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31/01/2018 | FRANCE | N°14-15696

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 janvier 2018, 14-15696


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y..., engagée par la société Murtoli le 8 avril 2009 en qualité de femme de chambre et garde d'enfants, a été victime le 11 avril 2009 d'un accident du travail pour lequel elle a bénéficié d'arrêts de travail jusqu'au 14 septembre 2010 ; qu'après avoir demandé à son employeur l'organisation d'une visite de reprise, elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de diverses sommes au titre de la prise d'acte de rupture de son contrat de travail ;
>Sur les premier et deuxième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de stat...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y..., engagée par la société Murtoli le 8 avril 2009 en qualité de femme de chambre et garde d'enfants, a été victime le 11 avril 2009 d'un accident du travail pour lequel elle a bénéficié d'arrêts de travail jusqu'au 14 septembre 2010 ; qu'après avoir demandé à son employeur l'organisation d'une visite de reprise, elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de diverses sommes au titre de la prise d'acte de rupture de son contrat de travail ;

Sur les premier et deuxième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article L. 1226-15 du code du travail, en sa rédaction applicable au litige ;

Attendu que pour condamner l'employeur à payer à la salariée une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que l'intéressée a droit à l'indemnité prévue par l'article L. 1226-15 du code du travail et qu'au regard de son salaire c'est à bon droit que les premiers juges lui ont alloué la somme de 17 423,52 euros ;

Qu'en statuant ainsi alors que l'article L. 1226-15 du code du travail n'est pas applicable lorsque la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée aux torts de l'employeur, pendant une période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident de travail, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Murtoli à payer à Mme Y... la somme de 17 423,52 euros, l'arrêt rendu le 12 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par M. Pion, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du trente et un janvier deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Murtoli.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir dit que l'action introduite par Madame Y... s'analysait en une demande de résiliation judiciaire, d'avoir prononcé en conséquence la résiliation judiciaire du contrat de travail liant la SARL MURTOLI à Madame Y... et d'avoir en conséquence confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné la SARL MURTOLI à payer à Madame Y... des sommes à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité légale de licenciement et d'indemnité de préavis ;

AUX MOTIFS QU'il sera rappelé que si la prise d'acte de rupture n'est soumise à aucun formalisme particulier, encore faut-il que l'employeur en soit directement destinataire ; que Madame Y... prétend que cette prise d'acte résulterait de sa requête emportant saisine du conseil de prud'hommes ; que toutefois une telle saisine pour voir juger, comme en l'espèce, que la rupture intervenue est imputable à l'attitude fautive de l'employeur, ne peut être assimilée à une prise d'acte mais doit être analysée comme une demande de résiliation judiciaire ; que c'est sur ce fondement que la cour doit statuer ; que le manquement de l'employeur aux obligations découlant de l'article R. 4624-22 du Code du travail justifie la résiliation du contrat aux torts de l'employeur celle-ci produisant en l'espèce les effets d'un licenciement nul ; qu'à défaut de demande de réintégration la salariée a droit à l'indemnité prévue par l'article L. 1226-15 du Code du travail ainsi qu'à une indemnité de licenciement égale à un mois de salaire et à une indemnité compensatrice de préavis quand bien même elle aurait été en incapacité éventuellement de l'effectuer ;

ALORS, D'UNE PART, QU'en prononçant la résiliation du contrat de travail de Madame Y... aux torts de la société MURTOLI à la date de son arrêt, bien que la salariée ait demandé que soit confirmé le jugement entrepris qui avait condamné l'employeur au paiement d'une somme au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse suite à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de la société MURTOLI, la cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, TRES SUBSIDIAIREMENT, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que si, lorsque la procédure est orale, les moyens soulevés d'office sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l'audience, il peut être apporté la preuve contraire ; qu'en prononçant la résiliation du contrat de travail de Madame Y... aux torts de la société MURTOLI, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations, à cet égard, cependant qu'il ressort des propres énonciations de l'arrêt que le moyen oralement présenté à la l'audience, après avoir été développé par la salariée dans ses écritures, était pris de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par la salariée, résultant de la saisine par celle-ci du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail liant la société MURTOLI à Madame Y... à compter de l'arrêt et d'avoir en conséquence confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné la SARL MURTOLI à payer à Madame Y... des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité légale de licenciement et d'indemnité de préavis ;

AUX MOTIFS QU'à l'appui de ses demandes, Madame Y... prétend que l'employeur aurait violé ses obligations quant à l'organisation d'une visite médicale de reprise ; que plus particulièrement, elle fait valoir qu'elle a toujours transmis l'ensemble de ses certificats d'arrêts maladie ; que le 14 septembre 2010 elle a transmis le certificat médical de consolidation et de fin d'arrêt de travail et, par le même courrier, a manifesté son souhait de reprendre son emploi en demandant à l'employeur de lui adresser la carte magnétique lui permettant d'accéder à son lieu de travail et en sollicitant la visite médicale de reprise ; qu'aucune suite n'a été donnée à ces demandes l'obligeant ainsi à saisir la juridiction prud'homale ; que l'employeur réplique qu'il n'a jamais reçu le courrier précité en arguant de ce que la signature figurant sur l'accusé de réception ne correspond pas à celle de l'employée qui réceptionne habituellement le courrier par comparaison de cette signature avec celle figurant sur les accusés de réception assortissant les précédents envois de Madame Y... ; qu'il ajoute que quand bien même ce courrier lui aurait été remis, il disposait aux termes de l'article R. 4624-22 du code du travail de 8 jours à compter de la reprise du travail pour solliciter une visite médicale de reprise qui n'a pas été sollicitée expressément par la salariée, laquelle de surcroît ne s'est pas tenue à sa disposition pour qu'il y soit procédé en tentant de reprendre effectivement son travail ; que cependant la signature apposée sur l'accusé de réception de la lettre recommandée du 14 septembre 2010 fait présumer qu'elle a été réceptionnée par une personne dûment habilitée comme devant, en principe, fournir une pièce d'identité ; que la comparaison effectuée avec la signature apposée sur d'autres accusés de réception est insusceptible en soi de remettre en cause l'habilitation de la personne concernée, dès lors notamment que la cour ne dispose d'aucun élément sur le nombre de personnes habilitées à recevoir les plis et dans la mesure où la signature alléguée est apposée sur des accusés de réception ne portant pas sur la même période de temps ; qu'aucun élément ne permet donc de remettre en cause la réception par l'employeur du courrier précité ; que ce courrier est rédigé dans les termes suivants : "Dans ce courrier, vous avez le certificat final datant du 14 septembre 2010. Veuillez déclencher la visite médicale de reprise et de me permettre d'accéder à mon logement de fonction ainsi qu'à l'accès du lieu de travail (soit par l'envoi de la carte d'accès, soit par rendez-vous), n'oubliez pas que vous avez un délai à respecter concernant la procédure visite de reprise
" ; que s'il convient de constater que la salariée a adressé ce courrier le jour même de la cessation de son arrêt maladie et ne justifie pour sa part d'aucune démarche pour reprendre effectivement, en se présentant sur son lieu d'emploi, son activité professionnelle, il n'en demeure pas moins que les termes de son courrier comport[ent] sans ambiguïté la volonté clairement exprimée de reprendre son travail et la demande d'une organisation d'une visite médicale de reprise ; qu'en ne procédant à aucune initiative pour ce faire, l'employeur a manqué aux obligations découlant de l'article R 4624-22 du code du travail, étant précisé qu'aux termes de cet article l'employeur doit saisir le service de santé au travail dès qu'il a connaissance de la fin de l'arrêt de travail et qu'il appartient alors au service de santé d'organiser l'examen de reprise dans un délai de huit jours à compter de la reprise du travail par le salarié ;

ALORS, D'UNE PART, QU'en estimant que le seul fait pour l'employeur de ne pas avoir organisé la visite de reprise prévue par l'article R. 4624-22 du Code du travail justifiait la résiliation du contrat de travail à ses torts, quand la salariée n'avait effectué aucune démarche pour reprendre effectivement son activité professionnelle en se présentant sur son lieu d'emploi et que le moyen de la SARL MURTOLI selon lequel elle n'avait jamais reçu le courrier par lequel la salariée lui avait transmis le certificat médical de consolidation et de fin d'arrêt de travail et demandé d'organiser une visite de reprise n'a été écarté qu'à raison de la présomption de réception de ce courrier par une personne dûment habilitée résultant de la signature apposée sur l'accusé de réception de ce courrier par une personne non identifiée, si bien qu'il existait un doute sur l'information effective de l'employeur sur le contenu de ce courrier, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence d'un manquement de l'employeur de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail et ainsi violé les articles 1184 du Code civil et L. 1231-1 du Code du travail ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'en tout état de cause, en s'abstenant de vérifier en l'état des faits par elle relevés si le manquement reproché à l'employeur était suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en regard des articles 1184 du Code civil et L. 1231-1 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait alloué à Madame Y... la somme de 17.423,52 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QU'à défaut de demande de réintégration, la salariée a droit à l'indemnité prévue par l'article L. 1226-15 du code du travail ; qu'au regard du salaire de Madame Y... c'est à bon droit que les premiers juges lui ont alloué la somme de 17.423,52 € au titre de l'indemnité prévue par l'article L. 1226-15 du Code du travail ;

ALORS QUE l'article L 1226-15 du Code du travail n'est pas applicable lorsque la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée aux torts de l'employeur, pendant une période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident de travail qui s'est poursuivie faute pour l'employeur d'avoir organisé une visite de reprise ; que dans ce cas, il appartient aux juges du fond d'évaluer souverainement le préjudice subi par le salarié du fait de la résiliation ; qu'en condamnant la SARL MURTOLI au paiement de l'indemnité prévue par l'article L. 1226-15 du code du travail, la Cour d'appel a violé ce texte, par fausse application.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-15696
Date de la décision : 31/01/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 12 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 jan. 2018, pourvoi n°14-15696


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:14.15696
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