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13/05/2015 | FRANCE | N°13-28918

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 mai 2015, 13-28918


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 31 octobre 2013), que M. X... a été engagé le 12 octobre 2009 en qualité de directeur administratif, commercial et marketing selon contrat de travail écrit par la société Ecobois services, dont le gérant est M. Y... ; que la société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Versailles le 18 octobre 2011, la société SMJ, en la personne de M. Z..., étant désignée en qualité de liquidateur ; que, licen

cié le 10 septembre 2011, M. X... a saisi la juridiction prud'homale ;
Att...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 31 octobre 2013), que M. X... a été engagé le 12 octobre 2009 en qualité de directeur administratif, commercial et marketing selon contrat de travail écrit par la société Ecobois services, dont le gérant est M. Y... ; que la société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Versailles le 18 octobre 2011, la société SMJ, en la personne de M. Z..., étant désignée en qualité de liquidateur ; que, licencié le 10 septembre 2011, M. X... a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que le mandataire liquidateur fait grief à l'arrêt de dire que M. X... avait la qualité de salarié et de fixer en conséquence diverses créances au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecobois services, alors, selon le moyen :
1°/ qu'a la qualité de dirigeant de fait, exclusive de tout contrat de travail, celui qui s'immisce dans des fonctions déterminantes pour la direction, la gestion ou l'administration d'une société ; qu'en concluant à l'existence d'un contrat de travail, pour cela que si M. X... exerçait ses fonctions de directeur administratif et financier de manière extensive et donnait l'impression aux salariés de gérer la société à la place de son gérant M. Y..., ce dernier n'avait pas pour autant perdu le contrôle de la gestion menée par son directeur auquel il n'avait pas délégué de pouvoir de signature et était informé de cette gestion par les salariés et le conseiller en gestion de patrimoine, tout en constatant que M. X... se comportait comme le gérant de la société, quant à la gestion du personnel (recrutement, détermination des salaires et échelons, notes de services, directives aux employés, direction des réunions de personnel, pouvoir de sanction), quant aux relations commerciales (négociation des prix avec les fournisseurs, relations avec les clients), quant à la gestion financière et comptable de la société (unique interlocuteur de l'expert comptable et du conseiller en gestion de patrimoine, relations avec les banques, gestion des comptes bancaires, relations avec les sociétés d'affacturage), qu'il avait fait embaucher son épouse aux lieu et place de Mme Y..., qu'il avait favorisé la prise de participation par la société Ecobois services au sein de la société Créajardin dont le capital était détenu par son frère, qu'il agissait dans son propre intérêt, qu'il avait fait réaliser des travaux chez lui par des salariés de l'entreprise et qu'il était détenteur d'une carte de paiement à son nom pour le compte de l'entreprise, ce dont il s'évinçait que M. X... avait la qualité de dirigeant de fait, exclusive d'un contrat de travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en jugeant que l'absence de lien de subordination n'était pas établie, bien que M. X... exerçât ses fonctions de directeur administratif et financier de manière extensive et donnât l'impression aux salariés de gérer la société à la place de son gérant, M. Y..., au motif que ce dernier n'avait pas perdu le contrôle de la gestion menée par son directeur auquel il n'avait pas délégué de pouvoir de signature et qu'il était informé de cette gestion par les salariés et par le conseiller en gestion de patrimoine, sans préciser en quoi M. X... exécutait son travail sous l'autorité de M. Y..., qui avait le pouvoir de lui donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et sanctionner les manquements de son subordonné, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve ;
Et attendu qu'ayant constaté qu'un contrat de travail écrit avait été conclu entre les parties, et, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, relevé que l'intéressé ne bénéficiait d'aucune délégation de signature relativement aux chèques, aux demandes de prêt et aux contrats de travail des salariés, et que, s'il exerçait ses fonctions de directeur administratif et financier de manière extensive, le gérant de droit n'avait pas perdu pour autant le contrôle de la gestion menée par son directeur auquel il n'avait pas délégué de pouvoir de signature, étant en outre informé de cette gestion tant par ses salariés que par les interlocuteurs directs de la société, faisant ainsi ressortir que la preuve de l'absence d'un lien de subordination n'était pas établie, la cour d'appel a pu décider que l'intéressé n'était pas le dirigeant de fait de l'entreprise ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société SMJ, ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société SMJ, ès qualités, à payer à M. X... la somme de 2 700 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille quinze et signé par Mme Vallée, président, et Mme Piquot, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de la décision.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils pour la société SMJ, ès qualités,
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir jugé que Monsieur X... avait bien la qualité de salarié de la société ECOBOIS SERVICES, et d'avoir, en conséquence, fixé diverses créances au passif de la liquidation judiciaire de la société ECOBOIS SERVICES,
Aux motifs propres que « un contrat de travail écrit ayant été conclu entre les parties le 12 juin 2010, des bulletins de paie ayant été établis et une procédure de licenciement diligentée, il existe un contrat de travail apparent entre M. Xavier X... et la société ECOBOIS SERVICES ; qu'aussi, il incombe au liquidateur de la société, qui conteste la qualité de salarié de M. X..., de rapporter la preuve qu'en réalité, il n'existait pas de lien de subordination entre ce dernier et M. Y..., représentant de la société, étant rappelé que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que pour faire cette preuve, le liquidateur produit divers témoignages écrits émanant :- d'une part, de salariés de la société ECOBOIS SERVICES : Mme Solène A..., secrétaire ; M. Thierry B..., technicien des espaces verts ; M. Loïc C..., conducteur de travaux ; M. Teddy D..., ouvrier paysagiste ; M. Thierry E..., jardinier ; M. Yohan F..., ouvrier paysagiste ; M. Gilbert G..., chauffeur-chef d'équipe ;- d'autre part de tiers à la société : M. Fabien H..., expert comptable ; M. Patrice I..., agent de la compagnie d'assurance ALLIANZ ; M. Steeve L..., conseiller de patrimoine indépendant ; que tous ces témoins exposent que M. X... outrepassait ses fonctions de directeur administratif et financier et se comportait comme le gérant de la société : il ouvrait le courrier, recrutait le personnel définissait les salaires et les échelons, rédigeait les notes de services, donnait des directives aux employés, dirigeait les réunions de personnel, appliquait les sanctions, négociait les prix avec les fournisseurs, prenait en charge les relations avec les banques, les sociétés d'affacturage, l'assureur, les litiges clients, la société d'expertise comptable, gérait seul les comptes bancaires, faisait même réaliser des travaux chez lui par les salariés de l'entreprise, imposait ses règles ; que l'expert comptable indique qu'il était son unique interlocuteur et qu'il ne transmettait pas à M Y... ses demandes et recommandations, si bien qu'il a décidé d'interpeller directement le gérant pour lui signaler que M. X... agissait avant tout dans son propre intérêt et non celui de la société ; que la société ALIANZ écrit que le dossier d'assurance de la société n'était géré que par M. X..., et ce depuis le mois d'octobre 2009 ; que le conseiller en gestion de patrimoine explique que M. X... s'était imposé comme interlocuteur au niveau des affaires de la société, qu'il outrepassait son rôle de directeur administratif et financier, intervenant directement pour obtenir des conseils et négocier avec les banques de l'escompte et des découverts, et même pour trouver un fonds d'investissement, manifestant l'envie de faire grandir la société trop vite en prenant des risques ; qu'à ces témoignages, le liquidateur ajoute les faits suivants : M. X... a fait embaucher sa femme en qualité d'assistante de direction aux lieu et place de Mme Y... ; il a favorisé la prise de participation par ECOBOIS SERVICES au sein de la société CREAJARDIN dont le capital était détenu par son frère Jean-Luc X... ; que s'il ne disposait pas de la signature bancaire, il était en revanche détenteur d'une carte de paiement à son nom sur le compte de l'entreprise ; que M. X... produit quant à lui le témoignage de Mme Stella J..., comptable, qui explique qu'elle a refusé de témoigner à l'encontre de M. Xavier X... lorsqu'elle s'est aperçue que M. Y... lui dictait des faits ne correspondant pas à la réalité de ce qu'elle avait constaté dans l'exercice de ses fonctions, estimant quant à elle que M. Y... était bien le véritable patron, précisant que tous les documents comptables étaient signés par M. Y... ; que dans ses écritures, M. X... expose, sans être contredit par le liquidateur de la société ECOBOIS SERVICES, qu'il ne bénéficiait d'aucune délégation de signature relativement aux chèques, aux demandes de prêts et aux contrats de travail des salariés, et qu'il informait M. Y... de l'avancement de ses missions par messages électroniques ; qu'à cet égard, la secrétaire de Mme A... précise que M. Y... ne savait pas utiliser sa messagerie informatique et que les salariés passaient par sa propre messagerie pour communiquer avec M. Y..., de peur que les messages interceptés par Xavier X... ne soient pas transmis à M. Y... ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que si M. X... exerçait ses fonctions de directeur administratif et financier de manière extensive et donnait l'impression aux salariés de gérer la société à la place de son gérant M. Y..., ce dernier n'avait pas pour autant perdu le contrôle de la gestion menée par son directeur auquel il n'avait pas délégué de pouvoir de signature, étant en outre informé de cette gestion tant par ses salariés, qui pouvaient communiquer avec lui via la messagerie informatique avec la secrétaire, que par les tiers interlocuteurs directs de la société, notamment le conseiller en gestion de patrimoine qui indique avoir mis en garde M. Y... contre la gestion de son directeur ; qu'il y a donc lieu de conclure à l'existence d'un contrat de travail entre la société ECOBOIS SERVICES et M. X..., l'absence d'un lien de subordination n'étant pas établie » (arrêt pages 4 et 5) ;
Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges que « la SARL ECOBOIS SERVICES a été créée en mai 2001 et que la gérant était Monsieur Y... dès l'origine ; que Monsieur Xavier X... a été engagé le 12 octobre 2009 par Monsieur Y... en qualité de directeur administratif, commercial et marketing, position C2 ; que Monsieur Xavier X... n'avait le pouvoir ni de signature sur les comptes bancaires, ni de contracter les contrats de travail ou de prononcer des sanctions envers le personnel, ce n'est que Monsieur Y... en tant que gérant qui appose sa signature ; que divers témoignages produits par la SELARL SMJ nomment Monsieur Damien X... pour divers agissements sur la gestion ; or, ce dernier est le frère de Monsieur Xavier X... demandeur à l'instance et possède des parts dans le capital de la SARL ECOBOIS SERVICES (attestations de Monsieur K... Anthony, Mademoiselle A... Solène, Monsieur D... Teddy) ; que Monsieur Xavier X... en qualité de cadre unique de la SARL ECOBOIS SERVICE pouvait assister Monsieur Y... le gérant dans les entretiens avec le personnel mais qu'en tout état de cause, c'était le gérant qui prenait les décisions finales ; qu'il y avait bien un lien de subordination entre Monsieur Xavier X... et Monsieur Y... gérant puisqu'il est avéré dans l'attestation de Mademoiselle A... Solène que Monsieur Xavier X... transmettait par mail à Monsieur Y... tous les éléments qu'il avait recueillis pour signature et acceptation du gérant ; que dans ces conditions, le conseil dit que Monsieur Xavier X... avait bien la qualité de salarié au sein de la SARL ECOBOIS SERVICES » (jugement page 4 § 7 à 13) ;
1°) Alors que a la qualité de dirigeant de fait, exclusive de tout contrat de travail, celui qui s'immisce dans des fonctions déterminantes pour la direction, la gestion ou l'administration d'une société ; qu'en concluant à l'existence d'un contrat de travail, pour cela que si Monsieur X... exerçait ses fonctions de directeur administratif et financier de manière extensive et donnait l'impression aux salariés de gérer la société à la place de son gérant Monsieur Y..., ce dernier n'avait pas pour autant perdu le contrôle de la gestion menée par son directeur auquel il n'avait pas délégué de pouvoir de signature et était informé de cette gestion par les salariés et le conseiller en gestion de patrimoine, tout en constatant que Monsieur X... se comportait comme le gérant de la société, quant à la gestion du personnel (recrutement, détermination des salaires et échelons, notes de services, directives aux employés, direction des réunions de personnel, pouvoir de sanction), quant aux relations commerciales (négociation des prix avec les fournisseurs, relations avec les clients), quant à la gestion financière et comptable de la société (unique interlocuteur de l'expert comptable et du conseiller en gestion de patrimoine, relations avec les banques, gestion des comptes bancaires, relations avec les sociétés d'affacturage), qu'il avait fait embaucher son épouse aux lieu et place de Madame Y..., qu'il avait favorisé la prise de participation par la société ECOBOIS SERVICES au sein de la société CRÉAJARDIN dont le capital était détenu par son frère, qu'il agissait dans son propre intérêt, qu'il avait fait réaliser des travaux chez lui par des salariés de l'entreprise et qu'il était détenteur d'une carte de paiement à son nom pour le compte de l'entreprise, ce dont il s'évinçait que Monsieur X... avait la qualité de dirigeant de fait, exclusive d'un contrat de travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°) Alors que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en jugeant que l'absence de lien de subordination n'était pas établie, bien que Monsieur X... exerçât ses fonctions de directeur administratif et financier de manière extensive et donnât l'impression aux salariés de gérer la société à la place de son gérant, Monsieur Y..., au motif que ce dernier n'avait pas perdu le contrôle de la gestion menée par son directeur auquel il n'avait pas délégué de pouvoir de signature et qu'il était informé de cette gestion par les salariés et par le conseiller en gestion de patrimoine, sans préciser en quoi Monsieur X... exécutait son travail sous l'autorité de Monsieur Y..., qui avait le pouvoir de lui donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et sanctionner les manquements de son subordonné, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-28918
Date de la décision : 13/05/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 31 octobre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 mai. 2015, pourvoi n°13-28918


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.28918
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