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07/02/2018 | FRANCE | N°16-27851

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 février 2018, 16-27851


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, soulevé d'office après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu les articles L. 1233-65 et L. 1233-67 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé en qualité de peintre le 4 mars 2009 par M. A... , aux droits duquel se trouve la société Les Nuances du Midi, et qu'il a été licencié pour motif économique après avoir accepté, le 22 mai

2012, un contrat de sécurisation professionnelle ;

Attendu que pour débouter le sala...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, soulevé d'office après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu les articles L. 1233-65 et L. 1233-67 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé en qualité de peintre le 4 mars 2009 par M. A... , aux droits duquel se trouve la société Les Nuances du Midi, et qu'il a été licencié pour motif économique après avoir accepté, le 22 mai 2012, un contrat de sécurisation professionnelle ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le courrier de rupture du 30 mai 2012 vise expressément les difficultés économiques, lesquelles peuvent être indiquées de façon sommaire, la référence à l'absence de nouveaux chantiers et à des pertes financières très importantes étant suffisante, et la mention de l'importance des charges sociales n'étant citée que précédée de la mention notamment, que l'incidence sur l'emploi est mentionnée, l'employeur rappelant expressément qu'elle consistait en une modification de la durée du travail qui est un élément essentiel du contrat de travail qui a été refusée par le salarié et que dans ces conditions cette lettre satisfait à l'obligation de l'employeur de notifier les motifs économiques de la rupture de son contrat de travail au salarié ;

Attendu, cependant, que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle, l'employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d'information sur le contrat de sécurisation professionnelle remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié, en application du premier des textes susvisés, lorsque le délai dont dispose le salarié pour faire connaître sa réponse à la proposition de contrat de sécurisation professionnelle expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail ; que lorsqu'un salarié adhère au contrat de sécurisation professionnelle, la rupture du contrat de travail intervient à l'expiration du délai dont il dispose pour prendre parti ;

Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que la lettre du 30 mai 2012, qui avait pour but de notifier au salarié le motif économique du licenciement envisagé, de lui rappeler qu'il avait adhéré le 22 mai 2012 au contrat de sécurisation professionnelle et que cette lettre constatait la rupture de son contrat de travail à l'issue du délai de réflexion le 6 juin 2012, n'avait été adressée au salarié que postérieurement à son acceptation du contrat de sécurisation professionnelle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré fondée la rupture du contrat de travail de M. Y... par adhésion au contrat de sécurisation professionnelle et l'a débouté de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 28 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;

Condamne la société Les Nuances du Midi aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la SCP Lesourd ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils, pour M. Y...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré fondée la rupture du contrat de travail de M. Y... par adhésion au contrat de sécurisation professionnelle et de l'AVOIR débouté de l'ensemble de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE « M. Y... invoque une motivation insuffisante et carencée de la lettre de rupture du 30 mai 2012, de par l'absence d'indication de la raison économique (difficultés économiques, mutations technologiques ou réorganisation de l'entreprise) ou la façon très vague dont elles ont été alléguées, l'absence de mention de l'incidence précise sur l'emploi ou sur le contrat de travail (suppression ou transformation d'emploi ; modification, refusée par le salariée, d'un élément essentiel du contrat de travail) et l'absence de mention de la mise en oeuvre des critères légaux (ordre des licenciements) permettant à l'employeur d'expliquer son choix aux salariés ; que l'employeur doit notifier au salarié qui accepte le contrat de sécurisation professionnelle l'énoncé des motifs économiques de la rupture et la priorité de réembauche dont il bénéficie ainsi que ses conditions d'application ; que les motifs économiques (difficultés économiques, mutations technologiques ou réorganisation de l'entreprise) doivent être indiqués ainsi que l'incidence sur l'emploi du salarié ; qu'en l'espèce, l'employeur a adressé à M. Y... une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 30 mai 2012 ainsi rédigée : « Nous vous avons informé le 4 mai 2012 que vous étiez concerné par le projet de licenciement, dont les motifs économiques sont les suivants : pertes financières très importantes (notamment en raison des charges sociales excessives) et absence d'ouverture de nouveaux chantiers traduisant de très sérieuses difficultés économiques, rendant nécessaire la réduction de l'ensemble des coûts. Nous vous avions par courrier en date du 22 mars 2012, proposé une modification de votre contrat pour motif économique notamment en réduisant la durée de votre travail en fonction des nécessités de l'entreprise. Nous vous rappelons les termes de cette proposition : la durée du travail du salarié comprendra 20 h par semaine (soit 86, 66 h par mois) réparties de la façon suivante entre les jours de la semaine et à l'intérieur de chaque journée de travail : lundi : de 8 h 00
Mardi :
Mercredi
En contrepartie de l'accomplissement de ses fonctions, le salarié percevra une rémunération brute horaire de 9, 50 euros. Par courrier en date du 23 avril 2012, vous avez refusé la modification telle que proposée. Lors de la convocation préalable à un projet de licenciement, nous vous avions informé que vous pouviez adhérer à un contrat de sécurisation professionnelle conformément aux articles L.1233-65 et suivants du code du travail. Le dossier concernant le contrat de sécurisation professionnelle vous a été remis lors de l'entretien préalable. Après réflexion, vous avez décidé d'accepter ce contrat et vous nous avez remis votre bulletin d'adhésion le 21 mai 2012. Nous vous rappelons que, du fait de cette adhésion, nous constatons par la présente en application de l'article L.1233-67 du code du travail la rupture de votre contrat de travail avec effet au 6 juin 2012, date d'expiration du délai de réponse imparti. Conformément aux dispositions du CSP vous n'avez pas à effectuer de préavis, et vous renoncez à votre indemnité de préavis
» ; que ce courrier de rupture vise expressément les difficultés économiques, lesquelles peuvent être indiquées de façon sommaire, la référence à l'absence de nouveaux chantiers et à des pertes financières très importantes étant suffisante et la mention de l'importance des charges sociales n'étant citées que précédées de la mention « notamment » ; que l'incidence sur l'emploi est mentionnée, l'employeur rappelant expressément qu'elle consistait en une modification de la durée du travail, qui est un élément essentiel du contrat de travail et qui a été refusée par le salarié ; que dans ces conditions, ce courrier, qui contient en outre les mentions tenant à la priorité de réembauchage et au droit individuel à la formation, satisfait à l'obligation de l'employeur de notifier les motifs économiques de la rupture de son contrat de travail au salarié, étant ajouté que la réalité et le caractère réel et sérieux de ces motifs n'est pas contestée par M. Y... » ;

ALORS QUE, lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle, l'employeur doit mentionner, d'une part, les raisons économiques et, d'autre part, leur incidence sur l'emploi et le contrat de travail du salarié concerné ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait dans ses dernières conclusions (p. 5 § 4 et s.) que, comme l'avait jugé le conseil de prud'hommes, la lettre de rupture ne mentionnait pas l'incidence des difficultés économiques sur l'emploi du salarié ; qu'en retenant que la seule référence à une proposition de réduction de la durée de travail du salarié, par ailleurs refusée, suffisait à caractériser l'incidence des raisons économiques sur son emploi, la cour d'appel a violé les articles L.1233-3, L.1233-15 et L.1233-16 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-27851
Date de la décision : 07/02/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 28 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 fév. 2018, pourvoi n°16-27851


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Carbonnier, SCP Lesourd

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.27851
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