pas contesté les allégations de la société GPW qui lui reprochait d'avoir délivré à son encontre une assignation en appel provoqué formé, dans le but de tenter de retarder l'appel principal interjeté contre l'ordonnance du 27 juillet 2012, tout en méconnaissant le principe selon lequel il est interdit de faire état de pièces saisies en vertu d'une ordonnance rétractée, la cour d'appel qui s'est déterminée par des motifs impropres à établir en quoi la société EFIGEST AM avait fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice, a violé l'article 1382 du Code civil ;
3. ALORS QUE la défense d'une prétention devant les juges d'appel ne peut constituer un abus lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré ; qu'en se déterminant en considération de l'interdiction pour la société EFIGEST AM d'exploiter des pièces obtenues en exécution d'une ordonnance sur requête avant qu'elle ne soit rétractée, bien que le juge des référés ait reconnu le bien fondé de ses demandes, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser l'abus d'ester en justice ; qu'ainsi, elle a violé l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13-23908
Date de la décision : 22/10/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 juillet 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 22 oct. 2014, pourvoi n°13-23908


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.23908
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