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09/12/2015 | FRANCE | N°14-25231;14-25232

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 décembre 2015, 14-25231 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité joint les pourvois n° Q 14-25. 231 et R. 14-25. 232 ;
Attendu, selon les jugements attaqués (conseil de prud'hommes de Paris, 8 avril 2014), statuant en dernier ressort, que la direction générale de La Poste a décidé de regrouper l'ensemble des primes et indemnités versées à son personnel sous la forme d'un complément indemnitaire dit " complément poste " en 1993, pour les agents fonctionnaires, puis en 1995 pour les agents contractuels de droit privé, ce complément faisant partie intég

rante de la rémunération de l'ensemble des agents de La Poste ; qu'un ac...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité joint les pourvois n° Q 14-25. 231 et R. 14-25. 232 ;
Attendu, selon les jugements attaqués (conseil de prud'hommes de Paris, 8 avril 2014), statuant en dernier ressort, que la direction générale de La Poste a décidé de regrouper l'ensemble des primes et indemnités versées à son personnel sous la forme d'un complément indemnitaire dit " complément poste " en 1993, pour les agents fonctionnaires, puis en 1995 pour les agents contractuels de droit privé, ce complément faisant partie intégrante de la rémunération de l'ensemble des agents de La Poste ; qu'un accord salarial conclu en 2001 prévoyait que " fin 2003 les compléments poste des agents contractuels de niveau I-2, I-3 et II-1 seront égaux aux montants des compléments poste des fonctionnaires de même niveau " ; que Mmes X... et Y..., agents contractuels de droit privé, soutenant que La Poste n'avait pas respecté ses engagements, ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de rappels de salaire et d'indemnités de congés payés afférentes, sur le fondement du principe d'égalité de traitement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que La Poste fait grief aux jugements d'accueillir leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que constitue une justification objective à une différence de traitement dans l'attribution d'un avantage ou d'un élément de rémunération se substituant à d'autres éléments du salaire, l'obligation, pour l'employeur, de maintenir aux agents alors en fonction le niveau de rémunération acquis au moment de son institution ; qu'en décidant le contraire, le conseil de prud'hommes a violé le principe " à travail égal salaire égal " ;
2°/ que la création et l'évolution du complément poste au sein de La Poste sont le résultat de délibérations, instructions et décisions indivisibles du conseil d'administration et du président de La Poste, les premières, en date du 27 avril et du 3 août 1993, créant le " complément indemnitaire " pour les seuls fonctionnaires, la deuxième, du 25 février 1994, étendant cet élément de rémunération aux personnels non titulaires, la troisième, en date du 9 décembre 1994, l'étendant aux agents contractuels relevant de la convention commune, les dernières (résolution du 25 janvier 1995 et décision du 4 mai 1995), fixant les " règles d'évolution transitoires et permanentes du complément poste " ; qu'il ressort clairement de ces décisions que le complément poste, dont la mise en oeuvre devait être progressive, avait, pour chaque bénéficiaire, " vocation à regrouper les primes et indemnités qui, à la date de son institution, constitu aient un complément de rémunération ¿ totalisées pour leur montant annuel " et qui étaient énumérées en annexes ; que la délibération du 25 janvier 1995 et la décision du 4 mai 1995 ont, pour leur part, défini la " nouvelle composition de la rémunération ", le complément poste rémunérant " le niveau de fonction et tenant compte de la maîtrise du poste " ; que, prévoyant un principe " de convergence et d'évolution du complément poste " par la création de " champs de normalité ", la décision du 4 mai 1995 a expressément précisé : " les compléments poste ont été composés sur la base de primes et indemnités ayant un caractère permanent que percevait chaque agent en septembre 1993 pour la première vague, mars 1994 pour la seconde vague et janvier 1995 pour les agents contractuels. La reclassification des personnels ¿ conjuguée avec le niveau des " compléments poste " résultant de l'ancienne gestion indemnitaire par corps et grade met en évidence le caractère hétérogène des compléments sur un même niveau de fonction " (article 521) ; qu'il résulte de ces dispositions indivisibles que le montant du complément Poste des agents, initialement composé par le regroupement des primes et indemnités perçues lors de sa création, et, donc, par les " avantages individuels acquis " à cette date, auxquels il s'est substitué, dépend de la date de leur recrutement, de leur statut et de leur historique de carrière ; qu'en décidant le contraire, le conseil de prud'hommes a violé les délibérations, instructions et décisions de portée réglementaire susvisées ;
3°/ que si la décision du 4 mai 1995 déclare que l'objet assigné du complément poste est de rémunérer " le niveau de fonction et la maîtrise du poste " (article 2-1), elle n'en précise pas moins, tout aussi expressément, que " les compléments poste ont été composés sur la base de primes et indemnités ayant un caractère permanent que percevait chaque agent en septembre 1993 pour la première vague, mars 1994 pour la seconde vague et janvier 1995 pour les agents contractuels " d'où " ¿ le caractère hétérogène des compléments au sein d'un même niveau de fonction " (article 521) ; qu'en retenant " ¿ qu'il ressort clairement de cette décision que, par définition, le complément poste ne dépend que du niveau de fonction et de la maîtrise du poste et qu'au regard de cet élément de salaire ¿ les agents sont placés dans une situation identique, indépendamment du statut des agents ou de la notion d'avantage individuel acquis de sorte que l'explication objective par des avantages acquis et un historique de carrière distinct des fonctionnaires auquel se compare le demandeur, agent contractuel, n'est pas pertinente pour justifier une différence de montant du complément poste ", le conseil de prud'hommes a violé l'article 521 de la décision de portée réglementaire n° 717 du 4 mai 1995 ;
4°/ que le principe d'égalité de traitement ne s'oppose pas à ce que l'employeur tienne compte des différences de rémunération des agents avant leur intégration dans une nouvelle organisation afin de fixer des règles communes et équitables de rémunération après leur intégration dans cette organisation ; qu'il ressort des délibérations précitées que l'institution du " complément poste " fait partie du processus d'intégration dans les corps de reclassification de La Poste d'agents publics et d'agents de droit privé appartenant auparavant à des corps et à des grades différents et percevant, de ce fait, des primes et des indemnités différentes ; qu'en décidant, dans un premier temps, de maintenir le montant des primes et indemnités versées à ces agents avant leur intégration dans cette nouvelle organisation puis, dans un deuxième temps, de faire évoluer le montant de ces primes et indemnités de manière à ce que les fonctionnaires et les agents de droit privé d'un même corps de reclassification bénéficient d'un complément poste d'un montant équivalent, abstraction faite des évolutions dues aux mérites individuels de chaque agent, La Poste ne s'est pas contredite et n'a pas méconnu le principe d'égalité de traitement ; qu'en retenant à l'appui de sa décision " que La Poste qui expose suivre un plan de convergence du montant des compléments poste à chaque niveau de fonction au travers des " champs de normalité " admet au moins implicitement que sa politique de rémunération vise au respect du principe d'égalité normalement applicable à cet élément de salaire, contredisant dans le même temps la thèse de l'avantage acquis cristallisé dont le montant, par définition, n'est pas soumis à évolution ", le conseil de prud'hommes a violé derechef les décisions susvisées, ensemble le principe d'égalité de traitement ;
5°/ que l'accord du 10 juillet 2001 ne prévoyait l'égalisation du complément poste des agents contractuels des niveaux I. 2, I. 3 et II. 1 avec celui des fonctionnaires de même niveau que pour la fixation des " seuils de recrutement " de cet élément de rémunération et moyennant " une mesure exceptionnelle " permettant de " porter le versement biannuel effectué au second semestre 2003 au niveau de celui effectué pour les fonctionnaires à cette même date " (article 3. 5) ; qu'il ne comportait aucun engagement de La Poste en faveur d'un alignement systématique du complément poste perçu par l'ensemble des fonctionnaires et agents de droit privé de même niveau à compter de cette date ; qu'en déduisant de cette décision l'obligation, pour La Poste, d'aligner pour l'avenir les compléments poste de l'ensemble des agents de droit privé et des fonctionnaires de même niveau, le conseil de prud'hommes a violé, par fausse interprétation, l'article 3. 5 de l'accord salarial du 10 juillet 2001 ;
6°/ que la fixation d'un élément de salaire par les partenaires sociaux dans un accord collectif issu de la négociation annuelle obligatoire s'impose aux parties et au juge prud'homal qui ne saurait le remettre en cause sous couvert d'une méconnaissance du principe d'égalité de traitement ; qu'en l'espèce, les accords collectifs du 10 juillet 2001 et du 8 juillet 2003 avaient admis le processus de convergence progressive des compléments poste des différents agents, fixé ses modalités et les montants de rémunération en résultant ; qu'en remettant en cause les modalités ainsi fixées, le conseil de prud'hommes a violé les articles L. 1242-1 et L. 1242-8 du code du travail ;
Mais attendu que, selon la délibération du 25 janvier 1995 du conseil d'administration de La Poste, les primes et indemnités perçues par les agents de droit public et les agents de droit privé et initialement regroupées au sein d'un complément indemnitaire ont été supprimées et incorporées dans un tout indivisible appelé complément poste constituant désormais, de façon indissociable, l'un des sous-ensembles de la rémunération de base de chaque catégorie de personnel ; que, selon la décision n° 717 du 4 mai 1995 du président du conseil d'administration de La Poste, la rémunération des agents de La Poste se compose désormais de deux éléments, d'une part, le traitement indiciaire pour les fonctionnaires ou le salaire de base pour les agents contractuels, lié au grade et rémunérant l'ancienneté et l'expérience, d'autre part, le complément poste perçu par l'ensemble des agents, qui rétribue le niveau de fonction et tient compte de la maîtrise du poste ; qu'il en résulte que l'employeur n'est pas fondé à justifier une différence de rémunération au titre du complément poste, entre les fonctionnaires et les agents de droit privé de même niveau exerçant les mêmes fonctions, par la nécessité de maintenir au bénéfice des fonctionnaires les primes qui leur étaient versées avant la généralisation, à compter du 1er janvier 1995, du complément poste, lesquelles ont été incorporées dans cet élément de rémunération applicable à l'ensemble du personnel sur le critère de la fonction occupée ;
Et attendu qu'après avoir constaté que La Poste s'était engagée, aux termes de l'accord salarial de 2001 à combler d'ici fin 2003 l'écart existant entre les compléments poste des agents contractuels des niveaux I. 2, I. 3 et II. 1 et ceux perçus par les fonctionnaires de même niveau, le conseil de prud'hommes a relevé, d'abord, que le montant mensuel du complément poste perçu par les salariés, agents de droit privé, était inférieur à celui perçu par des fonctionnaires de même niveau effectuant le même travail, ensuite que La Poste fournissait pour seules explications à cette différence, la nécessité de maintenir les " avantages acquis " par les fonctionnaires avant la généralisation, en 1995 de ce complément indemnitaire à l'ensemble du personnel ainsi qu'un historique de carrière distinct des fonctionnaires, contredisant ainsi le plan de convergence progressive qu'elle avait mis en place pour combler l'écart existant entre les agents de droit privé et les fonctionnaires ; qu'il en a exactement déduit que la différence de traitement n'était justifiée par aucune raison pertinente et que le principe " à travail égal salaire égal " avait été méconnu ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne La Poste aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne La Poste à payer la somme globale de 1 000 euros à Mmes X... et Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société La Poste

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief aux jugements attaqués d'AVOIR condamné La Poste à verser à Mesdames Y... et X..., salariées de droit privé, diverses sommes à titre de rappels de " complément Poste " et de congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QU'" il résulte du principe de l'égalité salariale, dont s'inspirent notamment les articles L. 2261-22. 9, L. 2271-1. 8 et L. 3221-2 du Code du travail, que tout employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale ; que l'identité de situation s'apprécie au regard de l'avantage concerné et qu'en application de l'article 1315 du Code civil, s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe " à travail égal salaire égal " de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence ;
QU'en l'espèce, le demandeur, agent contractuel de droit privé employé par la SA La Poste, établit que certains fonctionnaires effectuant un travail de valeur égale au même niveau de fonction perçoivent chaque mois un " complément Poste " d'un montant plus élevé, ce qui constitue une violation du principe d'égalité ;
QUE la SA La Poste expose que cette différence est issue des circonstances dans lesquelles après son changement de statut, elle a décidé de regrouper dans un " complément indemnitaire " l'ensemble des primes et indemnités versées à son personnel de droit public avant de supprimer définitivement lesdits avantages et d'instituer un complément Poste au bénéfice de tous les agents ; que la défenderesse rappelle que le montant du complément indemnitaire remplacé par le complément Poste a été fixé cas par cas en 1993 et 1994 à partir du cumul des primes et des indemnités acquises à chaque fonctionnaire et qu'il en résulte que les agents contractuels, à l'instar du demandeur, qui ne bénéficiaient pas de primes avant le 1er janvier 1995, ne sont pas placés dans une situation semblable à celle des fonctionnaires auxquels ils se comparent et qui présentent un historique de carrière, une ancienneté ou encore une expérience distinctes justifiant un complément Poste d'un montant plus élevé ;
QU'il ressort des pièces versées aux débats par la défenderesse que le complément Poste institué en 1995 au bénéfice de l'ensemble des agents, quel que soit leur statut, constitue une entité indissociable, non plus un agrégat de primes et indemnités, que chaque agent perçoit mensuellement un montant fixe appelé rémunération de référence, qui se compose de deux éléments, à savoir :- pour le premier, le traitement indiciaire pour les fonctionnaires ou le salaire de base pour les agents contractuels ; cet élément, lié au grade, rémunère l'ancienneté et l'expérience,- pour le second, le complément Poste perçu par l'ensemble des agents ; cet élément rétribue le niveau de fonction et tient compte de la maîtrise du poste ;
QU'il résulte, en l'espèce, que le complément Poste n'a pas pour objet de rétribuer l'ancienneté et l'expérience, prises en compte dans le premier élément, ni d'entériner un droit au maintien d'avantages acquis par certains agents, alors que celui-ci est perçu par l'ensemble du personnel ; que la SA La Poste ne démontre donc pas que la disparité constatée serait objectivement et pertinemment justifiée par l'ancienneté, l'historique de carrière ou bien encore par des avantages acquis au titre des primes et des indemnités supprimées alors que le complément Poste n'a pas vocation à rémunérer des éléments individuels ;
QU'il en résulte que deux salariés, agent contractuel et fonctionnaire, employés au même niveau de fonction avec une maîtrise similaire de leur poste, se trouvent placés dans une situation identique au regard du complément Poste, la SA La Poste ne faisant pas la démonstration que la disparité observée entre les deux agents ayant le même niveau de fonction s'expliquerait par une maîtrise du poste différente ; qu'en outre, même à admettre que l'ancienneté et l'expérience du fonctionnaire seraient supérieures aux siennes et impliqueraient, de facto, une meilleure maîtrise du poste, il apparaît que ces deux critères sont déjà pris en compte dans le premier élément de la rémunération de référence cité ci-dessus ;
QUE par ailleurs, il sera rappelé que, dans l'accord salarial pour l'année 2001, signé le 10 juillet 2001, l'engagement avait été pris, sous l'intitulé " EVOLUTION PLURIANNUELLE ", que fin 2003 les compléments Poste des agents contractuels des niveaux I. 2, I. 3 et II. 1 seront égaux aux montants des compléments Poste des fonctionnaires de même niveau ; qu'il ressort, à l'évidence, des exemples comparatifs aux dossiers entre agents contractuels et fonctionnaires de mêmes niveaux I. 2, I. 3 et II. 1 que la réalisation de cet engagement n'a pas été conduite à son terme ;
QUE de surcroît La Poste, qui expose suivre un plan de convergence du montant des compléments Poste à chaque niveau de fonction au travers des " champs de normalité " admet au moins implicitement que sa politique de rémunération vise au respect du principe d'égalité normalement applicable à cet élément de salaire, contredisant dans le même temps la thèse de l'avantage acquis cristallisé dont le montant, par définition, n'est pas soumis à évolution ;
QU'en application du principe d'égalité de traitement, le demandeur a donc droit à un complément Poste de même montant que celui du fonctionnaire auquel il se compare, dès lors qu'ils sont l'un et l'autre employés au même niveau de fonction avec une maîtrise du poste analogue " ;
1°) ALORS QUE constitue une justification objective à une différence de traitement dans l'attribution d'un avantage ou d'un élément de rémunération se substituant à d'autres éléments du salaire, l'obligation, pour l'employeur, de maintenir aux agents alors en fonction le niveau de rémunération acquis au moment de son institution ; qu'en statuant comme il l'a fait, le Conseil de prud'hommes a violé le principe " à travail égal salaire égal " ;
2°) ALORS QUE la création et l'évolution du complément Poste au sein de La Poste sont le résultat de délibérations, instructions et décisions indivisibles, de portée réglementaire, du conseil d'administration et du président de La Poste, les premières, en date du 27 avril et du 3 août 1993, créant le " complément indemnitaire " pour les seuls fonctionnaires, la deuxième, du 25 février 1994, étendant cet élément de rémunération aux personnels non titulaires, la troisième, en date du 9 décembre 1994, l'étendant aux agents contractuels relevant de la convention commune, les dernières (résolution du 25 janvier 1995 et décision du 4 mai 1995), fixant les " règles d'évolution transitoires et permanentes du complément Poste " ; qu'il ressort clairement de ces décisions que le complément Poste, dont la mise en oeuvre devait être progressive, avait, pour chaque bénéficiaire, " vocation à regrouper les primes et indemnités qui, à la date de son institution, constitu aient un complément de rémunération ¿ totalisées pour leur montant annuel " et qui étaient énumérées en annexes ; que la délibération du 25 janvier 1995 et la décision du 4 mai 1995 ont, pour leur part, défini la " nouvelle composition de la rémunération ", le complément Poste rémunérant " le niveau de fonction et tenant compte de la maîtrise du poste " ; que, prévoyant un principe " de convergence et d'évolution du complément Poste " par la création de " champs de normalité ", la décision du 4 mai 1995 a expressément précisé : " les compléments Poste ont été composés sur la base de primes et indemnités ayant un caractère permanent que percevait chaque agent en septembre 1993 pour la première vague, mars 1994 pour la seconde vague et janvier 1995 pour les agents contractuels. La reclassification des personnels ¿ conjuguée avec le niveau des " compléments Poste " résultant de l'ancienne gestion indemnitaire par corps et grade met en évidence le caractère hétérogène des compléments sur un même niveau de fonction " (article 521) ; qu'il résulte de ces dispositions indivisibles que le montant du complément Poste des agents, initialement composé par le regroupement des primes et indemnités perçues lors de sa création, et, donc, par les " avantages individuels acquis " à cette date, auxquels il s'est substitué, dépend de la date de leur recrutement, de leur statut et de leur historique de carrière ; qu'en décidant le contraire, le Conseil de prud'hommes a violé les délibérations, instructions et décisions de portée réglementaire susvisées ;
3°) ALORS QUE si la décision du 4 mai 1995 déclare que l'objet assigné du complément Poste, versé à l'ensemble de ses agents, est de rémunérer " le niveau de fonction et la maîtrise du poste " (article 2-1), tandis que le salaire de base rémunère " l'ancienneté et l'expérience ", elle n'en précise pas moins expressément, que " les compléments Poste ont été composés sur la base de primes et indemnités ayant un caractère permanent que percevait chaque agent en septembre 1993 pour la première vague, mars 1994 pour la seconde vague et janvier 1995 pour les agents contractuels " d'où " ¿ le caractère hétérogène des compléments au sein d'un même niveau de fonction " (article 521) ; qu'en retenant à l'appui de sa décision " ¿ que la SA La Poste ne démontre ¿ pas que la disparité constatée serait objectivement et pertinemment justifiée par l'ancienneté, l'historique de carrière ou bien encore par des avantages acquis au titre des primes et des indemnités supprimées alors que le complément Poste n'a pas vocation à rémunérer ces éléments individuels ¿ ", le Conseil de prud'hommes a violé l'article 521 de la décision de portée réglementaire n° 717 du 4 mai 1995 ;
4°) ALORS QUE le principe d'égalité de traitement ne s'oppose pas à ce que l'employeur tienne compte des différences de rémunération des agents avant leur intégration dans une nouvelle organisation afin de fixer des règles communes et équitables de rémunération après leur intégration dans cette organisation ; qu'il ressort des délibérations précitées que l'institution du " complément Poste " fait partie du processus d'intégration dans les corps de reclassification de La Poste d'agents publics et d'agents de droit privé appartenant auparavant à des corps et à des grades différents et percevant, de ce fait, des primes et des indemnités différentes ; qu'en décidant, dans un premier temps, de maintenir le montant des primes et indemnités versées à ces agents avant leur intégration dans cette nouvelle organisation puis, dans un deuxième temps, de faire évoluer le montant de ces primes et indemnités de manière à ce que les fonctionnaires et les agents de droit privé d'un même corps de reclassification bénéficient d'un complément Poste d'un montant équivalent, abstraction faite des évolutions dues aux mérites individuels de chaque agent, La Poste ne s'est pas contredite et n'a pas méconnu le principe d'égalité de traitement ; qu'en retenant à l'appui de sa décision " que La Poste qui expose suivre un plan de convergence du montant des compléments Poste à chaque niveau de fonction au travers des " champs de normalité " admet au moins implicitement que sa politique de rémunération vise au respect du principe d'égalité normalement applicable à cet élément de salaire, contredisant dans le même temps la thèse de l'avantage acquis cristallisé dont le montant, par définition, n'est pas soumis à évolution ", le Conseil de prud'hommes a violé derechef les décisions susvisées, ensemble le principe d'égalité de traitement ;
5°) ALORS enfin QUE l'accord du 10 juillet 2001 ne prévoyait l'égalisation du complément Poste des agents contractuels des niveaux I. 2, I. 3 et II. 1 avec celui des fonctionnaires de même niveau que pour la fixation des " seuils de recrutement " de cet élément de rémunération et moyennant " une mesure exceptionnelle " permettant de " porter le versement biannuel effectué au second semestre 2003 au niveau de celui effectué pour les fonctionnaires à cette même date " (article 3. 5) ; qu'il ne comportait aucun engagement de La Poste en faveur d'un alignement systématique du complément Poste perçu par l'ensemble des fonctionnaires et agents de droit privé de même niveau à compter de cette date ; qu'en déduisant de cette décision l'obligation, pour La Poste, d'aligner pour l'avenir les compléments Poste de l'ensemble des agents de droit privé et des fonctionnaires de même niveau, le Conseil de prud'hommes a violé par fausse interprétation l'article 3. 5 de l'accord salarial du 10 juillet 2001 ;
6°) ALORS QUE la fixation d'un élément de salaire par les partenaires sociaux dans un accord collectif issu de la négociation annuelle obligatoire s'impose aux parties et au juge prud'homal qui ne saurait le remettre en cause sous couvert d'une méconnaissance du principe d'égalité de traitement ; qu'en l'espèce, les accords collectifs du 10 juillet 2001 et du 8 juillet 2003 avaient admis le processus de convergence progressive des compléments Poste des différents agents, fixé ses modalités et les montants de rémunération en résultant ; qu'en remettant en cause les modalités ainsi fixées le Conseil de prud'hommes a violé les articles L. 1242-1 et L. 1242-8 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est fait grief aux jugements attaqués d'AVOIR condamné La Poste à verser à Mesdames Y... et X... salariées de droit privé, diverses sommes à titre de rappels de " complément Poste " et de congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QU'" il résulte du principe de l'égalité salariale, dont s'inspirent notamment les articles L. 2261-22. 9, L. 2271-1. 8 et L. 3221-2 du Code du travail, que tout employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale ; que l'identité de situation s'apprécie au regard de l'avantage concerné et qu'en application de l'article 1315 du Code civil, s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe " à travail égal salaire égal " de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence ;
QU'en l'espèce, le demandeur, agent contractuel de droit privé employé par la SA La Poste, établit que certains fonctionnaires effectuant un travail de valeur égale au même niveau de fonction perçoivent chaque mois un " complément Poste " d'un montant plus élevé, ce qui constitue une violation du principe d'égalité ;
QUE la SA La Poste expose que cette différence est issue des circonstances dans lesquelles après son changement de statut, elle a décidé de regrouper dans un " complément indemnitaire " l'ensemble des primes et indemnités versées à son personnel de droit public avant de supprimer définitivement lesdits avantages et d'instituer un complément Poste au bénéfice de tous les agents ; que la défenderesse rappelle que le montant du complément indemnitaire remplacé par le complément Poste a été fixé cas par cas en 1993 et 1994 à partir du cumul des primes et des indemnités acquises à chaque fonctionnaire et qu'il en résulte que les agents contractuels, à l'instar du demandeur, qui ne bénéficiaient pas de primes avant le 1er janvier 1995, ne sont pas placés dans une situation semblable à celle des fonctionnaires auxquels ils se comparent et qui présentent un historique de carrière, une ancienneté ou encore une expérience distinctes justifiant un complément Poste d'un montant plus élevé ;
QU'il ressort des pièces versées aux débats par la défenderesse que le complément Poste institué en 1995 au bénéfice de l'ensemble des agents, quel que soit leur statut, constitue une entité indissociable, non plus un agrégat de primes et indemnités, que chaque agent perçoit mensuellement un montant fixe appelé rémunération de référence, qui se compose de deux éléments, à savoir :- pour le premier, le traitement indiciaire pour les fonctionnaires ou le salaire de base pour les agents contractuels ; cet élément, lié au grade, rémunère l'ancienneté et l'expérience,- pour le second, le complément Poste perçu par l'ensemble des agents ; cet élément rétribue le niveau de fonction et tient compte de la maîtrise du poste ;
QU'il résulte, en l'espèce, que le complément Poste n'a pas pour objet de rétribuer l'ancienneté et l'expérience, prises en compte dans le premier élément, ni d'entériner un droit au maintien d'avantages acquis par certains agents, alors que celui-ci est perçu par l'ensemble du personnel ; que la SA La Poste ne démontre donc pas que la disparité constatée serait objectivement et pertinemment justifiée par l'ancienneté, l'historique de carrière ou bien encore par des avantages acquis au titre des primes et des indemnités supprimées alors que le complément Poste n'a pas vocation à rémunérer des éléments individuels ;
QU'il en résulte que deux salariés, agent contractuel et fonctionnaire, employés au même niveau de fonction avec une maîtrise similaire de leur poste, se trouvent placés dans une situation identique au regard du complément Poste, la SA La Poste ne faisant pas la démonstration que la disparité observée entre les deux agents ayant le même niveau de fonction s'expliquerait par une maîtrise du poste différente ; qu'en outre, même à admettre que l'ancienneté et l'expérience du fonctionnaire seraient supérieures aux siennes et impliqueraient, de facto, une meilleure maîtrise du poste, il apparaît que ces deux critères sont déjà pris en compte dans le premier élément de la rémunération de référence cité ci-dessus ;
QUE par ailleurs, il sera rappelé que, dans l'accord salarial pour l'année 2001, signé le 10 juillet 2001, l'engagement avait été pris, sous l'intitulé " EVOLUTION PLURIANNUELLE ", que fin 2003 les compléments Poste des agents contractuels des niveaux I. 2, I. 3 et II. 1 seront égaux aux montants des compléments Poste des fonctionnaires de même niveau ; qu'il ressort, à l'évidence, des exemples comparatifs aux dossiers entre agents contractuels et fonctionnaires de mêmes niveaux I. 2, I. 3 et II. 1 que la réalisation de cet engagement n'a pas été conduite à son terme ;
QUE de surcroît La Poste, qui expose suivre un plan de convergence du montant des compléments Poste à chaque niveau de fonction au travers des " champs de normalité " admet au moins implicitement que sa politique de rémunération vise au respect du principe d'égalité normalement applicable à cet élément de salaire, contredisant dans le même temps la thèse de l'avantage acquis cristallisé dont le montant, par définition, n'est pas soumis à évolution ;
QU'en application du principe d'égalité de traitement, le demandeur a donc droit à un complément Poste de même montant que celui du fonctionnaire auquel il se compare, dès lors qu'ils sont l'un et l'autre employés au même niveau de fonction avec une maîtrise du poste analogue ;
QUE " les tableaux récapitulatifs individuels dont celui fourni à l'appui de la demande de la salariée sont précis, détaillés mois par mois, vérifiables, compréhensibles au vu des explications recueillies contradictoirement à l'audience et ils tiennent compte, le cas échéant, du changement de niveau de fonction en cours de période ouvrant droit à un complément Poste d'un montant supérieur, étant observé qu'il est référé, dans chaque niveau de fonction, à un fonctionnaire bénéficiant du montant le plus élevé du complément Poste constaté ;
QUE la SA La Poste qui dispose, en sa qualité d'employeur, de tous les éléments de calcul du salaire n'étaie pas sa critique secondaire sur des éléments concrets, discutables contradictoirement, et ne propose pas non plus en défense un détail de calcul lui paraissant plus approprié (¿) " ;
ALORS QUE le principe d'égalité de traitement n'impose de traiter des salariés de manière identique que pour autant qu'ils sont placés en situation identique ; que ne sont pas placés en situation identique, pour le versement d'un complément de rémunération, les salariés travaillant à temps complet et ceux travaillant à temps partiel ; qu'en ce cas, la rémunération ne peut être réclamée qu'au prorata du temps de travail effectif ; qu'en l'espèce, La Poste avait fait valoir, dans ses écritures oralement reprises, que tel était le cas de Madame Y... et de Madame X..., qui travaillaient à temps partiel pendant la période couvrant leur réclamation et, partant, ne pouvaient revendiquer un complément Poste de même montant que celui du fonctionnaire à temps complet auquel elles se comparaient ; qu'en accueillant pourtant leur demande pour le montant réclamé sans répondre à ces conclusions pertinentes le Conseil de prud'hommes, qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-25231;14-25232
Date de la décision : 09/12/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Paris, 08 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 déc. 2015, pourvoi n°14-25231;14-25232


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Tiffreau, Marlange et de La Burgade

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.25231
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