La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/09/2017 | FRANCE | N°16-11775

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 septembre 2017, 16-11775


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 décembre 2015), qu'engagée par l'association Office du tourisme et des congrès de Paris le 9 mai 1997 en qualité d'agent d'accueil et de renseignement, Mme X...a été licenciée par une lettre du 17 novembre 2009 pour inaptitude médicalement constatée et impossibilité de reclassement ; que, soutenant que son inaptitude avait pour origine un harcèlement moral, elle a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la condamnation de son employ

eur à lui payer diverses sommes ;
Attendu que la salariée fait grief à l'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 décembre 2015), qu'engagée par l'association Office du tourisme et des congrès de Paris le 9 mai 1997 en qualité d'agent d'accueil et de renseignement, Mme X...a été licenciée par une lettre du 17 novembre 2009 pour inaptitude médicalement constatée et impossibilité de reclassement ; que, soutenant que son inaptitude avait pour origine un harcèlement moral, elle a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la condamnation de son employeur à lui payer diverses sommes ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que, le salarié est tenu d'apporter des éléments laissant présumer l'existence d'un harcèlement et l'employeur, au vu de ces éléments, doit établir que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision est justifiée par les éléments objectifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément relevé que les divers documents médicaux communiqués par Mme X...font clairement état d'un syndrome post-traumatique suite à une situation de harcèlement moral dans le milieu professionnel ; qu'en considérant que ces documents ne pouvaient à eux-seuls établir la matérialité des faits constitutifs de harcèlement, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve du harcèlement sur Mme X..., a violé l'article L. 1154-1 du code du travail ;
2°/ que, la preuve de faits de harcèlement est libre ; qu'en jugeant que les certificats et avis médicaux ne peuvent à eux seuls établir la matérialité de faits constitutifs de harcèlement, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
3°/ que, le juge ne peut écarter les éléments propres à établir la matérialité de faits précis et concordants permettant de présumer l'existence du harcèlement sans les avoir examinés dans leur ensemble ; qu'en l'espèce, l'arrêt énonce que, pour établir des faits de harcèlement moral, Mme X...a fait état d'insultes proférées par ses collègues devant des clients, d'une accusation de délation, de la dégradation de son état de santé à l'origine de nombreux arrêts de maladie et de la mise en place d'un mi-temps thérapeutique, de rechutes et d'avis d'inaptitudes, corroborés par différentes pièces régulièrement versées aux débats dont le procès-verbal de son audition auprès des services de police le 29 juillet 2009, une plainte avec constitution de partie civile, une attestation de M. Y...et un dossier médical comportant de nombreux certificats médicaux et un rapport psychiatrique ; qu'en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par la salariée, alors qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis, dont les certificats médicaux, laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral, et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer le contraire, la cour d'appel a violé les textes les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
4°/ que, en relevant, pour faire échec aux demandes de Mme X..., qu'elle n'a jamais fait état, auprès de quiconque, de faits de harcèlement moral avant d'être licenciée, la cour d'appel, qui a statué par une motivation inopérante à y faire échec, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1154- 1du code du travail ;
Mais attendu que sans méconnaître les règles d'administration de la preuve applicables en la matière, la cour d'appel, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la quatrième branche, constaté que la salariée n'établissait pas la matérialité de faits pouvant laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Mme X...de ses demandes en condamnation de l'Association Office de tourisme et des congrès de Paris à paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts en réparation des préjudices économique et moral subis, et d'une indemnité compensatrice de préavis avec congés payés afférents ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme X...soutient que le licenciement prononcé est dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors qu'il a pour origine le harcèlement qu'elle a subi sur son lieu de travail de la part de collègues ; qu'aux termes des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que selon l'article L. 1154-1 du même code, en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que Mme X...explique que plusieurs salariés ont entamé, en 2000, une procédure judiciaire contre l'employeur pour un problème d'heures supplémentaires, qu'elle a refusé de se joindre à cette procédure et qu'elle a été ensuite mise à l'écart et plus spécialement harcelée par Mme Laurence A... ; qu'elle fait état d'insultes proférées par cette personne à son encontre devant des collègues, devant des touristes-clients, d'une accusation de délation au motif qu'elle s'entendait bien avec sa chef de service ; qu'elle évoque la dégradation de son état de santé à l'origine de nombreux arrêts maladie, de la mise en place d'un mi-temps thérapeutique, des rechutes dont elle a souffert ; que pour justifier des faits allégués, Mme X...communique :- son audition par les services de police le 29 juillet 2009 consécutive à la lettre qu'elle avait adressée au procureur de la République près du tribunal d'instance de Paris pour lui signaler des faits de harcèlement moral,- sa plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction près du tribunal de grande instance de Paris le 8 octobre 2009,- l'attestation de M. Serge Y...qui témoigne des qualités de Mme X...qu'il décrit comme ayant été « joyeuse, paisible et simple » et du désarroi qui a été le sien consécutivement « aux marques d'hostilité qui lui ont été manifestées par ses collègues », que ce témoin constate que Mme X...« s'est progressivement repliée sur elle-même », qu'il « fallait lui arracher les confidences sur ces événements », qu'« il ne voit pas comment imputer sa dépression profonde à une autre cause que les actes d'hostilité qu'elle a subis sur son lieu de travail de la part de certains collègues et de supérieurs hiérarchiques »,- son dossier médical, ses arrêts de travail, de nombreux certificats médicaux, l'avis d'inaptitude ; que ces divers documents médicaux font clairement état d'un syndrome de stress post-traumatique suite à une situation de harcèlement dans le milieu professionnel ; qu'or, aucun des éléments invoqués par la salariée comme permettant de présumer l'existence d'un harcèlement n'est matériellement établi, les divers documents établis par des médecins et spécialistes diagnostiquant la réalité d'un état dépressif sévère post traumatique en lien avec une situation de harcèlement au sein du milieu professionnel ne pouvant établir à eux seuls la matérialité des faits constitutifs du harcèlement ; qu'en effet, les autres documents communiqués par la salariée à savoir, son audition par les services de police à la suite de sa lettre dénonçant des faits de harcèlement et sa plainte avec constitution de partie civile entre les mains du doyen du juge d'instruction ne présentent pas de valeur probante dans le présent débat dès lors que ces documents relatent les déclarations de la salariée elle-même qui ne peut ainsi « se constituer de preuves à soi-même » ; qu'au surplus, le juge d'instruction saisi a rendu, le 26 août 2011 une ordonnance de non-lieu, aux termes de laquelle il indique que l'ensemble des témoins entendus, sur proposition de la partie civile elle-même, n'ont pu apporter des éléments permettant de corroborer les faits dénoncés par elle, que seule a pu être rapportée l'aversion importante ressentie par Mme X...à l'encontre de sa collègue Mme A ; qu'enfin, si M. Y...a été le témoin de la dégradation de l'état de santé de Mme X...et de son désarroi, il ressort des termes mêmes de l'attestation qu'il a rédigée qu'il a reçu les confidences de la salariée sur les événements à l'origine de ceux-ci, lui-même n'ayant jamais été le témoin direct des actes d'hostilité de la part des collègues mises en cause ; que l'employeur communique aux débats de nombreux témoignages et spécialement celui de Mme Marie-Josèphe Z..., assistante de direction, secrétaire du comité d'hygiène et de sécurité qui atteste qu'elle n'a jamais été consultée que ce soit par le médecin du travail ou par Mme X...elle-même pour une plainte pour harcèlement la concernant ; qu'à défaut pour Mme X...d'établir matériellement les éléments invoqués comme laissant présumer l'existence d'un harcèlement, les certificats et avis médicaux ne pouvant à eux seuls établir la matérialité de faits constitutifs de harcèlement, c'est pertinemment que les premiers juges l'ont déboutée de ses demandes tant au titre du harcèlement qu'au titre du licenciement, puisqu'il ne peut être retenu que le licenciement prononcé pour inaptitude et impossibilité de la reclasser a pour origine le harcèlement invoqué ; que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE, sur les demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour préjudice moral et pour préjudice économique, que le harcèlement moral se définit par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (article L. 1152-1 du travail) ; que le conseil constate que Mme Claudine X...n'a jamais fait état d'un harcèlement moral tout au long de la relation de travail ; que ni le CHSCT, ni la médecine du travail n'ont alerté l'Office de Tourisme et des Congrès de Paris à ce sujet ; que par ailleurs, une ordonnance de non-lieu a été délivrée le 26 août 2011 par le juge d'instruction, après une longue enquête ; que dans ces conditions, le conseil confirme que la salariée ne rapporte aucun fait précis laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral dont elle aurait été victime et la déboute de l'ensemble de ses demandes à ce titre ; qu'en outre, le conseil constate que l'Office de Tourisme et des Congrès de Paris s'est efforcé d'être le plus accommodant possible envers Mme Claudine X...: * un aménagement de ses horaires a été mis en place, * un changement d'affectation à sa demande, * : * un aménagement de ses horaires a été mis en place, * un changement d'affectation à sa demande, * un entretien d'évaluation dans des lieux neutres, * application des prérogatives de la médecin du travail ; que par conséquent, le conseil dit que le harcèlement moral n'est pas fondé et que le licenciement de Mme Claudine X...repose bien sur une cause réelle et sérieuse ; que dans ces conditions, le conseil déboute Mme Claudine X...de l'ensemble de ses demandes à ce titre ; que le conseil ne retenant pas le harcèlement moral émanant de l'Office de Tourisme et des Congrès de Paris, l'état de santé de Mme Claudine X...ne peut être imputé à son employeur ; qu'elle a été régulièrement rémunérée, tant par son employeur que par la caisse d'assurance maladie ; que Mme Claudine X...a, par ailleurs, obtenu du tribunal des affaires de sécurité sociale, par décision du 20 octobre 2011, le rétablissement de ses indemnités journalières avec effet rétroactif au 1er octobre 2009 ; que dès que l'Office de Tourisme et des Congrès de Paris a eu connaissance de cette décision, le complément de salaire correspondant a été versé par ses soins à Mme Claudine X...; que par conséquent, le conseil dit que Mme Claudine X...n'a pas subi de préjudice économique dû à l'Office de Tourisme et des Congrès de Paris et la déboute de sa demande de dommages et intérêts ;
1°) Alors que, le salarié est tenu d'apporter des éléments laissant présumer l'existence d'un harcèlement et l'employeur, au vu de ces éléments, doit établir que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision est justifiée par les éléments objectifs ; qu'en l'espèce, la cour a expressément relevé que les divers documents médicaux communiqués par Mme X...font clairement état d'un syndrome post-traumatique suite à une situation de harcèlement moral dans le milieu professionnel ; qu'en considérant que ces documents ne pouvaient à eux-seuls établir la matérialité des faits constitutifs de harcèlement, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve du harcèlement sur Mme X..., a violé l'article L. 1154-1 du code du travail ;
2°) Alors que, la preuve de faits de harcèlement est libre ; qu'en jugeant que les certificats et avis médicaux ne peuvent à eux seuls établir la matérialité de faits constitutifs de harcèlement, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
3°) Alors que, le juge ne peut écarter les éléments propres à établir la matérialité de faits précis et concordants permettant de présumer l'existence du harcèlement sans les avoir examinés dans leur ensemble ; qu'en l'espèce, l'arrêt énonce que, pour établir des faits de harcèlement moral, Mme X...a fait état d'insultes proférées par ses collègues devant des clients, d'une accusation de délation, de la dégradation de son état de santé à l'origine de nombreux arrêts de maladie et de la mise en place d'un mi-temps thérapeutique, de rechutes et d'avis d'inaptitudes, corroborés par différentes pièces régulièrement versées aux débats dont le procès-verbal de son audition auprès des services de police le 29 juillet 2009, une plainte avec constitution de partie civile, une attestation de M. Y...et un dossier médical comportant de nombreux certificats médicaux et un rapport psychiatrique ; qu'en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par la salariée, alors qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis, dont les certificats médicaux, laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral, et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer le contraire, la cour d'appel a violé les textes les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
4°) Alors que, en relevant, pour faire échec aux demandes de Mme X..., qu'elle n'a jamais fait état, auprès de quiconque, de faits de harcèlement moral avant d'être licenciée, la cour d'appel, qui a statué par une motivation inopérante à y faire échec, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1154- 1du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-11775
Date de la décision : 20/09/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 09 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 sep. 2017, pourvoi n°16-11775


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.11775
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award