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05/11/2014 | FRANCE | N°13-19306

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 novembre 2014, 13-19306


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée à compter du 4 septembre 2000 par la société Trap's et occupant en dernier lieu les fonctions de responsable d'équipe puis d'animatrice d'équipe, a été licenciée pour motif économique le 21 octobre 2010 ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner à verser à la salariée une somme à titre de dommage

s-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que les possibilités de reclassement doiv...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée à compter du 4 septembre 2000 par la société Trap's et occupant en dernier lieu les fonctions de responsable d'équipe puis d'animatrice d'équipe, a été licenciée pour motif économique le 21 octobre 2010 ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner à verser à la salariée une somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l'intérieur du groupe, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'implantation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie de leur personnel ; que l'exercice d'activités de nature différente, impliquant l'emploi de salariés ayant des qualifications de nature différente, interdit toute permutation de personnel entre deux entreprises ; qu'en ce cas, le seul fait qu'un ou deux salariés occupant des emplois relevant de l'administration générale, aient pu travailler successivement au service des deux entités ne suffit pas à caractériser une permutabilité du personnel ; qu'au cas présent, la société Trap's faisait valoir qu'elle exerce une activité commerciale de sous-traitance industrielle et emploie principalement des ouvriers de production, tandis que l'ADSEAN est une association à but non lucratif qui a pour objet d'offrir différents services aux personnes vulnérables et souffrant de handicaps et qui emploie en conséquence essentiellement des personnels qualifiés dans le domaine sanitaire et social ; qu'il en résulte qu'aucune permutabilité du personnel n'était possible entre les deux entreprises ; qu'en se bornant à relever, pour affirmer qu'il existait des possibilités de permutation du personnel entre les deux entités, que trois salariés sont passés de l'ADSEAN à la société Trap's, sans s'interroger, ainsi qu'elle y était invitée, sur la nature des postes occupés par ces salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
2°/ que la société Trap's soutenait que, bien qu'il n'existât aucune possibilité de permutation de son personnel avec celui de l'ADSEAN, elle avait demandé à cette dernière de lui faire connaître la liste des postes disponibles en son sein par lettre du 7 septembre 2010 ; qu'elle soutenait également qu'une fois qu'elle avait eu connaissance des salariés touchés par la mesure de licenciement, elle avait approfondi sa recherche en transmettant à l'ADSEAN, par lettre du 15 septembre 2010, un descriptif des compétences des six salariés concernés ; qu'en affirmant que la société Trap's n'a pas effectué une recherche sérieuse de reclassement dès lors que le courrier du 7 septembre 2010 ne comportait aucune précision sur la qualification et les compétences de Mme X..., sans s'expliquer sur le courrier complémentaire du 15 septembre 2010 qui comportait des précisions sur le profil des six salariés menacés de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
3°/ que l'absence de poste disponible adapté aux compétences du salarié rend son reclassement impossible ; qu'en l'espèce, la société Trap's soutenait que Mme X..., qui occupait un emploi d'animatrice d'équipe, catégorie ouvrier, ne possédait pas les qualifications et diplômes nécessaires pour occuper les emplois à pourvoir au sein de l'ADSEAN et, en particulier, les emplois qui avaient été effectivement pourvus par l'embauche de salariés en contrat à durée indéterminée ; qu'ainsi, elle démontrait, en produisait les fiches de postes et contrats de travail correspondant, que les salariés recrutés par l'ADSEAN entre le 1er septembre et le 1er novembre 2010 l'avaient été pour pourvoir des emplois d'éducateur, de cuisinier ou d'animateur nécessitant des compétences et diplômes que Mme X... ne possédait pas ; qu'en se bornant à relever que l'ADSEAN avait procédé à huit embauches en contrat à durée indéterminée sur cette période, sans vérifier si Mme X... disposait des compétences requises pour occuper l'un des emplois pourvus par ces embauches, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, qu'ayant constaté qu'une permutation de personnel s'opérait entre l'association de sauvegarde de l'enfant à l'adulte de la Nièvre (ADSEAN) et la société Trap's, la cour d'appel a pu en déduire l'existence d'un groupe au sein duquel les possibilités de reclassement devaient être examinées, peu important que les entités n'aient pas la même activité ;
Et attendu, ensuite, qu'ayant retenu, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, que la société Trap's avait interrogé l'ADSEAN pour le reclassement de la salariée mais sans préciser la situation, la qualification et les compétences de cette dernière et alors, que dans le même temps, l'association procédait à l'embauche de huit salariés en contrat de travail à durée indéterminée, la cour d'appel a pu en déduire que les recherches de reclassement n'avaient pas été sérieuses ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident de la salariée :
Vu l'article L. 1234-9 et l'article L. 1233-67 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes au titre de complément d'indemnité de préavis et de licenciement, et la condamner à rembourser à son employeur la somme de 1 439 euros, l'arrêt retient qu'ayant adhéré à une convention de reclassement personnalisé, la salariée n'a pas droit à des indemnités de préavis et doit rembourser ce qu'elle a indûment perçu à ce titre ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence de motif économique de licenciement, la convention de reclassement personnalisé devient sans cause de sorte que l'employeur est alors tenu à l'obligation du préavis et des congés payés afférents, sauf à tenir compte des sommes déjà versées à ce titre en vertu de ladite convention, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme X... de ses demandes au titre du complément d'indemnité de préavis et du complément d'indemnité de licenciement, et condamné Mme X... à rembourser à la société Trap's la somme de 1 439 euros, l'arrêt rendu le 12 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne la société Trap's aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour les sociétés Trap's et Aurélie Lecaudey, demanderesses au pourvoi principal
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement économique de Madame X... sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné la société TRAP'S à verser à Madame X... la somme de 17.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « le licenciement pour motif économique ne peut intervenir que lorsque tous les efforts d'adaptation et de formation du salarié ont été réalisés et que le reclassement de celui-ci ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel cette dernière appartient ; que si elle s'en défend, la SA TRAP'S fait bien partie d'un groupe avec l'ADSEA, peu important à cet égard qu'elles n'aient pas la même activité, au sein duquel il existait des possibilités de permutations de personnel comme en atteste le fait que Messieurs Z... et A... ainsi qu'Eric B... sont passés successivement de l'ADSEA à la SA TRAP'S ; que si la SA TRAP'S a bien interrogé l'ADSEA par courrier du 7 septembre 2010, cette seule interrogation, par laquelle elle ne donnait aucune précision sur la situation, la qualification de Nolwenn X... et ses compétences, ne saurait constituer une recherche sérieuse de reclassement, aucune proposition de reclassement n'ayant été faite à Nolwenn X... alors que dans le même temps, du 1er septembre au 1er novembre 2010, l'ADSEA procédait à l'embauche de huit salariés en contrat de travail à durée indéterminée ; que ce manquement de l'employeur à son obligation de reclassement rend le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et le jugement entrepris sera réformé de ce chef » ;
1. ALORS, D'UNE PART, QUE les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l'intérieur du groupe, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'implantation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie de leur personnel ; que l'exercice d'activités de nature différente, impliquant l'emploi de salariés ayant des qualifications de nature différente, interdit toute permutation de personnel entre deux entreprises ; qu'en ce cas, le seul fait qu'un ou deux salariés occupant des emplois relevant de l'administration générale, aient pu travailler successivement au service des deux entités ne suffit pas à caractériser une permutabilité du personnel ; qu'au cas présent, la société TRAP'S faisait valoir qu'elle exerce une activité commerciale de sous-traitance industrielle et emploie principalement des ouvriers de production, tandis que l'ADSEAN est une association à but non-lucratif qui a pour objet d'offrir différents services aux personnes vulnérables et souffrant de handicaps et qui emploie en conséquence essentiellement des personnels qualifiés dans le domaine sanitaire et social ; qu'il en résulte qu'aucune permutabilité du personnel n'était possible entre les deux entreprises ; qu'en se bornant à relever, pour affirmer qu'il existait des possibilités de permutation du personnel entre les deux entités, que trois salariés sont passés de l'ADSEAN à la société TRAP'S, sans s'interroger, ainsi qu'elle y était invitée, sur la nature des postes occupés par ces salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du Code du travail ;
2. ALORS, D'AUTRE PART, QUE la société TRAP'S soutenait que, bien qu'il n'existât aucune possibilité de permutation de son personnel avec celui de l'ADSEAN, elle avait demandé à cette dernière de lui faire connaître la liste des postes disponibles en son sein par lettre du 7 septembre 2010 ; qu'elle soutenait également qu'une fois qu'elle avait eu connaissance des salariés touchés par la mesure de licenciement, elle avait approfondi sa recherche en transmettant à l'ADSEAN, par lettre du 15 septembre 2010, un descriptif des compétences des six salariés concernés ; qu'en affirmant que la société TRAP'S n'a pas effectué une recherche sérieuse de reclassement dès lors que le courrier du 7 septembre 2010 ne comportait aucune précision sur la qualification et les compétences de Madame X..., sans s'expliquer sur le courrier complémentaire du 15 septembre 2010 qui comportait des précisions sur le profil des six salariés menacés de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du Code du travail ;
3. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'absence de poste disponible adapté aux compétences du salarié rend son reclassement impossible ; qu'en l'espèce, la société TRAP'S soutenait que Madame X..., qui occupait un emploi d'animatrice d'équipe, catégorie ouvrier, ne possédait pas les qualifications et diplômes nécessaires pour occuper les emplois à pourvoir au sein de l'ADSEAN et, en particulier, les emplois qui avaient été effectivement pourvus par l'embauche de salariés en contrat à durée indéterminée ; qu'ainsi, elle démontrait, en produisait les fiches de postes et contrats de travail correspondant, que les salariés recrutés par l'ADSEAN entre le 1er septembre et le 1er novembre 2010 l'avaient été pour pourvoir des emplois d'éducateur, de cuisinier ou d'animateur nécessitant des compétences et diplômes que Madame X... ne possédait pas ; qu'en se bornant à relever que l'ADSEAN avait procédé à huit embauches en contrat à durée indéterminée sur cette période, sans vérifier si Madame X... disposait des compétences requises pour occuper l'un des emplois pourvus par ces embauches, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du Code du travail.

Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour Mme X..., demanderesse au pourvoi incident
Il est fait grief à l'arrêt, sur ce point, confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Mme Nolwenn X... de sa demande au titre du complément d'indemnité compensatrice de préavis et de sa demande au titre du complément d'indemnité de licenciement et d'AVOIR condamné Mme Nolwenn X... à verser à la société Trap's la somme de 1 439 euros perçue à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « ce manquement de l'employeur à son obligation de reclassement rend le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et le jugement entrepris sera réformé de ce chef ; / Nolwenn X... avait adhéré à une convention de reclassement personnalisé le 26 octobre 2010, la cour approuvera les premiers juges d'avoir débouté cette dernière de ses demandes au titre du complément d'indemnité de préavis et de licenciement, tout en la condamnant à rembourser à la Sa Trap's la somme de 1 439 € indûment perçue de ce chef » (cf., arrêt attaqué, p. 4) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE « Madame X... a adhéré à une convention de reclassement personnalisé le 26 octobre 2010 suite à son licenciement pour motif économique survenu le 21 octobre 2010 ; / attendu que l'article L. 1233-7 du code du travail stipule que " si le salarié accepte la convention de reclassement personnalisé le contrat de travail est réputé rompu du commun accord des parties, cette rupture du contrat de travail qui ne comporte ni préavis, ni indemnité de préavis, ouvre droit à l'indemnité de licenciement" ; / attendu que selon l'article 1376 du code civil " celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à la restituer à celui de qui il l'a dûment reçu " ; / en conséquence, le conseil déboute Madame X... de sa demande, laquelle devra en outre procéder au remboursement du préavis indûment perçu » (cf., jugement entrepris, p. 4) ;
ALORS QU'en l'absence de motif économique de licenciement, la convention de reclassement personnalisé devient sans cause, de sorte que l'employeur est alors tenu à l'obligation du préavis et des congés payés afférents, sauf à tenir compte des sommes déjà versées à ce titre en vertu de ladite convention ; qu'en énonçant, par conséquent, pour débouter Mme Nolwenn X... de sa demande au titre du complément d'indemnité compensatrice de préavis et de sa demande au titre du complément d'indemnité de licenciement et condamner Mme Nolwenn X... à verser à la société Trap's la somme de 1 439 euros perçue à titre d'indemnité compensatrice de préavis, que Mme Nolwenn X... avait adhéré à une convention de reclassement personnalisé le 26 octobre 2010, quand elle retenait que la société Trap's avait manqué à son obligation de reclassement à l'égard de Mme Nolwenn X... et que le licenciement de cette dernière était, pour cette raison, dénué de cause réelle et sérieuse et quand, dès lors, le licenciement de Mme Nolwenn X... était dépourvu de motif économique, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 1233-67 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la cause.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-19306
Date de la décision : 05/11/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 12 avril 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 nov. 2014, pourvoi n°13-19306


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.19306
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