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11/05/2017 | FRANCE | N°16-12803

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 11 mai 2017, 16-12803


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 12 novembre 2015) et les productions, que la société Marchetto a interjeté appel d'un jugement rendu par un tribunal de commerce en intimant la société Amatrans et la société de droit taïwanais Evergreen Shipping Marine Corporation (la société Evergreen) ; qu'avisée par le greffe de ce que la société Evergreen n'avait pas constitué avocat, la société Marchetto ne lui a pas signifié la déclaration d'appel dans le délai requis ; que dans ses premières c

onclusions d'intimée en date du 27 novembre 2014, la société Amatrans a deman...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 12 novembre 2015) et les productions, que la société Marchetto a interjeté appel d'un jugement rendu par un tribunal de commerce en intimant la société Amatrans et la société de droit taïwanais Evergreen Shipping Marine Corporation (la société Evergreen) ; qu'avisée par le greffe de ce que la société Evergreen n'avait pas constitué avocat, la société Marchetto ne lui a pas signifié la déclaration d'appel dans le délai requis ; que dans ses premières conclusions d'intimée en date du 27 novembre 2014, la société Amatrans a demandé la confirmation du jugement et a formé appel incident à l'encontre de la société Evergreen alors non constituée ; que la société Amatrans a signifié ces conclusions à la société Evergreen le 9 décembre 2014 ; que par une ordonnance du 5 mars 2015 devenue irrévocable, le conseiller de la mise en état a prononcé la caducité de la déclaration d'appel en tant que formée à l'encontre de la société Evergreen ; que la société Amatrans ayant déféré à la cour d'appel une ordonnance ultérieure du conseiller de la mise en état déclarant irrecevable son appel incident, la société Evergreen a demandé que les dernières conclusions au fond, identiques aux premières conclusions d'appelante que la société Marchetto lui avait signifiées, soient déclarées irrecevables ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Evergreen fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'appel incident de la société Amatrans, alors, selon le moyen,

1°/ que la caducité de la déclaration d'appel fait disparaître rétroactivement les actes de procédure qui, comme l'appel incident, ont été accomplis sur le fondement de cet appel principal entaché de caducité ; qu'en décidant que la caducité de la déclaration d'appel de la société Marchetto à l'égard de la société Evergreen était sans influence sur le droit de la société Amatrans d'agir par voie d'appel incident à l'encontre de la société Evergreen, cependant que cet appel incident était anéanti rétroactivement par l'effet de la caducité de l'appel principal, qui constituait son support procédural nécessaire, la cour d'appel a violé les articles 385, 550 et 902 du code de procédure civile ;

2°/ que le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche ; qu'en retenant que l'appel dirigé par la société Marchetto contre la société Amatrans avait été déclaré recevable par le conseiller de la mise en état dans son ordonnance du 5 mars 2015, cependant qu'il ressortait du dispositif de cette décision que le conseiller de la mise en état avait dit n'y avoir lieu à statuer sur la recevabilité de cet appel, qui n'était pas discutée dans le cadre de l'incident qui lui était soumis, la cour d'appel a méconnu l'autorité de chose jugée qui s'attachait à l'ordonnance susvisée et violé les articles 4 et 480 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'un intimé, à l'égard duquel l'acte d'appel est frappé de caducité, reste néanmoins partie intimée à l'égard du co-intimé qui forme à son encontre un appel incident ;

Qu'ayant exactement énoncé que la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de la société Evergreen était sans incidence sur le droit de la société Amatrans à agir par voie d'appel incident à son encontre et qu'elle restait saisie de la demande d'indemnisation formée par la société Marchetto contre la société Amatrans et de la demande de condamnation à garantie formée par la société Amatrans contre la société Evergreen, la cour d'appel en a justement déduit que l'appel incident formé par la société Amatrans à l'encontre de la société Evergreen dans les délais prévus par les articles 909 et 911 du code de procédure civile était recevable ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la seconde branche du moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la société Evergreen fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à voir dire la société Marchetto irrecevable à conclure au fond contre elle, alors, selon le moyen,

1°/ qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation qui interviendra du chef du premier moyen de cassation déclarant recevable la société Amatrans en son appel incident dirigé contre la société Evergreen entraînera la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif de l'arrêt critiqué par le second moyen, qui est dans sa dépendance nécessaire ;

2°/ qu'en tout état de cause, la notification de conclusions contenant un appel provoqué contre la partie intimée par l'appelant principal dont la déclaration d'appel encourt la caducité faute d'avoir été signifiée dans le délai requis, ne peut faire échec, en la régularisant, à la sanction procédurale spécifique prévue par l'article 902, alinéa 3, du code de procédure civile ; qu'en déboutant la société Evergreen de sa demande tendant à voir dire la société Marchetto irrecevable à conclure au fond contre elle, cependant que la déclaration d'appel de la société Marchetto étant caduque, cette société n'était pas recevable à notifier des conclusions contenant un appel provoqué dirigé contre la société Evergreen pour faire échec, en la régularisant, à la sanction procédurale de caducité prévue par l'article 902, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour d'appel a violé ce texte par refus d'application, ensemble les articles 538 et 549 du même code ;

Mais attendu, d'une part, que le premier moyen est rejeté et, d'autre part, qu'il résulte ni de l'arrêt ni des productions que les nouvelles conclusions au fond signifiées par la société Marchetto aient contenu un appel provoqué à l'encontre de la société Evergreen ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en chacune de ses branches, est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Evergreen Shipping Marine Corporation aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Evergreen Shipping Marine Corporation ; la condamne à payer à la société Amatrans la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Evergreen Shipping Marine Corporation.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré recevable la société Amatrans en son appel incident dirigé contre la société Evergreen Shipping Marine Corporation (Evergreen Taiwan) ;

AUX MOTIFS QUE par ordonnance du 5 mars 2015 le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable l'appel formé par la société Marchetto à l'égard de la société Evergreen France, qui n'est pas partie à l'instance, prononcé la caducité de la déclaration d'appel de la société Marchetto à l'égard de la société Evergreen Taïwan et déclaré recevable l'appel de la société Marchetto à l'égard de la société Amatrans ; que la société Marchetto avait fait signifier à la société Amatrans le 2 octobre 2014 des conclusions au fond par lesquelles elle demande à la cour, notamment de condamner in solidum la société Amatrans et la société Evergreen Taïwan à l'indemniser d'un ensemble de dommages et en particulier la perte de valeur sur le transport, le coût du transport et l'immobilisation de trésorerie ; que la société Amatrans a déposé le 27 novembre 2014 des conclusions portant appel incident, dirigé contre la société Evergreen Taïwan qui n'avait pas alors constitué avocat ; que par ces conclusions elle demandait à la cour notamment de condamner, en cas d'infirmation du jugement déféré, la société Evergreen Taïwan à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ; que par assignation du 9 décembre 2014 intitulée appel provoqué, elle a signifié à la société Evergreen Taïwan les conclusions du 27 novembre 2014 susvisées ; qu'aux termes de l'article 548 du code de procédure civile, « l'appel peut être incidemment relevé par l'intimé tant contre l'appelant que contre les autres intimés » ; que (selon) l'article 549 du même code : « l'appel incident peut également émaner, sur l'appel principal ou incident qui le provoque, de toute personne, même non intimée, ayant été partie en première instance » ; que selon les dispositions de l'article 909 du code de procédure civile : « l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité soulevée d'office, d'un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour conclure et former, le cas échéant, appel incident » ; que l'article 911 du code de procédure civile dispose que « sous les sanctions prévues aux articles 908 à 910 6 les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe. Sous les mêmes sanctions elles sont signifiées dans le mois suivant l'expiration de ce délai aux parties qui n'ont pas constitué avocat » ; que l'appel incident peut être formé alors même que celui qui le forme serait forclos pour agir au principal ; qu'en ce dernier cas, cependant, la recevabilité de l'appel incident reste subordonnée à la recevabilité de l'appel principal à l'égard de l'auteur de l'appel incident ; que, par ailleurs, la caducité constitue la sanction du défaut d'accomplissement de diligences ou de formalités ; que ses effets doivent donc être limités à celui à qui incombaient ces diligences ou formalités ; que la caducité de l'appel à l'égard d'un intimé est la sanction d'une négligence de l'appelant principal, de sorte qu'elle ne doit avoir d'effet qu'à l'égard de celui-ci ; qu'elle n'affecte pas en elle-même rétroactivement l'appel incident qu'un intimé aurait régulièrement formé ; qu'en conséquence si, antérieurement à la constatation de la caducité, un intimé a déposé, dans le délai légal, des conclusions comportant appel incident, celui-ci doit être considéré recevable ; qu'en l'espèce, si par sa décision du 5 mars 2015, le conseiller de la mise en état a constaté la caducité de l'appel principal à l'égard de la société Evergreen Taïwan, il a déclaré recevable l'appel de la société Marchetto à l'égard de la société Amatrans ; qu'en conséquence l'instance n'est pas achevée, la cour restant au contraire saisie de l'appel principal dirigé contre la société Amatrans et donc de la demande d'indemnisation formée par la société Marchetto contre la société Amatrans, et de la demande de condamnation à garantie formée par la société Amatrans contre la société Evergreen Taïwan par voie d'appel incident ; que, dans le cadre du litige dont la cour reste saisie, la société Amatrans, contre laquelle est formée la demande d'indemnisation susvisée et qui en première instance a été condamnée, in solidum avec la société Marchetto, à payer le coût du fret, dispose d'un intérêt à agir en garantie à l'encontre de la société Evergreen Taïwan ; que de ces éléments il résulte que la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de la société Evergreen Taïwan est sans influence sur le droit de la société Amatrans d'agir par voie d'appel incident à l'encontre de la société Evergreen Taïwan, partie intimée et partie en première instance ; que, sur le respect du délai pour agir, la société Marchetto a signifié à la société Amatrans ses conclusions au fond le 2 octobre 2014 ; que la société Evergreen Taïwan n'avait pas alors constitué avocat ; que la société Amatrans a formé appel incident en signifiant par assignation du 9 décembre 2014 intitulées appel provoqué les conclusions du 27 novembre 2014 susvisées ; que ces éléments font ressortir que l'appel incident a été formé dans le délai légal imparti par les articles 909 et 911 précités, point qui n'est pas discuté par la société Evergreen Taïwan ; que l'appel incident réalisé par la société Amatrans à l'égard de la société Evergreen Taïwan sera donc déclaré recevable sans qu'il soit nécessaire de distinguer entre appel incident et appel provoqué ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la caducité de la déclaration d'appel fait disparaître rétroactivement les actes de procédure qui, comme l'appel incident, ont été accomplis sur le fondement de cet appel principal entaché de caducité ; qu'en décidant que la caducité de la déclaration d'appel de la société Marchetto à l'égard de la société Evergreen Shipping Marine Corporation (Evergreen Taïwan) était sans influence sur le droit de la société Amatrans d'agir par voie d'appel incident à l'encontre de la société Evergreen Shipping Marine Corporation (Evergreen Taïwan), cependant que cet appel incident était anéanti rétroactivement par l'effet de la caducité de l'appel principal, qui constituait son support procédural nécessaire, la cour d'appel a violé les articles 385, 550 et 902 du code de procédure civile ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche ; qu'en retenant que l'appel dirigé par la société Marchetto contre la société Amatrans avait été déclaré recevable par le conseiller de la mise en état dans son ordonnance du 5 mars 2015, cependant qu'il ressortait du dispositif de cette décision que le conseiller de la mise en état avait dit n'y avoir lieu à statuer sur la recevabilité de cet appel, qui n'était pas discutée dans le cadre de l'incident qui lui était soumis, la cour d'appel a méconnu l'autorité de chose jugée qui s'attachait à l'ordonnance susvisée et violé les articles 4 et 480 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société Evergreen Shipping Marine Corporation (Evergreen Taïwan) de sa demande tendant à voir dire la société Marchetto irrecevable à conclure au fond contre elle ;

AUX MOTIFS QUE la société Evergreen Taïwan expose que, par conclusions au fond signifiées le 1er août 2015, la société Marchetto conclut à nouveau dans des termes identiques à ses premières écritures d'appelante, sans faire état des différents incidents de procédure ; qu'elle fait valoir que, dans la mesure où le lien d'instance entre la société Marchetto et la société Evergreen Taïwan a été définitivement rompu, ces conclusions sont sans objet et irrecevables ; que cependant, la cour reste saisie de l'appel principal formé par la société Marchetto à l'encontre de la société Amatrans et de l'appel incident formé par celle-ci ; que, sous réserve de l'appréciation des moyens et prétentions quant au fond du litige, la société Marchetto reste recevable à déposer des conclusions au fond dans le cadre du présent litige ;

ALORS, D'UNE PART, QUE, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation qui interviendra du chef du premier moyen de cassation déclarant recevable la société Amatrans en son appel incident dirigé contre la société Evergreen Shipping Marine Corporation (Evergreen Taiwan) entraînera la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif de l'arrêt critiqué par le second moyen, qui est dans sa dépendance nécessaire ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QU' en tout état de cause, la notification de conclusions contenant un appel provoqué contre la partie intimée par l'appelant principal dont la déclaration d'appel encourt la caducité faute d'avoir été signifiée dans le délai requis, ne peut faire échec, en la régularisant, à la sanction procédurale spécifique prévue par l'article 902, alinéa 3, du code de procédure civile ; qu'en déboutant la société Evergreen Shipping Marine Corporation (Evergreen Taiwan) de sa demande tendant à voir dire la société Marchetto irrecevable à conclure au fond contre elle, cependant que la déclaration d'appel de la société Marchetto étant caduque, cette société n'était pas recevable à notifier des conclusions contenant un appel provoqué dirigé contre la société Evergreen Shipping Marine Corporation (Evergreen Taiwan) pour faire échec, en la régularisant, à la sanction procédurale de caducité prévue par l'article 902, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour d'appel a violé ce texte par refus d'application, ensemble les articles 538 et 549 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-12803
Date de la décision : 11/05/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 12 novembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 11 mai. 2017, pourvoi n°16-12803


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.12803
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