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17/05/2016 | FRANCE | N°14-23611

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 mai 2016, 14-23611


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 27 juin 2014), que M. X... a été engagé le 1er juin 1985 par la société Synthexim ; qu'il était responsable du magasin stockage lorsqu'il a été placé en arrêt de travail le 27 septembre 2010 ; qu'au terme des examens médicaux des 28 septembre et 14 octobre 2011, il a été déclaré inapte à son poste, en raison d'une contre-indication à l'exposition aux produits chimiques de l'entreprise, le salarié devant bénéficier d'une aide lors du port de charges supérieure

s à 20 kilos ; que, par courrier du 31 octobre 2011, l'employeur lui a propos...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 27 juin 2014), que M. X... a été engagé le 1er juin 1985 par la société Synthexim ; qu'il était responsable du magasin stockage lorsqu'il a été placé en arrêt de travail le 27 septembre 2010 ; qu'au terme des examens médicaux des 28 septembre et 14 octobre 2011, il a été déclaré inapte à son poste, en raison d'une contre-indication à l'exposition aux produits chimiques de l'entreprise, le salarié devant bénéficier d'une aide lors du port de charges supérieures à 20 kilos ; que, par courrier du 31 octobre 2011, l'employeur lui a proposé un poste de responsable des achats, le descriptif joint à la proposition mentionnant la localisation du poste à Saint Marcel, dans l'Eure, la nécessité d'une formation supérieure Bac+5 et la pratique courante de l'anglais ; que, par courrier du 7 novembre 2011, le salarié a refusé cette proposition, exposant être titulaire d'un simple brevet professionnel sans expérience commerciale et ne maîtriser qu'imparfaitement l'anglais ; qu'il a été licencié le 12 décembre 2011 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement et de le condamner à payer au salarié des sommes au titre de la rupture, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il ne suffit pas que le refus de reclassement par un salarié déclaré inapte à son précédent emploi ne soit pas déclaré « illégitime » pour que l'employeur se voie imputer une carence dans son obligation de reclassement ; qu'en se fondant exclusivement sur le descriptif théorique du poste envisagé sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur les termes de la proposition/ de l'employeur qui, tout en déclarant ne pas avoir immédiatement d'emploi disponible correspondant à la formation de l'intéressé, soulignait la conformité de sa proposition aux prescriptions de la médecine du travail et qui demandait, en conséquence, à M. X... de « faire part de son intérêt » pour ledit poste, ce qui impliquait nécessairement une possibilité bilatérale d'adaptation, la cour d'appel de Douai n'a pas valablement caractérisé une défaillance de la société dans son obligation de reclassement et a privé sa décision de base légale tant au regard de l'article L. 1226-4 que de l'article L. 1231-1 du code du travail ;
2°/ que concernant l'absence d'attribution d'un poste de standardiste chargé de l'accueil, situé sur le lieu de travail originaire de l'intéressé, la société avait exposé que l'établissement était un site de production sur lequel les employés de la réception étaient quotidiennement au contact, en contrariété directe avec les prescriptions du médecin du travail, avec des solvants et des intermédiaires de synthèse du fait de la réception des livraisons effectuées par les fournisseurs ; que viole, ensemble, les articles 5 du code civil et 455 du code de procédure civile la cour d'appel qui, sans effectuer aucune recherche concrète, se borne pour écarter la décision de l'employeur, à énoncer, dans un motif général et abstrait, « qu'il n'est pas interdit de faire une différence entre un poste de responsable du magasin des stocks et un poste de standardiste chargé de l'accueil » ;
Mais attendu que, sans déduire l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de la légitimité du refus par le salarié du poste de responsable des achats proposé en reclassement, la cour d'appel, qui a relevé que l'inadaptation du poste de standardiste, disponible et non proposé en reclassement, invoquée par l'employeur, ne résultait pas des documents produits devant elle dès lors que le médecin du travail n'avait pas précisé que l'inaptitude du salarié était due à une exposition de la totalité du site aux vapeurs chimiques, et que ce médecin n'avait pas été consulté sur ce poste, a, répondant aux conclusions, légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme à titre d'indemnité compensatrice de préavis alors, selon le moyen :
1°/ que la disposition de l'arrêt ayant dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse sera annulée sur la base du premier moyen de cassation, de sorte que, par voie de conséquence, la condamnation à payer une indemnité compensatrice de préavis sera cassée en application de l'article 625 du code de procédure civile ;
2°/ que le salarié inapte à son emploi en conséquence d'une maladie non professionnelle ne peut prétendre au paiement d'une indemnité de préavis qu'il est dans l'impossibilité d'exécuter et que, comme l'a précisé la loi du 22 mars 2012 venue compléter l'article L. 1226-4 du code du travail, cette règle s'applique impérativement, sans compensation possible, à toute rupture de contrat consécutive à un licenciement non annulé, le préavis n'étant, alors, pris en compte que pour le calcul de l'indemnité légale de licenciement, de sorte qu'en mettant à la charge de la société une somme de 8 540,13 euros au titre d'un préavis, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Mais attendu, d'abord, que le rejet du premier moyen prive de portée le second moyen pris en sa première branche ;
Attendu, ensuite, que si un salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité d'exécuter en raison de son inaptitude physique à son emploi, cette indemnité est due en cas de rupture du contrat de travail imputable à l'employeur en raison du manquement à son obligation de reclassement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Synthexim aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Synthexim à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Synthexim.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur X... consécutif à la déclaration d'inaptitude émanant de la médecine du travail, d'AVOIR condamné la SAS SYNTHEXIM à payer à M. X... 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, 2.846,71 € au titre des congés payés du 15 novembre au 12 décembre 2011, 8.540,13 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le licenciement : M. X... était responsable du magasin stockage lorsqu'il a été placé en arrêt de travail le 27 septembre 2010. Les visites de reprise ont eu lieu les 28 septembre et 14 octobre 2011. M. X... a été déclaré inapte à son poste, qui avait été visité par le médecin du travail le 11 octobre, en raison d'une contre-indication à l'exposition aux produits chimiques de l'entreprise. Il est précisé que le salarié devait bénéficier d'un aide lors du port de charges supérieures à 20 kg ; que par courrier du 31 octobre 2011, l'employeur lui proposait un poste de responsable des achats. Le descriptif joint à la proposition mentionne la localisation du poste à Saint Marcel, dans l'Eure, la nécessité d'une formation supérieure Bac+5, la pratique courante de l'anglais ; que par courrier du 7 novembre 2011, M. X... refusait cette proposition en exposant être titulaire d'un simple brevet professionnel sans expérience commerciale et ne maîtriser qu'imparfaitement l'anglais ; que l'employeur soutient que si le poste en cause a été proposé à l'intéressé, c'est qu'il estimait celui-ci être en mesure de l'occuper, au besoin après formation ; que le salarié lui fait reproche de ne pas lui avoir proposé un poste de standardiste qui a fait l'objet d'un recrutement contemporain de son licenciement ; que l'employeur affirme que ce dernier poste n'était pas conforme aux restrictions énoncées par le médecin du travail dans la mesure où, situé au sein de la société SYNTHEXIM, il aurait nécessairement exposé M. X... à l'action des produits chimiques quotidiennement livrés sur le site ; que le refus du poste proposé en reclassement n'est pas illégitime dans la mesure où le salarié ne disposait pas des compétences que lui aurait assurées une formation initiale conforme au descriptif figurant joint à l'offre et pouvait douter de sa capacité de les acquérir alors même que l'employeur n'y mentionne en rien cette possibilité de formation. Il pouvait par ailleurs douter de sa capacité de passer d'une maîtrise imparfaite de la langue anglaise à une pratique courante pourtant exigée ; que par ailleurs l'inadaptation du poste disponible et non proposé en reclassement ne se déduit pas des seuls documents soumis à cette cour. En effet le médecin du travail ne précise pas, dans son avis définitif, que le salarié est inapte à tout poste dans l'entreprise en raison de l'exposition de la totalité du site aux valeurs chimiques et il n'est pas interdit de faire une différence entre un poste de de responsable du magasin des stocks et un poste de standardiste chargé de l'accueil. A tout le moins l'employeur pouvait-il solliciter l'avis du médecin du travail qui a procédé le 11 octobre à l'examen du poste occupé par l'intéressé et qui aurait pu donner son avis sur le poste susceptible d'être proposé ; qu'il en découle que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement et que le licenciement doit être dit sans cause réelle ni sérieuse ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il ne suffit pas que le refus de reclassement par un salarié déclaré inapte à son précédent emploi ne soit pas déclaré « illégitime » pour que l'employeur se voie imputer une carence dans son obligation de reclassement ; qu'en se fondant exclusivement sur le descriptif théorique du poste envisagé sans s'expliquer, comme elle y était invitée (conclusions de la société SYNTHEXIM page 4), sur les termes de la proposition de l'employeur qui, tout en déclarant ne pas avoir immédiatement d'emploi disponible correspondant à la formation de l'intéressé, soulignait la conformité de sa proposition aux prescriptions de la médecine du travail et qui demandait, en conséquence, à Monsieur X... de « faire part de son intérêt » pour ledit poste, ce qui impliquait nécessairement une possibilité bilatérale d'adaptation, la Cour de DOUAI n'a pas valablement caractérisé une défaillance de la société SYNTHEXIM dans son obligation de reclassement et a privé sa décision de base légale tant au regard de l'article L.1226-4 que de l'article L.1231-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE concernant l'absence d'attribution d'un poste de standardiste chargé de l'accueil, situé sur le lieu de travail originaire de l'intéressé, la société SYNTHEXIM avait exposé que l'établissement était un site de production sur lequel les employés de la réception étaient quotidiennement au contact, en contrariété directe avec les prescriptions du médecin du travail, avec des solvants et des intermédiaires de synthèse du fait de la réception des livraisons effectuées par les fournisseurs ; que viole, ensemble, les articles 5 du Code civil et 455 du Code de Procédure Civile la Cour d'appel qui, sans effectuer aucune recherche concrète, se borne pour écarter la décision de l'employeur, à énoncer, dans un motif général et abstrait, « qu'il n'est pas interdit de faire une différence entre un poste de responsable du magasin des stocks et un poste de standardiste chargé de l'accueil ».
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le pourvoi reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société SYNTHEXIM à régler à Monsieur X... une somme de 8.540,13 euros au titre d'indemnité compensatrice de préavis, ainsi que 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ;
AUX MOTIFS (page 3) QUE « le licenciement étant invalidé pour manquement à l'obligation de reclassement, il convient de faire droit à la demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis à hauteur de 8.540,13 euros étant observé que Monsieur X... a été reconnu travailleur handicapé le 4 juin 2008 et qu'il bénéficie des dispositions de l'article L.5213-9 du Code du travail » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la disposition de l'arrêt ayant dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse sera annulée sur la base du premier moyen de cassation, de sorte que, par voie de conséquence, la condamnation à payer une indemnité compensatrice de préavis sera cassée en application de l'article 625 du Code de Procédure Civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, ET DE TOUTE FACON, QUE le salarié inapte à son emploi en conséquence d'une maladie non professionnelle ne peut prétendre au paiement d'une indemnité de préavis qu'il est dans l'impossibilité d'exécuter et que, comme l'a précisé la loi du 22 mars 2012 venue compléter l'article L.1226-4 du Code du travail, cette règle s'applique impérativement, sans compensation possible, à toute rupture de contrat consécutive à un licenciement non annulé, le préavis n'étant, alors, pris en compte que pour le calcul de l'indemnité légale de licenciement, de sorte qu'en mettant à la charge de la société SYNTHEXIM une somme de 8.540,13 euros au titre d'un préavis, la Cour d'appel a violé les textes susvisés.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-23611
Date de la décision : 17/05/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 27 juin 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 mai. 2016, pourvoi n°14-23611


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.23611
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