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18/03/2015 | FRANCE | N°13-15063;13-26335

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mars 2015, 13-15063 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité joint les pourvois n°s S 13-15.63 et U 13-26.335 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 3 février 2003 par la société Manuplast en qualité de directeur exécutif, a été licencié le 1er octobre 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail, de rappels de salaires et remboursement de frais, de la perte de divers avantages et de remise de documents sociaux ; que le conseil de prud'hommes s'est décl

aré incompétent pour statuer au profit du tribunal de grande instance ;...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité joint les pourvois n°s S 13-15.63 et U 13-26.335 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 3 février 2003 par la société Manuplast en qualité de directeur exécutif, a été licencié le 1er octobre 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail, de rappels de salaires et remboursement de frais, de la perte de divers avantages et de remise de documents sociaux ; que le conseil de prud'hommes s'est déclaré incompétent pour statuer au profit du tribunal de grande instance ; que par arrêt du 1er mars 2013, la cour d'appel a reçu le contredit formé par M. X..., décidé d'évoquer et renvoyé les parties à conclure au fond ; que par arrêt du 11 octobre 2013, elle a condamné la société Manuplast à payer au salarié des sommes au titre de rappel de salaire et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur les premier, deuxième et troisième moyens des pourvois réunis :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le quatrième moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi n° U 13-26.335 :
Vu les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
Attendu que pour condamner l'employeur à payer une certaine somme au titre de rappel de salaire, l'arrêt retient que si le contrat de travail stipule la mise à la disposition du salarié d'un véhicule et qu'il s'agit d'un avantage en nature dont la valeur sera ajoutée à sa rémunération brute annuelle, il ne prévoit pas le règlement par l'employeur de la totalité du carburant consommé aussi bien à titre professionnel qu'à titre privé, que toutefois jusqu'en janvier 2009 et durant cinq ans et dix mois, la société a remboursé au salarié tout le carburant acheté, ce qui établit suffisamment la commune intention des parties de la prise en charge de tous les frais de carburant par la société et que c'est à tort que celle-ci a cessé de rembourser celui correspondant à des déplacements privés ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la société avait fait valoir que l'utilisation du véhicule mis à la disposition du salarié pour des déplacements personnels n'était qu'une tolérance, que les notes de frais devaient comporter le nombre de kilomètres effectués et le carburant correspondant et qu'elle avait rappelé au salarié que la mise à disposition d'un véhicule ne prévoyait pas la prise en charge des frais de carburant exposés pour ses déplacements personnels, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé l'existence d'un engagement de l'employeur à consentir un tel avantage en nature, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Manuplast à payer M. X... une somme de 911 euros à titre de rappel de salaires, l'arrêt rendu le 11 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Manuplast, demanderesses aux pourvois n° S 13-15.63 et U 13-26.335.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué du 1er mars 2013 d'AVOIR reçu Monsieur X... en son contredit,
AUX MOTIFS QUE la SA Manuplast soutient que le contredit serait irrecevable car tardif. En application de l'article 82 du Code de procédure civile, le contredit doit être remis au greffe de la juridiction qui a rendu la décision dans les 15 jours de cette décision. M. X... ne conteste pas avoir été avisé de la date du prononcé de la décision. Ce délai a donc commencé à courir, en application de l'article 641 du Code de procédure civile, le lendemain du jour où cette décision a été rendue, soit le 15/5/12 et expirait normalement le 29/5/12 à 24H, en application de l'article 642 du Code de procédure civile. En l'espèce, par ordonnance du premier président de la cour d'appel, le greffe du conseil de prud'hommes d'Argentan était « exceptionnellement fermé au public » notamment le mardi 29/5/12 ce qui privait le justiciable d'une partie du délai accordé par la loi pour former leur contestation. Le délai s'est donc trouvé prorogé au 30/5/12, premier jour ouvrable suivant et a expiré le 30/5/12 à 24H. Le contredit reçu au greffe le 30/5/12 a donc bien été remis dans le délai prévu à l'article 82 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE le contredit doit, à peine d'irrecevabilité, être remis au secrétariat de la juridiction qui a rendu la décision dans les quinze jours de celle-ci ; qu'il ne peut être formé par télécopie ; que les fins de non-recevoir ont un caractère d'ordre public notamment lorsqu'elles résultent de l'inobservation des délais dans lesquels doivent être exercés les voies de recours ; qu'en l'espèce, il était constant que Monsieur X... avait formé son contredit par télécopie - laquelle n'avait pu saisir valablement la cour d'appel - et par lettre recommandée envoyées toutes deux le 29 mai 2012, dernier jour du délai de contredit ; qu'en retenant, pour rejeter la fin de non-recevoir d'ordre public invoquée par l'exposante, que la fermeture au public du greffe du conseil de prud'hommes d'Argentan le 29 mai 2012 avait privé le justiciable d'une partie du délai accordé par la loi pour former sa contestation pour en déduire que le délai devait être prorogé au 30 mai 2012, quand une lettre envoyée le 29 mai 2012 n'aurait pu, même si le greffe avait été ouvert, être reçue ce jour là, de sorte que l'auteur du recours n'avait été privé d'aucun délai par sa fermeture, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles 82 et 125 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué du 1er mars 2013 d'AVOIR reçu Monsieur X... en son contredit et évoqué le fond,
AUX MOTIFS QU'un contrat de travail a été signé entre les parties. Il appartient donc à la SA Manuplast qui conteste la réalité de ce contrat de travail d'en démontrer le caractère fictif. La SA Manuplast fait valoir que M. X... utilisait le titre de directeur général et qu'il était bien, de fait, mandataire social comme en atteste sa rémunération (la plus importante de l'entreprise), ses attributions (présidence du CHSCT), représentation de l'entreprise devant le conseil de prud'hommes) et l'absence de lien de subordination (pas de comptes-rendus au président du conseil d'administration, signature conjointe de courriers avec 'lui, absence de directives et de sanctions, pas d'entretien d'évaluation). Il convient d'examiner ces différents points ainsi que ceux avancés par M. X.... La classification de M. X... ne le plaçait pas au sommet de la hiérarchie puisqu'il était classé au coefficient 900 et non au coefficient 940, celui des cadres dirigeants; toutefois, sa rémunération a, en 2008, effectivement été la plus importante de l'entreprise (86448 € selon le relevé des frais fiscaux généraux), la seconde rémunération de l'entreprise étant celle du salarié chargé du développement commercial (78331 €). Il est constant que M. X..., embauché comme "directeur exécutif', a utilisé l'appellation de "directeur général". Néanmoins, il n'avait aucun mandat social, comme le précise d'ailleurs son contrat de travail et il n'était pas actionnaire de la société; en outre, il affirme sans être contesté qu'il ne participait pas au conseil d'administration ni même au comité directeur de l'entreprise. Son contrat de travail précise qu'il ne peut engager la société pour des actes d'administration sauf ceux pour lesquels il a reçu un mandat exprès du président. La SA Manuplast n'établit pas que M. X... aurait méconnu cette clause de son contrat de travail. Elle n'établit d'ailleurs avoir donné délégation à M. X... que pour la représenter une seule fois devant le conseil de prud'hommes. M. X... aurait également reçu délégation, selon ses propres conclusions, pour de petites opérations à la poste et la SA Manuplast établit que M. X... présidait le CHSCT, ce qui suppose effectivement une délégation au moins tacite du président du conseil d'administration. Honnis ces délégations ponctuelles, M. X... n'avait pas de délégation du président du conseil d'administration, M. Michel Y.... Ainsi, alors que son contrat de travail prévoyait la possibilité pour M. X..., avec l'aval du président du conseil d'administration, de procéder à des engagements financiers à des investissements, à des embauches ou des licenciements, il n'est ni établi ni même soutenu que M. X... aurait exercé ces pouvoirs, a fortiori sans l'aval exigé dans son contrat de travail. Le fait que M. X... ait fait co-signer certains courriers par le président du conseil d'administration, M. Michel Y... ne le met pas pour autant au même rang que ce dernier. Une co-signature a en effet seulement pour but d'accroître la solennité d'un courrier en adjoignant à la signature du subalterne celle de son supérieur. Ses fonctions énumérées au contrat de travail sont des fonctions techniques: encadrement du personnel, relance de la démarche qualité, définition de la politique commerciale et relance de la dynamique commerciale, mise en place d'outils de pilotage avec la dimension prévisionnelle de l'établissement et suivi des prix de revient. La SA Manuplast n'établit pas que M. X... aurait outrepassé ses fonctions pour s'immiscer dans la direction de l'entreprise. Au demeurant, dans deux courriers des 26/1 et 9/3/09, M. Michel Y... écrit à M. X... "Vos fonctions en tant que directeur sont demeurées identiques depuis lors pour l'essentiel :" (Lettre du 26/1) et "En ce qui concerne votre fonction dans l'entreprise (.. ) vous n'avez jamais exercé les fonctions de directeur général ... ". L'ensemble de ces éléments établissent suffisamment que M. X... n'a pas exercé une fonction de dirigeant de fait (ou selon la terminologie de la SA Manuplast de "mandataire social de fait"). Il pourrait toutefois, à défaut d'avoir dirigé la société, avoir exercé ses fonctions de direction technique dans une indépendance telle qu'elle serait incompatible avec le lien de subordination caractérisant un contrat de travail. Il convient de souligner que M. X... occupait un poste qui le plaçait sous la seule hiérarchie du président du conseil d'administration ou du conseil d'administration lui - même, ce qui, de fait, restreint le nombre de directives qu'il pouvait recevoir. La SA Manuplast soutient qu'il n'en recevait pas. Toutefois, M. X... justifie qu'il était parmi les destinataires de la note de service relatif aux modalités à suivre et documents à l'emplir pour demander une autorisation d'absence. En outre, le président du conseil d'administration l'a informé en janvier 2009 que désormais ses frais de déplacement personnel ne seraient plus pris en charge par la société. Ces deux notes caractérisent l'exercice effectif d'un pouvoir de direction de même que l'injonction faite à M. X... de cesser d'utiliser le titre de "directeur général". Les éléments avancés par la SA Manuplast pour contester l'existence d'un lien de subordination sont peu probants. Les entretiens annuels d'évaluation ont été mis en place à compter du 11/12/08. Moins de six mois plus tard, au moment où M. X... a été placé en arrêt maladie (3/6/09) - cet arrêt s'étant poursuivi jusqu'à son licenciement- il n'avait pas été évalué. La SA Manuplast ne justifie toutefois pas du nombre de salariés, notamment parmi les cadres de l'entreprise, qui avaient déjà été évalués à cette date. En conséquence, cette absence d'évaluation n'est pas significative. Estimer a posteriori, dans le cadre de conclusions, que le comportement de M. X... (avoir un accident responsable avec le véhicule de fonction de l'entreprise et omettre d'en avertir l'employeur) aurait justifié une sanction, relève d'une appréciation subjective, insuffisante pour en déduire que l'employeur n'aurait pas exercé son pouvoir de sanction à raison de l'absence de lien de subordination, comme le soutient la SA Manuplast. Il est constant que M. X... n'a pas adressé de comptes-rendus de son activité à M. Y.... Toutefois, M. X... indique, sans être contesté, que leurs bureaux étaient contigus et communiquants et que leurs échanges étaient constants. Les quelques courriels produits attestent de la réalité de ces échanges. Les suggestions faites par M. X... ou le fait d'adresser à tous -y compris au président du conseil d'administration- une note sur la sécurité- ne saurait permettre d'en déduire qu'il se serait situé dans une position d'égalité - voire de supériorité- à l'égard du président du conseil d'administration. En conséquence, la SA Manuplast à qui cette charge incombait n'établit pas le caractère fictif du contrat de travail. Le conseil de prud'hommes était dès lors compétent pour connaître cette affaire ;
1. ALORS QU'aux termes de l'article 1356 du Code civil, « l'aveu judiciaire est la déclaration que fait en justice la partie ou son fondé de pouvoir spécial. Il fait pleine foi contre celui qui l'a fait. (...) Il ne peut être révoqué, à moins qu'on ne prouve qu'il a été la suite d'une erreur de fait » ; qu'en l'espèce, la société MANUPLAST invoquait sur plusieurs points les aveux judiciaires faits par Monsieur X... dans ses conclusions de première instance, ce dernier ayant notamment admis que la société avait fait appel à lui pour remplacer le directeur général révoqué et qu'il exerçait des tâches de direction générale non prévues par son contrat de travail (stratégie/veille marketing, relations/réseau/lobbying auprès d'organismes extérieurs, juridique/contractuel et tâches occasionnelles spécifiques telles que la gestion des crises dans les relations clients ou fournisseurs) (conclusions de l'exposante aux fins de rejet du contredit, p. 11-12, 14, 19-20) ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces aveux judiciaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1356 du Code civil ;
2. ALORS QUE le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Monsieur X... n'avait pas adressé de comptes-rendus au PDG, n'avait pas été évalué et qu'il présidait le CHSCT ; qu'en se bornant à relever que Monsieur X... avait été parmi les destinataires de la note de service relative aux modalités à suivre et documents à remplir pour demander une autorisation d'absence, que le président du conseil d'administration l'avait informé en janvier 2009 que désormais ses frais de déplacement personnel ne seraient plus pris en charge par la société et lui avait fait injonction de cesser d'utiliser le titre de "directeur général" sans relever aucun exemple d'exercice du pouvoir disciplinaire et en particulier sans s'expliquer sur la circonstance que la persistance de Monsieur X... à utiliser le titre de directeur général n'avait entraîné aucune sanction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
3. ALORS en outre QUE l'exposante soulignait que la note relative aux autorisations d'absences avait également été adressée à Monsieur Martin-Pierre Y..., directeur général délégué statutaire de sorte que cette note, ne prévoyant au demeurant aucune sanction en cas d'inobservation, ne pouvait établir un quelconque lien de subordination (conclusions de l'exposante aux fins de rejet du contredit, p. 22) ; qu'en se fondant sur cette note, sans s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
4. ALORS QUE la société MANUPLAST indiquait que selon la note d'information de décembre 2008 concernant la mise en place d'entretiens individuels d'évaluation, ces entretiens devaient avoir lieu le mois anniversaire du contrat d'embauche de sorte que Monsieur X..., dont le contrat de travail apparent avait été signé en février 2003, aurait dû avoir un entretien d'évaluation en février 2009 (conclusions de l'exposante aux fins de rejet du contredit, p. 23) ; qu'en affirmant que cette absence d'évaluation n'était pas significative au prétexte inopérant que les entretiens d'évaluations avaient été mis en place à compter du 11 décembre 2008, que Monsieur X... avait été mis en arrêt maladie en juin 2009 et n'avait pas ensuite repris le travail, et que la société ne justifiait pas du nombre de salariés qui avait déjà été évalués à cette date, sans s'expliquer sur la circonstance que l'entretien, s'il avait dû avoir lieu, se serait tenu avant le début de l'arrêt maladie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
5. ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en affirmant que Monsieur X... indiquait sans être contesté avoir eu des échanges constants avec le PDG Monsieur Y..., leurs bureaux étant contigus et communiquants, quand l'exposante faisait valoir que le PDG, compte tenu de ses mandats externes, était souvent absent (conclusions aux fins de rejet du contredit, p. 22), la cour d'appel a dénaturé ses conclusions en violation de l'article 4 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué du 11 octobre 2013 d'AVOIR condamné la société MANUPLAST à payer à M. X... les sommes de 54.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE M. X... a été licencié à raisons de la "désorganisation de l'entreprise résultant de (son) absence prolongée et (de) l'absence de reprise prévisible" et de "la nécessité de pourvoir à (son) remplacement définitif". M. X... était directeur de la SA Manuplast, entreprise employant 90 salariés. Le contrat de travail énumère ainsi ses fonctions: encadrement du personnel, relance de la démarche qualité, définition de la politique commerciale et relance de la dynamique commerciale, mise en place d'outils de pilotage avec la dimension prévisionnelle de l'établissement et suivi des prix de revient. Lors de l'entretien préalable, il a été précisé qu'il était notamment chargé d'élaborer des formules de révision des prix et de décomposer ces prix en fonction de grilles d'analyse variant selon chaque client, d'examiner et de rédiger des contrats, de suivre et de prospecter le marché de l'automobile prioritaire pour l'entreprise. La SA Manuplast indique que pendant son absence ses tâches essentielles ont été réparties entre trois salariés mais que cette solution ne pouvait perdurer à raison de la charge de travail supplémentaire induite pour ces personnes et parce que certaines tâches restaient en déshérence. Il est constant que M. X... a été sollicité à maintes reprises pendant son arrêt maladie notamment en juin 2010 ("par téléphone (...) pour (lui) demander aussi bien des précisions ou des avis (dossiers clients ou autres .. .)" et lui "faire parvenir des documents ou fichiers"), d'ailleurs écrit-il "j'ai fait un transfert d'appel permanent de mon téléphone portable professionnel sur mon portable personnel qui est allumé 24h/24h", il a également régulièrement jusqu'en juin 2010 consulté sa boîte mail professionnelle. Le poste de direction qu'occupait M. X... ne pouvait durablement être pris en charge par trois salariés en plus de leurs propres attributions. Du reste, la nécessité où se trouvait la SA Manuplast de solliciter M. X... malgré son arrêt maladie, comme en atteste le courrier adressé par M. X... à son employeur en juillet 2010 cité ci-dessus, témoigne de la désorganisation qu'entraînait l'absence prolongée de M. X.... Il n'existait au moment du licenciement aucune perspective de reprise prochaine d'activité. Si M. X... a évoqué la possibilité d'un mi-temps thérapeutique aucune démarche concrète n'avait été faite en ce sens au moment du licenciement - M. X... était d'ailleurs encore en arrêt maladie le 31/12/11 (soit plus de 14 mois après son licenciement)- . Pour que le licenciement d'un salarié malade soit fondé, il faut que l'employeur remplace effectivement et définitivement le salarié malade qu'il a licencié. La SA Manuplast indique avoir immédiatement après le licenciement remplacé M. X... par M Martin-Pierre Y..., fils du président du conseil d'administration, qui était précédemment directeur industriel et avoir embauché comme directeur industriel M. Z.... La société, a effectivement conclu avec M. M-P Y..., le 1/10, date de la lettre de licenciement un avenant aux termes duquel ce dernier était promu directeur exécutif en remplacement de M. X.... Les fonctions énumérées au contrat correspondent exactement à celles de M. X.... Le 1/10, M. Michel Y..., a établi, à destination de M. Z..., une lettre d'engagement au poste de directeur industriel en lui demandant la date à laquelle il comptait commencer ses fonctions. Cette lettre a été remise en mains propres au destinataire. Par lettre en réponse datée du 12/10/10 - également remise en mains propres - M. Z... a accepté cette lettre d'engagement en informant la société qu'il ne pourrait prendre son poste que fin avril 2011. Un contrat de travail entre les parties a été établi le 26/4/11 et une déclaration d'embauche a été faite à cette même date. Le 6/5/11, par lettre remise en mains propres, M. Z... a rompu la période d'essai. La SA Manuplast ne justifie pas avoir ensuite remplacé ou même cherché à remplacer M. Z.... M. M-P Y... n'a donc jamais été effectivement remplacé à son poste. Le contrat de travail et les échanges de lettres, toujours remises en mains propres et donc sans date certaine entre M. M. Y... et M. Z... sont les seules traces de l'existence d'une relation de travail. Il n'est d'ailleurs pas justifié que M. Z... aurait, pendant les 8 jours où il est censé avoir travaillé fin avril, pour la SA Manuplast, fourni une quelconque prestation de travail. Dès lors, aucun salarié n'ayant effectivement remplacé M. M-P Y..., qui a occupé l'emploi resté vacant après le licenciement de M. X..., la réalité du remplacement total et définitif de M. X... n'est pas établie. Le licenciement de M. X... est en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse. En réparation du préjudice qui lui a ainsi été causé, M. X... est bien fondé à obtenir des dommages et intérêts au moins égaux à ses six derniers mois salaire (31 063,56¿). M. X... a été placé en arrêt maladie jusqu'au 31/12/11 et a pris retraite courant 2012 sans que la date n'en soit précisée. Il ne justifie pas en toute hypothèse avoir perçu des allocations de chômage depuis son licenciement. Il indique avoir été contraint de prendre sa retraite de manière anticipée avant ses 65 ans et avoir ainsi perdu, jusqu'au 31/12/13, la différence de revenu entre son salaire et le montant sa retraite. En outre, ayant cotisé moins longtemps le montant de sa retraite s'en trouve minoré. Compte tenu de ces renseignements, des autres éléments connus: son âge (61 ans et 10 mois) son ancienneté (7 ans et 8 mois) son salaire (6040 €) au moment du licenciement, il lui sera accordé 54.000 € de dommages et intérêts ;
1. ALORS QUE la cassation à intervenir de l'arrêt du 1er mars 2013 sur le pourvoi n° S 13-15063 ou sur l'un des deux premiers moyens du présent pourvoi entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt du 11 octobre 2013 notamment sur les chef de dispositif visés par le moyen, par application de l'article 625 du Code de procédure civile ;
2. ALORS en tout état de cause QUE l'article L. 1132-1 du Code du travail faisant interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap ne s'oppose pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié, lorsque ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder au remplacement définitif par l'engagement d'un autre salarié ; que constitue une promesse d'embauche, valant contrat de travail, l'écrit qui précise l'emploi proposé et la date d'entrée en fonctions dès lors qu'il a fait l'objet d'une acceptation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le jour de l'envoi de la lettre de licenciement, le 1er octobre 2010, la société MANUPLAST avait conclu avec M. Martin-Pierre Y... ¿ jusque là directeur industriel au sein de l'entreprise ¿ un avenant le nommant au poste de M. X... et que le même jour, la société avait établi une lettre d'engagement à destination de M. Z..., ce dernier ayant accepté son embauche le 12 octobre 2010 ; que cette promesse d'embauche, établie le jour de la notification du licenciement et acceptée moins de deux semaines après valait engagement définitif du M. Z... et établissait à lui seul le remplacement définitif de M. X..., peu important que M. Z... ait ensuite rompu ce contrat en période d'essai ; qu'en retenant que M. Martin-Pierre Y... n'avait pas été remplacé à son poste de directeur industriel au prétexte inopérant que M. Z... avait rompu la période d'essai le 6 mai 2011, et que la société ne justifiait pas avoir ensuite remplacé ou cherché à remplacer M. Z..., la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 1232-1 du Code du travail et l'article 1134 du Code civil ;
3. ALORS à tout le moins QUE l'article L. 1132-1 du Code du travail faisant interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap ne s'oppose pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié, lorsque ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder au remplacement définitif par l'engagement d'un autre salarié ; que la réalité et le sérieux du motif de licenciement s'apprécient au jour où la décision de rompre le contrat de travail est prise par l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le jour de l'envoi de la lettre de licenciement, le 1er octobre 2010, la société MANUPLAST avait conclu avec M. Martin-Pierre Y... - jusque là directeur industriel au sein de l'entreprise - un avenant le nommant au poste de M. X... et que le même jour, la société avait établi une lettre d'engagement à destination de M. Z..., ce dernier ayant accepté son embauche le 12 octobre 2010 et informé la société qu'il pouvait prendre ses fonctions fin avril 2011, et que, enfin, le 26 avril 2011 un contrat de travail avait été établi entre la société MANUPLAST et M. Z..., une déclaration d'embauche étant effectuée (arrêt, p. 5, § 9 à p. 6, § 1) ; qu'en retenant que M. Martin-Pierre Y... n'avait pas été remplacé à son poste de directeur industriel au prétexte inopérant que M. Z... avait rompu la période d'essai le 6 mai 2011, et que la société ne justifiait pas avoir ensuite remplacé ou cherché à remplacer M. Z..., la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article L. 1232-1 du Code du travail ;
4. ALORS de même QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que pour établir le remplacement de M. Y... par M. Z..., la société MANUPLAST produisait les lettres d'engagement et d'acceptation échangées entre les parties, le contrat de travail conclu entre elles, et enfin la déclaration d'embauche de M. Z... ; qu'en affirmant ensuite que les lettres et le contrat de travail étaient « les seules traces » de l'existence d'un contrat de travail, la cour d'appel, qui s'est contredite en relevant l'existence d'une déclaration d'embauche tout en niant l'existence de toute trace du contrat de travail autre que celui-ci et que les lettres échangées entre la société MANUPLAST et M. Z..., a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
5. ALORS en outre et en tout état de cause QUE l'établissement d'un contrat de travail écrit suivi d'une déclaration d'embauche fait présumer l'existence d'un contrat de travail jusqu'à preuve contraire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société MANUPLAST avait, le 1er octobre 2010, établi une lettre d'engagement de M. Z... en remplacement de M. Y..., acceptée par M. Z... par lettre datée du 12 octobre 2010 informant la société MANUPLAST d'une prise de poste fin avril 2011 ; que la cour d'appel a encore relevé qu'un contrat de travail avait été établi entre la société MANUPLAST et M. Z... le 26 avril 2011, qu'une déclaration d'embauche avait été faite à cette même date et que, le 6 mai 2011, M. Z... avait rompu la période d'essai ; qu'en reprochant à la société MANUPLAST de ne pas établir, d'une part, que le contrat de travail et les lettres échangées avaient date certaine pour avoir été remis en mains propres, d'autre part, que M. Z... avait effectivement exercé ses fonctions jusqu'à la rupture de la période d'essai ni, enfin, qu'elle l'avait ensuite remplacé ou avait cherché à le faire, quand l'établissement du contrat de travail suivi d'une déclaration d'embauche emportait présomption de l'existence d'un contrat de travail qu'il appartenait à monsieur X... de détruire, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
6. ALORS enfin QUE dans ses conclusions oralement soutenues, M. X... ne soutenait pas que la société aurait omis de chercher un remplaçant à M. Z..., et ne contestait ni la réalité du contrat de travail de M. Z... ni celle de sa prestation entre son embauche et son départ, se contenant de soutenir que M. Martin-Pierre Y... n'aurait pas abandonné dès le 1er octobre 2010 son poste de directeur industriel, et de se prévaloir de la démission en période d'essai de M. Z... pour conclure à l'absence de remplacement définitif (conclusions d'appel, p. 14) ; qu'en retenant à l'appui de sa décision, d'une part, que la société ne justifiait pas avoir remplacé ou cherché à remplacer M. Z... après son départ et d'autre part, que le contrat de travail et les échanges de lettres, toujours remises en mains propres et donc sans date certaine entre M. M. Y... et M. Z... sont les seules traces de l'existence d'une relation de travail et qu'il n'est d'ailleurs pas justifié que M. Z... aurait, pendant les 8 jours où il est censé avoir travaillé fin avril fourni une quelconque prestation de travail, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué du 11 octobre 2013 d'AVOIR condamné la société MANUPLAST à payer à M. X... la somme de 911 € à titre de rappel de salaire,
AUX MOTIFS QUE Le contrat de travail stipule que "sera mis à disposition de M. X... une voiture (...) Ces éléments constituent des avantages en nature dont la valeur sera ajoutée à sa rémunération brute annuelle". Il ne précise pas si cette mise à disposition, qui implique, puisqu'elle constitue un avantage en nature, l'usage privé du véhicule, inclut une prise en charge par l'employeur de tout le carburant brûlé par cette voiture, aussi bien à titre professionnel qu'à titre privé. Il est toutefois constant que, jusqu'en janvier 2009, la SA Manuplast a remboursé à M. X... tout le carburant acheté et qu'aucun avantage en nature n'a pas été mentionné sur les bulletins de paie, au titre de l'usage du véhicule. Le 26/1/09, la SA Manuplast a informé M. X... que "Cette mise à disposition ne prévoit aucunement la prise en charge par l'entreprise des déplacements personnels. Les déplacements à titre personnel (...) n'ont pas à être pris en charge par l'entreprise. L'utilisation du véhicule dans ces cas n'est qu'une tolérance et un avantage dont personne d'autre ne bénéficie dans l'entreprise. En conséquence, les notes de frais doivent comporter le nombre de kilomètres effectués pour le compte de l'entreprise et le carburant correspondant" À compter de cette date, la SA Manuplast a cessé de rembourser à M. X... le carburant correspondant à des trajets privés. M. X... a, par courrier du 25/2/09, protesté et réclamé la "régularisation" de la somme déduite pour la période de mai à décembre 2008. Un avantage en nature étant une composante du salaire, l'employeur ne peut valablement le modifier sans l'accord du salarié. En l'espèce, l'employeur a, pendant cinq ans et dix mois, en application de la clause énoncée ci-dessus pris en charge tous les frais de carburant, ce qui établit suffisamment que telle était la commune intention des parties. En cessant, en janvier 2009, de les prendre en charge, il a, à tort, rogné un avantage contractuellement prévu. M. X... est donc bien fondé à obtenir le remboursement de ses frais personnels de carburant. Le montant réclamé à ce titre (911 €) n'étant pas contesté, ne serait-ce qu'à titre subsidiaire par la SA Manuplast sera retenu ;
1. ALORS QUE la cassation à intervenir de l'arrêt du 1er mars 2013 sur le pourvoi n° S 13-15063 ou sur l'un des deux premiers moyens du présent pourvoi entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt du 11 octobre 2013, et notamment en ce qu'il a condamné l'exposante à un rappel de salaire, par application de l'article 625 du Code de procédure civile ;
2. ALORS QUE le caractère contractuel d'un avantage consenti par un employeur à un salarié ne peut résulter d'une pratique serait-elle prolongée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que si le contrat de travail prévoyait la mise à disposition d'un véhicule, il ne prévoyait pas la prise en charge de tout le carburant brûlé par cette voiture aussi bien à titre professionnel qu'à titre privé ; que l'exposante soulignait que l'article XII du contrat de travail indiquait que les frais de déplacement engagés par M. X... à l'occasion de l'exercice de ses fonctions lui seraient remboursés sur justificatif (conclusions d'appel, p. 14) ; qu'en déduisant la commune intention des parties de voir prendre en charge par l'employeur le carburant utilisé à titre privé par M. X... de ce que l'employeur avait, pendant cinq ans et dix mois, en application de la clause énoncée ci-dessus pris en charge tous les frais de carburant, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-15063;13-26335
Date de la décision : 18/03/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 11 octobre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mar. 2015, pourvoi n°13-15063;13-26335


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.15063
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