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07/02/2018 | FRANCE | N°16-11635;16-11636;16-11637;16-11641

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 février 2018, 16-11635 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° C 16-11.635, D 16-11.636, E 16-11.637 et J 16-11.641 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que MM. Y..., I... , A... et B..., salariés de la société HDF finance, aux droits de laquelle est venue la société Rothschild HDF Investment solutions, respectivement en qualité de directeur de gestion adjoint pour les trois premiers et de directeur administratif pour le dernier, ont été licenciés par lettres du 18 janvier 2011 ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale

en paiement de diverses sommes, dont une somme à titre de dommages-intérê...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° C 16-11.635, D 16-11.636, E 16-11.637 et J 16-11.641 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que MM. Y..., I... , A... et B..., salariés de la société HDF finance, aux droits de laquelle est venue la société Rothschild HDF Investment solutions, respectivement en qualité de directeur de gestion adjoint pour les trois premiers et de directeur administratif pour le dernier, ont été licenciés par lettres du 18 janvier 2011 ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale en paiement de diverses sommes, dont une somme à titre de dommages-intérêts pour privation indue du bénéfice d'actions gratuites ;

Sur les premier et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les premier et troisième moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen, commun à chacun des pourvois :

Vu l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que, pour condamner la société à payer aux salariés des dommages-intérêts pour privation indue du bénéfice des actions gratuites attribuées, la cour d'appel, après avoir décidé que les licenciements des intéressés étaient sans cause réelle et sérieuse, a retenu qu'il résultait des articles 5 et 7 des règlements des plans d'attribution d'actions gratuites signés le 15 décembre 2009 par MM. Y..., I... et A..., et le 21 juin 2010 par M. B..., que les actions attribuées deviendraient de plein droit leur propriété respectivement le 15 décembre 2011 et le 21 juin 2012, soit deux ans après leur attribution, à condition qu'ils exercent toujours leurs fonctions à ces dates ; que l'article 8 desdits règlements prévoyait que « après la période d'acquisition de deux ans, le bénéficiaire s'engage à conserver les titres pendant une période de deux ans. Pendant cette période les actions gratuites sont acquises par le bénéficiaire mais sont incessibles et insaisissables » ; qu'en licenciant sans cause réelle et sérieuse les salariés avant le 15 décembre 2011 et le 21 juin 2012, l'employeur les avait privés du droit d'être propriétaires gratuitement des actions attribuées et les avait privés indûment de l'avantage financier contractuel que constituaient ces actions ; que cette privation avait causé aux salariés un préjudice, avéré et certain, qui devait être évalué, pour chacun d'eux, sur la base de la valeur de l'action au 15 décembre 2011 ;

Attendu cependant que le salarié qui n'a pu, du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse intervenu avant le terme de la période d'acquisition, se voir attribuer de manière définitive des actions gratuites, subit une perte de chance ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui s'est abstenue de mesurer la réparation allouée à la chance perdue, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils fixent le montant de la condamnation de la société Rothschild HDF Investment solutions à titre de dommages-intérêts pour privation indue du bénéfice des actions gratuites attribuées aux sommes de 383 373,25 euros en ce qui concerne MM. Y..., I... et A... et à la somme de 45 004,18 euros en ce qui concerne M. B..., les arrêts rendus le 27 novembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne MM. Y..., I... , A... et B... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi n° C 16-11.635 par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour la société Rothschild HDF Investment solutions.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR dit le licenciement de M. Eric Y... privé de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence condamné la société Rothschild HDF Investment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser au salarié diverses indemnités;

AUX MOTIFS QUE « La cour observe les faits constants suivants;

Que la SA HDF FINANCE est une société de gestion indépendante spécialisée dans le domaine de la multi-gestion créée en 1986 par Monsieur Gilles K...            , détenue majoritairement par une holding familiale la société HDF Group Sas.

Qu'à la suite du décès [...]        de Monsieur Gilles K...            , sa veuve Madame Christine K...            est devenue usufruitière de la société et contrôlait 75% de la Holding HDF GROUP.

Qu'au 29 septembre 2009 la nouvelle gouvernance de cette société était assurée de la manière suivante; le Directoire était composé de Christine K...           , Christophe D..., Christophe E..., Erwan B... et Gilles F..., ce dernier ayant recruté dès le 24 juin 2009 pour être le directeur général de la société, et ayant vocation à être en outre Vice-Président puis Président du Directoire.

Que le mars 2010, le conseil de surveillance composé des actionnaires a révoqué ad litum le mandat social détenu par Gilles F..., en sorte que le directoire n'était plus composé le 11 août 2010 que des quatre personnes suivantes; Christine K...     , présidente du directoire, M. Christophe D..., directeur général et membre du directoire, Christophe E..., directeur général et membre du directoire, M. Erwan B..., directeur général et membre du directoire j M. M... a remplacé M. F... en qualité de Directeur général de la SA HDF FINANCE à compter du 1er juillet 2010, puis a donné sa démission le 5 octobre 2010.

Que sans qu'il soit nécessaire d'examiner dans le détail les raisons de ces mouvements dans la gouvernance de la SA HDF FINANCE, il convient de retenir à ce stade que la disparition de son fondateur a suscité diverses interrogations en interne quant à l'avenir de la société et à son contrôle.

Que c'est dans ce contexte qu'est intervenu le licenciement de Monsieur Eric Y... et de trois autres de ses collègues, MM. Thierry I... , Erwan B... et Z... A... auxquels Madame Christine K...           , devenue dirigeante de la société reproche;

d'avoir refusé de suivre son instruction réitérée de cesser de travailler sur le projet de rachat de la HDF par ces derniers, la dirigeante ayant indiqué ne pas vouloir céder ses actions dans HDF

- d'avoir manqué à l'obligation de loyauté en communiquant à un tiers investisseur, la société G... des éléments confidentiels sur la SA HDF FINANCE et exercé des pressions morales.

Que s'agissant du premier grief tel que formulé dans la lettre de licenciement intégralement reproduite, la cour retient que si Madame K... affirme qu'elle n'aurait informée que le 23 novembre 2010 du projet de LBO (Leverage Buy Out, opération consistant à racheter une entreprise par ses salariés), cette assertion est contredite par les éléments versés aux débats.

Qu'il ressort en effet clairement d'un échange de courriels le 14 octobre entre Madame K... et Monsieur Christophe E..., détenteur de 5% du capital de la société, membre du directoire de la société et directeur général selon K bis du 11 août 2010, supérieur hiérarchique direct de M. Eric Y... ainsi que cela est expressément mentionné dans son contrat de travail que dans le cadre du devenir la société (objet du courriel HDF 2013), Mme K... qui s'inquiétait de la position de M. E... et de son rôle dans les diverses démissions effectives ou envisagées et sur les difficultés de la société indiquait; « ... enfin nos pert se sont moins bien redressées que notre peer group en septembre et, pour la première année, nous sommes en dessous des indices sur tous nos fonds. Dans ce contexte de climat archi politique de HDF qui nuit à l'avenir d'HDF, mes priorités vont devenir le changement d'actionnariat rapide avant tout autre chose.

J'arrête tous les autres sujets et vous me forcez à me mettre en quête d'un actionnaire à 100%. Voulez-vous faire un LBO sur la base d'une valo faite par Gilles K...? »

Qu'au vu de cette demande expresse, et alors que M. E... répond à Mme K... « l'esprit qui m'anime est uniquement orienté vers la recherche d'une solution pérenne pour HDF, dans I'intérêt du triptyque historique d'HDF: ses clients, son staff et ses actionnaires ... », il apparaît tout à fait compréhensible que Monsieur Eric Y... ait été conduit avec ses trois autres collègues à travailler sur un projet de rachat de l'entreprise (LBO), une hypothèse de changement d'actionnariat envisagée par Mme K... elle-même ;

Que sans doute M. E... atteste-t-il près deux ans après le licenciement de l'appelant ne pas lui avoir un tel ordre; mais d'une part, son lien de subordination avec la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HDF FINANCE et sa position d'actionnaire membre du directoire rendent son attestation peu crédible; en outre son affirmation reste peu convaincante, dès lors que M. E... a également été convoqué pour un entretien préalable à un éventuel licenciement pour avoir précisément travaillé et fait travailler sur ce rachat dont l'étude a été confiée à ses collaborateurs directs dont l'appelant;

Que la société qui prétend que le novembre 2010, Monsieur Eric Y... et ses trois autres collègues auraient été convoqués à un entretien pendant lequel Madame K... leur aurait interdit de poursuivre le projet de rachat des parts de la Société ne le démontre pas en ne fournissant aucun élément à l'appui de son affirmation ;

Que le rappel à l'ordre téléphonique en date du 6 décembre 2010 n'est pas davantage corroboré par un quelconque élément de preuve.

Que la seule instruction claire donnée au salarié de cesser de travailler sur ce projet de rachat date en réalité du courriel du 7 décembre 2010, aux termes duquel Madame K... demande au salarié:

«Je vous remercie de vous concentrer sur votre travail, de cesser toutes les discussions avec la Société de LBO puisque je ne souhaite pas vendre ».

Que le jour même et non le 9 décembre 2010 comme il est prétendu dans la lettre de licenciement, Madame K... sollicite Monsieur Eric Y... pour qu'iI organise une réunion avec la Société de LBO dans les termes suivants ;

« Merci de m'envoyer la société de LBO au plus vite de façon à ce que cela cesse ».

Que cette directive a bien été respectée puisque le 10 décembre 2010, Madame K... recevait le cabinet G... et Qu'ainsi la Société HDF Finance n'apporte aucune preuve que le salarié aurait reçu l'ordre avant le 7 décembre 2010 de cesser de travailler au projet de rachat de l'entreprise envisagé dans un premier temps par la direction, projet dont M. E... était responsable en tant que directeur général, membre du directoire et préparé par Monsieur Eric Y..., un de ses adjoints et ses collègues.

Que certes lors du comité exécutif du 17 décembre 2010 auquel participait M. E..., Mme K... indiquait « je rappelle qu'une proposition de LBO m'a été soumise. J'ai fait savoir que je n'acceptais pas ce projet. Néanmoins j'entends que beaucoup de membres du personnel de la société ont été mis au courant de ce projet. Je demande à chacun d'entre vous de veiller à ce que ces rumeurs cessent en faisant savoir à vos équipes que ce projet aucunement à l'ordre du jour. »

Qu'il ne s'en déduit cependant nullement que Monsieur Y... ait contrevenu à la consigne de cesser de travailler au projet de rachat, mais cette remarque de Mme K... qui ne vise pas spécifiquement le salarié a pour objet notamment de mettre fin aux rumeurs et de faire savoir la clarté de sa consigne.

Qu'en toute hypothèse, la société ne démontre qu'après l'instruction écrite formelle du 7 décembre 2010 donnée à ses collègues, l'appelant ne s'y serait pas conformé en sorte que l'insubordination reprochée n'est pas avérée;

Que les attestations établies plus d'un an après les faits par Monsieur H... et par Monsieur Damien K...            manquent de force probante dès lors que le premier est administrateur et consultant de la société HDF Finance, et que le second est administrateur, actionnaire de la société et beau-fils de Madame K... et partagent donc avec la société une communauté d'intérêts;

Qu'en outre, la rencontre alléguée en date du 9 décembre 2010 avec Christine K... au cours de laquelle Monsieur Eric Y... accompagné de M. E... et d'autres collègues aurait à nouveau parlé de ce projet de LBO ne suffit pas à établir que Monsieur Eric Y... continuait à travailler à ce projet; de même la teneur de l'entretien avec M. G... n'étant pas rapportée par celui-ci, il n'est pas suffisamment établi que Monsieur Eric Y... aurait de manière réitérée refusé de se conformer à la directive de Mme K... .

Que par suite, il est retenu que la preuve de la réalité du premier grief n'est pas suffisamment rapportée.

Que s'agissant du second grief relatif au manquement à l'obligation de loyauté par transmission d'éléments confidentiels à un tiers investisseur et par l'exercice de pressions sur Madame Christine K...           , il convient d'observer en premier lieu que le reproche collectivement fait à Monsieur Eric Y... et ses trois collègues sans que l'imputabilité spécifique à Monsieur Eric Y... ne soit établie ni même alléguée rend le grief peu sérieux.

Qu'en outre, le grief n'est pas suffisamment précis ni matériellement vérifiable, la lettre de licenciement n'indiquant pas quels documents confidentiels auraient été transmis ni à quelle date, ni de quelle manière. Il n'est corroboré par aucun élément objectif, pas même par M. G... détenteur de ces documents selon la société intimée.

Qu'au surplus, dans la mesure où le meneur du projet était M. E... directeur général, membre du directoire, il ne peut reproché spécifiquement à Monsieur Eric Y... d'avoir transmis des documents utiles à l'étude du projet de LBO initialement demandé par Mme K... et mis en oeuvre par M. E... et son équipe.

Que dans ces conditions et alors qu'il n'est pas contesté que M. E... n'a pas été licencié malgré un début de procédure et est resté directeur général de la société dont il est actionnaire, la cour retient que les griefs reprochés à Monsieur Eric Y... ne sont pas avérés et ne pouvaient justifier son licenciement.

Que l'ensemble ces éléments conduit la cour à retenir par infirmation du jugement que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse; il n'est dès lors pas nécessaire de répondre au moyen surabondant tiré de la cause économique du licenciement, véritable motif de la rupture selon le salarié; ce dernier doit également être débouté de sa demande de production en justice de différents documents concernant l'embauche et le départ de M. F..., l'embauche de M. M... , le départ de M. D..., les comptes de la société, ces documents n'étant pas utiles à la solution du litige.

Qu'eu égard à son ancienneté (plus de 5 ans), à son âge (47 ans) et à sa situation professionnelle dont il est justifié (pas de période de chômage et nouvel emploi effectif à compter du 2 mai 2011 avec une rémunération annuelle de 140.000 euros fixe, soit 20% plus importante à celle reçue chez la SA HDF FINANCE), son préjudice financier et moral fié à l'éviction abusive d'un collaborateur particulièrement investi dans ses fonctions et régulièrement récompensé pour la qualité de son travail sera intégralement réparé par l'allocation de la somme de 206.250,03 euros (9 mois) en application de l'article L.235-3 du code du travail.

Que le salarié est débouté du surplus de sa demande faute de justifier de l'ampleur du dommage à hauteur de l'indemnité qu'il sollicite.

Que la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HDF FINANCE est condamnée à payer à Monsieur Y... la somme de 206.250,03 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Que s'agissant de dommages et intérêts, la somme allouée s'entend d'une somme nette non soumise à CSG-CRDS.

Que le jugement est infirmé de ce chef»;

ALORS QUE si, dans le contexte dans lequel était placée la société HDF Finance à la suite du décès de son fondateur, un changement d'actionnariat, par le biais d'une opération de LBO, pouvait apparaître envisageable, des salariés tenus à l'égard de leur employeur à un devoir de loyauté ne pouvaient pour autant légitimement travailler à un tel projet sans l'accord exprès de leur employeur ou des instances dirigeantes concernées et moins encore en cas de refus explicite ; que pour démontrer que Mme K... avait au plus tard le novembre 2010 exprimé clairement son refus de vendre et donné des instructions, qui ne seront pas respectées, pour faire cesser les démarches en ce sens, la société HDF Finance soulignait dans ses écritures qu'un courriel du 7 décembre 2010 adressé par Mme K... à quatre salariés concernés qui faisait état d'instructions données quinze jours auparavant aux salariés concernés par l'opération litigieuse, soit le 23 novembre 2010 (« comme je vous l'ai déjà dit et répété il y a 15 jours », cf. conclusions d'appel de l'exposante, page 30, § 4) ; qu'en retenant toutefois, pour en déduire que le refus toute opération de LBO avait été exprimé pour la première fois au salarié lors d'un entretien du 7 décembre 2010, que la société HDF Finance, «ne fournissait aucun élément à l'appui de son affirmation» (arrêt attaqué, page 5, § 3), la cour d'appel a dénaturé par omission le courrier du 7 décembre 2010 et violé l'article 1134 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR condamné la société Rothschild HDF Investment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser à M. Eric Y... la somme de 383 373,25 euros à titre de dommages intérêts pour exclusion abusive des actions attribuées au titre d'un plan d'attribution gratuite d'actions;

AUX MOTIFS QUE « Selon le règlement du plan d'attribution d'actions gratuites signé le 15 décembre 2009, le salarié s'est vu attribuer 16 472 actions à cette même date;

Que si l'article 5 de ce règlement prévoit que « ... le bénéficiaire ne pourra acquérir les actions gratuites qui lui ont été attribuées que s'il exerce toujours ses fonctions de directeur salarié de la SA HDF FINANCE à l'issue de la période d'acquisition », et I'article 8 que « après la période d'acquisition de deux ans, le bénéficiaire s'engage à conserver les titres pendant une période de deux ans. Pendant cette période les actions gratuites sont acquises par le bénéficiaire mais sont incessibles et insaisissables ... », l'article 7 indique « Les Actions gratuites deviendront la propriété du Bénéficiaire à I'issue d'un délai d'acquisition de 2 (deux) ans commençant à courir à compter de la date d'attribution et prenant fin le jour suivant celui du deuxième anniversaire de cette date d'attribution (ce qui correspond à la Date d'acquisition) » ;

Qu'il résulte de ces éléments que les actions attribuées devenaient de plein droit par I'effet de la clause la propriété le 15 décembre 2011, soit deux ans après leur attribution.

Qu'en licenciant sans cause réelle et sérieuse le salarié avant cette date, l'employeur a privé ce dernier du droit accordé dès le 15 décembre 2009 d'être propriétaire gratuitement des actions attribuées, et l'a ainsi privé indûment de l'avantage financier contractuel que constituaient ces actions.

Que cette privation a nécessairement causé un préjudice au salarié; ce dernier fixe à 383 373,25 euros le montant du préjudice sur la base d'une valeur de l'action au 15 décembre 2011 à la somme de 23,27 euros selon tableau fourni (pièce 32 du salarié) non discutée par l'employeur ; contrairement à ce qu'indique l'employeur ce préjudice est avéré et certain et n'est pas sérieusement discuté par l'employeur qui ne produit pas de valeur moindre de l'action de nature à réduire le préjudice allégué ;

Que par suite, la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de fa société HFD FINANCE est condamnée à payer à Monsieur Eric Y... la somme de 383 373,25 euros à titre de dommages intérêts pour exclusion abusive des actions attribuées au titre du plan d'attribution gratuite d'actions.

Que s'agissant de dommages intérêts, la somme allouée s'entend d'une somme nette non soumises à CSG-CRDS » ;

ALORS QUE la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée; que suivant la convention de cession gratuite d'actions du 15 décembre 2009, les' actions attribuées pouvaient devenir de plein droit propriété de M. Y... à compter du 15 décembre 2011 à condition qu'il exerce toujours « ses fonctions de direction salarié de la société HDF FINANCE SA à l'issue de la période d'acquisition »; que la société HDF Finance faisait donc valoir qu'à supposer son licenciement privé de cause réelle et sérieuse, le préjudice subi par le salarié du fait de la perte de son droit à des actions gratuites devait s'analyser en une simple perte de chance, le salarié ayant été licencié avant le terme du délai d'acquisition de deux ans (Conclusions d'appel de l'exposante, page 68); qu'en allouant au salarié une indemnité correspondant à la valeur totale actions attribuées à l'expiration du délai d'acquisition, après avoir énoncé que le préjudice subi par M. Y... était avéré et certain, lors même. qu'il ne pouvait correspondre qu'à une simple perte de chance, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné la société Rothschild HDF lnvestment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser à M. Eric Y... la somme de 150 000 euros à titre de dommages intérêts pour privation indue de prime annuelle au titre de l'année 2010 ;

AUX MOTIFS QUE « le contrat prévoit expressément que le salarié « pourra percevoir une rémunération variable dont le montant sera fonction de sa contribution aux performances des OPCVM gérés par la société. Ce montant sera laissé à la discrétion de la direction de la société» ;

Que le salarié établit qu'il a perçu au titre de la prime variable la somme de 15.000 euros au titre de l'année 2005,100.000 euros au titre de l'année 2006, 200.000 euros pour l'année 2007, 100.000 euros pour l'année 2008, 150.000 euros pour l'année 2009 ;

Que contrairement à ce qu'affirme la SA HDF FiNANCE, cette clause ne subordonne nullement le versement de cette prime à la présence du salarié au mois de mars de l'année du versement, cette mention ne figurant pas au contrat et la prime variable au titre de l'année 2009 ayant été versée pour partie en mars 2010 et pour partie en décembre 2010 ;

Que le principe de la prime variable étant contractualisé et seul son montant étant laissé à la discrétion de la SA HDF FINANCE, le salarié est fondé à réclamer des dommages et intérêts pour avoir été privé indûment par l'effet du licenciement sans cause réelle et sérieuse du bénéfice d'une prime variable contractuellement due; s'agissant du montant réclamé, l'employeur qui n'a pas fourni aux débats malgré la sommation de communiquer formulée par l'appelant le montant des primes variables effectivement allouées à l'ensemble des salariés au titre de l'année 2010 et ne fournit aucun élément démontrant que pendant l'année 2010 le salarié n'aurait pas contribué aux performances des OPCVM ne peut se prévaloir de sa propre carence et se borner à conclure qu'aucune somme ne serait due à l'appelant ; à cet égard, et sans qu'il soit besoin d'ordonner en justice la production par l'employeur des primes individuelles versées aux salariés maintenus dans l'entreprise, la cour a les éléments pour apprécier le préjudice généré par la perte de la rémunération variable récompensant les résultats obtenus pendant l'année 2010 aux performances de la société ; en effet, le salarié démontre -et ce n'est pas contesté par l'employeur-qu'un montant de l'ordre de 150.000 euros en moyenne a été réglé chaque année depuis 5 ans à ce salarié dont il n'est pas démontré, ni même allégué qu'il n'a pas contribué aux performances de la société pendant l'année 2010 ; que par suite la cour retient que le salarié est fondé à réclamer une rémunération variable de l'ordre de 150.000 euros au titre de l'année 2010 ; qu'en revanche la majoration de des primes variables à verser en 2010 est écartée faute pour l'appelant de démontrer cette hausse systématique de 25% en 2010 ;

Que la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de Ja société HFD FINANCE est condamnée à payer à Monsieur Eric Y... la somme de 150.000 euros à titre de dommages intérêts pour privation indue de prime annuelle au titre de l'année 2010. Les sommes allouées ayant la nature de dommages intérêts, elles sont entendues comme des montants nets non soumis à CSG-CRDS»;

ALORS D'UNE PART QUE le juge ne peut dénaturer les actes clairs et precis soumis à son appréciation; que le contrat de travail de M. Y... stipulait qu'à sa rémunération annuelle «pourra s'ajouter une rémunération variable dont le montant sera fonction de sa contribution aux performances des OPCVM gérés par la société. Ce montant sera laissé à la discrétion de la direction de la société» ; qu'aux termes de cette clause le versement de la prime était donc laissé à la discrétion de l'employeur, son montant, une fois décidée son allocation, étant seulement déterminé en fonction des performances des OPCVM gérées par la société ; qu'en estimant néanmoins que le principe d'une prime variable était contractualisé et que seul son montant était laissé à la discrétion de l'employeur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la clause susvisée et ainsi violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS D'AUTRE PART, QU'en l'absence de contractualisation du droit d'un salarié à une prime, seule une pratique générale, constante et fixe caractérise l'existence d'un usage susceptible d'engager l'employeur envers le salarié ; qu'en retenant néanmoins que M. Y... aurait dû percevoir une prime au titre de l'année 2010 sans caractériser l'existence d'un usage en ce sens, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

ALORS ENFIN et en tout état de cause, QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs; qu'aux termes de l'article 4.3(a) de la «politique générale de la rémunération» applicable au sein de la société HDF Finance, les primes ne pouvaient être versées qu'à la condition « que le salarié exerce encore ses fonctions au sein de l'entreprise au moment du versement et qu'aucune procédure de rupture de son contrat de travail n'ait été engagée, ni qu'il ait notifié sa démission au moment du versement »; que la société HDF Finance se prévalait de cette clause pour en déduire qu'en l'absence de M. Y... au jour prévu, aucune prime ne lui était due (conclusions HDF, page 60, pièce n°15) ; qu'en se contentant, pour allouer néanmoins à M. Y... une indemnité au titre d'une prime non versée, de relever que le contrat de travail ne subordonnait pas le versement de la prime à la présence du salarié dans l'entreprise, sans répondre à ce moyen de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits au pourvoi n° D 16-11.636 par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour la société Rothschild HDF Investment solutions.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR dit le licenciement de M. Thierry I... privé de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence condamné la société Rothschild HDF Investment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser au salarié diverses indemnités;

AUX MOTIFS QUE « La cour observe les faits constants suivants:

Que la SA HDF FINANCE est une société de gestion indépendante spécialisée dans le domaine de la multi-gestion créée en 1986 par Monsieur Gilles k...            , détenue majoritairement par une holdingfamiliale la société HDF Group Sas.

Qu'à la suite du décès [...]        de Monsieur Gilles K... , sa veuve Madame Christine K...            est devenue usufruitière de la société et contrôlait 75% de la Holding HDF GROUP.

Qu'au 29 septembre 2009 la nouvelle gouvernance de cette société était assurée de la manière suivante: le Directoire était composé de Christine K...           , Christophe D..., Christophe E..., Erwan B... et Gilles F..., ce dernier ayant été recruté dès le 24 juin 2009 pour être le directeur général de la société, et ayant vocation à être en outre Vice-Président puis Président du Directoire.

Que le 26 mars 2010, le conseil de surveillance composé des actionnaires a révoqué ad litum le mandat social détenu par Gilles F..., en sorte que le directoire n'était plus composé le 11 août 2010 que des quatre personnes suivantes: Christine K...           , présidente du directoire, M. Christophe D..., directeur général et membre du directoire, Christophe E..., directeur général et membre du directoire, M. Erwan B..., directeur général et membre du directoire; M. M... a remplacé M. F... en qualité de Directeur général de la SA HDF FINANCE à compter du 1er juillet 2010, puis a donné sa démission le 5 octobre 2010.

Que sans qu'il soit nécessaire d'examiner dans le détail les raisons de ces mouvements dans la gouvernance de la SA HDF FINANCE, il convient de retenir à ce stade que la disparition de son fondateur a suscité diverses interrogations en interne quant à l'avenir de la société et à son contrôle.

Que c'est dans ce contexte qu'est intervenu le licenciement de Monsieur Thierry I... et de trois autres de ses collègues, MM. Eric Y..., Erwan B... et Z... A... auxquels Madame Christine K...           , devenue dirigeante de la société reproche :

- d'avoir refusé de suivre son instruction réitérée de cesser de travailler sur le projet de rachat de la société HDF par ces derniers, la dirigeante ayant indiqué ne pas vouloir céder ses actions dans HDF

- d'avoir manqué à l'obligation de loyauté en communiquant à un tiers investisseur, la société G... des éléments confidentiels sur la SA HDF FINANCE et exercé des pressions morales.

Que s'agissant du premier grief tel que formulé dans la lettre de licenciement intégralement reproduite, la cour retient que si Madame K... affirme qu'elle n'aurait été informée que le 23 novembre 2010 du projet de LBO (Leverage Buy Out, opération consistant à racheter une entreprise par ses salariés), cette assertion est contredite par les éléments versés aux débats.

Qu'il ressort en effet clairement d'un échange de courriels le 14 octobre entre Madame K... et Monsieur Christophe E..., détenteur de 5% du capital de la société, membre du directoire de la société et directeur général selon K bis du 11 août 2010, supérieur hiérarchique direct de M. Thierry I... ainsi que cela est expressément mentionné dans son contrat de travail que dans le cadre du devenir de la société (objet du courriel HDF 2013), Mme K... qui s'inquiétait la position de M. E... et de son rôle dans les diverses démissions effectives ou envisagées et sur les difficultés de la société indiquait: « ... enfin nos perf se sont moins bien redressées que notre peer group en septembre et, pour la première année, nous sommes en dessous des indices sur tous nos fonds. Dans ce contexte de climat archi politique de HDF qui nuit à l'avenir d'HDF, mes priorités vont devenir le changement d'actionnariat rapide avant tout autre chose.

J'arrête tous les autres sujets et vous me forcez à me mettre en quête d'un actionnaire à 100%. Voulez-vous faire un LBO sur la base d'une valo faite par M. Gilles K...? »

Qu'au vu de cette demande expresse, et alors que M. E... répond à Mme K... « l'esprit qui m'anime est uniquement orienté vers la recherche d'une solution pérenne pour HDF, dans l'intérêt du triptyque historique d'HDF: ses clients, son staff et ses actionnaires ... », il apparaît tout à fait compréhensible que Monsieur Thierry I... ait été conduit avec ses trois autres collègues à travailler sur un projet de rachat de l'entreprise (LBO), une hypothèse de changement d'actionnariat envisagée par Mme K... elle-même ;

Que sans doute M. E... atteste-t-il près deux ans après le licenciement de l'appelant ne pas lui avoir un tel ordre; mais d'une part, son lien de subordination avec la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HDF FINANCE et sa position d'actionnaire membre du directoire rendent son attestation peu crédible ; en outre son affirmation reste peu convaincante, dès lors que M. E... a également été convoqué pour un entretien préalable à un éventuel licenciement pour avoir précisément travaillé et fait travailler sur ce rachat dont l'étude a été confiée à ses collaborateurs directs dont l'appelant ;

Que la société qui prétend que le 23 novembre 2010, Monsieur Thierry I... et ses trois autres collègues auraient été convoqués à un entretien pendant lequel Madame K... leur aurait interdit de poursuivre le projet de rachat des parts de la Société ne le démontre pas en ne fournissant aucun élément à l'appui de son affirmation ;

Que le rappel à l'ordre téléphonique en date du 6 décembre 2010 n'est pas davantage corroboré par un quelconque élément de preuve.

Que la seule instruction claire donnée au salarié de cesser de travailler sur ce projet de rachat date en réalité du courriel du 7 décembre 2010, aux termes duquel Madame K... demande au salarié :

« Je vous remercie de vous concentrer sur votre travail, de cesser toutes les discussions avec la Société de LBO puisque je ne souhaite pas vendre ».

Que le jour même et non le 9 décembre 2010 comme il est prétendu dans la lettre de licenciement, Madame K... sollicite Monsieur Thierry I... pour qu'il organise une réunion avec la Société de LBO dans termes suivants:

« Merci de m'envoyer la société de LBO au plus vite de façon à ce que cela cesse ».

Que cette directive a bien été respectée puisque le 10 décembre 2010, Madame K... recevait le cabinet G... et Associés             .

Qu'ainsi la Société HDF Finance n'apporte aucune preuve que Je salarié aurait reçu l'ordre avant le 7 décembre 2010 de cesser de travailler au projet de rachat de l'entreprise envisagé dans un premier temps par la direction, projet dont M. E... était responsable en tant que directeur général, membre du directoire et préparé par Monsieur Thierry I... , un de ses adjoints et ses collègues.

Que certes lors du comité exécutif du 17 décembre 2010 auquel participait M. E..., Mme K... indiquait « je rappelle qu'une proposition de LBO m'a été soumise. J'ai fait savoir que je n'acceptais pas ce projet. Néanmoins j'entends que beaucoup de membres du personnel de la société ont été mis au courant de ce projet. Je demande à chacun d'entre vous de veiller à ce que ces rumeurs cessent en faisant savoir à vos équipes que ce projet n'est aucunement à l'ordre du jour. »

Qu'il ne s'en déduit cependant nullement que Monsieur Thierry I... ait contrevenu à la consigne de cesser de travailler au projet de rachat, mais cette remarque de Mme K... qui ne vise pas spécifiquement le salarié a pour objet notamment de mettre fin aux rumeurs et de faire savoir la clarté de sa consigne.

Qu'en toute hypothèse, la société ne démontre qu'après l'instruction écrite formelle du 7 décembre 2010 donnée à ses collègues, l'appelant ne s'y serait pas conformé en sorte que l'insubordination reprochée n'est pas avérée ;

Que les attestations établies plus d'un an après les faits par Monsieur H... et par Monsieur Damien K...            manquent de force probante dès lors que le premier est administrateur et consultant de Ja société HDF Finance, et que le second est administrateur, actionnaire de la société et beau-fils de Madame K... et partagent donc avec la société une communauté d'intérêts ;

Qu'en outre, la rencontre alléguée en date du 9 décembre 2010 avec Christine K... au cours de laquelle Monsieur Thierry I... accompagné de M. E... et d'autres collègues aurait à nouveau parlé de ce projet de LBO ne suffit pas à établir que Monsieur Thierry I... continuait à travailler à ce projet ; de même la teneur de l'entretien avec M. G... n'étant pas rapportée par celui-ci, il n'est pas suffisamment établi que Monsieur Thierry I... aurait de manière refusé de se conformer à la directive de Mme K... .

Que par suite, il est retenu que la preuve de la réalité du premier grief n'est pas suffisamment rapportée.

Que s'agissant du second grief relatif au manquement à l'obligation de loyauté par transmission d'éléments confidentiels à un tiers investisseur et par l'exercice de pressions sur Madame Christine K...           , il convient d'observer en premier lieu que le reproche collectivement fait à Monsieur Thierry I... et ses trois collègues sans que l'imputabilité spécifique à Monsieur Thierry I... ne soit établie ni même alléguée rend le grief peu sérieux.

Qu'en outre, le grief n'est pas suffisamment précis ni matériellement vérifiable, la lettre de licenciement n'indiquant pas quels documents confidentiels auraient été transmis ni à quelle date, ni de quelle manière. Il n'est corroboré par aucun élément objectif, pas même par M. G... détenteur de ces documents selon la société intimée.

Qu'au surplus, dans la mesure où Je meneur du projet était M. E... directeur général, membre du directoire, il ne peut être reproché spécifiquement à Monsieur Thierry I... d'avoir transmis des documents utiles à l'étude du projet de LBO initialement demandé par Mme K... et mis en oeuvre par M. E... et son équipe.

Que dans ces conditions et alors qu'il n'est pas contesté que M. E... n'a pas été licencié malgré un début de procédure et est resté directeur général de la société dont il est actionnaire, la cour retient que les griefs reprochés à Monsieur Thierry I... ne sont pas avérés et ne pouvaient justifier son licenciement.

Que l'ensemble de ces éléments conduit la cour à retenir par infirmation du jugement que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; il n'est dès lors pas nécessaire de répondre au moyen surabondant tiré de la cause économique du licenciement, véritable motif de la rupture selon le salarié; ce dernier doit également être débouté de sa demande de production en justice de différents documents concernant l'embauche et le départ de M. F..., l'embauche de M. M... , le départ de M. D..., les comptes de la société, ces documents n'étant pas utiles à la solution du litige.

Qu'eu égard à son ancienneté (plus de 2 ans), à son âge (47 ans) et à sa situation professionnelle dont il est justifié (pas de période de chômage et nouvel emploi effectif dès le 2 mai 2011 avec une rémunération annuelle fixe plus importante celle reçue chez la SA HDF FINANCE), son préjudice financier et moral lié à l'éviction abusive d'un collaborateur particulièrement investi dans ses fonctions et régulièrement récompensé pour la qualité de son travail sera intégralement réparé par l'allocation de la somme de 148 958,35 euros (6,5 mois de salaire) en application de l'article L 1235-3 du code du travail.

Que le salarié est débouté du surplus de sa demande faute de justifier de l'ampleur du dommage à hauteur de l'indemnité qu'il sollicite.

Que la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HDF FINANCE est condamnée à payer à Monsieur Thierry I... la somme de 148 958,35 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Que s'agissant de dommages et intérêts, la somme allouée s'entend d'une somme nette non soumise à CSG-CRDS.

Que le jugement est infirmé de ce chef» ;

ALORS QUE si, dans le contexte dans lequel était placée la société HDF Finance à la suite du décès de son fondateur, un changement d'actionnariat, par le biais d'une opération de LBO, pouvait apparaître envisageable, des salariés tenus à l'égard de leur employeur à un devoir de loyauté ne pouvaient pour autant légitimement travailler à un tel projet sans l'accord exprès de leur employeur ou des instances dirigeantes concernées et moins encore en cas de refus explicite ; que pour démontrer que Mme K... avait au plus tard le 23 novembre 2010 exprimé clairement son refus de vendre et donné des instructions, qui ne seront pas respectées, pour faire cesser les démarches en ce sens, la société HDF Finance soulignait dans ses écritures qu'un courriel du 7 décembre 2010 adressé par Mme K... à quatre salariés concernés qui faisait état d'instructions données quinze jours auparavant aux salariés concernés par l'opération litigieuse, soit le 23 novembre 2010 (« comme je vous l'ai déjà dit et répété il y a 15 jours», cf. conclusions d'appel de l'exposante, page 30, § 4) ; qu'en retenant toutefois, pour en déduire que le refus de toute opération de LBO avait été exprimé pour la première fois au salarié lors d'un entretien du 7 décembre 2010, que la société HDF Finance, « ne fournissa[i]t aucun élément à l'appui de son affirmation » (arrêt attaqué, page 5, § 3), la cour d'appel a dénaturé par omission le courrier du 7 décembre 2010 et violé l'article 1134 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

II est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné la société Rothschild HDF Investment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser à M. Thierry I... la somme de 383 373,25 euros à titre de dommages intérêts pour privation indue du bénéfice des actions attribuées au titre des actions attribuées au titre d'un plan d'attribution gratuite d'actions ;

AUX MOTIFS QUE «Selon le règlement du plan d'attribution d'actions gratuites signé le 15 décembre 2009, le salarié s'est vu attribuer 16 472 actions à cette même date ;

Que si l'article 5 de ce règlement prévoit que « ... le bénéficiaire ne pourra acquérir les actions gratuites qui lui ont été attribuées que s'il exerce toujours ses fonctions de directeur salarié de la SA HDF FINANCE à l'issue de la période d'acquisition », et l'article 8 que « après la période d'acquisition de deux ans, le bénéficiaire s'engage à conserver les titres pendant une période de deux ans. Pendant cette période les actions gratuites sont acquises par le bénéficiaire mais sont incessibles et insaisissables ... », l'article 7 indique « Les Actions gratuites deviendront la propriété du Bénéficiaire à l'issue d'un délai d'acquisition de 2 (deux) ans commençant à courir à compter de la date d'attribution et prenant fin le jour suivant celui du deuxième anniversaire de cette date d'attribution (ce qui correspond à la Date d'acquisition) » ;

Qu'il résulte de ces éléments que actions attribuées devenaient de plein droit par l'effet de la clause la propriété le 21 juin 2012, soit deux ans après leur attribution.

Qu'en licenciant sans cause réelle et sérieuse le salarié avant cette date, l'employeur a privé ce dernier du droit accordé dès le 21 juin 2010 d'être propriétaire gratuitement des actions attribuées, et l'a ainsi privé indûment de l'avantage financier contractuel que constituaient ces actions.

Que cette privation a nécessairement causé un préjudice au salarié ; ce dernier fixe à 383 373,25 euros le montant du préjudice sur la base d'une valeur de l'action au 15 décembre 2011 à la somme de 23,27 euros selon tableau fourni (pièce 32 du salarié) non discutée par l'employeur ; contrairement à ce qu'indique l'employeur ce préjudice est avéré et certain et n'est pas sérieusement discuté par l'employeur qui ne produit pas de valeur moindre de l'action de nature à réduire le préjudice alIégué ;

Que par suite, la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HFD FINANCE est condamnée à payer à Monsieur Thierry I... fa somme de 383 373,25 euros à titre de dommages intérêts pour exclusion abusive des actions attribuées au titre du plan d'attribution gratuite d'actions.

Que s'agissant de dommages intérêts, la somme allouée s'entend d'une somme nette non soumises à CSG-CRDS » ;

ALORS QUE la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s' était réalisée ; que suivant la convention de cession gratuite d'actions du 15 décembre 2009, les actions attribuées pouvaient devenir de plein droit propriété de M. I... à compter du 15 décembre 2011 à condition qu'il exerce toujours « ses fonctions de direction salarié de la société HDF FINANCE SA à l'issue de la période d'acquisition » ; que la société HDF Finance faisait donc valoir qu'à supposer son licenciement privé de cause réelle et sérieuse, le préjudice subi par le salarié du fait de la de son droit à des actions gratuites devait s'analyser en une simple perte de chance, le salarié ayant été licencié avant le terme du délai d'acquisition de deux ans (Conclusions d'appel de l'exposante, page 68) ; qu'en allouant au salarié une indemnité correspondant à la valeur totale actions attribuées à l'expiration du délai d'acquisition, après avoir énoncé que le préjudice subi par M. I... était avéré et certain, lors même qu'il ne pouvait correspondre qu'à une simple perte de chance, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire).

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR condamné la société Rothschild HDF Investment Solutions, anciennement dénommé HDF Finance, à verser à M. Thierry I... la somme de 150 000 euros à titre de dommages intérêts pour privation indue de prime annuelle au titre de l'année 2010 ;

AUX MOTIFS QUE « le contrat prévoit expressément que le salarié perçoit une rémunération fixe à laquelle « pourra s'ajouter une prime annuelle d'un montant discrétionnaire » ;

Que le salarié établit qu'il n'a pas perçu de prime en 2008 compte tenu de sa date d'embauche mais qu'il a perçu la somme de 150 000 euros au titre de l'année 2009 ;

Que contrairement à ce qu'affirme la SA HDF FINANCE, cette clause ne subordonne nullement le versement de cette prime à la présence du salarié au mois de mars de l'année du versement, cette mention ne figurant pas au contrat ;

Que par ailleurs, le salarié soutient qu'il existe une pratique générale constante de versement d'une prime annuelle au sein de la société ;

Qu'à cet égard, il n'est pas contesté que des primes annuelles ont été systématiquement versées à au moins trois autres collègues, à savoir M. Y... qui a perçu les sommes de 15.000 euros au titre de l'année 2005, 100.000 euros au titre de l'année 2006, 200.000 euros pour l'année 2007, 100.000 euros pour l'année 2008, 150.000 euros pour l'année 2009 ; Monsieur A... qui a perçu les sommes de 90.000 euros au titre de l'année 2006, 110.000 euros au titre de l'année 2007, 100.000 euros pour l'année 2008, 135.000 euros pour l'année 2009 ; Monsieur B... qui a perçu les sommes de 40.000 euros au titre de l'année 2006, 200.000 euros pour l'année 2007, 160.000 euros pour l'année 2008, 70.000 euros pour l'année 2009 ;

Qu'il résulte de ces éléments la preuve de l'usage général fixe et constant d'un versement de prime au titre de l'année écoulée en sorte que le salarié est fondé en son principe au versement d'une prime pour l'exercice 2010 et à réclamer des dommages intérêts pour avoir été privé indûment par l'effet du licenciement sans cause réelle et sérieuse du bénéfice d'une prime contractuellement due ; que s'agissant du montant réclamé, l'employeur qui n'a pas fourni aux débats malgré la sommation de communiquer formulée par l'appelant le montant des primes variables effectivement allouées à l'ensemble des salariés au titre de l'année 2010 et ne fournit aucun élément justifiant que le salarié ne serait pas traité comme les autres salariés non licenciés et privé de prime de fin d'année, ne peut se prévaloir de sa propre carence et se borner à conclure qu'aucune somme ne serait due à l'appelant; qu'à cet égard, et sans qu'il soit besoin d'ordonner en justice la production par l'employeur des primes individuelles versées aux salariés maintenus dans l'entreprise, la cour a les éléments pour apprécier le préjudice généré par la perte de la prime annuelle de fin d'année, préjudice fixé à 150.000 ;

Qu'en définitive la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HDF FINANCE est condamnée à payer à Monsieur Thierry I... la somme de 150.000 euros à titre de dommages intérêts pour privation indue de prime annuelle au titre de l'année 2010 ;

Que les sommes allouées ayant la nature de dommages intérêts, elles sont entendues comme des montants nets non soumis à CSG-CRDS » ;

ALORS QUE le versement de prîmes relevant de l'appréciation discrétionnaire l'employeur ne présente pas un caractère de fixité suffisant pour établir l'existence d'un usage; qu'en retenant l'existence d'un usage sans rechercher si le versement de la prime en cause ne restait pas, selon termes exprès du contrat de travail, à la discrétion de l'employeur et si en conséquence, la condition de fixité de cette pratique n'était pas exclue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

ALORS QUE, en tout état de cause, le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'aux termes de l'article 4.3(a) de la « politique générale de la rémunération » applicable au sein de la société HDF Finance, les primes ne pouvaient être versées qu'à la condition « que le salarié exerce encore ses fonctions au sein de l'entreprise au moment du versement et qu'aucune procédure de rupture de son contrat de travail n'ait été engagée, ni qu'il ait notifié sa démission au moment du versement » ; que la société HDF Finance se prévalait de cette clause pour en déduire qu'en l'absence de M. I... au jour prévu, aucune prime ne lui était due (conclusions HDF, page 60, pièce n°15) ; qu'en se contentant, pour allouer néanmoins à M. I... une indemnité au titre d'une prime non versée, de relever que le contrat de travail lui-même ne subordonnait pas le versement de la prime à la présence du salarié dans l'entreprise, sans répondre à ce moyen de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article du code de procédure civile;

ALORS QUE, subsidiairement, les juges du fond doivent viser et analyser, même sommairement, les éléments sur lesquels ils se fondent ; que, pour fixer à la somme de 150.000 euros les dommages et intérêts correspondants au préjudice du salarié généré par la perte de la prime annuelle de fin d'année, la cour d'appel a relevé qu'il n'était pas nécessaire d'ordonner la production par l'employeur des primes individuelles versées aux salariés qui demeuraient dans l'entreprise en mars 2011, date à laquelle ces primes leur auraient été versées; qu'il résulte ainsi de l'arrêt attaqué que la cour d'appel ne disposait pas du montant des primes versées à ces salariés ; qu'en considérant toutefois qu'elle avait les «éléments pour apprécier le préjudice généré par la perte de prime annuelle de fin d'année », qu'elle a évalué à la somme de 150.000 euros, sans viser les éléments de preuve sur lesquels elle s'est fondée pour déterminer ainsi le montant de la prime que le salarié aurait dû percevoir, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits au pourvoi n° D 16-11.637 par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour la société Rothschild HDF Investment solutions.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR dit le licenciement de M. Z... A... dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence condamné la société Rothschild HDF Investment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser au salarié diverses indemnités ;

AUX MOTIFS QUE « La cour observe les faits constants suivants ;

Que la SA HDF FINANCE est une société de gestion indépendante spécialisée dans le domaine de la multi-gestion créée en 1986 par Monsieur Gilles K...    , détenue majoritairement par une holding familiale la société HDF Group Sas.

Qu'à la suite du décès [...]        de Monsieur Gilles K...            , sa veuve Madame Christine K...            est devenue usufruitière de la société et contrôlait 75% la Holding HDF GROUP.

Qu'au 29 septembre 2009 la nouvelle gouvernance de cette société était assurée de la manière suivante: le Directoire était composé de Christine K...           , Christophe D..., Christophe E..., Erwan B... et Gilles F..., ce dernier ayant été recruté dès le juin 2009 pour être le directeur général de la société, et ayant vocation à être en outre Vice-Président puis Président du Directoire.

Que le 26 mars 2010, le conseil de surveillance composé des actionnaires a révoqué ad litum le mandat social détenu par Gilles F..., en sorte que le directoire n'était plus composé le 11 août 2010 que des quatre personnes suivantes : Christine K...           , présidente du directoire, M. Christophe D..., directeur général et membre du directoire, Christophe E..., directeur général et membre du directoire, M. Erwan B..., directeur général et membre du directoire ; M. M... a remplacé M. F... en qualité de Directeur général de la SA HDF FINANCE à compter du 1er juillet 2010, puis a donné sa démission le 5 octobre 2010.

Que sans qu'il soit nécessaire d'examiner dans le détail les raisons de ces mouvements dans la gouvernance de la SA HDF FINANCE, il convient de retenir à ce stade que la disparition de son fondateur a suscité diverses interrogations en interne quant à l'avenir de la société et à son contrôle.

Que c'est dans ce contexte qu'est intervenu le licenciement de Monsieur Z... A... et de trois autres de ses collègues, MM. Eric Y..., Erwan B... et Thierry A... auxquels Madame Christine K...           , devenue dirigeante de la société reproche ;

- d'avoir refusé de suivre son instruction réitérée de cesser de travailler sur le projet de rachat de la société HDF par ces derniers, la dirigeante ayant indiqué ne pas vouloir céder ses actions dans HDF

- d'avoir manqué à l'obligation de loyauté en communiquant à un tiers investisseur, la société G... des éléments confidentiels sur la SA HDF FINANCE et exercé des pressions morales.

Que s'agissant du premier grief tel que formulé dans la lettre de licenciement intégralement reproduite, la cour retient que si Madame K... affirme qu'elle n'aurait été informée que le 23 novembre 2010 du projet de LBO (Leverage Buy Out, opération consistant à racheter une entreprise par ses salariés), cette assertion est contredite par les éléments versés aux débats.

Qu'il ressort en effet clairement d'un échange de courriels le 14 octobre entre Madame K... et Monsieur Christophe E..., détenteur de 5% du capital de la société, membre du directoire de la société et directeur général selon K bis du 11 août 2010, supérieur hiérarchique direct de Monsieur Z... A... ainsi que cela est expressément mentionné dans son contrat de travail que dans le cadre du devenir de la société (objet du courriel HDF 2013), Mme K... qui s'inquiétait de la position de M. E... et de son rôle dans les diverses démissions effectives ou envisagées et sur les difficultés de la société indiquait : « ... enfin nos perf se sont moins bien redressées que notre peer group en septembre et, pour la première année, nous sommes en dessous indices sur tous nos fonds. Dans ce contexte de climat archi politique de HDF qui nuit à l'avenir d'HDF, mes priorités vont devenir le changement d'actionnariat rapide avant tout autre chose.

J'arrête tous les autres sujets et vous me forcez à me mettre en quête d'un actionnaire à 100%. Voulez-vous faire un LBO sur la base d'une valo faite par M. J...? »

Qu'au vu de cette demande expresse, et alors que M. E... répond à Mme K... « l'esprit qui m'anime est uniquement orienté vers la recherche d'une solution pérenne pour HDF, dans l'intérêt du triptyque historique d'HDF : ses clients, son staff et ses actionnaires ... », il apparaît tout à fait compréhensible que Monsieur Z... A... ait été conduit avec ses trois autres collègues à travailler sur un projet de rachat de l'entreprise (LBO), une hypothèse de changement d'actionnariat envisagée par Mme K... elle-même ;

Que sans doute M. E... atteste-t-il près deux ans après le licenciement de l'appelant ne pas lui avoir un ordre ; mais d'une part, son lien de subordination avec la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HDF FINANCE et sa position d'actionnaire membre du directoire rendent son attestation peu crédible; en outre son affirmation reste peu convaincante, lors que M. E... a également été convoqué pour un entretien préalable à un éventuel licenciement pour avoir précisément travaillé et fait travailler sur ce rachat dont l'étude a confiée à ses collaborateurs directs dont l'appelant ;

Que la société qui prétend que le 23 novembre 2010, Monsieur Z... A... et ses trois autres collègues auraient été convoqués à un entretien pendant lequel Madame K... leur aurait interdit de poursuivre le projet de rachat des parts de la Société ne le démontre pas en ne fournissant aucun élément à l'appui de son affirmation ;

Que le rappel à l'ordre téléphonique en date du 6 décembre 2010 n'est pas davantage corroboré par un quelconque élément de preuve.

Que la seule instruction claire donnée au salarié de cesser de travailler sur ce projet de rachat date en réalité du courriel du 7 décembre 2010, aux termes duquel Madame K... demande au salarié :

« Je vous remercie de vous concentrer sur votre travail, de cesser toutes les discussions avec la Société de LBO puisque je ne souhaite pas vendre ».

Que le jour même et non le 9 décembre 2010 comme il est prétendu dans la lettre de licenciement, Madame K... sollicite Monsieur Z... G1LLERON pour qu'il organise une réunion avec la Société de LBO dans les termes suivants :

« Merci de m'envoyer la société de LBO au plus vite de façon à ce que cela cesse ».

Que cette directive a bien été respectée puisque le 10 décembre 2010, Madame K... recevait le cabinet G... et Associés             .

Qu'ainsi la Société HDF Finance n'apporte aucune preuve que le salarié aurait reçu l'ordre avant le 7 décembre 2010 de cesser de travailler au projet de rachat de l'entreprise envisagé dans un premier temps par la direction, projet dont M. E... était responsable en tant que directeur général, membre du directoire et préparé par Monsieur David A..., un de ses adjoints et ses collègues.

Que certes lors du comité exécutif du 17 décembre 2010 auquel participait M. E..., Mme K... indiquait « je rappelle qu'une proposition de LBO m'a été soumise. J'ai fait savoir que je n'acceptais pas ce projet. Néanmoins j'entends que beaucoup de membres du personnel de la société ont été mis au courant de ce projet. Je demande à chacun d'entre vous de veiller à ce que ces rumeurs cessent en faisant savoir à vos équipes que ce projet n'est aucunement à l'ordre du jour.»

Qu'il ne s'en déduit cependant nullement que Monsieur David A... ait contrevenu à la consigne de cesser de travailler au projet de rachat, mais cette remarque de Mme K... qui ne vise pas spécifiquement le salarié a pour objet notamment de mettre fin aux rumeurs et de faire savoir la clarté de sa consigne.

Qu'en toute hypothèse, la société ne démontre qu'après l'instruction écrite formelle du 7 décembre 2010 donnée à ses collègues, l'appelant ne s'y serait pas conformé en sorte que l'insubordination reprochée n'est pas avérée ;

Que les attestations établies plus d'un an après les faits par Monsieur H... et par Monsieur Damien K...            manquent de force probante dès lors que le premier est administrateur et consultant de la société HDF Finance, et que le second est administrateur, actionnaire de la société et beau-fils de Madame K... et partagent donc avec la société une communauté d'intérêts ;

Qu'en outre, la rencontre alléguée en date du 9 décembre 2010 avec Christine K... au cours de laquelle Monsieur David A... accompagné de M. E... et d'autres collègues aurait à nouveau parlé de ce projet de LBO ne suffit pas à établir que Monsieur David A... continuait à travailler à ce projet ; de même la teneur de l'entretien avec M. G... n'étant pas rapportée par celui-ci, il n'est pas suffisamment établi que Monsieur David A... aurait de manière réitérée refusé de se conformer à la directive de Mme K... .

Que par suite, il est retenu que la preuve de la réalité du premier grief n'est pas suffisamment rapportée.

Que s'agissant du second grief relatif au manquement à l'obligation de loyauté par transmission d'éléments confidentiels à un tiers investisseur et par l'exercice de pressions sur Madame Christine K...           , il convient d'observer en premier lieu que le reproche collectivement fait à Monsieur David A... et ses trois collègues sans que l'imputabilité spécifique à Monsieur David A... ne soit établie ni même alléguée rend le grief peu sérieux.

Qu'en outre, le grief n'est pas suffisamment précis ni matériellement vérifiable, la lettre de licenciement n'indiquant pas quels documents confidentiels auraient été transmis ni à quelle date, ni de quelle manière. Il n'est corroboré par aucun élément objectif, pas même par M. G... détenteur de ces documents selon la société intimée.

Qu'au surplus, dans la mesure où le meneur du projet était M. E... directeur général, membre du directoire, il ne peut être reproché spécifiquement à Monsieur David A... d'avoir transmis des documents utiles à l'étude du projet de LBO initialement demandé par Mme K... et mis en oeuvre par M. E... et son équipe.

Que dans ces conditions et alors qu'il n'est pas contesté que M. E... n'a pas été licencié malgré un début de procédure et est resté directeur général de la société dont il est actionnaire, la cour retient que les griefs reprochés à Monsieur David A... ne sont pas avérés et ne pouvaient justifier son licenciement.

Que l'ensemble de ces éléments conduit la cour à retenir par infirmation du jugement que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; il n'est dès lors pas nécessaire de répondre au moyen surabondant tiré de la cause économique du licenciement, véritable motif de la rupture selon le salarié ; ce dernier doit également être débouté de sa demande de production en justice de différents documents concernant l'embauche et le départ de M. F..., l'embauche de M. M... , le départ de M. D..., les comptes de la société, ces documents n'étant pas utiles à la solution du litige.

Qu'eu égard à son ancienneté (plus de 11 ans), à son âge (37 ans) et à sa situation professionnelle dont il est justifié (pas de période de chômage et nouvel emploi effectif dès le 2 mai 2011 avec une rémunération annuelle fixe plus importante celle reçue chez la SA HDF FINANCE), son préjudice financier et moral lié à l'éviction abusive d'un collaborateur particulièrement investi dans ses fonctions et régulièrement récompensé pour la qualité de son travail sera intégralement réparé par l'allocation de la somme de 229 500 euros (12 mois de salaire) en application de l'article L. 1235-3 du code du travail.

Que le salarié est débouté du surplus de sa demande faute de justifier de l'ampleur du dommage à hauteur de l'indemnité qu'il sollicite.

Que la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HDF FINANCE est condamnée à payer à Monsieur David A... la somme de 229 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Que s'agissant de dommages et intérêts, la somme allouée s'entend d'une somme nette non soumise à CSG-CRDS.

Que le jugement est infirmé de ce chef » ;

ALORS QUE si, dans le contexte dans lequel était placée la société HDF Finance à la suite du décès de son fondateur, un changement d'actionnariat, par le biais d'une opération de LBO, pouvait apparaître envisageable, des salariés tenus à l'égard de leur employeur à un devoir de loyauté ne pouvaient pour autant légitimement travailler à un tel projet sans l'accord exprès de leur employeur ou des instances dirigeantes concernées et moins encore en cas de refus explicite ; que pour démontrer que Mme K... avait au plus tard le 23 novembre 2010 exprimé clairement son refus de vendre et donné des instructions, qui ne seront pas respectées, pour faire cesser les démarches en ce sens, la société HDF Finance soulignait dans ses écritures qu'un courriel du 7 décembre 2010 adressé par Mme K... à quatre salariés concernés qui faisait état d'instructions données quinze jours auparavant aux salariés concernés par l'opération litigieuse, soit le 23 novembre 2010 ( « comme je vous l'ai déjà dit et répété il y a 15 jours », cf. conclusions d'appel de l'exposante, page 30, § 4) ; qu'en retenant toutefois, pour en déduire que le refus de toute opération de LBO avait été exprimé pour la première fois au salarié lors d'un entretien du 7 décembre 2010, que la société HDF Finance, « ne fournissa[i]t aucun élément à l'appui de son affirmation » (arrêt attaqué, page 5, § 3), la cour d'appel a dénaturé par omission le courrier du 7 décembre 2010 et violé l'article 1134 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné la société Rothschild HDF Investment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser à M. David A... la somme de 383 373,25 euros à titre dommages intérêts pour privation indue du bénéfice des actions attribuées au titre d'un plan d'attribution gratuite d'actions ;

AUX MOTIFS QUE « Selon le règlement du plan d'attribution d'actions gratuites signé le 15 décembre 2009, le salarié vu attribuer 16 472 actions à cette même date ;

Que si l'article 5 de ce règlement prévoit que « ... le bénéficiaire ne pourra acquérir les actions gratuites qui lui ont attribuées que s'il exerce toujours ses fonctions de directeur salarié de la SA HDF FINANCE à l'issue de la période d'acquisition », et l'article 8 que « après la période d'acquisition de deux ans, le bénéficiaire s'engage à conserver les titres pendant une période de deux ans. Pendant cette période les actions gratuites sont acquises par le bénéficiaire mais sont incessibles et insaisissables ... », l'article 7 indique « Les Actions gratuites deviendront la propriété du Bénéficiaire à l'issue d'un délai d'acquisition de 2 (deux) ans commençant à courir à compter de la date d'attribution et prenant fin le jour suivant celui du deuxième anniversaire de cette date d'attribution (ce qui correspond à la Date d'acquisition) » ;

Qu'il résulte de ces éléments que les actions attribuées devenaient de plein droit par l'effet de la clause la propriété le 21 juin 2012, soit deux ans après leur attribution.

Qu'en licenciant sans cause réelle et sérieuse le salarié avant cette date, l'employeur a privé ce dernier du droit accordé dès le 21 juin 2010 d'être propriétaire gratuitement des actions attribuées, et l'a ainsi privé indûment de l'avantage financier contractuel que constituaient ces actions.

Que cette privation a nécessairement causé un préjudice au salarié ; ce dernier fixe à 383 373,25 euros le montant du préjudice sur la base d'une valeur l'action au 15 décembre 2011 à la somme de 23,27 euros selon tableau fourni (pièce du salarié) non discutée par l'employeur ; contrairement à ce qu'indique l'employeur ce préjudice est avéré et certain et n'est pas sérieusement discuté par l'employeur qui ne produit pas de valeur moindre de l'action de nature à réduire le préjudice allégué ;

Que par suite, la SA HOTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HFD FINANCE est condamnée à payer à Monsieur David A... la somme de 383 373,25 euros à titre de dommages intérêts pour exclusion abusive actions attribuées au titre du plan d'attribution gratuite d'actions.

Que s'agissant de dommages intérêts, la somme allouée s'entend d'une somme nette non soumises à CSG-CRDS » ;

ALORS QUE la réparation d'une perte de chance doit mesurée à la chance perdue et ne peut être à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée ; qu'il est constant que suivant la convention de cession gratuite d'actions du 15 décembre 2009, les actions attribuées pouvaient devenir de plein droit propriété de M. A... à compter du 15 décembre 2011 à condition qu'il exerce toujours « ses fonctions de direction salarié de la HDF FINANCE SA à l'issue de la période d'acquisition » ; que la société HDF Finance faisait donc valoir qu'à supposer son licenciement privé de cause réelle et sérieuse, le préjudice subi par le salarié du fait la perte de son droit à des actions gratuites devait s'analyser en une simple perte de chance, le salarié ayant licencié avant le terme du délai d'acquisition de deux ans (Conclusions d'appel de l'exposante, page 68) ; qu'en allouant au salarié une indemnité correspondant à la valeur totale des actions attribuées à l'expiration du délai d'acquisition, après avoir énoncé que le préjudice subi par M. A... était avéré et certain, lors même qu'il ne pouvait correspondre qu'à une simple perte de chance, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR condamné la société Rothschild HDF lnvestment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser à M. David A... la somme de 120 000 euros à titre de dommages intérêts pour privation indue de prime annuelle au titre de l'année 2010 ;

AUX MOTIFS QUE « contrairement à ce qu'indique le salarié et ce qu'a affirmé le conseil de prud'hommes, le contrat du salarié ne prévoit que le paiement d'une rémunération fixe annuelle sans prévoir de prime ;

Qu'en revanche, le salarié soutient qu'il existe une pratique une pratique générale constante de versement d'une prime annuelle au sein de la société ;

Qu'à cet égard, il n'est pas contesté que des primes annuelIes ont été systématiquement versées à au moins trois autres colIègues, à savoir M. Y... qui a perçu les sommes de 15.000 euros au titre de l'année 2005, 100.000 euros au titre de l'année 2006, 200.000 euros pour l'année 2007, 100.000 euros pour l'année 2008, 150.000 euros pour l'année 2009 ;
Monsieur A... qui a perçu les sommes de 150.000 euros au titre de l'année 2009 ; Monsieur B... qui a perçu les sommes de 40.000 euros au titre de l'année 2006, 200.000 euros pour l'année 2007, 160.000 euros pour l'année 2008, 70.000 euros pour l'année 2009 ;

Monsieur A... lui-même a perçu les sommes de 90.000 euros au titre de l'année 2006, 110.000 euros au titre de l'année 2007, 100.000 euros pour l'année 2008, 135.000 euros pour l'année 2009 ;

Qu'il résulte de ces éléments la preuve de l'usage général fixe et constant d'un versement de prime au titre de l'année écoulée en sorte que le salarié est fondé en son principe au versement d'une prime pour l'exercice 2010 et à réclamer des dommages intérêts pour avoir été privé indûment par l'effet du licenciement sans cause réelle et sérieuse du bénéfice d'une prime contractuellement due ; que s'agissant du montant réclamé, l'employeur qui n'a pas fourni aux débats malgré la sommation de communiquer formulée par l'appelant le montant des primes variables effectivement allouées à l'ensemble des salariés au titre de l'année 2010 et ne fournit aucun élément justifiant que le salarié ne serait pas traité comme les autres salariés non licenciés et privé de prime de fin d'année, ne peut se prévaloir de sa propre carence et se borner à conclure qu'aucune somme ne serait due à l'appelant ; qu'à cet égard, et sans qu'il soit besoin d'ordonner en justice la production par l'employeur des primes individuelles versées aux salariés maintenus dans l'entreprise, la cour a les éléments pour apprécier le préjudice généré par la perte de la prime annuelle de fin d'année, préjudice fixé à 120.000 ;

Qu'en définitive la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HDF FINANCE est condamnée à payer à Monsieur David A... la somme de 120.000 euros à titre de dommages intérêts pour privation indue de prime annuelle au titre de l'année 2010 ;

Que les sommes allouées ayant la nature de dommages intérêts, elles sont entendues comme des montants nets non soumis à CSG-CRDS » ;

ALORS QUE le versement de primes relevant de l'appréciation discrétionnaire de l'employeur ne présente pas un caractère de fixité suffisant pour établir l'existence d'un usage ; qu'en retenant l'existence d'un usage sans rechercher si, selon les termes exprès du contrat de travail, le versement de la prime en cause ne restait pas à la discrétion de l'employeur et si en conséquence, la condition de fixité de cette pratique n'était pas exclue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

ALORS QUE, en tout état de cause, le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'aux termes de l'article 4.3(a) de la « politique générale de la rémunération » applicable au sein de la société HDF Finance, les primes ne pouvaient être versées qu'à la condition « que le salarié exerce encore ses fonctions au sein de l'entreprise au moment du versement et qu'aucune procédure de rupture de son contrat de travail n'ait été engagée, ni qu'il ait notifié sa démission au moment du versement » ; que la société HDF Finance se prévalait de cette clause pour en déduire qu'en l'absence de M. A... au jour prévu, aucune prime ne lui était due (conclusions HDF, page 60, pièce n°15) ; qu'en se contentant, pour allouer néanmoins à M. A... une indemnité au titre d'une prime non versée, de relever que le contrat de travail lui-même ne subordonnait pas le versement de la prime à la présence du salarié dans l'entreprise, sans répondre à ce moyen de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, subsidiairement, les juges du fond doivent viser et analyser, même sommairement, les éléments sur lesquels ils se fondent ; que, pour fixer à la somme de 120.000 euros les dommages et intérêts correspondants au préjudice du salarié généré par la perte de la prime annuelle de fin d'année, la cour d'appel a relevé qu'il n'était pas nécessaire d'ordonner la production par l'employeur des primes individuelles versées à ces salariés ; qu'il résulte ainsi de l'arrêt attaqué que la cour d'appel ne disposait pas du montant des primes versées à ces salariés ; qu'en considérant toutefois qu'elle avait les « éléments pour apprécier le préjudice généré par la perte de prime annuelle de fin d'année », qu'elle a évalué à la somme de 120.000 euros, sans viser les éléments de preuve sur lesquels elle s'est fondée pour déterminer ainsi le montant de la prime que le salarié aurait dû percevoir, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits au pourvoi n° J 16-11.641 par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour la société Rothschild HDF Investment solutions.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR dit le licenciement de M. Erwan B... privé de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence condamné la société Rothschild HDF Investment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser au salarié diverses indemnités ;

AUX MOTIFS QUE « La cour observe les faits constants suivants :

Que la SA HDF FINANCE est une société de gestion indépendante spécialisée dans le domaine de la multi-gestion créée en 1986 par Monsieur Gilles K...            , détenue majoritairement par une holding familiale la société HDF Group Sas.

Qu'à la suite du décès [...]        de Monsieur Gilles K...            , sa veuve Madame Christine K...            est devenue usufruitière de la société et contrôlait 75% de la Holding HDF GROUP.

Qu'au 29 septembre 2009 la nouvelle gouvernance de cette société était assurée de Ja manière suivante : le Directoire était composé de Christine K...           , Christophe D..., Christophe E..., Erwan B... et Gilles F..., ce dernier ayant été recruté dès le 24 juin 2009 pour être le directeur général de la société, et ayant vocation à être en outre Vice-Président puis Président du Directoire.

Que le 26 mars 2010, Je conseil de surveillance composé des actionnaires a révoqué ad litum le mandat social détenu par Gilles F..., en sorte que le directoire n'était plus composé le 11 août 2010 que des quatre personnes suivantes : Christine K...           , présidente du directoire, M. Christophe D..., directeur général et membre du directoire, Christophe E..., directeur général et membre du directoire, M. Erwan B..., directeur général et membre du directoire, M. M... a remplacé M. F... en qualité de Directeur général de la SA HDF FINANCE à compter du 1er juillet 2010, puis a donné sa démission le 5 octobre 2010.

Que sans qu'il soit nécessaire d'examiner dans le détail les raisons de ces mouvements dans la gouvernance de la SA HDF FINANCE, il convient de retenir à ce stade que la disparition de son fondateur a suscité diverses interrogations en interne quant à l'avenir de la société et à son contrôle.

Que c'est dans ce contexte qu'est intervenu le licenciement de Monsieur Erwan B... et de trois autres de ses collègues, MM. Thierry I... , Eric Y..., et David A... auxquels Madame Christine K...           , devenue dirigeante de la société reproche :

- d'avoir refusé de suivre son instruction réitérée de cesser de travailler sur le projet de rachat de la société HDF par ces derniers, la dirigeante ayant indiqué ne pas vouloir céder ses actions dans HDF

- d'avoir manqué à l'obligation de loyauté en communiquant à un tiers investisseur, la société G... des éléments confidentiels sur la SA HDF FINANCE et exercé des pressions morales.

Que s'agissant du premier grief tel que formulé dans la lettre de licenciement intégralement reproduite, la cour retient que si Madame K... affirme qu'elle n'aurait été informée que le 23 novembre 2010 du projet de LBO (Leverage Buy Out, opération consistant à racheter une entreprise par ses salariés), cette assertion est contredite par les éléments versés aux débats.

Qu'il ressort en effet clairement d'un échange de courriels le 14 octobre entre Madame K... et Monsieur Christophe E..., détenteur de 5% du capital de la société, membre du directoire de la société et directeur général selon K bis du 11 août 2010, que dans le cadre du devenir de la société (objet du courriel HDF 2013), Mme K... qui s'inquiétait de la position de M. E... et de son rôle dans les diverses démissions effectives ou envisagées et sur les difficultés de la société indiquait : « ... enfin nos perf se sont moins bien redressées que notre peer group en septembre et, pour la première année, nous sommes en dessous des indices sur tous nos fonds. Dans ce contexte de climat archi politique de HDF qui nuit à l'avenir d'HDF, mes priorités vont devenir le changement d'actionnariat rapide avant tout autre chose.

J'arrête tous autres sujets et vous me forcez à me mettre en quête d'un actionnaire à 100%. Voulez-vous faire un LBO sur la base d'une valo faite par M. J...? »

Qu'au vu de cette demande expresse, et alors que M. E... répond à Mme K... « l'esprit qui m'anime est uniquement orienté vers la recherche d'une solution pérenne pour HDF, dans l'intérêt du triptyque historique d'HDF: ses clients, son staff et ses actionnaires ... », il apparaît tout à fait compréhensible que Monsieur Erwan B... ait été conduit avec ses trois autres collègues à travailler sur un projet de rachat de l'entreprise (LBO), une hypothèse de changement d'actionnariat envisagée par Mme K... elle-même ; cette collaboration de Erwan B... était parfaitement légitime lui-même membre du directoire et intéressé au changement d'actionnariat.

Que sans doute M. E... atteste-t-iI près deux ans après le licenciement de l'appelant ne pas lui avoir un tel ordre ; mais d'une part, son lien de subordination avec la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HDF FINANCE et sa position d'actionnaire membre du directoire rendent son attestation peu crédible ; en outre son affirmation reste peu convaincante, dès lors que M. E... a également été convoqué pour un entretien préalable à un éventuel licenciement pour avoir précisément travaillé et fait travailler sur ce rachat dont l'étude a été confiée à ses collaborateurs directs dont l'appelant ; certes le supérieur hiérarchique mentionné au contrat n'est pas M. E... mais il n'est pas discuté que M. B... en sa qualité de directeur administratif a fait partie de l'équipe autour de M. E... pour étudier le projet de LBO.

Que la société qui prétend que le 23 novembre 2010, Monsieur Erwan B... et ses trois autres collègues auraient convoqués à un entretien pendant lequel Madame K... leur aurait interdit de poursuivre le projet de rachat des parts de la Société ne le démontre pas en ne fournissant aucun élément à l'appui de son affirmation.

Que Madame K... ne démontre pas davantage qu'elle a adressé au salarié un courriel le 7 décembre 2010 lui demandant de cesser de travailler à ce projet de rachat, reconnaissant n'avoir envoyé ce courriel qu'à M. E..., et MM. Y..., I... et A... mais pas à M. B....

Que certes le salarié a accompagné le 7 décembre 2010 ses autres collègues pour voir Madame K... ; la consigne a alors et pour la première fois été donnée clairement Madame K... demandant l'organisation d'une réunion avec la société de LBO pour exprimer son refus du projet de rachat de parts.

Que cette directive a bien été respectée puisque le 10 décembre 2010, Madame K... recevait le cabinet G... et Associés             .

Qu'ainsi la Société HDF Finance n'apporte aucune preuve que le salarié aurait reçu flordre avant le 7 décembre 2010 de cesser de travailler au projet de rachat de l'entreprise envisagé dans un premier temps par la direction, projet dont M. E... était responsable en tant que directeur général, membre du directoire et préparé par Monsieur Erwan B... et ses collègues.

Que certes lors du comité exécutif du 17 décembre 2010 auquel participait M. E..., Mme K... indiquait « je rappelle qu'une proposition de LBO m'a soumise. J'ai fait savoir que je n'acceptais pas ce projet. Néanmoins j'entends que beaucoup de membres du personnel de la société ont été mis au courant de ce projet. Je demande à chacun d'entre vous de veiller à ce que ces rumeurs cessent en faisant savoir à vos équipes que ce projet n'est aucunement à l'ordre du jour. »

Qu'il ne s'en déduit cependant nullement que Monsieur Erwan B... ait contrevenu à la consigne de cesser de travailler au projet de rachat, mais cette remarque de Mme K... qui ne vise pas spécifiquement le salarié a pour objet notamment de mettre fin aux rumeurs et de faire savoir la clarté de sa consigne.

Qu'en toute hypothèse, la société ne démontre qu'après l'instruction écrite formelle du 7 décembre 2010 donnée à ses collègues, l'appelant ne s'y serait pas conformé en sorte que l'insubordination reprochée n'est pas avérée. La démarche auprès de M. H... le 21 décembre 2010 alléguée par l'employeur n'est pas suffisamment établie.

Qu'en effet, les attestations établies plus d'un an après les faits par Monsieur H... et par Monsieur Damien K...            manquent de force probante dès lors que le premier est administrateur et consultant de la société HDF Finance, et que le second est administrateur, actionnaire de la société et beau-fils de Madame K... et partagent donc avec la société une communauté d'intérêts.

En outre, la rencontre alléguée en date du 9 décembre 2010 avec Christine K... au cours de laquelle Monsieur Erwan B... accompagné de M. E... et d'autres collègues aurait à nouveau parlé de ce projet de LBO ne suffit pas à établir que Monsieur Erwan B... continuait à travailler à ce projet ; de même la teneur de l'entretien avec M. G... n'étant pas rapportée par celui-ci, il n'est pas suffisamment établi que Monsieur Erwan B... aurait de manière réitérée refusé de se conformer à la directive de Mme K... .

Que par suite, il est retenu que la preuve de la réalité du premier grief n'est pas suffisamment rapportée.

Que s'agissant du second grief relatif au manquement à l'obligation de loyauté par transmission d'éléments confidentiels à un tiers investisseur et par l'exercice de pressions sur Madame Christine K...           , il convient d'observer en premier lieu que le reproche collectivement fait à Monsieur Erwan B... et ses trois collègues sans que l'imputabilité spécifique à Monsieur Erwan B... ne soit établie ni même alléguée rend le grief peu sérieux.

Qu'en outre, le grief n'est pas suffisamment précis ni matériellement vérifiable, la lettre de licenciement n'indiquant pas quels documents confidentiels auraient été transmis ni à quelle date, ni de quelle manière. Il n'est corroboré par aucun élément objectif, pas même par M. G... détenteur de ces documents selon la société intimée.

Qu'au surplus, dans la mesure où le meneur du projet était M. E... directeur général, membre du directoire, il ne peut être reproché spécifiquement à Monsieur Erwan B... d'avoir transmis des documents utiles à l'étude du projet de LBO initialement demandé par Mme K... et mis en oeuvre par M. E... et son équipe.

Que dans ces conditions et alors qu'il n'est pas contesté que M. E... n'a pas licencié malgré un début de procédure et est resté directeur général de la société dont il est actionnaire, la cour retient que griefs reprochés à Monsieur Erwan B... ne sont pas avérés et ne pouvaient justifier son licenciement.

Que l'ensemble de ces éléments conduit la cour à retenir par infirmation du jugement que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, il n'est lors pas nécessaire de répondre au moyen surabondant tiré de la cause économique du licenciement, véritable motif de la rupture selon le salarié ; ce dernier doit également être débouté de sa demande de production en justice de différents documents concernant l'embauche et le départ de M. F..., l'embauche de M. M... , le départ de M. D..., comptes de la société, ces documents n'étant pas utiles à la solution du litige.

Qu'eu égard à son ancienneté (plus de 4 ans), à son âge (38 ans) et à sa situation professionnelle dont il est justifié (avec une longue période de chômage indemnisée avec retard suivie d'emplois précaires et à temps partiel en 2013 et 2014 et d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel depuis le 12 mars 2014), son préjudice financier et moral lié à l'éviction abusive d'un collaborateur particulièrement investi dans ses fonctions et régulièrement récompensé pour la qualité de son travail sera intégralement réparé par l'allocation de la somme de 248 391,77 euros (11 mois) en application de l'article L1235-3 du code du travail.

Que le salarié est débouté du surplus de sa demande faute de justifier de l'ampleur du dommage à hauteur de l'indemnité qu'il sollicite.

Que la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HDF FINANCE est condamnée à payer à Monsieur Erwan B... la somme de 248 391,77 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Que s'agissant de dommages et intérêts, la somme allouée s'entend d'une somme nette non soumise à CSG-CRDS.

Que le jugement est infirmé de ce chef.

Que les conditions de l'article L.1235-4 du code du travail étant réunies, la cour ordonne le remboursement par la société intimée à l'ASSEDIC concernée des indemnités chômage payées à l'appelant du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage » ;

ALORS QUE si, dans le contexte dans lequel était placée la HDF Finance à la suite du décès de son fondateur, un changement d'actionnariat, par le biais d'une opération de LBO, pouvait apparaître envisageable, salariés tenus à l'égard de leur employeur à un devoir de loyauté ne pouvaient pour autant légitimement travailler à un tel projet sans l'accord exprès de leur employeur ou instances dirigeantes concernées et moins encore en cas de refus explicite; que pour démontrer que Mme K... avait au plus tard le novembre 2010 exprimé clairement son refus de vendre et donné des instructions, qui ne seront pas respectées, pour faire cesser démarches en ce sens, la société HDF Finance soulignait dans ses écritures qu'un courriel du 7 décembre 2010 adressé par Mme K... à quatre salariés concernés qui faisait état d'instructions données quinze jours auparavant aux salariés concernés par l'opération litigieuse, soit le 23 novembre 2010 (« comme je vous l'ai déjà dit et répété il y a jours», cf. conclusions d'appel de l'exposante, page 30, § 4) ; qu'en retenant toutefois, pour en déduire que le refus de toute opération de LBO avait été exprimé pour la première fois au salarié lors d'un entretien du 7 décembre 2010, que la société HDF Finance, « ne fournissa[it] aucun élément à l'appui de son affirmation » (arrêt attaqué, page 5, § 3), la cour d'appel a dénaturé par omission le courrier du 7 décembre 2010 et violé l'article 1134 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué

D'AVOIR condamné la société Rothschild HDF Investment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser à M. Erwan B... la somme de 45004,18 euros à titre de dommages intérêts pour exclusion abusive actions attribuées au titre d'un plan d'attribution gratuite d'actions ;

AUX MOTIFS QUE « Selon le règlement du plan d'attribution d'actions gratuites signé le 21 juin 2010, le salarié vu attribuer 1 934 actions à cette même date.

Que si l'article 5 de ce règlement prévoit que « ... le bénéficiaire ne pourra acquérir les actions gratuites qui lui ont été attribuées que s'il exerce toujours ses fonctions de directeur salarié de la SA HDF FINANCE à l'issue de la période d'acquisition », et l'article 8 que « après la période d'acquisition de deux ans, le bénéficiaire s'engage à conserver les titres pendant une période de deux ans. Pendant cette période les actions gratuites sont acquises par le bénéficiaire mais sont incessibles et insaisissables ... », l'article 7 indique « Les Actions gratuites deviendront la propriété du Bénéficiaire à l'issue d'un délai d'acquisition de 2 (deux) ans commençant à courir à compter de la date d'attribution et prenant fin le jour suivant celui du deuxième anniversaire de cette date d'attribution (ce qui correspond à la Date d'acquisition) ».

Qu'il résulte de ces éléments que les actions attribuées devenaient de plein droit par l'effet de la clause la propriété le 21 juin 2012, soit deux ans après leur attribution.

Qu'en licenciant sans cause réelle et sérieuse le salarié avant cette date, l'employeur a privé ce dernier du droit accordé dès le 21 juin 2010 d'être propriétaire gratuitement des actions attribuées, et l'a ainsi privé indûment de l'avantage financier contractuel que constituaient ces actions.

Que cette privation a nécessairement causé un préjudice au salarié ; ce dernier fixe à 45 004,18 euros le montant du préjudice sur la base d'une valeur de l'action au 15 décembre 2011 à la somme de 23,27 euros selon tableau fourni (pièce 32 du salarié) non discutée par l'employeur ; contrairement à ce qu'indique l'employeur ce préjudice est avéré et certain et n'est pas sérieusement discuté par l'employeur qui ne produit pas de valeur moindre de l'action de nature à réduire le préjudice allégué.

Que par suite, la SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HFD FINANCE est condamnée à payer à Monsieur Erwan B... la somme de 45 004,18 euros à titre de dommages intérêts pour exclusion abusive des actions attribuées au titre du plan d'attribution gratuite d'actions.

Que s'agissant de dommages intérêts, la somme allouée s'entend d'une somme nette non soumises à CSG-CRDS » ;

ALORS QUE la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée ; que suivant la convention de cession gratuite d'actions du 15 décembre 2009, les actions attribuées pouvaient devenir de plein droit propriété de M. B... à compter du 15 décembre 2011 à condition qu'il exerce toujours « ses fonctions de direction salarié de la société HDF FINANCE SA à l'issue de la période d'acquisition » ; que la société HDF Finance faisait donc valoir qu'à supposer son licenciement privé de cause réelle et sérieuse, le préjudice subi par le salarié du fait de la perte de son droit à des actions gratuites devait s'analyser en une simple perte de chance, le salarié ayant licencié avant le terme du délai d'acquisition de deux ans (Conclusions d'appel l'exposante, page 68) ; qu'en allouant au salarié une indemnité correspondant à la valeur totale des actions attribuées à l'expiration du délai d'acquisition, après avoir énoncé que le préjudice subi par M. B... était avéré et certain, lors même qu'il ne pouvait correspondre qu'à une simple perte de chance, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné la société Rothschild HDF Investment Solutions, anciennement dénommée HDF Finance, à verser à M. Erwan B... la somme de 143 333 euros à titre de dommages intérêts pour privation indue de prime annuelle au titre de l'année 2010 ;

AUX MOTIFS QUE « le contrat prévoit expressément que le salarié perçoit une rémunération annuelle à laquelle « pourra s'ajouter une prime annuelle d'un montant variable fixé en fonction des résultats personnels obtenus... dans ses fonctions. »

Contrairement à ce qu'affirme la SA HDF FINANCE, cette clause ne subordonne nullement le versement de cette prime à la présence du salarié au mois de mars de l'année du versement, cette mention ne figurant pas au contrat.

Le principe de la prime variable étant contractualisé et seul son montant étant laissé à la discrétion de la SA HDF FINANCE, le salarié est fondé à réclamer des dommages et intérêts pour avoir été privé indûment par l'effet du licenciement sans cause réelle et sérieuse du bénéfice d'une prime variable contractuellement due ; s'agissant du montant réclamé, l'employeur qui n'a pas fourni aux débats malgré la sommation de communiquer formulée par l'appelant le montant des primes variables effectivement allouées à l'ensemble des salariés au titre de l'année 2010 et ne fournit aucun élément démontrant que pendant l'année 2010 le salarié n'aurait pas obtenu de résultats personnels, ne peut se prévaloir de sa propre carence et se borner à conclure qu'aucune somme ne serait due à l'appelant ; à cet égard, et sans qu'il soit besoin d'ordonner en justice la production par l'employeur des primes individuelles versées aux salariés maintenus dans l'entreprise, la cour a les éléments pour apprécier le préjudice généré par la perte de la rémunération variable récompensant les résultats obtenus pendant l'année 2010 ; en effet, le salarié établit qu'il a perçu les sommes de 40.000 euros au titre de l'année 2006, 200.000 euros pour l'année 2007, 160.000 euros pour l'année 2008,70.000 euros pour l'année 2009 au titre de la prime contractuelle annuelle, soit une moyenne de 143.333 euros ; par suite, la cour retient que le salarié est fondé à réclamer des dommages et intérêts à hauteur de 143.333 euros.

La SA ROTHSCHILD HDF INVESTMENTS SOLUTIONS venant aux droits de la société HFD FINANCE est condamnée à payer à Monsieur Erwan B... la somme de 143.333 euros à titre de dommages intérêts pour privation indue de prime annuelle au titre de l'année 2010. Les sommes allouées ayant la nature de dommages intérêts, elles sont entendues comme des montants nets non soumis à CSG-CRDS » ;

ALORS D'UNE PART QUE le juge ne peut dénaturer les actes et précis soumis à son appréciation ; que le contrat de travail de M. B... stipulait qu'à sa rémunération annuelle « pourra s'ajouter une prime annuelle d'un montant variable fixé en fonction des résultats obtenus ... dans ses fonctions »; qu'aux termes de cette clause le versement de la prime était donc à la discrétion de l'employeur, son montant) une fois décidée son allocation, étant seulement déterminé en fonction résultats obtenus ; qu'en estimant néanmoins que le principe d'une prime variable était contractualisé et que seul son montant était laissé à la discrétion de l'employeur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la clause et violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS D'AUTRE PART QU'en l'absence de contractualisation du droit à une prime, seule une pratique générale, constante et fixe caractérise l'existence d'un usage susceptible d'engager l'employeur envers le salarié ; qu'en retenant néanmoins que M. B... aurait dû percevoir une prime au titre de l'année 2010 sans caractériser l'existence d'un usage en ce sens, la cour d'appel a privé sa décision de toute base au regard de l'article 1134 du code civil ;

ALORS ENFIN et en tout état de cause, QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'aux termes de l'article 4.3(a) de la « politique générale de la rémunération » applicable au sein de la société HDF Finance, les primes ne pouvaient être qu'à la condition « que le salarié exerce encore ses fonctions au sein de l'entreprise au moment du versement et qu'aucune procédure de rupture de son contrat de travail n'ait été engagée, ni qu'il ait notifié sa démission au moment du versement »; que la société HDF Finance se prévalait de cette clause pour en déduire qu'en l'absence de M. B... au jour prévu, aucune prime ne lui était due (conclusions HDF, page 60, pièce n°15) ; qu'en se contentant, pour allouer néanmoins à M. B... une indemnité au titre d'une prime non versée, de relever que le contrat de travail lui-même ne subordonnait pas le versement de la prime à la présence du salarié dans l'entreprise, sans répondre à ce moyen de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-11635;16-11636;16-11637;16-11641
Date de la décision : 07/02/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 novembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 fév. 2018, pourvoi n°16-11635;16-11636;16-11637;16-11641


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Zribi et Texier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.11635
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