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25/05/2016 | FRANCE | N°15-16935

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 mai 2016, 15-16935


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Robert Jean-Baptiste X... a engagé une action en partage des biens dépendant, notamment, des successions de ses parents, Robert Félix X... et Thérèse Y..., de nationalité française, décédés respectivement en 1966 et 2000, dont la dernière résidence habituelle était fixée en France ; qu'il s'est opposé à ce que la masse partageable comprenne un immeuble situé en Espagne, acquis indivisément par ses ascendants en 1965, soutenant en être devenu propriétai

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Robert Jean-Baptiste X... a engagé une action en partage des biens dépendant, notamment, des successions de ses parents, Robert Félix X... et Thérèse Y..., de nationalité française, décédés respectivement en 1966 et 2000, dont la dernière résidence habituelle était fixée en France ; qu'il s'est opposé à ce que la masse partageable comprenne un immeuble situé en Espagne, acquis indivisément par ses ascendants en 1965, soutenant en être devenu propriétaire par l'effet de la loi espagnole concernant la prescription acquisitive ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Vu l'article 3, alinéa 2, du code civil ;
Attendu que, pour homologuer l'acte de partage comprenant l'immeuble litigieux, et rejeter la demande de M.
X...
tendant à exclure ce bien, l'arrêt, après avoir relevé que ce dernier acceptait la compétence des juridictions françaises pour statuer sur la propriété du bien, retient que, par l'effet de la règle de conflit de lois relative aux successions immobilières désignant la loi espagnole applicable au bien situé en Espagne, et du renvoi, opéré par cette loi, à la loi nationale du défunt, la loi française est applicable, et, qu'en conséquence, M.
X...
ne peut revendiquer la propriété de l'appartement litigieux par l'effet d'une prescription acquisitive d'une durée de quinze ans, admise par le droit espagnol ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la loi espagnole du lieu de situation de l'immeuble était applicable pour déterminer la propriété de ce bien, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il homologue l'acte de partage comprenant l'immeuble litigieux et rejette la demande de M.
X...
tendant à exclure ce bien, l'arrêt rendu le 4 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne Mme Bénédicte X... et MM. Michel et Simon
X...
aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mai deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. Robert X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir homologué le projet de partage établi le 7 janvier 2010 par Me Z..., notamment en ce qu'il avait porté à l'actif de la succession de Thérèse Y... la valeur du compte-titres dont elle était usufruitière et en ce qui concernait l'évaluation de la quotité disponible et celle des réductions ;
AUX MOTIFS QUE l'appelant sollicite l'inscription au passif de la succession de sa mère Mme Thérèse Y... veuve X... de la valeur d'un portefeuille « Titres » dont elle aurait été bénéficiaire et qui selon lui ne se retrouverait pas en nature au jour du décès de cette dernière ; QU'à l'examen du dossier, la cour observe :- QUE dans la déclaration de la succession de Mme Thérèse Y... veuve X... figure au titre des éléments d'actif un compte « Titres » pour une valeur au décès de celle-ci de 318 715, 53 F ;- QUE n'est nullement rapportée par M. Jean-Baptiste X... la preuve de l'existence d'un autre compte « Titres » sur lequel Mme Thérèse Y... veuve X... aurait pu exercer ses droits d'usufruitière, sachant que lors du décès de son époux M. Robert Félix X..., celle-ci avait déclaré vouloir bénéficier de l'usufruit portant sur la totalité des biens composant la succession de ce dernier, laquelle comportait notamment des valeurs de bourse au porteur et nominatives d'un montant total de 56 201, 90 F ; QUE de la conjonction de ces éléments, il s'évince qu'il y a concordance entre le portefeuille « Titres » existant lors du décès de M. Robert Félix X... et le compte « Titres » retrouvé lors du décès de son épouse Mme Thérèse Y... ; QUE faute pour M. Jean-Baptiste X... de pouvoir démontrer comme il le soutient que la somme portée à l'actif de la succession de cette dernière pour un montant de 318 715, 53 F est manifestement insuffisante pour représenter l'ensemble des titres existant au décès de M. Robert Félix X..., il y a lieu :- de constater que Mme Thérèse Y... veuve X... n'a pas outrepassé ses droits d'usufruitière relativement à cet élément d'actif ;- de débouter M. Jean-Baptiste X... de l'ensemble de ses prétentions formulées au sujet du portefeuille « Titres » devant selon lui être rapporté aux héritiers de son père, et notamment de sa demande d'expertise sollicitée à l'effet de déterminer la valeur dudit portefeuille ;- de considérer qu'une somme de 492 905, 72 F a été à bon droit retenue par le notaire liquidateur au titre des liquidités existant au jour du décès de Mme Thérèse Y... veuve X..., et englobant notamment le compte « Titres » à concurrence de la somme de 318 715, 53 F ;- de confirmer sur ce point le jugement déféré ;

ALORS QUE l'usufruit prend fin à la mort de l'usufruitier, tous les droits du propriétaire se trouvant alors réunis dans la main du nu-propriétaire ; que la cour d'appel, qui a constaté que Thérèse Y... avait joui du seul usufruit d'un compte titre ayant appartenant à son époux prédécédé, devait donc constater qu'après la mort de celle-ci, la propriété du compte titre appartenait dans tous ses éléments, aux nus-propriétaires ; qu'en jugeant néanmoins que le compte titre dont elle n'était qu'usufruitière devait être porté à l'actif de sa succession, la cour d'appel a violé l'article 617 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir homologué le projet de partage établi le 7 janvier 2010 par Me Z..., notamment en ce qu'il avait considéré que l'appartement situé en Espagne dépendait de la succession de Thérèse Y... ;
AUX MOTIFS QUE M. Jean-Baptiste X... conteste l'intégration dans la masse à partager de l'appartement situé à Laredo en Espagne, acquis indivisément par ses parents les époux Robert Félix X.../ Thérèse Y... le 13 septembre 1965, et ce :- en se prévalant sur cet immeuble de la prescription acquisitive reconnue par le droit espagnol au bout de 15 années ;- en acceptant la compétence des juridictions françaises pour connaître des opérations de liquidation et partage de la succession de sa mère Mme Thérèse Y..., et pour statuer sur le sort dudit bien ; QU'à titre liminaire, la cour :- considère QUE M. Jean-Baptiste X... est parfaitement recevable en sa contestation, dès lors (…)- relève le caractère international que revêt la succession de Mme Thérèse Y... veuve X... du fait de l'existence de l'appartement situé à Laredo en Espagne, et la nécessité de déterminer la loi applicable à cet immeuble ; QU'à cet égard, il convient :- de rappeler QU'en application de l'article 3 alinéa 2 du code civil disposant que « Les immeubles même ceux possédés par les étrangers, sont régis par la loi française », les successions immobilières sont régies par la loi du lieu de situation des immeubles ;- de relever l'existence dans les différentes successions à partager et notamment dans celle de Mme Thérèse Y... veuve X..., de plusieurs immeubles situés en France et d'un seul immeuble situé en Espagne ;- de considérer que l'immeuble situé à Laredo en Espagne doit être régi par la loi française correspondant à la loi nationale des époux Robert Félix X.../ Thérèse Y... tous deux décédés en France, et ce : * par l'effet de l'application combinée de la règle de conflit de lois désignant la loi espagnole applicable à l'immeuble situé à Laredo en Espagne, et de la théorie du renvoi opéré par la loi espagnole en direction de la loi nationale du défunt ; d'autant que se trouvent ainsi garanties l'unité successorale et l'application d'une même loi aux meubles comme aux immeubles ; QU'au vu de ces observations, la cour rappelant que le droit français ne reconnaît que la prescription acquisitive de trente ans en matière immobilière, considère :- QUE M. Jean-Baptiste X... ne peut revendiquer la propriété de l'appartement de Laredo par l'effet d'une prescription acquisitive d'une moindre durée par lui invoquée pour une durée de vingt années et ce en vertu d'une usucapion de quinze ans admis par le droit espagnol jugé inapplicable en l'espèce ;- QUE c'est à juste titre que le projet de partage établi par Maître Z... a intégré une somme de 100 000 € correspondant à la valeur non discutée dudit bien, dans la masse à partager au titre du règlement des différentes successions à partager, et notamment de celles des époux Robert Félix X.../ Thérèse Y... qui en étaient propriétaires indivis, respectivement décédés le 9 décembre 1966 et le 25 juin 2000 ; QU'en conséquence, il y a lieu :- de débouter M. Jean-Baptiste X... de l'ensemble de ses demandes relatives à l'appartement de Laredo ;- de confirmer sur ce point le jugement entrepris ;
1- ALORS QUE les immeubles sont régis par la loi du pays où ils sont situés ; que si cette règle peut recevoir exception en matière de succession, la question de savoir si un immeuble a ou non appartenu au de cujus est préalable à celle de la dévolution successorale, est étrangère au droit successoral et doit donc être tranchée par les juridictions du lieu de situation de l'immeuble et selon la loi applicable en ce lieu ; que la cour d'appel, saisie de la question de savoir si M. Jean-Baptiste X... n'avait pas acquis par usucapion, avant même le décès de sa mère, un immeuble situé en Espagne, ne pouvait appliquer la loi française sans violer l'article 3, alinéa 2, du code civil ;
2- ALORS QU'il en va de même du point de savoir si l'immeuble dépendant initialement de la succession, est entré depuis dans le patrimoine d'un tiers ; que la cour d'appel, saisie de la question de savoir si M. Jean-Baptiste X... n'avait pas acquis par usucapion, depuis le décès de sa mère, un immeuble situé en Espagne et dépendant initialement de sa succession, ne pouvait appliquer la loi française sans violer l'article 3, alinéa 2, du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-16935
Date de la décision : 25/05/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONFLIT DE LOIS - Succession - Successions immobilières - Loi applicable - Loi du lieu de situation des immeubles - Exception - Renvoi à une autre loi - Loi désignée par l'effet du renvoi applicable pour déterminer la propriété du bien (non)

En matière de succession immobilière, la loi désignée par l'effet du renvoi opéré par la loi du lieu de situation de l'immeuble n'est pas applicable pour déterminer la propriété de ce bien. Celle-ci est soumise exclusivement à la loi du lieu de situation de l'immeuble


Références :

article 3, alinéa 2, du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 04 novembre 2013

Sur la loi applicable en matière de succession immobilière, à rapprocher :1re Civ., 21 mars 2000, pourvoi n° 98-15650, Bull. 2000, I, n° 96 (cassation) ;1re Civ., 23 juin 2010, pourvoi n° 09-11901, Bull. 2010, I, n° 140 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 mai. 2016, pourvoi n°15-16935, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat général : Mme Valdès-Boulouque
Rapporteur ?: Mme Guyon-Renard
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.16935
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