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14/09/2016 | FRANCE | N°14-24357

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 septembre 2016, 14-24357


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 4 juillet 2014), que Mme X..., engagée le 1er janvier 2005 par l'association Mission locale jeunes Bugey-plaine de l'Ain (l'association), avec reprise d'ancienneté à compter de novembre 2001, a saisi le 8 juillet 2011 la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail, prétendant notamment être victime de harcèlement moral ; qu'elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre du 15 juin 2012 ;


Sur les deux premiers moyens réunis :
Attendu que la salariée fait g...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 4 juillet 2014), que Mme X..., engagée le 1er janvier 2005 par l'association Mission locale jeunes Bugey-plaine de l'Ain (l'association), avec reprise d'ancienneté à compter de novembre 2001, a saisi le 8 juillet 2011 la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail, prétendant notamment être victime de harcèlement moral ; qu'elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre du 15 juin 2012 ;

Sur les deux premiers moyens réunis :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail et à la condamnation de l'association au paiement de diverses sommes au titre de la rupture de ce contrat, au titre de la réparation de son préjudice moral et au titre de la prime de responsabilité, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; que pour établir le harcèlement moral dont elle était la victime, la salariée faisait notamment état de la privation de ses attributions et responsabilités contractuelles, du défaut de paiement de sa prime de responsabilité, de son placement sous le « tutorat » de sa subordonnée hiérarchique, de l'obligation qui lui avait été faite lors de son retour d'arrêt maladie de dater, émarger et préciser sur une « feuille de remise de document » chacun des documents dont elle demandait communication pour effectuer son travail, de l'évocation en assemblée générale de la rupture de son contrat de travail, et de la privation de son bureau et produisait aux débats des certificats médicaux imputant directement son état dépressif marqué à la dégradation de ses activités professionnelles ; qu'après avoir constaté la réalité ces manquements, la cour d'appel a cru pouvoir s'abstenir de rechercher s'ils ne caractérisaient pas, pris dans leur ensemble, des agissements répétés de harcèlement moral ayant eu pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ou en tout cas une méconnaissance par l'employeur de son obligation de sécurité, et à tout le moins des manquements de nature à justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1152-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
2°/ qu'en s'abstenant de rechercher si ces faits de l'employeur ne caractérisaient pas des manquements contractuels de nature à lui imputer la rupture du contrat de travail et à tout le moins une méconnaissance de son obligation de sécurité de résultat, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du code civil et L. 4121-1 à L. 4121-4 du code du travail ;
3°/ qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que la salariée soutenait, et produisait les certificats médicaux propres à l'établir, avoir été victime d'une grave dépression en suite du comportement de sa subordonnée hiérarchique, Mme Y... ; qu'en se fondant sur les seules dénégations de la salariée incriminée et sur les qualités professionnelles que lui prêtaient quelques attestations, pour écarter le harcèlement moral, la cour d'appel qui n'a pas recherché si les agissements de cette salariée n'avaient pas en réalité pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail de l'intéressée susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a procédé aux recherches prétendument omises, a fait ressortir, d'une part, que certains des faits que la salariée invoquait comme faisant présumer l'existence d'un harcèlement moral n'étaient pas établis et que, s'agissant des autres, l'employeur prouvait que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, d'autre part, qu'il ne pouvait être reproché aucune négligence fautive, déloyauté ou mauvaise foi de l'employeur au sens de l'article L. 4121-1 du code du travail ; que dès lors elle a pu décider que le harcèlement moral n'était pas caractérisé, que l'employeur n'avait pas manqué à son obligation de sécurité de résultat, et que n'était pas rapportée la preuve d'un manquement de l'employeur de nature à justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à la condamnation de l'association à lui payer diverses sommes au titre de la rupture de son contrat de travail, alors, selon le moyen :
1°/ que le licenciement prononcé pour une inaptitude physique résultant d'agissements fautifs de l'employeur est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que la cassation a intervenir sur le premier et/ ou le deuxième moyen entraînera donc par voie de conséquence la cassation des chefs critiqués ;
2°/ qu'en jugeant que la salariée ne rapportait pas la preuve de l'imputabilité de son inaptitude à des agissements fautifs de son employeur après avoir constaté que les certificats médicaux versés aux débats imputaient directement son état dépressif marqué à la dégradation de ses activités professionnelles, que la salariée avait été placée sous le « tutorat » de sa subordonnée hiérarchique, et obligée de dater, émarger et préciser sur une « feuille de remise de document » chacun des documents dont elle demandait communication pour effectuer son travail, qu'elle avait été privée de sa prime de responsabilité au profit de sa subordonnée hiérarchique, et de son bureau et que la rupture de son contrat de travail avait été évoquée en assemblée générale, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil ensemble les articles L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail ;
3°/ que les dispositions du code du travail sont autonomes par rapport au droit de la sécurité sociale et qu'il appartient aux juges du fond de rechercher eux-mêmes l'existence du lien de causalité entre l'origine professionnelle de l'affection et l'activité du salarié ; qu'en fondant sa décision sur le refus de prise en charge de la maladie de la salariée par la sécurité sociale au titre de la maladie professionnelle, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-2 et suivants du code du travail ;
4°/ que le licenciement du salarié inapte ne peut revêtir de cause réelle et sérieuse qu'à la condition que soit établie l'impossibilité de reclasser le salarié ; qu'en jugeant fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement de la salariée sans s'assurer que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement à son égard, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a estimé que la salariée ne rapportait pas la preuve que son inaptitude était imputable à des manquements de l'employeur ; que le moyen, inopérant en sa première branche en ce qu'il invoque une cassation par voie de conséquence du chef de la décision critiquée par les deux premiers moyens, inopérant en sa troisième branche comme portant sur un motif surabondant et nouveau, mélangé de fait et de droit, et partant irrecevable en sa quatrième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Martine X... de ses demandes tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail et à la condamnation de la mission locale au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, d'une indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du préjudice moral et de la prime de responsabilité.
AUX MOTIFS QUE Madame X... soutient principalement que son employeur aurait gravement manqué à ses obligations légales et contractuelles dans la mesure où elle aurait été victime de harcèlement moral au sens des dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail du fait de son attitude combinée à celle de Madame Y... qui ont concouru à la dégradation de son état de santé ; qu'en outre son employeur se serait abstenu d'agir à l'encontre de Madame Y... afin de faire cesser ses agissements, tirant au contraire profit de cette situation pour la priver de ses attributions et la dévaloriser ; qu'il appartient dès lors à Madame X..., conformément aux dispositions de l'article L. 1154-1 du code du travail, d'établir les faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, puis à l'Association Mission Locale Jeunes Bugey-Plaine de l'Ain de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que sur les faits de harcèlement moral reprochés à Madame Y..., Madame X... prétend que dès sa prise de fonction Madame Y..., qui occupait alors les fonctions de conseillère, se serait présentée à elle en lui disant qu'elle aurait pu être directrice à sa place, qu'elle aurait ensuite tenté de soulever l'équipe contre elle, ne lui adressant pas à la parole ou lui tenant des propos désagréables allant jusqu'à la traiter de paranoïaque, refusant de travailler avec elle sur certains dossiers, pratiquant la rétention d'information ou prenant la parole en ses lieu et place et se considérant comme la véritable maîtresse des lieux ; que cependant les griefs ainsi formulés à l'encontre de Madame Y..., qu'elle avait elle-même promue en qualité de chargée de projets en mars 2005, ne sont corroborés par aucun élément objectif ; qu'ils sont expressément contestés par la personne concernée qui a rédigé six longues attestations dans le cadre de la présente procédure pour répondre aux accusations portées contre elle et dire sa consternation à la lecture des conclusions déposées ; qu'il apparaît à cet égard que Madame Y... a cherché à démissionner de ses fonctions à deux reprises, une première fois fin janvier 2008 pour suivre une formation en cuisine qui lui a été refusée faute de moyens et une seconde fois, après le retour de Madame X... au mois de juin 2011, ce qui ne correspond pas l'attitude d'une personne se livrant habituellement au harcèlement moral ; qu'en outre X... disposait à l'évidence, en raison des postes hiérarchiquement occupées par chacune d'elles, des moyens pour réagir aux comportements prétendument harceleurs de sa subordonnée ; qu'elle n'a toutefois jamais fait état auprès des représentants de l'association de la moindre difficulté avec cette personne ; que la seule lettre qu'elle ait adressée à Madame Agnès Z..., présidente de l'association, est en date du 10 mars 2010 ; que si Madame X... y mentionne sa souffrance au travail et les agissements répétitifs qu'elle aurait subis en interne mais aussi lors de réunions depuis plusieurs années, sans toutefois mentionner expressément le terme de « harcèlement », elle ne cite à aucun moment le nom de Madame Y... ou celui d'un autre de ses collaborateurs comme étant à l'origine de ses maux, plaçant de la sorte son employeur dans l'impossibilité d'intervenir pour remédier à sa situation de mal être pour laquelle il ne connaissait ni la cause ni l'origine ; que la présidente lui ayant répondu qu'elle ne pouvait prendre position sur les faits antérieurs à sa prise de fonction mais qu'elle se déclarait ouverte à toute discussion pouvant lui apporter une aide et lui proposait un rendez-vous en présence de trois élus conformément au choix du bureau actuel de travailler en groupe, Madame X... n'a pas maintenu sa demande d'entretien de sorte qu'elle n'a pu être reçue ; que ses arrêts maladie n'ont ensuite pas permis à l'employeur d'organiser les entretiens individuels ou autres réunions ; que l'appelante fait encore état d'un malaise dont elle a été victime le 05 juin 2008 sur son lieu de travail du fait de l'hostilité ouverte entretenue à son encontre par Madame Y... et qui a justifié son transport aux urgences de la clinique d'Ambérieu en Bugey ; que Madame Y... justifie pour sa part avoir été absente ce jour le matin pour participer à une réunion à la Mission Locale d'Oyonnax puis l'après-midi à cinq rendez-vous avec des jeunes, sans avoir toutefois constaté l'existence d'un quelconque malaise de la directrice ; que l'Association Mission Locale Jeunes Bugey-Plaine de l'Ain verse pour sa part aux débats les attestations de nombreuses personnes qui ont travaillé avec Madame Y... la décrivant comme une personne sérieuse, consciencieuse, investie dans ses fonctions et respectueuse du point de vue de chacun ; qu'il ressort en revanche des témoignages ainsi produits que Madame X... s'est très rapidement montrée hautaine, méprisante, voire tyrannique dans l'exercice de ses fonctions, au point qu'un climat de défiance et de méfiance provoqué par son attitude s'est rapidement instauré non seulement auprès des salariés mais également des partenaires de l'association qui ne souhaitaient plus la rencontrer et cherchaient à l'éviter ; que Madame Y..., dont l'appelante se prétend aujourd'hui la victime, a été contrainte, ainsi que ses autres collègues, à supporter son comportement dans la mesure où, tout en lui confiant des tâches importantes, elle ne manquait pas de la dénigrer et de la dévaloriser aux yeux de tous ; qu'en outre Madame X... a très mal accepté d'être temporairement remplacée pendant son arrêt maladie de plus de 2 ans par Madame Y... alors que cette dernière n'avait rempli cette fonction que parce que la proposition lui en avait été faite par le Bureau de l'association ; que l'appelante est ainsi mal fondée à prétendre que Madame Y... aurait cherché à prendre sa place, d'autant qu'elle n'avait pas cherché à le faire précédemment pour avoir refusé d'assurer le remplacement par intérim en 1999 de la précédente directrice, et avoir ensuite adopté la même position et provoqué la nomination d'un directeur intérimaire pendant le premier arrêt maladie de Madame X... des mois d'octobre à décembre 2007 ; qu'en conséquence Madame X... n'établit pas les faits de harcèlement qu'elle impute à Madame Y... ; que, sur les faits de harcèlement moral reprochés à l'employeur, Madame X... reproche ensuite à l'Association Mission Locale Jeunes Bugey-Plaine de l'Ain d'avoir encouragé Madame Y... dans ses entreprises par son inertie, voire sa complicité passive ; qu'aucun fait de harcèlement moral n'ayant été établi à l'encontre de Madame X..., l'appelante est mal fondée à reprocher à son employeur de n'y avoir pas remédié ; qu'elle invoque encore l'existence d'un rapport d'audit mené à charge contre elle en son absence et déposé à la demande de l'association ; qu'il ressort toutefois de l'attestation de Monsieur Jacky A..., président de l'Union Régionales des Missions Locales Rhône Alpes qui est à l'origine de cet audit, que Madame X... en avait été informée le 04 novembre 2008 au cours d'une réunion en présence de Madame Z..., présidente de la Mission Locale Bugey-Plaine de l'Ain ; que celle-ci avait présenté la situation en faisant état des difficultés de fonctionnement et du très mauvais climat qui régnait au sein de le service ; que le placement en arrêt maladie de Madame X... a retardé la mise en place de l'audit qu'il n'a finalement été réalisé qu'en fin d'année 2009 ; que son coût a été pris en charge par des fonds publics provenant du Conseil Régional Rhône Alpes à la demande d'élus locaux, de sorte de ce rapport n'a pas été commandité par les représentantes de l'Association Mission Locale Jeunes Bugey-Plaine de l'Ain pour évincer Madame X... ainsi qu'elle le prétend ; que l'audit, qui met en évidence les lacunes dans la gestion du personnel, la communication interne, la perte totale de confiance envers Madame X... tant de la part du personnel que des intervenants extérieurs et qui préconise un changement de directeur, a été effectué par un cabinet spécialisé en toute transparence et impartialité ; qu'il ne saurait dès lors être considéré comme constitutif d'un fait de harcèlement moral ; que Madame X... se plaint également d'avoir encore été dévalorisée par son employeur qui l'aurait dépossédée de ses attributions en les confiant à Madame Y..., nommée à sa place en son absence et assurant son tutorat à son retour, alors même que son bureau lui avait été supprimé pour être occupé par deux autres salariés et que sa prime de responsabilité ne lui était plus versée ; que, selon avenant à son contrat de travail en date du 19 mars 2009, Madame Y... n'a toutefois pas été nommée pour la remplacer mais seulement pour assurer son intérim en son absence prolongée pendant plus de deux ans, alors même qu'elle disposait de l'ancienneté et de l'expérience à le faire et qu'il convenait de finaliser le contrat d'objectif qui devait être présenté à la Direction du Travail et de l'Emploi au début de l'année 2009 et dont Madame X... avait la charge ; que l'intéressée n'a pas obtenu d'augmentation de salaire mais a gardé la même classification ainsi que l'établissent les bulletins de paie ; que l'indemnité de responsabilité et la prime de remplacement temporaire de la directrice, prévues par la convention collective, lui ont toutefois été octroyées dans la mesure où elle assumait la responsabilité effective de la structure aux lieu et place de la directrice qu'elle remplaçait, conformément aux dispositions de l'article 6. 3. 3 de ladite convention collective ; que Madame X... ne saurait reprocher à l'Association Mission Locale Jeunes Bugey-Plaine de l'Ain d'avoir mentionné, pour des raisons pratiques, le nom de Madame Y... dans l'annuaire des Missions Locales ; que lors de sa reprise de service à l'expiration de son congé maladie, Madame X... a émis des avis très négatifs sur le travail réalisé en son absence, ainsi qu'il apparaît les attestations des membres du Bureau de l'association versées aux débats, pour avoir affiché clairement son hostilité à l'égard de Madame Y... ; que, dans ces conditions, le Bureau de l'association a décidé, afin de faciliter la reprise des foncions par la directrice, de mettre en oeuvre un accompagnement en sa faveur pendant les premières semaines sous forme d'un « tutorat », même si le terme est maladroit, destiné à lui permettre de prendre connaissance des dossiers auprès de Madame Y... qui l'avait remplacée pendant une si longue période ; que Madame X... ne peut encore tirer argument de l'installation de deux salariés dans le bureau qu'elle occupait avant son arrêt maladie, alors même son bureau est resté vacant pendant huit mois, que son employeur a été contraint d'y affecter du personnel nouvellement recruté, qu'un nouveau bureau a été mis à sa disposition lors sa reprise du travail le 8 juin 2011 et qu'elle n'a alors émis aucune observation ; que le grief tenant à sa dévalorisation du fait du comportement fautif de son employeur n'est dès lors pas davantage fondé que le précédent ; que Madame X... prétend encore avoir été placée à son retour dans l'obligation d'émarger une feuille de remise de documents chaque fois qu'elle demandait la communication d'un document pour effectuer un travail, celle-ci comprenant la date et le libellé du document ; qu'il ressort cependant de l'attestation de Madame B... que celle-ci s'était plainte auprès de la présidente de l'association des demandes formulées par Madame X..., qui ne cessait de lui réclamer des documents qu'elle n'était pas en mesure de lui fournir et qui l'avait convoquée à un entretien pour lequel la salarié avait souhaité la présence de la présidente afin d'éviter toute difficulté ; que celle-ci s'y étant rendue, il a été proposé à Madame X... d'établir la liste des documents qu'elle souhaitait consulter ; que cette pièce ne peut dès lors s'analyser en un mode de pression supplémentaire constitutive de harcèlement ; que l'appelante fait enfin état du « déballage » de sa situation en assemblée générale du 16 juin 2011 au cours de laquelle son employeurs évoqué la possible rupture conventionnelle de son contrat de travail ainsi que les négociations confidentielles en cours » ; que la discussion a toutefois été limitée à la présentation à l'assemblée générale par les membres du Bureau des conséquences financières d'une éventuelle rupture conventionnelle du contrat de travail de Madame X..., dans la mesure où ils ne pouvaient se dispenser de rendre compte des enjeux financiers d'une telle rupture, qui engageait des fonds publics et nécessitait le recours à des emprunts ; qu'en conséquence il ne peut être reproché aucune négligence fautive, déloyauté ou mauvaise foi de l'Association Mission Locale Jeunes Bugey-Plaine de l'Ain au sens de l'article L. 4121-1 et L, 2222-1 du code du travail à l'égard de Madame X... ; qu'enfin l'appelante, qui ne s'est jamais véritablement plainte de harcèlement moral avant l'introduction de la présente procédure prud'homale, produit un certificat médical du Docteur C... du 18 octobre 2011 faisant état d'un « état dépressif marqué, réactionnel à une dégradation de ses activités professionnelles » avec « une accentuation des symptômes à la suite de sa reprise de travail du 6 au 30 juin 2011 » ; qu'elle verse en outre aux débats un nouveau certificat médical de ce même médecin daté du 22 juillet 2013 indiquant qu'elle « a présenté à la suite d'une modification de représentativité de ses employeurs, et probablement d'un excès de travail... un burn out, pathologie qui met en cause l'excès de prise en charge des responsabilités professionnelles et le cumul des heures consacrées à cet emploi » avec « la modification (selon elle) du comportement et de la considération à son égard de sa direction » ; que cependant ces certificats médicaux, établis par son médecin traitant, ne permettent pas de caractériser suffisamment la situation décrite par la salariée ; qu'en outre, ils sont dépourvus de valeur probante dans la mesure où le médecin, qui ne dispose que des seules informations qui lui sont transmises par la patiente, ne peut démontrer le lien de causalité entre l'affection qu'il constate et les conditions de travail invoquées ; qu'en conséquence Madame X... ne rapportant pas la preuve des torts qu'elle impute à l'Association Mission Locale Jeunes Bugey-Plaine de l'Ain, elle ne peut qu'être déboutée de sa demande de résiliation de son contrat de travail ; qu'il importe dès lors de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a dit et jugé que la demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail n'était pas fondée en son principe et que Madame X... ne pouvait dès lors obtenir le paiement des dommages et intérêts, de l'indemnité compensatrice de préavis et du solde l'indemnité de licenciement qu'elle sollicitait.
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE la résiliation judiciaire consiste à demander au juge de prononcer la rupture du contrat de travail aux torts de l'autre partie lorsque l'une des parties au contrat n'exécute pas ses obligations vis-à-vis de l'autre partie ; celle-ci peut alors demander en justice la résiliation du contrat et obtenir des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ; que l'action en résiliation judiciaire du contrat de travail n'est ouverte qu'aux salariés en cas d'inexécution par l'employeur de ses obligations ; qu'en l'espèce, le Conseil constate que Madame X..., malgré sa lettre du 10 Mars 2010 adressé à la Mairie de Lagnieu, n'apporte pas d'élément précis permettant de mettre en cause l'exécution de bonne foi du contrat de travail, ni que son employeur n'a pas exécuté ses obligations vis-à-vis d'elle-même ; qu'il y aura lieu en conséquence de débouter Madame X... de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.
ALORS QU'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; que pour établir le harcèlement moral dont elle était la victime, Madame Martine X... faisait notamment état de la privation de ses attributions et responsabilités contractuelles, du défaut de paiement de sa prime de responsabilité, de son placement sous le « tutorat » de sa subordonnée hiérarchique, de l'obligation qui lui avait été faite lors de son retour d'arrêt maladie de dater, émarger et préciser sur une « feuille de remise de document » chacun des documents dont elle demandait communication pour effectuer son travail, de l'évocation en assemblée générale de la rupture de son contrat de travail, et de la privation de son bureau et produisait aux débats des certificats médicaux imputant directement son état dépressif marqué à la dégradation de ses activités professionnelles ; qu'après avoir constaté la réalité ces manquements, la Cour d'appel a cru pouvoir s'abstenir de rechercher s'ils ne caractérisaient pas, pris dans leur ensemble, des agissements répétés de harcèlement moral ayant eu pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ou en tout cas une méconnaissance par l'employeur de son obligation de sécurité, et à tout le moins des manquements de nature à justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1152-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.
ET ALORS à tout le moins QU'en s'abstenant de rechercher si ces faits de l'employeur ne caractérisaient pas des manquements contractuels de nature à lui imputer la rupture du contrat de travail et à tout le moins une méconnaissance de son obligation de sécurité de résultat, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du Code civil et L. 4121-1 à L. 4121-4 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Martine X... de ses demandes tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail et à la condamnation de la mission locale au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, d'une indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du préjudice moral et de la prime de responsabilité.
AUX MOTIFS cités au premier moyen
ALORS QU'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que Madame Martine X... soutenait, et produisait les certificats médicaux propres à l'établir, avoir été victime d'une grave dépression en suite du comportement de sa subordonnée hiérarchique, Madame Y... ; qu'en se fondant sur les seules dénégations de la salariée incriminée et sur les qualités professionnelles que lui prêtaient quelques attestations, pour écarter le harcèlement moral, la Cour d'appel qui n'a pas recherché si les agissements de cette salariée n'avaient pas en réalité pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail de Madame Martine X... susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1152-1 du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Martine X... de ses demandes tendant à la condamnation de la mission locale à lui verser une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents, une indemnité de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS cités au premier moyen
ET AUX MOTIFS QUE Madame X... a été licenciée par l'Association Mission Locale Jeunes Bugey-Plaine de l'Ain selon lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 juin 2011 motivée par son inaptitude définitive et l'impossibilité de reclassement ; que la salariée n'ayant pas rapporté la preuve, au vu des développements qui précèdent, que son inaptitude aurait été consécutive aux manquements fautifs de son employeur, et le médecin du travail ayant prononcé le 16 mai 2011 un avis non contesté d'inaptitude définitive au terme d'une unique visite pour cause de danger immédiat, il convient de confirmer encore le jugement entrepris en ce qu'il a dit que son licenciement était pourvu d'une cause réelle et sérieuse et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes.
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE le Conseil considère que, compte tenu de l'avis d'inaptitude prononcé par le Médecin du travail en date du 16 Mai 2011 sans proposition ni seconde visite, la procédure de licenciement pour impossibilité de reclassement suite à inaptitude totale et définitive est pourvue de cause réelle et sérieuse ; que le Conseil considère que, compte tenu du refus de prise en charge au titre de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle par la sécurité sociale, l'inaptitude n'a pas d'origine professionnelle ; qu'il y aura lieu en conséquence de débouter Madame X... de sa demande relative à la requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
ALORS QUE le licenciement prononcé pour une inaptitude physique résultant d'agissements fautifs de l'employeur est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; Que la cassation a intervenir sur le premier et/ ou le deuxième moyen entrainera donc par voie de conséquence la cassation des chefs critiqués ;
ALORS en tout cas QU'en jugeant que Madame X... ne rapportait pas la preuve de l'imputabilité de son inaptitude à des agissements fautifs de son employeur après avoir constaté que les certificats médicaux versés aux débats imputaient directement son état dépressif marqué à la dégradation de ses activités professionnelles, que Madame Martine X... avait été placée sous le « tutorat » de sa subordonnée hiérarchique, et obligée de dater, émarger et préciser sur une « feuille de remise de document » chacun des documents dont elle demandait communication pour effectuer son travail, qu'elle avait été privée de sa prime de responsabilité au profit de sa subordonnée hiérarchique, et de son bureau et que la rupture de son contrat de travail avait été évoquée en assemblée générale, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil ensemble les articles L. 1235-1 et L. 1235-3 du Code du travail.
ET ALORS QUE les dispositions du Code du travail sont autonomes par rapport au droit de la sécurité sociale et qu'il appartient aux juges du fond de rechercher eux-mêmes l'existence du lien de causalité entre l'origine professionnelle de l'affection et l'activité du salarié ; qu'en fondant sa décision sur le refus de prise en charge de la maladie de Madame X... par la sécurité sociale au titre de la maladie professionnelle, la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-2 et suivants du Code du travail.
ALORS en toute hypothèse QUE le licenciement du salarié inapte ne peut revêtir de cause réelle et sérieuse qu'à la condition que soit établie l'impossibilité de reclasser le salarié ; qu'en jugeant fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement de Madame Martine X... sans s'assurer que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement à son égard, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-24357
Date de la décision : 14/09/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 04 juillet 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 sep. 2016, pourvoi n°14-24357


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.24357
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