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18/02/2016 | FRANCE | N°14-23468

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 février 2016, 14-23468


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 5 novembre 2007 par la pharmacie de La Pirogue comme aide préparatrice ; que par lettre du 18 janvier 2010, elle a été licenciée pour faute lourde, son employeur lui reprochant le vol de trois produits de la pharmacie ; que par arrêt du 6 juin 2012, la cour d'appel de Cayenne l'a relaxée de ce vol ; que contestant son licenciement, la salariée a saisi la juridiction prud'homale en paiement de diverses sommes ;
Sur le premier moyen :
Vu l'articl

e L. 1232-6 du code du travail et le principe de l'autorité, au civil...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 5 novembre 2007 par la pharmacie de La Pirogue comme aide préparatrice ; que par lettre du 18 janvier 2010, elle a été licenciée pour faute lourde, son employeur lui reprochant le vol de trois produits de la pharmacie ; que par arrêt du 6 juin 2012, la cour d'appel de Cayenne l'a relaxée de ce vol ; que contestant son licenciement, la salariée a saisi la juridiction prud'homale en paiement de diverses sommes ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 1232-6 du code du travail et le principe de l'autorité, au civil, de la chose jugée au pénal ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande tendant au paiement de dommages-intérêts pour licenciement abusif et vexatoire ainsi qu'au paiement de diverses autres sommes, l'arrêt retient que la salariée a été licenciée pour faute lourde le 18 janvier 2010, son employeur lui reprochant, au terme de la lettre de licenciement versée aux débats, le vol de trois produits confirmé par l'ensemble du personnel ; que si la salariée a été relaxée du chef de ce vol, il n'en demeure pas moins qu'elle a admis n'avoir pas enregistré ces produits sur un compte client ; que si ce fait en lui même ne suffit pas à caractériser une intention de nuire à l'employeur constitutive d'une faute lourde, il n'en demeure pas moins constitutif d'une faute grave rendant impossible le maintien dans l'entreprise ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que la lettre de licenciement reprochait à la salariée un vol dont elle avait été relaxée par une décision de la juridiction pénale devenue définitive, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième, troisième et quatrième moyens :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute Mme X... de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et en ce qu'il condamne la pharmacie La Pirogue à lui payer la somme de 27, 22 euros à titre de rappel de salaire pour la journée du 7 novembre 2009 avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2010, l'arrêt rendu le 26 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Cayenne ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre ;
Condamne la société Pharmacie de la Pirogue aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne également à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Josette X... de sa demande tendant au paiement de dommages-intérêts pour licenciement abusif et vexatoire, d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, d'un rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire et des congés payés y afférents.
AUX MOTIFS QU'engagée en tant qu'aide préparateur en pharmacie par contrat du 5 novembre 2007, Madame Josette X... avait notamment pour mission, ainsi que cela résulte du contrat de travail produit aux débats (pièce 4 de l'intimée), d'assurer rencaissement des ventes, la terme et l'exactitude de la caisse et d'assurer par tous les moyens, le recouvrement des créances sous la dépendance hiérarchique de Monsieur Y... ; qu'elle a été licenciée pour faute lourde le 18 janvier 2010 ; que son employeur lui reproche, au terme de la lettre de licenciement versée aux débats le vol de trois produits confirmé pas l'ensemble du personnel en l'état d'absence d'enregistrement dans le compte du client ; que compte tenu du motif ainsi évoqué dans la lettre de licenciement qui vise un détournement et de la procédure préalable de mise à pied conservatoire évoquée dans la même lettre, la faute reprochée à Madame X... est une faute disciplinaire et la sanction mise en oeuvre est une sanction disciplinaire ; qu'il appartient en conséquence à la pharmacie de la Pirogue de démontrer la réalité de la faute lourde qu'elle invoque et de justifier du respect de la procédure applicable au licenciement pour faute disciplinaire ; que sur les fautes reprochées à Madame X..., il résulte de la procédure que si Madame X... a été relaxée du chef de ce vol à la suite de la plainte de Monsieur Y... par arrêt de la Cour d'appel de Cayenne, il n'en demeure pas moins qu'elle a admis elle-même n'avoir pas enregistré ces produits sur le compte client de Madame Z... expliquant ce fait par un oubli de sa part et indiquant que cela allait être rectifié ; que dès lors que les pièces produites par les parties ne contredisent pas cette façon de procéder, il est établi que Madame X... a dans le cadre de son emploi omis d'enregistrer les produits qu'elle a livrés le 19 novembre 2009 à Madame Z.... Si ce fait en lui-même ne suffit pas à caractériser une intention de nuire à l'employeur constitutive d'une faute lourde, il n'en demeure pas moins constitutif d'une faute grave rendant impossible le maintien dans l'entreprise. Le licenciement pour faute intervenu est donc bien fondé. Le jugement dont appel sera infirmé.
ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux motifs qui y sont énoncés ; que la lettre notifiant son licenciement à Madame Josette X... faisait expressément et exclusivement état d'une tentative de vol ; qu'en jugeant, malgré la décision définitive de la juridiction correctionnelle relaxant Mme X... du chef de vol, son licenciement fondé à raison de son oubli d'enregistrer des produits sur un compte client, la Cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du Code du travail.
ALORS surtout QUE en retenant la seule omission d'enregistrer des produits livrés, grief différent de celui figurant dans la lettre de licenciement la Cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du Code du travail.
ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux motifs qui y sont énoncés ; que lorsqu'il résulte des termes de la lettre de licenciement que l'employeur a reproché au salarié des fautes, et prononcé un licenciement disciplinaire, les juges du fond doivent se prononcer sur le caractère fautif ou non du comportement du salarié ; que ne peuvent recevoir la qualification de faute, les erreurs ou insuffisances du salarié qui ne relèvent pas " d'une mauvaise volonté délibérée " de sa part ; qu'en jugeant fautif le fait tiré d'une absence du salarié après avoir constaté que ce dernier estimait être régulièrement en congé, la Cour d'appel qui n'a aucunement caractérisé la faute du salarié, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1232-1 du Code du travail.
ALORS en toute hypothèse QU'il incombe au juge de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement ; que Madame X... exposait que la véritable cause de son licenciement résidait dans la volonté de l'évincer d'une part parce que son employeur avait mal anticipé ses besoins réels en personnel et qu'elle n'avait au demeurant pas été remplacée dans son poste, d'autre part parce que ses collègues nourrissaient à son encontre des haines personnelles ; qu'en se bornant à dire établie la faute reprochée au salarié, la Cour d'appel qui n'a pas recherché si la cause véritable du licenciement n'était pas autre que celle énoncée dans la lettre de licenciement, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, en violation des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaire
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Josette X... de ses demandes tendant au paiement d'un rappel de salaires au titre de la période de mise à pied conservatoire, des congés payés y afférents, d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents.
AUX MOTIFS ENONCES AU PREMIER MOYEN
ALORS QUE la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que ne saurait constituer une faute, et a fortiori une faute grave, le simple oubli d'inscription en compte client de produits d'une valeur totale de 40 euros, constitués de deux shampoings et un flacon de vitamines, dont le paiement a été régularisé par ledit client par une salariée n'ayant par ailleurs jamais fait l'objet d'aucun reproche en plus de vingt-six mois de travail ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L. 1234-1, L. 1234-9 du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaire au deuxième
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Josette X... de ses demandes tendant au paiement d'un rappel de salaires au titre de la période de mise à pied conservatoire et des congés payés y afférents.
AUX MOTIFS ENONCES AU PREMIER MOYEN
ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que rien n'interdit à l'employeur de garantir au salarié mis à pied à titre conservatoire puis licencié pour faute grave le paiement du salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire ; que Madame Josette X... se prévalait de l'engagement pris par son employeur de lui verser les salaires correspondant à la période de mise à pied conservatoire et produisait aux débats le courrier de l'employeur attestant de cet engagement ; qu'en retenant que la faute grave était établie pour débouter la salariée de sa demande tendant au paiement des salaires correspondant à la période de mise à pied conservatoire, et des congés payés y afférents, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'employeur ne s'était pas engagé au paiement desdits salaires, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Josette X... de sa demande tendant au paiement de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire.
AUX MOTIFS QUE le fait qu'il est établi que Madame X... n'ait pas enregistré les produits pharmaceutiques livrés et que ce comportement ait conduit l'employeur à envisager le licenciement de cette salarié ôte tous caractère vexatoire à la procédure utilisée, peut important qu'au plan pénal celle-ci ait bénéficié d'une décision de relaxe ; que le jugement déféré sera infirmé sur le point.
ALORS QUE même justifié par une faute grave du salarié, le licenciement peut lui causer, en raison des circonstances vexatoires qui l'ont accompagné, un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi, dont il est fondé à demander réparation ; qu'en retenant que le fait reproché par l'employeur était établi pour exclure le caractère vexatoire du licenciement, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-23468
Date de la décision : 18/02/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Cayenne, 26 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 fév. 2016, pourvoi n°14-23468


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.23468
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