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06/04/2016 | FRANCE | N°14-13561

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 avril 2016, 14-13561


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les deux moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 10 janvier 2014), que M. X..., médecin qualifié en psychiatrie et en médecine générale, a été engagé en octobre 1984 par la société Clinique du Golfe, exploitant un établissement psychiatrique, la relation de travail s'étant poursuivie dans le cadre d'un contrat de médecin résident salarié du 10 juin 1991 ; qu'il a été licencié pour faute grave par lettre du 14 mai 2008 après mise à pied conservatoire ; qu'il a saisi la ju

ridiction prud'homale ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les deux moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 10 janvier 2014), que M. X..., médecin qualifié en psychiatrie et en médecine générale, a été engagé en octobre 1984 par la société Clinique du Golfe, exploitant un établissement psychiatrique, la relation de travail s'étant poursuivie dans le cadre d'un contrat de médecin résident salarié du 10 juin 1991 ; qu'il a été licencié pour faute grave par lettre du 14 mai 2008 après mise à pied conservatoire ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à la condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes au titre de la rupture du contrat de travail dépourvue de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux motifs qui y sont énoncés ; que lorsqu'il résulte des termes de la lettre de licenciement que l'employeur a reproché au salarié des fautes, et prononcé un licenciement disciplinaire, les juges du fond doivent se prononcer sur le caractère fautif ou non du comportement du salarié ; que ne peuvent recevoir la qualification de faute, les erreurs ou insuffisances du salarié qui ne relèvent pas " d'une mauvaise volonté délibérée " de sa part ; qu'en jugeant fautif le fait tiré d'une absence du salarié après avoir constaté que ce dernier estimait-à tort-être régulièrement en congé, la cour d'appel, qui n'a aucunement caractérisé la faute du salarié, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1232-1 du code du travail ;
2°/ que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; que le comportement de l'employeur est susceptible de priver de caractère fautif le comportement reproché au salarié ; qu'il était acquis aux débats que le planning établi par le président de la commission médicale d'établissement mentionnait que M. X... était en congé le 30 mars 2008 ; qu'en jugeant justifié le licenciement pour faute grave du salarié sans rechercher si l'absence du 30 mars 2008 qui lui était reprochée ne résultait pas du comportement de son employeur qui avait instauré une pratique constante consistant à charger le président de la commission médicale d'établissement d'établir le planning de permanence, comme l'avait relevé la décision du conseil de prud'hommes, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1232-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
3°/ qu'il incombe au juge de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement ; que le salarié exposait que la véritable cause de son licenciement résidait dans la volonté de le réprimer pour avoir saisi la juridiction prud'homale ; qu'en se bornant à dire établie la faute reprochée au salarié, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si la cause véritable du licenciement n'était pas autre que celle énoncée dans la lettre de licenciement, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, en violation des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
4°/ que le faute grave, qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, doit s'apprécier " in concreto " ; que le salarié faisait valoir dans ses écritures d'appel qu'il n'avait jamais fait l'objet du moindre reproche de la part de son employeur, que l'absence qui lui était reprochée résultait du fait qu'il se croyait régulièrement en congé et qu'il avait pris toute mesure pour pallier à son absence et se rendre immédiatement sur son lieu de travail ; qu'en omettant de rechercher si les circonstances particulières dans lesquelles la faute reprochée avait été commise ne lui ôtaient pas tout caractère de gravité, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1232-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le salarié avait méconnu ses obligations contractuelles vis-à-vis de l'employeur en n'assurant pas la permanence du week-end du 29 et 30 mars 2008 prévue dans un planning qui lui avait été au préalable transmis en copie par l'employeur sans donner lieu à protestation de sa part, la cour d'appel a pu décider, écartant par là-même toute autre cause de licenciement, que ces faits rendaient impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et constituaient une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six avril deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Yves X... de ses demandes tendant à la condamnation de la clinique du Golfe au paiement d'un rappel de salaire correspondant à une période de mise à pied conservatoire, des congés payés y afférents, d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, d'une indemnité conventionnelle de licenciement et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'à la remise de documents de fin de contrat rectifiés.
AUX MOTIFS QUE la faute grave du salarié dont la preuve incombe à l'employeur résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que la lettre de licenciement pour faute grave du 14 mai 2008 fixant les limites du litige reproche à Monsieur X... alors qu'il était de garde le week-end des 29 et 30 mars 2008 d'avoir refusé de se déplacer en raison de son éloignement géographique au motif qu'il se trouvait en congé, ces faits s'inscrivant dans une longue suite de rappels à l'ordre effectués par la direction de l'établissement et caractérisant « une désobéissance flagrante aux ordres donnés » ce qui justifierait son licenciement pour faute grave ; qu'il résulte de l'arrêt de la Cour d'appel de Caen du 24 février 2012 devenu définitif par le rejet du pourvoi du salarié que si la direction avait été informée de la volonté de son salarié de faire des remplacements à la demande et pour le compte des médecins psychiatres libéraux de la clinique notamment la nuit et les week-ends, il n'en demeure pas moins que ledit salarié en sa qualité de médecin résidant devait assurer dans l'établissement de 20h à 8h du matin et le week-end du samedi 12h au lundi matin 8h, la garde des patients laquelle s'exécutait sous forme d'astreinte depuis son logement de fonction sans être à la disposition permanente de l'employeur tout en pouvant vaquer à ses occupations personnelles et que son employeur en vertu de son pouvoir de direction, était autorisé à lui imposer le respect de ces dispositions contractuelles et ce indépendamment des remplacements à titre libéral que le salarié pouvait effectuer pour le compte d'autres médecins liés contractuellement à la clinique pour dispenser des soins mais ayant un statut échappant à l'autorité hiérarchique de la clinique du Golfe ; qu'en l'espèce, la Cour constate que dès le 15 février 2008, la direction de l'établissement avait pris le soin d'informer par écrit le président de la commission médicale d'établissement chargé d'établir le planning des permanences entre les médecins libéraux, des jours de garde de Monsieur X... notamment le week-end des 29 et 30 mars 2008 de sorte que le président de cette commission n'avait pas le pouvoir en dehors de toute délégation formelle et expresse émanant de la direction de considérer Monsieur X... comme se trouvant en congé sans de surcroît avoir avisé son employeur de tout changement par rapport au planning initial alors que ce dernier était tenu d'organiser dans son établissement les gardes du médecin de permanence conformément aux prescriptions légales et réglementaires qui lui avaient été rappelées par courrier de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales ainsi que le personnel soignant qui a fait appel à Monsieur X... qu'il croyait de garde pour la délivrance urgente de médicaments le dimanche 30 mars 2008 après 18h alors que ce dernier estimait à tort être régulièrement en congé ; que le comportement de Monsieur X... qui a méconnu gravement ses obligations contractuelles vis-à-vis de son employeur en n'assurant pas la permanence du week-end du 29 et 30 mars 2008 prévue dans un planning qui lui avait été au préalable transmis en copie par son employeur sans donner lieu à protestation de sa part et adressé également au président de la commission médicale d'établissement pour garantir la présence continue d'un médecin auprès des patients et en privilégiant un accord qu'il aurait conclu avec le président de cette commission représentant les autres médecins libéraux et lequel ne portait pas exclusivement sur des remplacements ponctuels de ces derniers mais en réalité sur l'organisation de son service et sur ses congés relevant du seul pouvoir de son employeur, justifie la mise à pied à titre conservatoire et son licenciement pour faute grave et ce indépendamment des autres faits antérieurs rappelés surabondamment dans la lettre de licenciement ou encore de l'absence de coordination qui pouvait exister entre la direction de l'établissement et la commission médicale d'établissement s'agissant de l'organisation des gardes et astreintes des médecins dans celui-ci ; que la Cour ne peut donc que réformer la décision entreprise et rejeter les prétentions du salarié au titre de son licenciement dont la reconnaissance de la faute grave le prive à la fois d'une indemnité compensatrice de préavis et d'une indemnité conventionnelle de licenciement et de tous dommages et intérêts.
ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux motifs qui y sont énoncés ; que lorsqu'il résulte des termes de la lettre de licenciement que l'employeur a reproché au salarié des fautes, et prononcé un licenciement disciplinaire, les juges du fond doivent se prononcer sur le caractère fautif ou non du comportement du salarié ; que ne peuvent recevoir la qualification de faute, les erreurs ou insuffisances du salarié qui ne relèvent pas " d'une mauvaise volonté délibérée " de sa part ; qu'en jugeant fautif le fait tiré d'une absence du salarié après avoir constaté que ce dernier estimait-à tort-être régulièrement en congé, la Cour d'appel qui n'a aucunement caractérisé la faute du salarié, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1232-1 du Code du travail.
ET ALORS QUE le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; que le comportement de l'employeur est susceptible de priver de caractère fautif le comportement reproché au salarié ; qu'il était acquis aux débats que le planning établi par le président de la commission médicale d'établissement mentionnait que Monsieur Yves X... était en congé le 30 mars 2008 ; qu'en jugeant justifié le licenciement pour faute grave de Monsieur Yves X... sans rechercher si l'absence du 30 mars 2008 qui lui était reprochée ne résultait pas du comportement de son employeur qui avait instauré une pratique constante consistant à charger le président de la commission médicale d'établissement d'établir le planning de permanence, comme l'avait relevé la décision du Conseil de prud'hommes la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1232-1 du Code du travail, et 1134 du Code civil.
ALORS enfin QU'il incombe au juge de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement ; que Monsieur Yves X... exposait que la véritable cause de son licenciement résidait dans la volonté de le réprimer pour avoir saisi la juridiction prud'homale ; qu'en se bornant à dire établie la faute reprochée au salarié, la Cour d'appel qui n'a pas recherché si la cause véritable du licenciement n'était pas autre que celle énoncée dans la lettre de licenciement, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, en violation des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaire

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Yves X... de ses demandes tendant à la condamnation de la clinique du Golfe au paiement d'un rappel de salaire correspondant à une période de mise à pied conservatoire, des congés payés y afférents, d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents ainsi qu'à la remise de documents de fin de contrat rectifiés.
AUX MOTIFS ENONCES AU PREMIER MOYEN
ALORS QUE la faute grave, qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, doit s'apprécier in concreto ; que Monsieur Yves X... faisait valoir dans ses écritures d'appel qu'il n'avait jamais fait l'objet du moindre reproche de la part de son employeur, que l'absence qui lui était reprochée résultait du fait qu'il se croyait régulièrement en congé et qu'il avait pris toute mesure pour pallier à son absence et se rendre immédiatement sur son lieu de travail ; qu'en omettant de rechercher si les circonstances particulières dans lesquelles la faute reprochée avait été commise ne lui ôtaient pas tout caractère de gravité, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1232-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-13561
Date de la décision : 06/04/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 10 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 avr. 2016, pourvoi n°14-13561


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Le Bret-Desaché, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.13561
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