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06/07/2016 | FRANCE | N°14-22410

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 juillet 2016, 14-22410


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 12 juin 2014), que Mme X..., engagée le 29 janvier 1998 en qualité d'adjointe au délégué général de l'Association Pour Favoriser l'Egalité des chances à l'Ecole est devenue responsable du secteur administratif de l'association le 1er février 2000 ; qu'elle a été licenciée pour motifs économiques le 6 janvier 2011 ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires

, indemnités pour travail dissimulé et exécution déloyale du contrat de travail, alors,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 12 juin 2014), que Mme X..., engagée le 29 janvier 1998 en qualité d'adjointe au délégué général de l'Association Pour Favoriser l'Egalité des chances à l'Ecole est devenue responsable du secteur administratif de l'association le 1er février 2000 ; qu'elle a été licenciée pour motifs économiques le 6 janvier 2011 ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires, indemnités pour travail dissimulé et exécution déloyale du contrat de travail, alors, selon le moyen :

1°/ que même lorsqu'elle est prévue par un accord collectif, la conclusion d'une convention de forfait en jours doit nécessairement faire l'objet d'un accord écrit entre l'employeur et le salarié ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué qu'avant le 3 juillet 2007, date à laquelle elle a signé un avenant à son contrat de travail sous la menace d'un licenciement, aucune convention de forfait écrite ne liait Mme X... à l'Association Pour Favoriser l'Egalité des chances à l'Ecole (APFEE) ; qu'en la déboutant de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et des demandes consécutives, motif pris que nonobstant l'absence d'écrit dont elle avait refusé la signature, elle était liée, pendant la période considérée, par une convention de forfait en jours la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 3121-38 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

2°/ qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production de tous éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en apportant, le cas échéant, la démonstration des horaires effectivement réalisés ; que constitue un tel élément un décompte unilatéralement établi par le salarié, dès lors qu'il est suffisamment précis pour que l'employeur puisse y répondre ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la demande en paiement d'heures supplémentaires présentée par Mme X... était étayée par un décompte " très précis des heures de travail qu'elle prétend avoir effectuées entre 2006 et 2007 ", auquel l'employeur pouvait répondre ; qu'en la déboutant cependant de sa demande la cour d'appel, qui a fait peser sur la seule salariée la charge de la preuve des heures supplémentaires, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

Mais attendu que, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants justement critiqués par la première branche, la cour d'appel, qui, procédant à la pesée des éléments de preuve avancés par l'une et l'autre des parties, a retenu que le décompte au titre des heures supplémentaires produit par la salariée n'apparaissait pas sérieux dans la mesure où il faisait ressortir une moyenne hebdomadaire de 50 heures de travail sur 5 jours, soit dix heures par jour alors qu'il était établi par les attestations produites par l'employeur que la salariée prenait des pauses déjeuner quotidiennes et qu'il lui arrivait de s'absenter pendant la journée, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Danielle X... de ses demandes tendant à la condamnation de son employeur, l'Association Pour Favoriser l'Egalité des Chances à l'Ecole, au paiement des heures supplémentaires effectuées pour son compte ainsi que d'une indemnité pour travail dissimulé et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

AUX MOTIFS QUE " Sur les heures supplémentaires : Madame X... prétend avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées en dépit de ses multiples demandes, et qu'en outre l'APFEE a multiplié les pressions jusqu'à la contraindre, sous menace de licenciement, à lui faire signer le 3 juillet 2007 un avenant rétroactif lui imposant un forfait annuel en jours afin de se soustraire à leur règlement ; qu'elle sollicite en conséquence le paiement de la somme de 20. 530, 58 € au titre des heures supplémentaires prétendument accomplies sur la période comprise entre le 18 avril 2006 et le 30 juin 2007 pour tenir compte de la prescription de cinq ans ;

QU'il convient à cet égard d'observer que Monsieur Jean-Jacques Y..., alors président de l'association, avait souhaité en 2002 engager une réflexion sur l'aménagement du temps de travail, notamment pour les cadres dont le décompte horaire [du] temps de travail n'apparaissait pas adapté ; qu'un accord collectif d'entreprise a ainsi été signé le 30 octobre 2002 permettant le recours au forfait annuel en jours pour tous les cadres autonomes de l'association ; qu'en sa qualité de responsable du pôle administratif et de responsable du personnel, Madame X..., qui avait participé aux travaux préparatoires de cet accord, devait en assurer la mise en place en veillant à ce que chaque salarié concerné, dont elle-même, signe un avenant à son contrat de travail ; qu'elle s'est toutefois abstenue de faire à la différence de tous les autres cadres concernés de l'entreprise, jusqu'à ce que Madame Z..., chargée de la gestion des ressources humaines à partir du mois de septembre 2006, constate cette situation à la fin de l'année 2006 ;

QUE Madame X... ne justifie pas avoir formulé la moindre remarque sur son statut de cadre autonome et l'application à son égard du système de forfait jours pendant toute la période antérieure courant de la fin de l'année 2002 à 2006, enregistrant régulièrement ses jours travaillés sur les feuilles de présence mises à sa disposition, comme cela avait été demandé à tous les cadres bénéficiant du forfait jours ; que ce n'est qu'à partir du 04 juillet 2006, selon les courriers électroniques et pièces qu'elle verse aux débats, qu'elle a fait état de sa situation en se prévalant de l'existence de nombreuses heures supplémentaires qu'elle disait avoir effectuées depuis 2003 et qui ne lui avaient pas été rémunérées, tout en reconnaissant qu'elle acceptait « de rester au statut cadre forfait jours bien que celui-ci ne soit pas conforme, avec toutefois une augmentation de 300 € brut à compter de janvier 2006. Le but étant d'avoir un salaire correct en fonction des heures effectuées » ; que, dans ces conditions, elle reconnaissait expressément en juillet 2006 que le système de forfait jours lui bien était applicable pour accepter d'y rester, mais à certaines conditions ;

QUE, par lettre recommandée du 22 mai 2007, Monsieur A..., alors directeur de l'association, a formellement demandé à Madame X... de régulariser sa situation en signant l'avenant à son contrat de travail ; que la salariée s'y est opposée en considérant que ses fonctions ne correspondaient pas à celles d'un cadre autonome, dans la mesure où elle ne bénéficiait pas d'une large autonomie dans l'organisation de son travail et la gestion de son temps de travail, pour être en réalité à la disposition permanente de l'association ; que, prenant acte de son refus, l'APFEE a convoqué Madame X... à un entretien préalable en vue de son licenciement qui s'est tenu le 03 juillet 2007, au cours duquel elle a finalement accepté de signer l'avenant à son contrat de travail dont elle prétend à présent qu'il ne serait pas valable ;

QUE [cependant] la mise en place des conventions individuelles de forfait en jours au sein de l'APFEE en 2003 répondait aux exigences de l'article L. 212-15-3, III ancien du code du travail alors applicable, pour avoir été prévue par un accord d'entreprise sur l'aménagement du temps de travail signé le 30 octobre 2002 avec un salarié dûment mandaté à cet effet, ensuite déposé le 07 novembre 2002 au greffe du conseil de prud'hommes de Lyon, et visant expressément les cadres de l'association dont le temps de travail est aléatoire, les horaires difficilement contrôlables, et le degré d'autonomie important, et prévoyant pour les forfaits ainsi mis en place une durée maximale de 210 jours travaillés par an, ainsi que les modalités de suivi ; que Madame X... croit pouvoir contester son statut de « cadre autonome » en faisant valoir qu'elle aurait été soumise à l'horaire collectif ainsi qu'à un planning prédéfini par la direction de l'association, et qu'en outre, lorsqu'elle s'absentait en cours de journée, ce n'était en aucun cas pour se livrer à des activités personnelles, mais pour honorer des rendez-vous avec des clients de l'association et notamment des fournisseurs, de sorte que la catégorie de « cadre autonome » dans laquelle l'association a souhaité la placer n'aurait été instituée que pour lui permettre d'échapper au paiement des heures supplémentaires ; que [cependant] Madame X... disposait du statut de cadre depuis 2003 en sa qualité de responsable du pôle administratif de l'association ; qu'elle bénéficiait nécessairement de ce fait d'une large autonomie dans l'organisation de son temps de travail et dans l'exécution de ses missions, fixant librement et sans contrôle ses heures d'arrivée et de sortie, disposant de la faculté de s'absenter dans la journée pour des motifs personnels sans en référer à ses supérieurs hiérarchiques, même si dans les faits elle estimait devoir être régulièrement présente, et fixant librement ses dates de congés sous réserve de ne pas nuire au bon fonctionnement de son service, ainsi qu'en ont attesté Madame Claude B..., secrétaire, Madame Camille Z..., responsable des ressources humaines, Madame Anne C..., comptable, Madame Jocelyne D..., assistante du président, et Madame E..., secrétaire administrative ;

QUE dans ces conditions … son employeur était en droit de lui demander en 2007 de signer le contrat qui avait été établi et signé par le directeur de l'association depuis 2003 sur lequel elle s'était abstenue jusqu'alors d'apposer sa signature, alors même qu'en sa qualité de responsable du pôle administratif et chargée du personnel, il lui avait été demandé de mettre en place les conventions individuelles de forfait dont elle n'ignorait pas qu'elles concernaient tous les cadres de l'association, dont elle-même ;
qu'en conséquence elle est mal fondée à soutenir que la direction de l'association l'aurait forcée à signer un contrat antidaté ; que son retard à apposer sa signature ne peut lui permettre d'obtenir le paiement d'heures supplémentaires prétendument effectuées pendant la période antérieure entre le 1er janvier 2006 et le 30 juin 2007, alors qu'elle était liée par une convention de forfait en jours même si celle-ci n'avait pas encore été régularisée de son fait par un écrit, ainsi que les dommages et intérêts qui lui ont été alloués par le conseil de prud'hommes, cette juridiction ayant cru devoir condamner l'APFEE à indemniser la salariée du préjudice ressortant du non paiement des heures supplémentaires à défaut de pouvoir en évaluer le montant " ;

1°) ALORS QUE même lorsqu'elle est prévue par un accord collectif, la conclusion d'une convention de forfait en jours doit nécessairement faire l'objet d'un accord écrit entre l'employeur et le salarié ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué qu'avant le 3 juillet 2007, date à laquelle elle a signé un avenant à son contrat de travail sous la menace d'un licenciement, aucune convention de forfait écrite ne liait Madame X... à l'Association Pour Favoriser l'Egalité des Chances à l'Ecole (APFEE) ; qu'en la déboutant de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et des demandes consécutives, motif pris que nonobstant l'absence d'écrit dont elle avait refusé la signature, elle était liée, pendant la période considérée, par une convention de forfait en jours la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 3121-38 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

ET AUX MOTIFS QU'en outre, indépendamment du forfait jours qui s'appliquait à elle, Madame X... ne produit aux débats aucun élément de preuve, ou à tout le moins d'un commencement de preuve par écrit, de nature à étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires conformément aux dispositions de l'article L. 3171-4 du Code du travail, le décompte très précis des heures de travail qu'elle prétend avoir effectuées entre 2006 et 2007 ayant été établi par ses soins pour les besoins de la cause, pour ne l'avoir fourni à l'association qu'avec ses conclusions déposées devant le conseil de prud'hommes au mois de novembre 2011 et n'en avoir jamais fait état lors de ses entretiens annuels d'évaluation ; qu'en outre, il n'apparaît pas sérieux pour faire ressortir une moyenne hebdomadaire de 50 heures de travail sur 5 jours, soit 10 heures par jour, alors qu'il est établi par les attestations précitées que la salariée prenait des pauses déjeuner quotidiennes et qu'il lui arrivait de s'absenter pendant la journée ; que dans ces conditions Madame X... doit être déboutée de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, et le jugement rendu par le conseil de prud'hommes réformé en ce qu'il à condamné l'APFEE à lui payer la somme de 5. 000, 00 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour non paiement des heures supplémentaires " ;

QU'en l'absence de tout travail dissimulé, l'appelante ne peut en outre qu'être déboutée de sa demande en paiement de l'indemnité prévue à l'article L. 8223-1 du code du travail (…) " (arrêt p. 4, 5, 6 alinéas 1 à 4) ;

2°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production de tous éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en apportant, le cas échéant, la démonstration des horaires effectivement réalisés ; que constitue un tel élément un décompte unilatéralement établi par le salarié, dès lors qu'il est suffisamment précis pour que l'employeur puisse y répondre ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que la demande en paiement d'heures supplémentaires présentée par Madame X... était étayée par un décompte " très précis des heures de travail qu'elle prétend avoir effectuées entre 2006 et 2007 ", auquel l'employeur pouvait répondre ; qu'en la déboutant cependant de sa demande la Cour d'appel, qui a fait peser sur la seule salariée la charge de la preuve des heures supplémentaires, a violé l'article L. 3171-4 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-22410
Date de la décision : 06/07/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 12 juin 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 jui. 2016, pourvoi n°14-22410


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.22410
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