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29/06/2017 | FRANCE | N°16-15734

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 juin 2017, 16-15734


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1233-3 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 1er mars 2001 par la société Olaria en qualité de responsable de magasin ; qu'elle a été licenciée pour motif économique le 11 juin 2008 ;

Attendu que pour condamner l'employeur à payer à la salariée une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail, l'arrêt retient que l'employeur explique que la future acti

onnaire de la société a travaillé bénévolement dans la boutique de septembre 2008 jusqu'au ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1233-3 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 1er mars 2001 par la société Olaria en qualité de responsable de magasin ; qu'elle a été licenciée pour motif économique le 11 juin 2008 ;

Attendu que pour condamner l'employeur à payer à la salariée une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail, l'arrêt retient que l'employeur explique que la future actionnaire de la société a travaillé bénévolement dans la boutique de septembre 2008 jusqu'au 2 février 2009, date de la cession d'actions à son profit et qu'elle a alors occupé l'emploi de la salariée, sans statut ni rémunération les trois mois ayant précédé l'acquisition du capital social ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'en supprimant le poste de la salariée et en faisant assumer cette fonction par la future dirigeante de la société travaillant de manière bénévole, l'employeur avait procédé à la suppression de son poste, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Olaria

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Olaria à payer à Mme Marylise X... la somme de 18 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail, avec intérêts au taux légal à compter du 26 septembre 2012, date du jugement, sur 15 000 €, et à compter de l'arrêt sur le surplus ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur le licenciement et ses conséquences :
que par lettre recommandée du 4 juillet 2008, la société OLARIA a notifié à Marylise X... son licenciement dans les termes suivants : «... pour le 3ème exercice consécutif, les comptes arrêtés au 31 décembre 2007 font apparaître non seulement une perte de 34'427 euros, mais également une nette dégradation du chiffre d'affaires, celui-ci passant de 309'485 euros en 2006 à 257'984 euros en 2007. Le premiers mois de l'exercice 2008 confirment une tendance négative conduisant à l'injection par l'actionnaire d'argent frais pour permettre de faire face aux charges d'exploitation. Malgré mon souhait comme actionnaire et Président de poursuivre l'oeuvre de Gérard Y..., fondateur de la Société, brusquement disparu, je dois aujourd'hui constater que compte tenu notamment de mon âge et de mon expérience, je n'ai plus les ressources et le dynamisme souhaitable pour m'atteler au redressement de la société. Ce constat m'a conduit à rechercher un repreneur pour la société et donc pour la boutique dont vous êtes responsable. Le repreneur trouvé... a la volonté de prendre lui-même la responsabilité de la boutique, ce qui conduit à la suppression de votre poste pour limiter les charges d'exploitation. La structure de la société qui n'a qu'une seule boutique et un seul emploi à temps plein, ne permet pas d'envisager de mesures de reclassement interne. C'est pourquoi nous sommes contraints de vous notifier votre licenciement pour motif économique : suppression de poste » ; que la société Olaria explique que son président et unique actionnaire, Claude Z..., qui souhaitait vendre ses actions a trouvé un repreneur en la personne d'une ancienne salariée, Jacqueline A..., qui voulait tenir elle-même la boutique, que cette décision impliquait la suppression du poste de Marylise X..., que la future actionnaire a donc travaillé bénévolement dans la boutique de septembre 2008 jusqu'au 2 février 2009, date de la cession d'actions à son profit et de sa nomination en qualité de président de la société en remplacement de Claude Z..., démissionnaire ; que Marylise X... précise que Jacqueline A..., candidate à la reprise de la société, a exigé son départ préalablement à l'acquisition du capital social, ce qui explique son licenciement intervenu sept mois avant la reprise de la société ; que les difficultés économiques de la SAS Olaria sont révélées par les comptes annuels de son exercice clos le 31 décembre 2007, le compte de résultat faisant en effet apparaître une perte de 31 018 €, supérieure à la perte dégagée le 31 décembre 2006 qui s'élevait alors à 18 509 €, perte résultant notamment d'une diminution du chiffre d'affaires net qui est passé d'un exercice à l'autre de 259 506 € à 309 485 € ; que si la décision de supprimer le poste de responsable de magasin qu'occupait Marylise X... pouvait se justifier dans son principe par la situation économique de l'entreprise, la cour ne peut que constater que cette suppression n'a pas été réalisée puisque la salariée a été remplacée en octobre 2008 par Jacqueline A...qui a occupé son emploi, selon les déclarations de la société Olaria, sans statut ni rémunération les trois mois ayant précédé l'acquisition du capital social ; que lors du licenciement, le 4 juillet 2008, le motif invoqué, soit la suppression du poste de responsable du magasin, n'était pas sincère puisque la suppression n'est jamais intervenue, le futur acquéreur de l'entreprise remplaçant « bénévolement » la salariée licenciée ; que c'est donc à raison que le conseil de prud'hommes a considéré que l'exigence formulée par le futur cessionnaire de l'entreprise ne constituait pas un motif légitime autorisant le cédant à rompre le contrat de travail de sa salariée ; que la moyenne des 3 derniers mois de salaire versés à Marylise X... avant son licenciement s'élève à 2 990, 32. € ; qu'en considération de son ancienneté, 7 années de service au sein de la société, de son âge, 56 ans lors de la rupture, et des circonstances du licenciement, la cour dispose des éléments de préjudice pour porter à 18 000 € la réparation du dommage causé par le licenciement abusif » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « sur la rupture du contrat de travail : vu les articles L. 1224-1, L. 1234-12, L. 1233-16, L. 1235-1 et L. 1233-3 du code du travail ; que Mme X..., engagée en qualité de vendeuse le 1er juin 2005 par M. B..., imprimeur, a été licenciée le 4 juillet 2008 pour motif économique, que la lettre de licenciement était rédigée en ces termes : « Malgré mon souhait comme actionnaire et Président de poursuivre l'oeuvre de Gérard Y..., fondateur de la Société, brusquement disparu, je dois aujourd'hui constater que compte tenu notamment de mon âge et de mon expérience, je n'ai plus les ressources et le dynamisme souhaitable pour m'atteler au redressement de la société. Ce constat m'a conduit à rechercher un repreneur pour la société et donc pour la boutique dont vous êtes responsable. Le repreneur trouvé (mais cela aurait été la même chose si j'avais décidé de reprendre la maîtrise de l'exploitation de la société) a la volonté de prendre lui-même la responsabilité de la boutique, ce qui conduit à la suppression de votre poste pour limiter les charges d'exploitation » ; qu'ayant relevé que la société avait licenciée la salariée le 4 juillet 2008, soit plusieurs mois avant la reprise de cette affaire par le cessionnaire le 2 février 2009 (sic) ; que le conseil décide, hors de toute dénaturation, que la société avait agi avec une légèreté critiquable et causé à la salariée un préjudice résultant de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ; que pour débouter la salariée de sa demande d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la partie défenderesse retient que les résultats de l'entreprise nécessitaient pour la reprise de l'activité par le nouvel employeur une économie importante des charges d'exploitation et que le licenciement peut être effectué par l'ancien employeur en vue de la cession ; qu'en plaidant ainsi, alors que si les dispositions des articles L. 1224-1 et L. 1234-12 du code du travail ne font pas obstacle à des licenciements pouvant intervenir antérieurement à la cession pour des motifs économiques, l'exigence formulée par l'acquéreur du licenciement d'un salarié employé dans l'entreprise transférée ne saurait constituer pour le cédant une cause légitime de rupture du contrat de travail de l'intéressé ; que le conseil en déduit que la société n'a pas donné de base légale à son licenciement ; que cette rupture des relations contractuelles ouvre droit à réparations ; que le conseil dispose des éléments nécessaires pour fixer à 15 000 € le montant de la réparation du préjudice subi » ;

ALORS 1/ QUE Mme X... reconnaissait elle-même dans ses conclusions que son poste avait été supprimé sept mois après la notification de son licenciement c'est-à-dire au mois de février 2009 (conclusions, p. 13, alinéa 3) ; que la société Olaria rappelait dans ses propres écritures que « les tâches qui incombaient à Mme X... sont désormais directement assurées par Mme A..., en sa qualité de président mandataire social et unique associée de la société » (conclusions, p. 16, antépénultième alinéa) ; qu'en retenant pourtant que la « suppression n'est jamais intervenue » (arrêt, p. 4, alinéa 1er), quand cette circonstance était acquise aux débats, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS 2/ QUE la société Olaria indiquait dans ses conclusions oralement soutenues à l'audience que Mme X... avait « apporté son aide à la société dès qu'elle a été dispensée de l'exécution de son préavis pour aider aux ventes de fin d'année et procéder aux commandes de produits pour la saison commençant après les soldes de janvier » (conclusions, p. 7, antépénultième alinéa) et que « les tâches qui incombaient à Mme X... sont désormais directement assurées par Mme A..., en sa qualité de président mandataire social et unique associée de la société » (conclusions, p. 16, antépénultième alinéa) ; qu'en retenant pourtant que « Jacqueline A...a occupé son emploi, selon les déclarations de la société Olaria, sans statut ni rémunération les trois mois ayant précédé l'acquisition du capital social » (arrêt, p. 4, alinéa 1er), la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'exposante, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS ET EN TOUT ETAT DE CAUSE 3/ QUE constitue une suppression d'emploi le remplacement d'un salarié par des collaborateurs bénévoles ; qu'en retenant pourtant que le licenciement de Mme X... serait dépourvu de cause réelle et sérieuse dans la mesure où la « suppression du poste de responsable n'est jamais intervenue, le futur acquéreur de l'entreprise remplaçant « bénévolement » la salariée licenciée » (arrêt, p. 4, alinéa 1er), la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;

ALORS 4/ QUE la réorganisation de l'entreprise justifiée par des difficultés économiques constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en conséquence, repose sur une cause réelle et sérieuse le licenciement d'un responsable de magasin en vue d'une cession d'actions, le cessionnaire ayant décidé d'exploiter directement ce magasin pour limiter les coûts d'exploitation ; qu'en l'espèce, la société Olaria soutenait dans ses conclusions que le licenciement de Mme X... le 4 juillet 2008 avait été décidé en vue de la cession des actions et que si cette cession n'avait été réalisée qu'au mois de février 2009 c'est uniquement en raison des difficultés rencontrées par le cessionnaire pour trouver un mode de financement (conclusions, p. 5 à 7) ; qu'en retenant pourtant que « lors du licenciement, le 4 juillet 2008, le motif invoqué, soit la suppression du poste de responsable du magasin, n'était pas sincère puisque la suppression n'est jamais intervenue, le futur acquéreur de l'entreprise remplaçant « bénévolement » la salariée licenciée » (arrêt, p. 4, alinéa 1er), sans rechercher, comme elle était invitée à le faire, si la suppression de l'emploi n'avait pas été retardée par un événement imprévisible à la date du licenciement et non imputable à l'employeur, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;

ALORS 5/ QUE la cession des actions d'une société par actions simplifiée ne constitue pas un changement d'employeur, de sorte qu'elle n'emporte pas transfert automatique des contrats de travail au cessionnaire ; qu'en retenant pourtant que « l'exigence formulée par le futur cessionnaire de l'entreprise ne constituait pas un motif légitime autorisant le cédant à rompre le contrat de travail de sa salariée » (arrêt, p. 4, alinéa 1er), la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 1224-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-15734
Date de la décision : 29/06/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 jui. 2017, pourvoi n°16-15734


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.15734
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