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13/01/2016 | FRANCE | N°14-21762

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 janvier 2016, 14-21762


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 27 mai 2014), que Mme X... a été engagée le 1er août 1995 en qualité d'hôtesse par la société Sulpice TV qui assumait la gestion de la location et de la maintenance des téléviseurs de la Clinique des eaux claires ; qu'à compter du 1er août 2011, le Groupe hospitalier mutualiste de Grenoble dont dépend la Clinique des eaux claires a confié la gestion des prestations audiovisuelles de ses trois établissements à la société Sodexo santé méd

ico-social qui assurait déjà une activité de restauration au sein des trois ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 27 mai 2014), que Mme X... a été engagée le 1er août 1995 en qualité d'hôtesse par la société Sulpice TV qui assumait la gestion de la location et de la maintenance des téléviseurs de la Clinique des eaux claires ; qu'à compter du 1er août 2011, le Groupe hospitalier mutualiste de Grenoble dont dépend la Clinique des eaux claires a confié la gestion des prestations audiovisuelles de ses trois établissements à la société Sodexo santé médico-social qui assurait déjà une activité de restauration au sein des trois structures ; que la société Sulpice TV a informé la salariée du transfert de son contrat de travail auprès de la société Sodexo laquelle a refusé le transfert ; que la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail et a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que la société Sodexo fait grief à l'arrêt de dire que la rupture du contrat de travail lui est imputable et de la condamner à payer à la salariée diverses sommes à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ que l'article L. 1224-1 du code du travail ne s'applique qu'en cas de transfert d'une entité économique autonome, comprise comme un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre ; que le transfert d'une telle entité ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un nouvel exploitant ; que s'agissant d'une activité de location et d'entretien de téléviseurs dans des chambres d'un établissement hospitalier, les éléments corporels que constituent les téléviseurs, le réseau, les câbles et le système informatique de gestion, contribuent de manière déterminante à l'exercice de l'activité ; qu'en conséquence, en l'absence de reprise de ces éléments corporels, indispensables à l'exercice de l'activité, les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ne sont pas applicables au repreneur de ce marché ; qu'en l'espèce, il est constant que la société Sodexo, qui s'est vu confier, en plus de l'activité de restauration et de l'exploitation d'une boutique - cafétéria, la gestion de l'ensemble audiovisuel du Groupement mutualiste hospitalier de Grenoble composé de trois cliniques, n'a repris aucun des matériels précédemment mis en oeuvre par la société Sulpice TV au sein de la Clinique des eaux claires pour assurer un service de location et de maintenance de téléviseurs ; qu'ainsi, la société Sodexo démontrait avoir fait procéder à l'installation de nouvelles télévisions et de leur support, d'un ensemble satellite avec transpondeurs, d'un nouveau système de câblage et d'un système de gestion informatique centralisée ; qu'en affirmant, pour retenir néanmoins que les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail sont applicables, que la reprise du matériel ne constitue pas une condition impérative du transfert d'une entité économique autonome et que la reprise d'un élément incorporel significatif comme la clientèle suffit à caractériser un tel transfert, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 1224-1 du code du travail ;
2°/ que l'article L. 1224-1 du code du travail ne s'applique qu'en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; qu'en l'espèce, la société Sodexo soutenait qu'elle n'a pas repris l'activité de location et maintenance de téléviseurs déployée par la société Sulpice TV au sein de la Clinique des eaux claires dans son organisation antérieure, en maintenant sa spécificité et son objectif propre ; qu'elle indiquait à cet égard qu'elle n'a été chargée d'une prestation de services audiovisuels qu'à titre accessoire d'un contrat portant sur un service de restauration et que la location de téléviseurs s'inscrit dans une offre globale de services déployées dans le cadre d'une boutique - cafétéria ; qu'en outre, cette prestation ne se limite pas à la seule Clinique des eaux claires mais s'étend aux trois établissements du Groupement mutualiste hospitalier de Grenoble ; que, par ailleurs, la location des téléviseurs n'est plus assurée par une personne spécialement affectée à cette tâche, mais par des hôtesses polyvalentes au sein d'une boutique - cafétéria, et que les prestations de maintenance ont été sous-traitées à un prestataire ; qu'en affirmant néanmoins que ces circonstances étaient indifférentes, cependant qu'elles faisaient ressortir que l'entité exploitée par la société Sulpice TV avait perdu son identité, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que l'activité de location et de maintenance de téléviseurs exercée au sein de la Clinique des eaux claires avait été intégralement reprise par la société Sodexo, peu important que celle-ci ait ensuite décidé de sous-traiter la gestion de la maintenance des appareils et qu'elle se soit également vue confier la même activité au sein des deux autres établissements composant le Groupe hospitalier mutualiste de Grenoble, et que cette activité s'exerçait dans les mêmes locaux et avec la même clientèle, la cour d'appel a pu en déduire l'existence d'un transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et que le contrat de travail de la salariée avait été transféré à la société Sodexo ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sodexo santé médico social aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Sodexo, et condamne celle-ci à payer à la société Sulpice la somme de 2 000 euros et à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Sodexo santé médico social.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la rupture du contrat de travail est imputable à la société SODEXO, d'AVOIR condamné la société SODEXO à payer à Madame X... les sommes de 4. 946, 64 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, 20. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 2. 343, 88 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 234, 39 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité de préavis, 540, 49 euros au titre du solde de congés payés restant dus, 1. 132, 87 euros à titre de rappel de salaire pour le mois d'août 2011 et 2. 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, d'AVOIR condamné la société SODEXO à remettre à Madame X... le certificat de travail, l'attestation pôle emploi et le bulletin de salaire du mois d'août 2011, d'AVOIR condamné la société SODEXO à verser la somme de 2. 500 euros à la société SULPICE TV, et d'AVOIR mis hors de cause la société SULPICE TV ;
AUX MOTIFS QUE « que la société Sulpice gérait la location de téléviseurs lui appartenant sur le site de la Clinique des Eaux Claires et en assurait la maintenance au terme d'un contrat de concession du 1er août 1995 ; que la clientèle était constituée par les patients de la clinique ; que cette activité était spécifique ; qu'elle reposait sur du matériel affecté à l'exploitation d'une clientèle déterminée, qui était toujours la même ; qu'un personnel était spécialement affecté par la société Sulpice au sein de la clinique pour assurer la gestion des téléviseurs ; qu'il en résulte que l'activité était identifiée et autonome ; qu'elle poursuivait un objectif propre ; que le fait que la société Sodexo gère également une activité de restauration que lui a confiée antérieurement le Groupe Hospitalier Mutualiste en vertu d'un contrat du 1er juillet 2006, et qu'elle s'est vu confier le 1er juin 2009 la gestion de l'ensemble du service audiovisuel sur le site n'exclut pas un transfert de l'entité économique autonome qu'exploitait auparavant la société Sulpice au sein de la Clinique des Eaux Claires ; qu'en effet l'activité de location de téléviseurs est la même que celle exercée auparavant dans les mêmes locaux, peu important que l'aménagement des locaux ait changé, et que l'activité ait été élargie à deux autres établissements présents sur le même site ; qu'il est également indifférent que le Groupe mutualiste ait choisi d'externaliser la maintenance, la location de téléviseurs impliquant nécessairement pour le repreneur de prendre en charge la maintenance peu important le mode de prise en charge ou de gestion qu'il a choisi pour assurer cette prestation ; que la clientèle est la même, les téléviseurs étant loués aux patients de la clinique des Eaux Claires ; que la reprise du matériel par le Groupe Mutualiste ne constitue pas une condition impérative du transfert d'une entité économique autonome poursuivant la même activité ; que le transfert d'un élément incorporel significatif comme la clientèle suffit à caractériser le transfert d'une entité économique autonome poursuivant un objectif propre ; qu'il en résulte que le nouvel exploitant a repris une activité identique et autonome en bénéficiant du transfert d'un élément incorporel significatif constitué par l'ensemble de la clientèle de la Clinique des Eaux Claires ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que le conseil des prud'hommes a retenu le transfert du contrat de travail de Mme X... en application de l'article L. 1224-1 du code du travail à la société Sodexo ; que la prise d'acte aux torts de l'employeur était justifiée, Mme X... ayant vu son emploi supprimé, sans que le nouvel employeur, la société Sodexo ne lui fournisse ensuite un travail équivalent au sein de l'entreprise » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE « l'activité de location de téléviseurs est restée la même, peu importe que le matériel ne soit plus celui de la SAS SULPICE TV mais celui de la SAS SODEXO ; que cette activité s'exerce sur le même site à savoir, les locaux de la clinique mutualiste des Eaux Claires ; qu'enfin la clientèle qui constitue un élément incorporel est identique s'agissant des patients de la clinique mutualiste des Eaux Claires ; que par conséquent, cet ensemble constitue une entité économique au sein de l'article L. 1224-1 du Code du travail et le contrat de travail de Madame Isabelle X... aurait donc dû être transféré chez le nouvel acquéreur du marché, la SAS SODEXO ; que lorsque le contrat de travail d'un salarié est transféré en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, le nouvel employeur est tenu de toutes les obligations qui incombaient à l'ancien à l'égard des salariés dont le contrat de travail subsiste, sauf si la cession est intervenue dans le cadre d'une procédure collective ou si la substitution d'employeur est intervenue sans qu'il y ait de convention ; qu'au 1er août 2011, la SAS SODEXO était bien l'employeur de madame Isabelle X... » ;
1. ALORS, D'UNE PART, QUE l'article L. 1224-1 du Code du travail ne s'applique qu'en cas de transfert d'une entité économique autonome, comprise comme un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre ; que le transfert d'une telle entité ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un nouvel exploitant ; que s'agissant d'une activité de location et d'entretien de téléviseurs dans des chambres d'un établissement hospitalier, les éléments corporels que constituent les téléviseurs, le réseau, les câbles et le système informatique de gestion, contribuent de manière déterminante à l'exercice de l'activité ; qu'en conséquence, en l'absence de reprise de ces éléments corporels, indispensables à l'exercice de l'activité, les dispositions de l'article L. 1224-1 du Code du travail ne sont pas applicables au repreneur de ce marché ; qu'en l'espèce, il est constant que la société SODEXO, qui s'est vu confier, en plus de l'activité de restauration et de l'exploitation d'une boutique - cafétéria, la gestion de l'ensemble audiovisuel du Groupement Mutualiste Hospitalier de Grenoble composé de trois cliniques, n'a repris aucun des matériels précédemment mis en oeuvre par la société SULPICE au sein de la Clinique des Eaux Claires pour assurer un service de location et de maintenance de téléviseurs ; qu'ainsi, la société SODEXO démontrait avoir fait procéder à l'installation de nouvelles télévisions et de leur support, d'un ensemble satellite avec transpondeurs, d'un nouveau système de câblage et d'un système de gestion informatique centralisée ; qu'en affirmant, pour retenir néanmoins que les dispositions de l'article L. 1224-1 du Code du travail sont applicables, que la reprise du matériel ne constitue pas une condition impérative du transfert d'une entité économique autonome et que la reprise d'un élément incorporel significatif comme la clientèle suffit à caractériser un tel transfert, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 1224-1 du Code du travail ;
2. ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'article L. 1224-1 du Code du travail ne s'applique qu'en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; qu'en l'espèce, la société SODEXO soutenait qu'elle n'a pas repris l'activité de location et maintenance de téléviseurs déployée par la société SULPICE au sein de la Clinique des Eaux Claires dans son organisation antérieure, en maintenant sa spécificité et son objectif propre ; qu'elle indiquait à cet égard qu'elle n'a été chargée d'une prestation de services audiovisuels qu'à titre accessoire d'un contrat portant sur un service de restauration et que la location de téléviseurs s'inscrit dans une offre globale de services déployées dans le cadre d'une boutique - cafétéria ; qu'en outre, cette prestation ne se limite pas à la seule Clinique des Eaux Claires mais s'étend aux trois établissements du Groupement Mutualiste Hospitalier de Grenoble ; que, par ailleurs, la location des téléviseurs n'est plus assurée par une personne spécialement affectée à cette tâche, mais par des hôtesses polyvalentes au sein d'une boutique - cafétéria, et que les prestations de maintenance ont été sous-traitées à un prestataire ; qu'en affirmant néanmoins que ces circonstances étaient indifférentes, cependant qu'elles faisaient ressortir que l'entité exploitée par la société SULPICE TV avait perdu son identité, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-21762
Date de la décision : 13/01/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 27 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jan. 2016, pourvoi n°14-21762


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP de Nervo et Poupet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.21762
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